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vendredi 22 mai 2015

L’armée dans tous ses états. Armées, États, économies et sociétés en Afrique

La revue Afrique contemporaine publie un appel à communication sur les armées en Afrique. Vous trouverez ci-dessous l'annonce :
"L’objet de ce dossier est d’analyser les liens entre armées, États, économies et sociétés en Afrique aujourd’hui. Sur ces différents points, les armées jouent fréquemment un rôle de premier plan dans le parcours historique des pays africains depuis leur indépendance et dans la construction des États. La question alors posée est de savoir pourquoi et comment elles ont acquis une place aussi déterminante. Tel est l’objectif de ce dossier de la revue Afrique contemporaine.
Instruments du pouvoir, centre de/du pouvoir, mais aussi et souvent acteurs économiques et sociaux, les armées en Afrique sont des objets d’analyse incontournables pour comprendre la réalité africaine contemporaine. Il importe évidemment de prendre en compte la très grande hétérogénéité des armées selon les pays.
Dans de nombreux pays, la centralité de l’armée est incontestablement un legs de la période coloniale, elle-même fortement différenciée selon les « modèles » de colonisation, en ce qui concerne la continuité des acteurs, des structures administratives et institutionnelles, des registres d’action, des méthodes de gestion, mais, plus d’un demi-siècle après les indépendances, leur rôle et leur place dans les États, les sociétés et les économies ont évolué. 
 
 

Les armées en Afrique au cœur du politique

Dans le champ du politique et dans bien des pays africains, les forces armées sont souvent présentes sur le devant de la scène : soit pour s’emparer du pouvoir par les armes, et ce aux dépens des urnes (coups d’État, régimes militaires) ; soit pour apporter une réponse à des blocages politiques (Guinée, Mauritanie, Niger, Guinée Bissau) ou à des crises post-électorales ; soit pour jouer un rôle dans la neutralisation des affrontements entre des mouvements populaires et citoyens et les pouvoirs autoritaires en place (cas de la Tunisie ou de l’Égypte lors des « printemps arabes »). Et ce sans compter des régimes militaires ou des régimes politiques dominés, officiellement ou non, par des militaires, d’anciens militaires, des gardes présidentielles.
Il importe donc de contextualiser les différentes places des armées dans les pays africains. Certaines sont « faillies », « fragiles » ou « fragilisées », alors que d’autres dominent les champs social, politique et économique. En outre, elles sont de plus en plus concurrencées dans leurs fonctions régaliennes de détention du monopole de l’usage de la violence par des groupes armés de tous types (milices et groupes d’auto-défense villageoise, mouvements djihadistes, gangs, etc).
Dans les situations post-conflit, la réintégration des « rebelles » dans les forces armées et la construction d’une armée nationale (cas de la Côte d’Ivoire, du Mali) sont des enjeux centraux pour la construction de la stabilité des pays concernés. De plus, les armées nationales ont souvent des moyens limités, si bien que des forces étrangères, africaines ou non, régionales ou multilatérales, sont engagées pour pallier ces défaillances. Les conflits armés ont aujourd’hui changé de nature. Les guerres entre États, opposant des armées nationales, sont très rares et les affrontements armés relèvent actuellement d’enchevêtrement d’acteurs, si bien que les armées tendent à n’être que l’un d’entre eux.

Les armées : nouveaux acteurs économiques?

Beaucoup moins appréhendés par les sciences humaines et sociales, le rôle économique des armées ainsi que leur place souvent importante dans les économies de certains pays, en Afrique mais pas seulement, mérite de faire l’objet d’études scientifiques. Sur le continent africain en effet, les armées sont impliquées dans l’économie de rente ou de prédation, voire dans des activités illégales ou criminelles (la Guinée Bissau et le trafic de la cocaïne originaire d’Amérique Andine, etc.). De telles trajectoires résultent, dans certains cas, du fait que les forces armées sont soumises à de fortes contraintes budgétaires qui impactent notamment le paiement des salaires (RDC, RCA, etc.).
Mais, toujours dans le champ de l’économie, les armées sont aussi un régulateur d’activité et donc indirectement de l’emploi par le biais des entreprises qu’elles contrôlent. Cette implication dans l’économie peut aller jusqu’à la création de complexes militaro-industriels (il en est ainsi des oligarchies pétrolières en Angola ou en Algérie).

Les armées : catalyseur social?

Les armées jouent enfin un rôle social non négligeable comme lieu de formation, de socialisation et d’intégration des jeunes, de brassage de populations d’origines diverses, d’accès des femmes à des postes de responsabilité, voire de constitution d’une citoyenneté. Plusieurs pays ont par ailleurs institué des services civiques ou militaires à des fins de développement (Madagascar, etc.). Il en est plus ou moins de même par leur implication dans des programmes de désarmement, démobilisation et réintégration des combattants en fin de conflit, comme au Liberia, en Sierra Leone, en RDC ou en Côte d’Ivoire.
Souvent, seules institutions publiques structurées dans les pays au lendemain des indépendances, les armées ont développé des services publics. Elles ont souvent leurs propres dispositifs de protection sociale, conduisent des politiques familiales, gèrent des complexes hospitaliers (Égypte), font de la recherche. Plus largement, l’armée participe à la construction de représentations autour de la masculinité, de l’organisation familiale, de la division du travail et de la répartition des rôles sociaux, mais donne chair au monopole légitime de la violence (cf. les missions régaliennes de l’Etat selon Max Weber) versus la constitution de groupes d’autodéfense et la liberté (de jure ou de facto) de port d’armes.

Argumentaire

Diverses disciplines relevant des sciences humaines ont abordé, chacune avec leur approche et leur méthodologie, la question des armées en Afrique. Mais, elles l’ont généralement fait par le biais de chemins de traverse¬. Les relations internationales et la science politique, tout comme les War & Peace Studies anglo-saxonnes, privilégient traditionnellement dans l’étude des affaires militaires une approche que l’on pourrait qualifier de schizophrène. Dans le même ordre d’idée, le caractère belliqueux et violent des armées ou leur rôle dans les renversements de régimes politiques et les coups d’État sont mis en exergue. Inversement, telles un Janus bifrons, les armées peuvent être des acteurs clés de stabilisation, voire de « pacification » pour reprendre une nomenclature coloniale, du fait de leur implication dans les processus de construction de la paix (programmes de DDR mentionnés ci-dessus). Cette schizophrénie abolit la distinction entre temps de guerre et temps de paix et révèle de nouveau que les armées sont des acteurs incontournables de l’évolution politique des Etats.
L’abondante littérature sur les Réformes du Secteur de la Sécurité (RSS) et de la Défense ne s’est pas ou peu penchée sur ce qu’était véritablement l’armée dans les pays africains. Elle s’est davantage focalisée sur les échecs et les succès de cet outil, sous l’angle des composantes sécuritaires de l’aide au développement, sur les dysfonctionnements des forces armées et les moyens à mettre en œuvre pour les réformer. Ces RSS ont légitimé ainsi la communauté internationale pour intervenir dans un domaine qui relève de la souveraineté des États, ce qui, d’une certaine façon, renvoie aux programmes d’ajustement structurel, fort intrusifs, des années 1980 – 1990. Les approches « Sécurité et Développement » sont quant à elles devenues dans les années 1990 – 2000, tout comme la RSS, le parangon dans les pays du Sud d’une problématisation qui fait un large appel à la thématique de l’insécurité, et ce tant par la communauté internationale que par les agences de développement, qu’elles soient bi ou multilatérales. 
Sans nier l’apport de ces approches à la compréhension du fait militaire en Afrique et à la connaissance des armées, le grand absent est, paradoxalement, l’armée en tant que telle et ceux qui la composent, donc les militaires. 
Dans une optique pluridisciplinaire, à un carrefour entre sciences politiques, économie politique, sociologie, histoire sociale et anthropologie, ce dossier a pour ambition de repenser les armées en Afrique, leurs élites militaires tout comme les hommes de troupe. 
Ce numéro de la revue Afrique contemporaine sera donc centré sur le rôle social, politique et économique des armées en Afrique. Il visera à inscrire dans leurs parcours historiques et leurs contextes la place, dans différents domaines, des forces armées des pays africains et à analyser leur rôle spécifique dans l’histoire et les évolutions de ces pays . Il abordera également la différenciation au sein des armées et les possibles rivalités internes qui en découleraient : entre régiments, armes et corps, entre garde présidentielle et armée de terre, entre troupes d’élite (comme les régiments de parachutistes et l’infanterie). Et ce sans oublier la forte spécificité de la gendarmerie en Afrique. Il visera également à comprendre la place qu’occupent les forces armées nationales à côté des armées régionales ou multilatérales et des forces armées privées (mercenariats, sociétés privées de sécurité et de défense, milices, services de renseignement, etc.).
 Il accordera une attention particulière aux études de terrain (enquêtes, observations participantes, entretiens), mais également aux analyses comparatives et aux archives. Le travail quotidien, les relations de ces acteurs avec leur institution ou d’autres organismes de l’État, ainsi qu’avec les pouvoirs politiques et économiques, seront traités par les articles de ce dossier. Les trajectoires socioprofessionnelles pourront être mises en perspective afin de répondre aux questions : Que fait l’armée ? Qui sont ces hommes et ces femmes qui la composent ? Pourquoi ont-ils choisi d’embrasser les carrières militaires ou policières ? En quoi ont-ils le monopole de la violence légitime ? Comment se situent les gardes prétoriennes ou systèmes de sécurité présidentielle, proches des pouvoirs politiques, par rapport aux armées ? De quelle logistique disposent les forces armées en Afrique ? Quelle sont les sources de financements, les rémunérations et les équipements ? Comment les autorités nationales exercent-elles des arbitrages entre des dépenses militaires assurant la sécurité et les autres dépenses du budget de l’Etat, notamment sociales ?
L’objectif final étant de replacer ces réflexions dans le temps long de ce qu’est aujourd’hui l’armée en Afrique, mais également, par rapport aux ruptures liées à la nature des nouveaux conflits qui dominent en Afrique depuis la fin de la guerre froide (guerres asymétriques, emboîtements d’échelles, diversité des acteurs, etc.).
L’approche comparative s’attachera, ainsi de manière complémentaire, à décrypter les évolutions des armées, de leur organisation et de leur positionnement à la lumière des transformations de la conflictualité et l’émergence exponentielle de nouveaux acteurs, privés et publics, de la sécurité, qu’ils soient nationaux, régionaux ou internationaux et des rapports de pouvoir qui en découlent.
Il importera également d’expliquer pourquoi les armées ne sont plus exclusivement, ni souvent prioritairement, des institutions purement militaires et pourquoi elles investissent les champs social, politique et économique plus que ceux du sécuritaire et de la défense.

Conditions de soumission

Faire acte de candidature en envoyant une courte note d’une page (problématique du texte, exposé du déroulé de l’argumentaire, exposé des données, des sources et terrains mobilisés). 
Les articles devront avoir un format de 35 000 signes espaces compris (notes de bas de page et bibliographie comprises) dans leur version destinée à la publication, ainsi qu’un court résumé de 800 signes (espaces compris), des mots clés et la biographie de l’auteur (150 signes). Les auteurs pourront intégrer à leur article des iconographies (cartes, graphiques, photos, dessins, etc.)
Ils suivront la procédure d’évaluation scientifique auprès de deux référés anonymes et du comité de lecture d’Afrique contemporaine. La soumission des appels à propositions et des articles se fait sur la plateforme Editorial Manager à l’adresse suivante : http://www.editorialmanager.com/afriquecontemporaine/
Vous pouvez nous contacter pour toutes précisions aux adresses suivantes : ncnicolascourtin@gmail.com et fortuiti@afd.fr

Calendrier

Envoi de la proposition d’article : le 1er juillet 2015.
Réponse de la rédaction d’Afrique contemporaine aux auteurs : le 10 juillet 2015 au plus tard.
Envoi d’une première version des articles présélectionnés : le 1er septembre 2015.
Publication du numéro : mars 2016.

BIBLIOGRAPHIE 

Ouvrages:

  • Augé A., Kloursen, P. (dir.), Réformer les armées africaines. En quête d’une nouvelle stratégie, Paris, Karthala, 2010. Bangoura, D., Les armées africaines, 1960-1990, », CHEAM, Paris, 1992.
  • Bazenguira-Gonga, Makki S, (eds), Sociétés en guerre. Ethnographie des mobilisations violentes, Editions Maison des sciences de l’homme, Paris, 2013.
  • Belkaïd, A., Lehmici, H., Égypte, La toute-puissance de l’armée, …
  • Bourrat F (ed) La place et le rôle des armées dans le monde arabe contemporain, « Champ de Mars N°23, IRSEM, La documentation française, 2012.
  • Clapham, C., African Guerillas, Oxford: James Currey, 1998.
  • Courmont B, Ribrikar D, Les guerres asymétriques, IRIS, Paris, 2002.
  • Dawisha, A., Zartman, W., Beyond Coercicion: the Durability of the Arab State, Croom Helm, 1988 – 310 pages.
  • Daguzan, J.-F., Le dernier rempart ? Forces armées et politiques de défense au Maghreb, Publisud, Paris, 1998.
  • Daguzan J-F, « Armées et société dans le monde arabe :entre révoltes et conservatisme », Note N005/13 Fondation pour la recherche stratégique, pp1-14, Fev 2013.
  • Debos, M., Les armées au Tchad, Col (CERI) …
  • Decalo, S., Coups and Army Rune in Africa: Studies in Military Style, New Haven : Yale University Press, 1976.
  • Decalo, S., “The Morphology of Radical Military Rule in Africa”, Journal of Communist Studies, Volume 1, Issue 3-4, 1985.
  • Droz-Vincent, P., « Le militaire et le politique en Égypte », Maghreb-Machrek Monde Arabe, n°162, juillet-septembre 1999.
  • Dupont, H., « La nouvelle armée libanaise : instrument du pouvoir ou acteur politique », in Confluences Méditerranée, n° 29, printemps 1999 (sous le pseudonyme de Hubert Dupont).
  • Eboe Hutchful, Abdoulaye Bathily (dir.), The Military and Militarism in Africa, eds. Dakar : CODESRIA, 1998. – xiii-617 p. (CODESRIA Book Series).
  • Hamon, L. (ed), Le rôle extra militaire de l’armée dans le Tiers Monde, Entretiens de Dijon, PUF, 1966, in Vol 7 N°28 pp 795-798.
  • Hugon Ph, Géopolitique de l’Afrique et contributions dans Vettoglia J-P, Déterminants des conflits et nouvelles formes de prévention, Bruxelles, Bruylant, 2013.
  • Huntington S, The Soldier and the State, Cambridge Mass Press, 1957.
  • Janowitz, M., The Military in the Political Development of New Nations, University Chicago Press, 1964.
  • Marchal, R., « Les frontières de la guerre à la paix », Politix, N°58, 2002.
  • Messinga, E. C., Les forces armées camerounaises face aux enjeux militaires dans le golfe de Guinée: le cas du conflit de Bakassi, Master en science politique, Université de Yaoundé II-SOA, 2007.
  • Metogo, G., « Armées du Golfe de Guinée : Vers l’émergence de deux puissances sous-régionales », Revue africaine de défense, N°2, bureau d’étude et d’information, Yaoundé, 2000.
  • Moghira Mohammed Anouar, Les armées arabes et le pouvoir d’Etat. Militaires du peuple ou du régime? (XIXe-XXIe siècle), Karthala, 2015, 336 pages.
  • Mohamed Abde Elsalam, « The military and the developments in its role in the Arab World », in Carsten Jensen (ed.), Developments in Civil-Milatry Relations in the Middle East, Royal Danish Defence College, 2008.
  • Moncef, O., Militaires, élites et modernisation dans la Libye contemporaine, L’Harmattan, Paris, 2009.
  • Oren, B., The Lebanese Army: A National Institution in a Divided Society, State University of New York Press, 2009, 272 p.
  • Perlmuter, A., The Military and Politics in Modern Times, Yale University Press, 1977.
  • Perlmuter, A., Military and Politics in Israel: Nation Building and Expansion, Yale University Press, 1969.
  • Perlmuter, A., Egypt and the Praetorian State, Yale University Press, 1974.
  • Perlmutter A., Political Roles and Military Rulers, Franck Cass London, 1981.
  • Perouse de Montclos, M.-A., Les humanitaires dans la guerre, La Documentation française, Paris 2012.
  • Picard, E., « Arab Military in Politics : From Revolutionary Plot to Authoritarian State », in Giacomo Luciani (ed), The Arab State, Routledge, London, 1990.
  • Pichon,F « Les armées privées en Afrique », Géopolitique africaine, N° 28 oct-déc 2007 pp 153-184.
  • Rouquié, R., « Le rôle des forces armées en Amérique latine. Etat des travaux », Revue française de sciences politiques, 1969.
  • Rubin, B., Kennedy, T., Armed Forces in the Middle East : Politics and Strategy, Londion Franck Cass, 2002.
  • Seznec, J.-F., « Les forces militaires saoudiennes sous le règne de Fahd Abdelaziz », Maghreb-Machrek, n° 174, octobre-novembre 2001, pp. 38-51.
  • Sarkesian, S., The professional Army in a Changing society, Nelson-Hall Co, 1975. Paul R (ed), No Peace, no war. An Anthropology of Compares Armed Conflicts, Ohio University press 2005.
  • Siddiqa, A., Military Inc.: Inside Pakistan’s Military Economy, Pluto Press, London, 2007, 304 pages.
  • Sorensen, D. S., Civil-military relations in North Africa, Middle east Policy, décembre 2007, http://www.thefreelibrary.com/Civil-military+relations+in+North+Africa, p. 12.
  • Zartmann, W., Elites on the Middle East, 1966.

Dossier de revues :

  • « L’Etat militaire à l’épreuve des transitions », Revue internationale de politique comparée, vol 15, pp. 151-162, 2008.
  • « Military Marxist Regimes in Africa », Journal of Communist Studies, Volume 1, Issue 3-4, 1985.
  • « Militaires et pouvoirs au Moyen-Orient », Vingtième Siècle, Presse de Sciences Po, n° 124, 2014/4, 256 pages.
  • « Amérique latine : l’état militaire à l’épreuve des transitions », Revue internationale de politique comparée, vol. 15, n° 1, 2008, p. 153.

samedi 17 novembre 2012

Imbroglio juridique en Mauritanie : l’Etat sans tête (MAJ)

Le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, a été blessé le 13 octobre, par balle et transféré vers Paris. Sans information supplémentaire sur son état de santé, toutes les rumeurs courent dans le pays. Le Président aurait été touché au bras et/ou à l'abdomen. Sa venue à Paris ne serait pas un signe inquiétant, il devrait juste y obtenir des "soins complémentaires" après avoir été opéré avec "succès" dans son pays. Rapidement, le président assurait que son état de santé était bon et précisait même les circonstances de l’accident : "Je veux les rassurer sur ma santé après cet incident commis par erreur par une unité de l'armée sur une piste non goudronnée dans les environs de la localité de Tweila (40 km de Nouakchott)", d’où il revenait d'une excursion dans le nord du pays. Le véhicule ne se serait pas arrêté à un barrage mobile de l'armée, et la voiture présidentielle, non identifiée, aurait été prise en chasse et mitraillée de 14 balles après n’avoir pas prêté attention aux tirs de sommation (témoignage à lire ICI)




L’hypothèse de l’accident est plausible bien qu’elle fasse débat (ICI et ICI) et puisse paraitre un peu fantaisiste. Ce qui nous intéresse ici est le vide juridique que cet évènement révèle. En effet, le président s’est rapidement exprimé et montré publiquement afin de prouver qu’il n’était pas mort, n’avait pas abdiqué et qu’il n’y avait donc pas de vacance du pouvoir. Le ministre des Affaires étrangères Hamadi Ould Hamadi, est intervenu pour assurer que le président : "exerce la plénitude de ses pouvoirs (…) L'Etat fonctionne, il n'y a aucun problème particulier qui nécessite des dispositions particulières".

Pourtant la rumeur enfle. L’absence du Président commence à être longue et l’opposition n’est plus la seule à gronder. Le Président est-il en état de convalescence ou peut-on poser la question de la vacance formelle du pouvoir ?

Appuyons nous sur la norme fondamentale pour débuter : la Constitution mauritanienne. Celle-ci dispose : 
« Article 40 : En cas de vacance ou d’empêchement déclaré définitif par le Conseil constitutionnel, le Président du Sénat assure l’intérim du Président de la République pour l’expédition des affaires courantes. Le Premier ministre et les membres du Gouvernement, considérés comme démissionnaires, assurent l’expédition des affaires courantes. Le Président intérimaire ne peut mettre fin à leurs fonctions. Il ne peut saisir le peuple par voie de référendum, ni dissoudre l’Assemblée Nationale. L’élection du nouveau Président de la République a lieu, sauf cas de force majeure, constaté par le Conseil constitutionnel, dans les trois (3) mois à partir de la constatation de la vacance ou de l’empêchement définitif. Pendant la période d’intérim, aucune modification constitutionnelle ne peut intervenir ni par voie référendaire, ni par voie parlementaire.
Article 41 : Le Conseil constitutionnel, pour constater la vacance ou l’empêchement définitif, est saisi soit par :• Le Président de la République ; • Le Président de l’Assemblée Nationale ; • Le Premier Ministre. »

Donc la vacance ou l’empêchement définitif sont des faits juridiques même s’ils ne sont pas définis précisément dans le texte suprême. C’est au Conseil constitutionnel de déclarer la vacance (ça n’est pas le cas ici car le Président n’est pas mort) ou l’empêchement définitif (distinct de l’empêchement provisoire qui serait, par exemple, une maladie plus ou moins prolongée mais non handicapante pour l’exercice de la fonction présidentielle). Si le Conseil déclare l’empêchement il permet ainsi au Président du Sénat d’assurer l’intérim.
Or pour cela le Conseil constitutionnel doit être saisi (il ne peut s’autosaisir), ce qui n’est pas le cas pour l’instant. Cette saisine revient soit au Président (ce qui reviendrait à constater sa démission, ça ne devrait pas être le cas ici), soit au Président de l’Assemblée nationale, Messaoud Ould Boulkheir (photo), ou au Premier ministre, Moulaye Ould Mohamed Laghdaf or ces derniers ne peuvent saisir le Conseil constitutionnel s’ils n’ont pas d’information sur la santé du Président. La charge de la preuve revient donc au gouvernement ou au Président de l’Assemblée nationale. Et ce dernier a « reconnu n’avoir jamais reçu le moindre bulletin de santé du Chef de l’Etat en précisant n’avoir aucune compétence médicale pour se prononcer sur son état uniquement à partir d’une communication téléphonique de 7 mn avec un interlocuteur qu’il dit être lucide mais parlant d’une " voix faible" (ICI). 

Le seul moyen pour les pousser à saisir le Conseil constitutionnel serait que l’état de santé du Président soit déclarée grave et l’empêcherait d’exercer son pouvoir. Sans bulletin de santé publié, ils ne peuvent exercer leur charge constitutionnelle. Il faudrait que le bulletin de santé du Président soit publié (ce que demande l’opposition). Or la publication du bulletin de santé n’est pas une obligation. C’est un vide juridique tant en Mauritanie qu’en France et dans d’autres pays.  De de Gaulle à Sarkozy tous les présidents français  ont  promis de publier leur bulletin de santé mais ces bulletins étaient faux ou omettaient des informations (lire cet article ICI). Et les Présidents comme les autres citoyens ont le droit au secret médical malgré l’exigence de transparence.
Allons plus loin, émettons l’hypothèse que la preuve de la santé vacillante du Président soit établie. Le Premier ministre et le Président de l’Assemblée nationale ne peuvent même pas, en droit pur, saisir le Conseil constitutionnel. En effet,  le cercle vicieux se poursuit. L’Assemblée nationale est arrivée au terme de son mandat mais n’a pas été renouvelée donc le Président de l’Assemblée nationale est sans prérogative constitutionnelle. De plus, si le Président du Sénat devait assurer l’intérim, il ne le pourrait pas car il n’a pas été renouvelé selon la règle du renouvellement par tiers tous les deux ans. Pour sa part, le Premier ministre n’a pas de majorité parlementaire sur laquelle s’appuyer à l’Assemblée puisque ses membres n’ont pas été renouvelés à la fin du mandat parlementaire. Last but not least, le Conseil constitutionnel ne pourrait même pas se prononcer car il est incomplet. Trois de ses membres n’ayant pas encore porté serment.
Ce vide juridique laisse le pays en état de paralysie institutionnelle. Nous l’avons vu, la Constitution ne permet pas de trouver une solution à ce blocage. Une situation d’autant plus grave vu le contexte régional actuel et les préparatifs d’une intervention militaire chez le voisin malien. Selon un journal local : «  La Constitution ne prévoyant pas de vacance temporaire du pouvoir, il y a de fortes chances que le Haut Conseil de Sécurité (HCS) renaisse de ses cendres, pour tirer les ficelles jusqu’au retour du président. » 
Pour le moment quelques généraux tiennent le pays. Ce vide est alarmant dans un pays où l’alternance démocratique a toujours posé problème. L’histoire mauritanienne est marquée par plusieurs coups d’Etat militaires (après la chute de Ould Taya). Le Président actuel est d’ailleurs un putschiste (2008) converti à la démocratie bien que son élection ait pu passer pour une mascarade électorale destinée à donner un masque de légitimité au coup d’Etat. Selon ses proches, son retour n’est plus qu’une question de semaines mais les doutes sont désormais permis et tout le monde attend fébrilement la fête nationale de l’indépendance, le 28 novembre, pour voir le Président.

Dernières nouvelles : 

Le président Ould Abdel Aziz de retour en Mauritanie ce 24 novembre 
-  Mauritanie: le président Ould Abdel Aziz reçu par François Hollande à l'Elysée

lundi 3 octobre 2011

Quel avenir pour AQMI après la mort de Ben Laden?

Dernier né de l'ANAJ-IHEDN, le Comité "Afrique" a le plaisir de vous inviter à sa première conférence le Mardi 18 octobre 2011, 19h30 à 21h00, École militaire, Amphithéâtre Desvallières.



Dans un message diffusé à l'occasion du 10ème anniversaire des attentats du 11 Septembre, Ayman al-Zawahiri a annoncé soutenir le Printemps arabe, allant jusqu’à le qualifier de « le Printemps de la dignité et de la libération ». Comment expliquer une telle évolution alors que, dans un premier temps, Al-Qaïda semblait prendre ses distances par rapport aux révolutions arabes qui ont entrainé la chute des régimes qu’elle combattait depuis des décennies ?

Le professeur Jean-Pierre FILIU nous expliquera l'évolution d'Al-Qaïda depuis la mort de son leader Oussama Ben Laden, ainsi que le rôle ou non d'AQMI dans les pays arabes du Maghreb.

Télécharger le flyer ICI

Inscription obligatoire à l'adresse : http://tinyurl.com/anaj-afrique

Informations : afrique@anaj-ihedn.org

lundi 22 novembre 2010

Mister Marlboro : du bandit au terroriste

La frontière entre le banditisme et le terrorisme est ténue en Afrique de l’Ouest, portrait d’un trafiquant « reconverti » dans le terrorisme.

Abdelkader Mokhtar Belmokhtar, alias Belawar, "le Borgne », leader de la katiba "El moulathamoun" est actif dans le nord du Mali et en Mauritanie depuis une quinzaine d’année. Surnommé « Mister Marlboro » il supervise les trafics de cigarettes, de drogues, d’armes, de migrants…Sa longévité dans ce bannditisme est facilité par son intégration dans la population locale où il bénéficie de nombreux soutiens (il est même marié à une notable touarègue du Mali).

"Mokhtar Belmokhtar est plus un contrebandier qu’un terroriste, précise le journaliste Anis Rahmani. Il a utilisé le GSPC, et maintenant Aqmi, pour faire du trafic au nom de l’islam. En réalité, il recherche simplement de l’argent." Pour Alain Rodier, du CF2R "la direction d'Aqmi ne peut se passer de ses services. C’est lui qui fournit en grande partie le mouvement en véhicules et en armement grâce à son activité de contrebandier, qu’il exerce dans la région depuis 1995."
C’est son groupe qui a enlevé, en novembre 2009, en Mauritanie, deux humanitaires espagnols.
Source : France 24

vendredi 12 novembre 2010

Le Sahel un terreau propice au développement de la criminalité (1/3)

Voici le premier billet d’une trilogie consacrée à l’Afrique de l’Ouest et plus particulièrement à l’espace saharo-sahélien, publié en parallèle sur AGS
. Nous essaierons de comprendre en quoi cet espace est un terreau favorable à l’expansion des groupes criminels et terroristes (la frontière entre les deux est souvent floue) puis qui sont ces acteurs ? Pourquoi AQMI est descendu de l’Algérie au Sahel ? Comment s’organise la lutte contre cet avatar d’Al Qaïda ?


Un ensemble de facteurs s’imbriquent et expliquent la situation actuelle :
Un espace instable et incontrôlé : Tout d’abord la porosité des frontières est un facteur géopolitique majeur dans la région. L’instabilité dans un pays se propage comme une tache d’huile chez les voisins. Et la région est soumise à de nombreux soubresauts politiques: coups d’Etat en Mauritanie (août 2008) et au Niger (février 2010) ou hyperstabilité (Campaoré au pouvoir depuis octobre 1987, Déby depuis février 1991). D’ailleurs l'entrée des États de la zone dans une période d'élections n'est pas rassurante. En effet la redistribution de pouvoir est au combien déstabilisatrice et génératrice de frustrations. On y observe la naissance ou la renaissance de guerres civiles. Petit aperçu des élections à venir dans la zone : Burkina Faso : Elections présidentielles le 21 novembre 2010. Par une révision de la Constitution Compaore devrait se représenter pour la 4ème fois, Niger : référendum constitutionnel le 31 octobre 2010, les élections locales le 08 janvier 2011, les législatives couplées au 1er tour des présidentielles le 31 janvier 2011, le 2ème tour des présidentielles le 12 mars 2011 et le président élu prêtera serment le 6 avril 2011, Nigéria: janvier 2011, Tchad : les élections générales de 2011 seraient reportées, Mali et Sénégal : 2012

Une situation économique alarmante :
Les pays de la zone sont particulièrement pauvres : le Burkina Faso, la Gambie, la Guinée Bissau, le Sénégal, le Mali, le Niger, le Tchad et le Soudan font parti des PMA (Pays les Moins Avancés) une catégorie créé par l’ONU en 1971 et regroupant les pays les moins développés socio-économiquement. Et pour cause se sont principalement des économies orientées vers l’exportation de produits de base bruts (agricoles et miniers).

La hausse du prix des matières premières n’a pas permis la réduction de la pauvreté car la croissance économique est phagocytée par une forte croissance démographique forte. La population du Sahel devrait doubler et devrait compter 150 millions d’habitant d’ici 2040.
Et même les pays ayant connu une croissance supérieure à 5% ont réduit de façon substantielle le taux de pauvreté. Pourquoi ? Entre autres parce que la région connait une forte corruption qui ne permet pas la redistribution des richesses : l'ONG internationale Transparency International a publié, 26 octobre, son rapport 2010 de la perception de la corruption dans 178 pays. Certains pays, comme le Niger, marquent un déclin, la Mauritanie (143ème), le Tchad (171ème) le Soudan (172ème) sont les plus mauvais élèves. Le Burkina Faso, le Sénégal, le Bénin et le Mali occupent respectivement les 98ème, 105ème, 110ème et 116ème rang.
Et quid de l’emploie des jeunes dans une région où le taux de chômage environne les 18% : 60 % des Africains de l’Ouest ont moins de 25 ans et 70 % moins de trente ans. Cette population est frustrée par la situation politique, économique et sociale est un vivier de recrutement idéal pour des groupes criminels et/ou terroristes en manque de main d’œuvre.

Un espace vide :

La densité du Sahel est plus de 3 fois inférieure à la densité moyenne de l’Afrique subsaharienne et les populations habitent principalement dans les capitales (Nouakchott, Bamako, Niamey, N’Djamena). De fait de vastes espaces restent vides (Nord Mali, Nord Niger, Nord et Ouest Mauritanie…). Ces Etats sont faibles et n’ont pas les moyens de contrôler tout leur territoire en le peuplant ou en ni disposant des forces représentants le pouvoir central. La souveraineté interne des Etats est défaillante. Comme le dit l’adage : « la nature a horreur du vide », certains groupes criminels et terroristes se sont chargés de le remplir.

Des populations vulnérables et marginalisées : 
Le Sahel est un espace vulnérable aux famines or les famines sont circonscrites dans le temps et l’espace et l’on sait aujourd’hui que ce phénomène n’est pas seulement le résultat de calamités naturelles mais qu’il est instrumentalisé, les famines sont cachés pour affaiblir certaines populations, ou créée pour attirer des aides. Mais la malnutrition chronique et quotidienne est aussi une donnée géopolitique, elle affaiblit les populations et cette vulnérabilité devrait croitre avec l’explosion démographique : la production vivrière augmente moins vite que la population.
Ajoutez à cette marginalisation géographique et politique le facteur historique. Certaines populations sont historiquement marginalisées : en Mauritanie on observe des rivalités entre Maures, les arabo-berbères et les Négro-africains. Les Harratines, descendants d’esclaves qui vivent au service de leurs maîtres, et les Beïdanes, Maures blancs pour la plupart. Le jeune qui avait fait un attentat kamikaze contre l’ambassade de France en Mauritanie était un Harratine il semble qu’il ait trouvé dans les revendications égalitaire d’AQMI une manière de lutter contre un Islam qui légitime les hiérarchies traditionnelles. Au Niger le pouvoir militaire appartient principalement aux Djerma-Shongaï le pouvoir économique aux Haoussas, et les Touaregs, peuplent le Nord du pays revendiquent une part du gâteau d’autant que les richesses minières sont dans leur espace de peuplement. Ils réclament : la mise en œuvre effective de la décentralisation, le développement économique, le respect de la diversité culturelle, la plus grande représentation des populations du Nord dans les instances étatiques, l’administration et l’armée ... demande explicitement un versement de 50 % des revenus des sociétés d’exploitation au profit des collectivités locales... Dès lors la question ethnique est un autre facteur géopolitique puisque de nombreuses ethnies vivent entre plusieurs pays qui deviennent des lieux de replis lors de conflits civils (ex : Soudan/Tchad, l’Algérie sahélienne pour les Touaregs en conflit avec le pouvoir central du Niger ou du Mali).
Par ailleurs les traites islamo arabe puis européennes avec la complicité parfois de certaines populations noires ont laissées des traces dans les mémoires collectives. Pour Medhi Taj : « cette fracture raciale Nord-Sud, ancrée dans l’histoire, est à la base d’une profonde conscience ethnico-tribale structurant les sociétés du sahel africain et brouillant la pertinence du concept occidental d’Etat Nation. »

Une série de facteurs qui laissait entrevoir la situation actuelle …

lundi 8 novembre 2010

La lutte contre AQMI s'organise

Deux membres d'AQMI auraient été capturé le 12 octobre et emprisonné à N'Djamena (Tchad). L'arrestation a été effectué par des membres de l'ex-rebellion touboue du Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad (MDTJ créé en 1998). Il s'agirait de 2 Algériens qui rendaient au Soudan pour «une mission» dont ils auraient été chargés par Abou Zeid, leur chef (ABou Zeid est accusé d'être le commanditaire de l'assassinat de Michel Germaneau, il a détenu Pierre Camatte et détiendrait les 5 Français d'Areva et VInci). Preuve d'une certaine coopération entre cet ex-rebellion et le pouvoir central depuis la signature de l'accord de paix du 2 avril 2010 sous la médiation de Kadhafi.
En 2004, le groupe avait déjà arrêté des membres du GSPC pour les remettre aux autorités algeriennes via la libye.

Les Etats de la région organisent la lutte contre AQMI
Pendant ce temps de nombreuses unités de l’armée mauritanienne, dont des GSI (groupements spéciaux de lutte antiterroristes) se seraient déployées dans le désert du nord malien. En outre, l’armée de l’air mauritanienne a repositionné, à Tombouctou, l’un de ces appareils.
La Mauritanie et le Mali font partie d’un commandement mixte antiterroriste, qui regroupe aussi l’Algérie et le Niger.

Du GIA, au FIS, au GSPC....à AQMI :
Dans C dans l'air les intervenants rappellent le lien originel entre AQMI et l'Algérie.

lundi 11 octobre 2010

Afrique de l'Ouest : géopolitique sous-marine

Un peu de géopolitique sous-marine en parlant des plateaux continentaux qui ne sont pas délimités et font l’objet de conflits pour l’instant seulement juridique. C’est une politique presque archaïque dans le sens où les pays se disputent pour conquérir des territoires. Pour l’instant tout se passe dans l’indifférence car l’exploitation des ressources n’est pas à l'ordre du jour mais qu'en sera t-il demain ?
Il y a quelques jours le Cap-Vert, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Guinée, la Mauritanie et le Sénégal ont donc signé un accord, sous l'égide de la Norvège, pour fixer leurs zones maritimes, potentiellement riches en pétrole et gaz. Cet accord vise à éviter des conflits futurs. Les six pays devront soumettre au plus tard début 2012 leurs propositions aux Nations unies, conformément à la convention sur le droit de la mer de 1982, pour l'extension de leur plateau continental au-delà de la zone des 200 milles nautiques (370 km).


Bref rappel juridique:
La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS) du 10 décembre 1982(ou Convention de Montego Bay,) est l’un des traités internationaux les plus importants qui réglementent le droit de la mer. Plus de 150 Etats sont parties à cette Convention. L’un de ses apports les plus importants est la réglementation des droits de souveraineté et de la juridiction en mer, et la définition des zones maritimes.

- La territorialisation des espaces maritimes :
o Eaux intérieures (toutes les eaux du côté continental de la ligne côtière sous la compétence d’un État côtier)
o Mer territoriale (jusqu’à 12 milles marins)
o Zone contiguë (de 12 à 24 milles marins)
o Zone économique exclusive (de 12 à 200 milles marins)
o Plateau continental (de 12 à 200 milles marins, mais peut s’étendre plus loin dans certaines circonstances)
o Haute mer (la zone au-delà de la limite extérieure du plateau continental d’un État côtier)
En cas d’Etats se faisant face une zone étroite, c est la ligne médiane d’équidistance qui doit être appliquée.

- Les facteurs de délimitation
o Juridiques : Depuis la Convention de Montego Bay, les Etats côtiers avaient obtenu le droit d’exploiter les ressources naturelles sous-marines jusqu’à 200 milles nautiques de leur littoral (370km). Donc jusqu’au plateau continental.
o Géographiques : Les géographes considèrent que le plateau continental est une entité géographique (pas que juridique) avec une définition précise : prolongement physique du territoire sous la mer. Et que fait-on si ce prolongement physique dépasse les 200 milles ?

L’article 76 de l’UNCLOS énonce une formule complexe pour déterminer la limite extérieure du plateau continental d’un État au-delà des 200 milles marins. Cette définition dépend de l’épaisseur des roches sédimentaires, qui sous-tend l’idée que le plateau est le prolongement naturel du territoire terrestre d’un État. La limite maximale est de 350 milles marins à partir des lignes de base, ou de 100 milles marins à partir de l’isobathe de 2 500 mètres, la distance la plus grande l’emportant.
Exceptions liées au plateau continental
Si le plateau continental d’un État côtier s’étend au-delà des 200 milles marins à partir des lignes de base, l’État doit communiquer l’information scientifique, technique et juridique relative aux limites de son plateau continental à la Commission des limites du plateau continental, un organisme des Nations Unies créé aux termes de l’UNCLOS. La Commission fera ses recommandations à l’État côtier en ce qui a trait à l’établissement de ses limites extérieures. Cette extension ne peut toutefois pas dépasser la limite des 350 milles (648 kilometres) et ne concerne pas les ressources halieutiques
Les Etats qui ont ratifie la convention après 1999 doivent déposer leur dossier au plus tard dix ans apres la date de sa ratification
Il est prévu qu’au bout de 12 ans d’exploitation l’Etat côtier verse des royalties à hauteur de 7% de la valeur de la production annuelle à un fonds de l’ONU

mardi 29 septembre 2009

Exportations d'armement de la France : une hausse significative de l'Afrique


Hier matin le ministère de la Défense a rendu public le rapport annuel, transmis au Parlement, sur les exportations d'armement de la France en 2008 (à lire ICI). On y apprend que les livraisons ont dégringolé de 7,69 milliards d'euros en 2004 à 3,17 milliards en 2008. Les prises de commande, elles, ont reculé de 8,15 milliards d'euros en 2000 à 6,58 milliards en 2008. La France, qui avait perdu sa place de troisième exportateur mondial en 2006 au profit de la Russie, se maintient au quatrième rang, avec 7,7% de parts de marché.
Le porte-parole du ministère de la Défense évoque une "montée importante des Amériques" et une croissance significative de l'Afrique. Au regard des chiffres il s’agit principalement de l’Afrique du Nord puisqu’en 2008 le Maroc faisait parti des trois premiers clients (avec le Brésil et l’Arabie Saoudite) pour l’achat de frégates. Dans les 10 premiers pays africains classés en fonction du montant des autorisations d’exportation de matériels de guerre délivrées en 2008. On retrouve non sans étonnement l’Afrique du Sud (83234933€), le Tchad (12 979 250€)…et les pays francophones (Bénin, Cameroun, Djibouti, Maurice, Mauritanie) mais aussi des pays qui ne font pas parti du pré carré français : Zambie (10 446 000€), Botswana (2 008 100€) et l’Ethiopie (663 827€). On retrouve également le Kenya à qui la France a livré pour 25.8 millions d’euros de matériel entre 2004 et 2008.
Les deux cartes ci dessous du site Géo-phile.net complètent ces observations.