dimanche 20 janvier 2013

La guerre vu par les humoristes

C'est le week end, alors pour sourire un peu malgré les évènements, quelques caricatures qui circulent actuellement :

vendredi 18 janvier 2013

Triste prospective, triste Sahel


En 2002 l’Economist Intelligence Unit présentait le Mali comme « un rempart contre l’islam radical en Afrique[1] ».  La même année le gouvernement américain avertissait que ce pays pourrait être une « pépinière potentielle d’intégristes islamiques ». Presque dix ans plus tard le Mali est le nouveau cœur de la guerre globale contre le terrorisme lancée par les Occidentaux en 2001. L’accélération des évènements au Sahel ne peut qu’irriter les chercheurs et observateurs de la zone, peu entendus dans les médias et encore moins par le politique (nous pensons en particulier à notre collègue Abou Djaffar et à la pertinence de ses analyses).

 (Les chercheurs : pour montrer ce qu'ils trouvent, ne doivent-ils pas être écoutés?)

Il y a deux ans lors d’un colloque organisé par le CREC St Cyr nous nous nous interrogions sur l’africanisation d’AQMI (à l'époque, seul groupe jihadiste de la région et dont le commandement était exclusivement arabe), au sens d’appropriation régionale d’une violence armée se réclamant de l’islam, ainsi que sur la réussite de la tentative de « déterritorialisation[2] » du GSPC-AQMI[3]. Nous concluions alors que si AQMI voulait survivre et se développer en Afrique subsaharienne son commandement devrait accepter de partager le pouvoir avec des subsahariens. Nous avions souligné les contraintes méthodologiques : d’une part beaucoup de recherches ont portées sur l’histoire de l’islam mais beaucoup moins sur l’islam pratiqué actuellement en Afrique, sur la formation des identités musulmanes, leur engagement politique... D’autre part, il s’agissait de dépasser une représentation souvent erronée de la zone saharo-sahélienne véhiculée par une historiographie défaillante[4] et qui s’explique par la rupture communément accepté entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne. 

Voici les conclusions que nous tirions, il y a donc deux ans
« La situation économique et sociale régionale fait le lit d’AQMI. D’autant que les communautés marginalisées reçoivent beaucoup moins en termes de programmes de développement alors qu’elles en ont le plus besoin. La décentralisation qui a suivi le changement de régime de 1991 au Mali ne s’est pas mise immédiatement en marche dans le Nord et a intensifié les luttes de pouvoir au sein des communautés[5]. Le retrait des ONG, le marasme économique que constitue la chute des revenus liés au tourisme sont une fenêtre d’opportunité pour le recrutement de jeunes. Les trafics en tout genre sont une perspective lucrative pour des jeunes désœuvrés.
La zone saharo-sahélienne donne à AQMI une profondeur stratégique face aux moyens de répressions algériens mais seul le temps nous permettra de comprendre les ambitions globales de cette jeune organisation. 
On peut poser la question de l’africanisation de cette organisation mais aussi celle de la réponse des autorités locales et donc de l’africanisation de la lutte. En effet, les Etats de la région doivent relever le défi complexe d’un système de crises à trois niveaux [6]: local (lutte clanique ou ethnique), régional (rivalités de puissances), transnational (réseaux criminels, terroristes). Ces différents facteurs se nourrissent mutuellement, se renforcent et se diffusent dans la périphérie. La stabilité régionale est la fois menacée par des guerres classiques dont l’enjeu est le contrôle du territoire ou des ressources mais à ces facteurs « classiques » doivent s’ajouter des facteurs « globaux ».
Au départ chaque gouvernement menait sa propre stratégie pour combattre l’expansion du terrorisme. Si les Etats sont conscients du besoin de coopérer, la coopération reste pour le moment insuffisante. De plus certains conflits comme celui du Sahara Occidental sont des obstacles à la mise en place d’une stratégie commune. L’Algérie et la Libye (du moins jusqu’à l’opération «Aube de l'Odyssée») rejettent tout interventionnisme dans ce qu’ils considèrent comme leur zone d’intérêt stratégique. D’ailleurs si la Mauritanie, le Niger et le Mali suivent l’Algérie dans sa lutte, la Libye, le Tchad, le Burkina Faso, se sont déjà désolidarisés d’une initiative précédente. De plus, l’internationalisation de la menace oblige les Etats de la région, et plus particulièrement l’Algérie, à intérioriser le cadre conceptuel de lutte contre le terrorisme formalisé par les Américains et ce cadre international est plus contraignant[7].
Une aide extérieure doit être apportée mais elle doit rester discrète et passe par de l’appui aux capacités (capacity building type formation, entrainement…) associée à une volonté politique des Etats de la région. Les partenaires occidentaux doivent se garder de toute intervention directe ou de toute publicité intempestive faisant le jeu de la propagande djihadiste. La lutte contre le terrorisme est devenue la rente stratégique post-11 septembre, les injustices qu’elle créée sont, pour reprendre les propos de  Jean-François Bayart, « le meilleur sergent recruteur du radicalisme islamique [8]». Une approche globale[9] est nécessaire pour combattre ce terrorisme. La recherche d’une solution passe inévitablement par une réponse aux problèmes régionaux structuraux. On ne peut pas faire l’économie d’un débat sur le développement économique et social de la région dont le retard est à la base de l’instrumentalisation de certaines populations par AQMI. Si aujourd’hui cette menace est plus sécuritaire que politique, la région est un terreau favorable à un soutien local opportuniste. D’autant, que l’impact très négatif de cette violence terroriste, sur le tourisme ou les investissements, devrait accentuer cette problématique. Toute solution passe également par un renforcement de la légitimité de l’Etat sur ses marges et donc de sa présence notamment par la fourniture de services publics.
Par ailleurs gardons à l’esprit que cet espace a toujours posé des problèmes de gouvernance tant pour l’Etat colonial que pour ses successeurs[10]. La ceinture sahélienne est une zone mouvante d’échanges et de circulation, peuplées de sociétés nomades qui ont toujours entretenus des relations de coopération sur des périodes plus ou moins longues et d’affrontement avec les gouvernements centraux. Toute intervention étrangère doit garder ces données en tête et ne pas commettre les mêmes erreurs qu’en Somalie où les ingérences extérieures ont donné une légitimité aux insurgés. Toute ingérence faire courir le risque que des alliances conjoncturelles se renforcent derrière une cause commune anti-impérialiste. Le djihad devenant la version islamique des luttes anticoloniales[11]. »


[1] Cité par Benjamin Soares, « L’islam au Mali à l’ère néolibérale » in Islam, Etat et société en Afrique, Paris, Karthala, 2009,
[2] Olivier Roy, « Islamisme et nationalisme » in « Dossier : Islam et démocratie », Pouvoirs, n°104, janvier 2003, p.45-53
[3] Cette terminologie « GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat)-AQMI » permet de mettre en évidence l’évolution en cours d’un djihadisme national vers un djihadisme globale.
[4] Lire E. Ann Mcdougall, « Constructing Emptiness : Islam, Violence and Terror in the Historical Making of the Sahara », in Journal of Contemporary African Studies, n°25, p.17-30 et Triaud Jean-Louis, « L'islam au sud du Sahara. Une saison orientaliste en Afrique occidentale » Constitution d'un champ scientifique, héritages et transmissions, in Cahiers d'études africaines,  2010/2-3-4 N° 198-199-200,  p. 907-950.
[5] Karin Nijenhuis, « Does decentralization serve everyone ? The struggle for power in a malian village », in The European Journal of Development Research, 2003,  Vol.15, n°2, p.67-92
[6] Charles Toussaint, « Vers un partenariat euro-sahélien de sécurité et de développement ? », in Annuaire français des relations internationales, 2010,  p.761
[7] Cherif Dris, « L’Algérie et le Sahel : de la fin de l’isolement à la régionalisation contraignante », in Maghreb Machrek, Choiseul, n°200, été 2009, p.57
[8] Jean-François Bayart, « Le piège de la lutte antiterroriste en Afrique de l’Ouest », in Sociétés politiques comparées, n°26, août 2010, P.4
[9] Sur ce concept se référer à : Cécile Wendling,  « L’approche globale dans la gestion civilo-militaire  des crises. Analyse critique et prospective du concept », in Cahier de l’IRSEM n°6, 2010,  134p.
[10] Entre 1957 et 1961, le colonisateur tenta de créer une Organisation commune des régions sahariennes (OCRS) afin d’administrer spécifiquement cet espace.
[11] Jean-Pierre Filiu, « The local and global Jihad of al-Qa’ida in the Islamic Maghrib », in The Middle East Journal, Vol.63n n°2, printemps 2009, p.214

mercredi 16 janvier 2013

Opération Serval au Mali : quand l'opinion part en guerre

Ilinca Mathieu, doctorante en science politique et rattachée aux jeunes chercheurs de l'IRSEM nous propose cette analyse de l'opinion publique au moment où la France se trouve engagée au Mali.

"Aux lendemains du déclenchement de l’opération Serval au Mali, les Français se seraient, selon les premiers sondages, montrés très favorables à cette décision (à 63% 1, voire même 75%² ). S’il faut s’en réjouir, le soutien de la Nation constituant un élément clé de l’action armée dans une démocratie libérale, la situation doit être appréhendée avec prudence. C’est enfoncer une porte ouverte que de rappeler que le soutien de l’opinion publique est classiquement plus fort au début d’une opération que dans les mois, voire les années qui suivent (les exemples afghan et libyen l’illustrent) ; mais il faut également s’interroger sur la nature de cet appui initial – penche-t-il réellement en faveur de cette intervention ?

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 ©AFP PHOTO /ERIC FEFERBERG

Il est permis d’en douter, ne serait-ce qu’à l’écoute des commentaires d’auditeurs – théoriquement sélectionnés pour leur pertinence et/ou leur représentativité – sur les grandes radios nationales ces derniers jours. On y retrouve d’abord ceux qui postulent l’impréparation et l’amateurisme de nos forces armées sur le seul constat de la mort d’un pilote de Gazelle ou de l’échec d’une mission commando (en Somalie, concomitante au déclenchement de l’intervention au Mali). Ils y côtoient les arguments de ceux qui somment le politique de s’expliquer sur le coût d’une telle action contre des djihadistes sur le territoire malien, en pleine crise budgétaire nationale. D’autres, forts de leur analyse confortablement énoncée plus d’un an après les évènements, assènent que l’opération Harmattan en Libye n’aurait jamais dû avoir lieu, puisqu’elle a eu pour conséquence de permettre la diffusion d’armements dans le Nord du Mali, et donc de nourrir ce nouveau conflit…

S’agit-il là tout simplement des 37% restants, déclarés hostiles à cette intervention, ou bien peut-on trouver une autre raison à ce hiatus ? Il est ici éclairant de se pencher sur la nature des sondages eux-mêmes. A quoi les 63% (ou 75%) de Français ont-ils donc exprimé leur soutien ? L’enquête Ifop précise la question posée aux sondés : « Vous savez que des troupes françaises ont été engagées militairement au Mali pour lutter au côté du gouvernement malien contre des mouvements islamistes armés. Vous personnellement, êtes-vous tout à fait favorable, plutôt favorable, plutôt pas favorable ou pas du tout favorable à cette intervention militaire française ? ». On peut alors se demander si les personnes interrogées se sont prononcées en faveur d’une action courte, visant uniquement à stopper l’avancée des rebelles vers la capitale, ou d’une intervention destinée à les éradiquer définitivement du Nord du pays. Un autre sondage nous informe par ailleurs que 64% des sondés estiment que l’opération Serval aura pour effet d’ « augmenter la menace terroriste en France »3 ! Est-ce à dire que l’opinion française soutient l’intervention de son armée tout en assumant une menace accrue sur son propre territoire ? Ou bien faut-il en déduire que les personnes interrogées dans les deux premiers sondages auxquels nous faisons référence n’avaient guère considéré cette possibilité avant de répondre ?

Ces sondages, de par l’imprécision des questions posées et la méconnaissance inévitable des paramètres de l’opération par les sondés, ne sauraient ainsi avoir aucune utilité. On se rappellera utilement à cet égard les critiques bourdieusiennes portées à l’encontre de la pratique des sondages en tant que telle4 . Le risque est grand, dans ces conditions, de voir l’opinion publique, désormais réputée initialement favorable au déclenchement de l’opération, se « retourner » au fil des semaines. Retournement qui sera attribué à l’incapacité de la France à résoudre rapidement le conflit (alors même qu’il est clair, dès aujourd’hui, que la formation des troupes africaines et l’élimination complète des mouvements islamistes prendront nécessairement du temps), quand elle pourrait aussi découler tout simplement de l’exposition a posteriori des sondés, au sein du débat public, à des questions qu’ils ne s’étaient pas posées initialement.

Pour autant, il ne faut pas négliger l’impact de ces chiffres sur le politique qui, préoccupé par la supposée aversion aux pertes humaines de l’opinion publique, semble parfois très (trop ?) sensible à ses éventuels retournements. Pourtant, outre le fait que les nombreux soldats tombés en Afghanistan n’ont provoqué, faute d’une franche opposition, qu’une sourde indifférence, il a été montré que l’opinion est tout à fait prête à supporter la mort de ses soldats, à condition que les objectifs poursuivis (et, in fine, l’intérêt national) soient clairs et légitimes5 . Dans le cas du Mali, les intérêts français potentiels apparaissent nombreux : éradiquer le foyer d’un terrorisme qui se veut international ; sauvegarder la vie des quelques 6000 ressortissants présents dans la zone ; répondre à l’appel d’un gouvernement ami (l’influence nourrissant la puissance sur la scène internationale) ; préserver la stabilité de la région afin d’y sauvegarder nos nombreux intérêts économiques et stratégiques… Mais aussi mettre en concordance nos valeurs, si souvent claironnées, et nos actes, la « politique du bluff » étant à long terme la pire des stratégies…

C’est au politique qu’il revient alors d’éclairer le citoyen sur la justification de cette opération, pour limiter les débats stériles. D’abord, parce qu’il s’agit d’une question essentielle par principe – l’emploi de la force armée, au nom de la nation française. Ensuite, parce que le soutien national aux troupes déployées sur le terrain – si souvent mis en avant dans les discours politiques comme militaires – est dans les faits trop faiblement marqué. Certes, les notions de patrie et d’esprit de défense n’ont généralement pour nos soldats qu’une dimension abstraite qui ne nourrit qu’indirectement leurs motivations au combat. « Faire son travail », appliquer ce qui a été acquis à l’entraînement, reste ainsi pour une immense majorité la première motivation à partir en opérations. L’opération Serval est ici l’occasion rêvée de mettre en œuvre les enseignements du combat en milieu désertique, notamment acquis lors des séjours à Djibouti, et notre armée professionnelle porte ainsi bien son nom. Pour autant, le soutien affirmé de la population aux militaires demeure essentiel, car il ne faut pas oublier que ce sont leurs familles qui sont exposées quotidiennement au débat public et médiatique, dont la violence rejaillit dès lors indirectement sur les soldats. Et que cela ne devrait pas être au militaire de répondre à la question qui lui est trop souvent posée : « mais qu’êtes-vous donc allés faire là-bas, et pourquoi ? »6 .

Sondage Ifop/La lettre de l’opinion mené les 12 et 13 janvier 2013.
2 Sondage BVA/Le Parisien mené les 14 et 15 janvier 2013.
3 Sondage CSA/BFM TV des 14 et 15 janvier 2013.
4 Bourdieu P., « L’opinion publique n’existe pas », Les Temps Modernes, n°318, janvier 1973.
5 Voir par exemple les travaux de E. Luttwak ou N. La Balme à ce sujet.
6 Merci au LCL H.Pierre pour ses réflexions à ce sujet.

L'armée malienne en reconquête, le risque de massacres


Dernièrement le chercheur Pierre Boilley avertissait :


 « Il ne faut pas laisser la main à la seule armée malienne. Le risque est grand que les autorités de Bamako, soutenues par une armée putschiste, ne profitent de la présence des militaires français au Mali pour mener de larges représailles contre les Touareg à l'abri du paravent antiterroriste. On peut s'inquiéter quand on entend le président malien par intérim, Dioncounda Traoré, appeler à la reconquête. Nous savons déjà que les civils touareg ne sont pas épargnés par les soldats maliens.
Les Français en ont conscience car des contacts existent avec le MNLA pour ne pas confondre ses forces avec celles des islamistes. La stabilité du Mali ne peut se faire sans régler la question touareg et le problème de la marginalisation du nord du pays qui ont nourri le terreau djihadiste." (Source: ICI)
Depuis le commencement  des opérations au Mali, plusieurs témoignages font aussi déjà état de vengeances et de punitions contre les populations non noirs : ICI et ICI


 Ce problème est ethnico racial et peut s’expliquer par une profonde division entre « Afrique noire » et « Afrique blanche » qui marque les mémoires collectives locales et caractérise les Etats situés entre les latitudes 10°Nord et 20° Nord. Le Sahara est ainsi un pont entre le bled es sudan (« pays des Noirs ») et le bled es beidan (« pays des Blancs »). Beaucoup de conflits trouvent leur origine dans la mémoire de la traite (islamo arabe puis européenne), souvent facilitée par des populations locales. A cette opposition ; il faudrait ajouter celle entre les populations sédentaires méridionales et les nomades (Toubou, Touaregs, Maures) se considérant, par opposition, comme Blancs. Pour Medhi Taj : « cette fracture raciale Nord-Sud, ancrée dans l’histoire, est à la base d’une profonde conscience ethnico-tribale structurant les sociétés du sahel africain et brouillant la pertinence du concept occidental d’Etat Nation.[1]»



[1] Medhi Taj, « Les clefs d’une analyse géopolitique du Sahel africain »

mardi 15 janvier 2013

Somalie : l’otage français est-il encore vivant ? (MAJ)


Alors que les Shebab ont exposé hier, dans une mise en scène macabre, le corps du commando français mort lors du raid visant à sauver l’otage Denis Allex, le sort de ce dernier reste un mystère. Plusieurs hypothèses se dégagent :



- l'otage est mort lors du raid. L’hypothèse aujourd’hui la plus crédible. Certains témoignages affirment qu'il aurait été exécuté dans une pièce au moment où les membres du raid seraient entrés dans la maison. Alors pourquoi les Shebab ne montrent –ils pas son corps ?
1) Ils n’ont tout simplement pas son corps qui serait resté dans la maison détruite par la suite.
2) Ils orchestrent un faux procès et une fausse exécution, avant de montrer son corps, et prouver à François Hollande que sans le raid les négociations étaient encore possibles. Ils souhaitent ainsi montrer qu'ils restent maîtres de l'agenda politique. D’ailleurs, sur leur fil Tweeter, les Shebab écrivent :
« François Hollande, was it worth it?” avec la photo du commando tué, et “All avenues for negotiations were open, but France chose treachery over negotiations. It failed, & it failed miserably. Well, C'est la vie!”. Pourtant, les négociations étaient particulièrement complexes et même bloquées depuis plusieurs semaines.


Autre hypothèse :

-l’otage est vivant. C’est en tout cas la version du mouvement jihadiste. Il le détiendrait et l'aurait jugé. Denis Allex risquerait alors d’être exécuté dans les jours à venir. Une vidéo ou des images seraient alors rapidement diffusés.

Le sort de Denis Allex semble en tout cas scellé. Difficile aujourd’hui d’en savoir plus. Peu d’informations remontent de Somalie et l’histoire de l’otage français reste un mystère, noyée dans un flot de désinformation et de propagande. 

Ce mercredi, les Shebab ont publié leur version de la capture, les négociations et leur jugement de Denis Allex qui aurait été exécuté : ICI

lundi 14 janvier 2013

L’échec du raid vu de Somalie (MAJ)


Les soldats français ont fait face à une résistance «plus forte que prévu» de la part des islamistes, analysait Jean-Yves Le Drian après l’échec de l’opération lancée dans la nuit de vendredi à samedi.

 Un commando du service Action de la DGSE a mené un raid pour libérer Denis Allex, un de ses membres, retenu par les Shebab depuis 2009. Si l’opération a été un échec c’est, entre autres, parce qu'elle n’a pas bénéficié de la surprise stratégique. En effet, d’après le récit qu’en fait Libération rapidement les habitants ont averti les combattants d’Al-Shabab : «Des gens ont vu (les commandos français) débarquer dans des champs, les shebab ont été informés que des hélicoptères avaient atterri et qu’ils avaient débarqué des soldats, et ainsi ils (les islamistes) ont pu se préparer», a déclaré un habitant, «Les combattants moudjahidine étaient déjà au courant de l’attaque et nous étions prêts à nous défendre, grâce à Dieu», a confirmé à l’AFP un commandant local islamiste. 


Voici l’analyse que font les médias somaliens :

1) Ils soulignent le fait que nous aurions sous-estimé les difficultés à opérer à terre et de nuit. Ils rappelles que cela contraste avec nos succès en mer dans la lutte contre la piraterie (lire les précédentes opérations ICI et ICI) ... 

2) Ils évoquent également une défaillance dans le renseignement notamment la localisation exacte de Denis Allex ainsi que le nombre de forces combattantes sur place. Ils comparent ainsi nos moyens de renseignement avec ceux que les américains ont déployés en Somalie notamment à Mogadiscio et se demandent d’ailleurs si ces derniers nous ont apporté un soutien en la matière.  (sur les sites de la CIA en Somalie ICI et une opération pour sauver des otages ICI)

Ils s'interrogent même sur la coopération possible avec les autorités somaliennes : ‘For such an operation, one would need to have spies on the ground to verify the presence of the hostage. The Somali government’s spy agency would be the perfect one to provide agents to assist with such an operation. Given the fact that the Shabab have been infiltrating agents into the government intelligence apparatus for the past 4 years, it is likely that they may have misled the French and led them into a trap.” Rappelons par ailleurs que le président somalien vient d’annoncer la réouverture de l’agence somalienne du renseignement et de la sécurité (NISA)... ICI


Par ailleurs, le gouverneur de la région du Lower Shabelle region, Abdiqadir Nur a affirmé avoir été informé de l'opération en avance alors que le cabinet du premier ministre, Abdi Farah ‘Shirdon’ dit ne pas en avoir eu connaissance... ICI

 Bulo Marer (avril 2012)

Pour les observateurs somaliens, la France n’aurait pas anticipé les obstacles sur place, notamment la réaction de la population locale : « The French seem to have been caught by surprise and admitted that they had underestimated the firepower the Shabab would have in the little town. True, the town is usually not very protected – the fact that it was unusually heavily-militarised suggests that the Shabab had prior knowledge of the raid or may have led the French there themselves.” 

Enfin, selon la presse locale, l’échec est d’autant plus conséquent que la France donne du crédit au mouvement jihadiste en montrant que le mouvement est encore opérationnel et fort, malgré un contexte de déroute au niveau national depuis plusieurs mois (communique Shebab ICI). Les Shabab ont d'ailleurs rapidement instrumentalisé la mort du commando français, en publiant hier des photos de son corps. La croix que l'homme aurait porté autour du cou lors de l'attaque leur permet de relancer leur discours propagandiste : 
"A return of the crusades, but the cross could not save him from the sword" @HSM Press)