Affichage des articles dont le libellé est Nigeria. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Nigeria. Afficher tous les articles

mercredi 7 avril 2010

Le Trans Saharan Gas Pipeline : Mirage ou réelle opportunité ?


Le Trans Saharan Gas Pipeline : Mirage ou réelle opportunité ? par Benjamin Augé, doctorant à l’Institut français de géopolitique (Paris 8) sur le site de l'IFRI (téléchargez ICI).

"Le continent africain possède 8 % des réserves gazières du monde. Sa relative faiblesse économique et l’absence presque totale de réseaux gaziers entraînent une consommation intérieure très réduite (quasi nulle en dehors de l’Algérie et de l’Égypte) qui permet une importante capacité exportatrice de son gaz. Relier l’Afrique subsaharienne à l’Union européenne (UE) par un gazoduc est donc un projet économique assez logique. Les deux blocs intéressés en discutent avec de plus en plus d’intensité depuis le début des années 2000. La stratégie paraît à priori évidente. La zone européenne compte trois importants producteurs de gaz : Norvège (non-membre de l’UE mais associée étroitement à sa politique énergétique), Grande-Bretagne et Pays-Bas, avec respectivement une production de 99,2, 69,5 et 67,5 milliards de mètres cubes en 2008. Toutefois, la production de la Norvège et des Pays- Bas va commencer à décroître dans quelques années ; celle de la Grande-Bretagne diminue déjà de façon significative depuis 2000 et les Britanniques importent actuellement un tiers de leur gaz pour leur consommation domestique (93,9 milliards de mètres cubes en 2008). Les importations de l’UE vont donc mathématiquement croître progressivement. Or, la crainte d’une dépendance au gaz russe (aujourd’hui de 25 % en moyenne parmi les 27) dans un futur proche conduit l’Union à vouloir diversifier ses sources d’approvisionnement. Si aucune diversification n’est mise en place, la Russie pourrait approvisionner quelque 70 % du marché européen (27 pays) d’ici à 2050. La solution de multiplier les usines de regazéifications pour importer du gaz naturel liquéfié (Liquefied Natural Gas, LNG) est actuellement clairement privilégiée par plusieurs pays de l’Union : France, Italie, Espagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Pologne. Les pays du golfe Persique, l’Égypte, l’Algérie et les États-Unis approvisionneront ces nouvelles usines. Le Trans Saharan Gas Pipeline (TSGP) qui relierait le Nigeria au Niger et à l’Algérie, elle-même connectée à l’Espagne et à l’Italie par des gazoducs existants ou en construction, pourrait s’avérer un choix supplémentaire d’approvisionnement de long terme. Cependant, si ce gazoduc de 4 128 km considéré par le NEPAD comme prioritaire n’est pas un rêve, ni même un défi du point de vue technique, plusieurs éléments financiers, sécuritaires et géopolitiques vont devoir trouver une solution avant une hypothétique prise de décision formelle de développement dans les prochaines années."

mardi 30 mars 2010

Des transitions démocratiques dans l'impasse en Afrique Subsaharienne ? Le cas du Nigeria


Téléchargez l'étude de Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chargé de recherche à l’IRD (Institut de recherche pour le développement) et docteur en sciences politique : Vers un nouveau régime politique en Afrique subsaharienne : Des transitions démocratiques dans l'impasse.

"L’Afrique subsaharienne est revenue sur les espoirs de démocratisation qu’avait suscités la fin de la guerre froide et des régimes de parti unique. L’heure est à la désillusion. Même les pôles de stabilité qu’étaient le Sénégal (depuis l’indépendance en 1960) et l’Afrique du Sud (depuis 1994) sont aujourd’hui menacés d’une dérive autoritaire. Les récents événements en Mauritanie et en Guinée Conakry ne doivent cependant pas induire en erreur. Ces deux pays ne sont pas représentatifs. Sur le reste du continent, la tendance lourde est à une diminution du nombre de coups d’États réussis ou avortés, y compris dans des pays comme les Comores et le Nigeria, qui s’en étaient fait une spécialité et qui détenaient des records mondiaux en la matière. Dans la plupart des cas, les populations africaines sont en réalité gouvernées par des régimes qui ne sont ni des dictatures militaires ni vraiment des démocraties parlementaires. Ils évoluent dans une sorte de zone grise entre guerre et paix, victimes d’une insécurité quotidienne qui met en évidence la grande fragilité d’États en devenir. Des chercheurs américains parlent à ce propos « d’anocracies », un terme qui désigne des États plus ou moins faillis, se caractérisant par :

* une autorité centrale inexistante ou purement virtuelle (Somalie, République centrafricaine) ;
* des gouvernements toujours menacés par la reprise d’une guerre civile (Sierra Leone, Liberia, Guinée-Bissau, Burundi et peut-être même l’Angola) ;
* des niveaux de corruption élevés qui appauvrissent les services publics, alimentent les frustrations et aggravent les inégalités sociales quand ils ne permettent pas d’assurer une redistribution équitable et informelle des ressources (Nigeria, les deux Congo) ;
* des pouvoirs mal légitimés et de plus en plus contestés (Zimbabwe), parfois avec des tensions régionales non résolues (Cameroun, Éthiopie)
* des régimes parlementaires qui n’en sont pas vraiment, avec des fraudes et des processus de cooptation et de sélection en guise d’élections (Nigeria, Éthiopie, Rwanda), etc.

De fait, beaucoup de pays africains demeurent des zones de non-droit qui ne favorisent ni l’investissement ni la consolidation de relations de coopération. Les impasses de la démocratisation démontrent en outre les échecs des modèles d’exportation des puissances occidentales en la matière. Il importe à cet égard de revenir sur les présupposés de la communauté internationale : une focalisation excessive sur le moment des élections au détriment des pratiques du politique au quotidien ; des illusions quant à une corrélation entre développement, démocratisation, prévention des conflits et stabilité politique ; des certitudes trompeuses sur les mérites des ONG et de la société dite « civile »."

mercredi 10 mars 2010

Actualité africaine du Chatham House : Président somalien et affrontements au Nigeria



Transcription ICI de l'intervention du Président Somalien Sheikh Sharif Sheikh Ahmed le lundi 8 mars 2010 (Chatham House)en présence de David Stephen (UN Secretary General's Special Representative for Somalia (1997-2001)):Somalia at a Crossroads and the Duty of the International Community.

"President Sharif's government is fighting a range of insurgent groups for control of Somalia, some of which have been linked to international terrorist attacks. The country faces severe humanitarian and development challenges, has lacked stability for 20 years and has consistently been declared to have the worst humanitarian crisis in the world. In recent years piracy off the coast of Somalia has brought new international attention to the conflict. President Sharif was formerly leader of the Islamic Courts Union government and an opposition leader before becoming President of the Transitional Federal Government in 2009"



Et l'article "Violence in Jos, Nigeria: Bloody Agendas and Hidden Hands" d'Elizabeth Donnelly également du Chathaam House.

mardi 2 mars 2010

Le monde en guerre en 33 conflits et en photos par Foreign Policy magazine




Le monde en guerre en 33 conflits et en photos par Foreign Policy magazine : ICI par Kayvan Farzaneh, Andrew Swift, et Peter Williams
Pour notre sujet on retiendra les photos :
1 Est du Congo (RDC)
5 Tchad
6 Est du Tchad
10-11 Somalie
16 Nigeria
19 République centrafricaine
24 Darfour (Soudan)
25 Sud Soudan
31 Ouganda
33 Ogaden (Ethiopie)

Photo (PIUS UTOMI EKPEI/AFP/Getty Images) :
Nigeria: The militant movement in Nigeria's Niger Delta sprung up after environmental activist Ken Saro-Wiwa and several of his colleagues were executed by the country's military regime in 1995. Saro-Wiwa had been protesting the poverty and pollution of his home region after oil companies began exploring there a decade earlier. Today's Movement for the Emancipation of the Niger Delta (MEND), founded around 2003, demands a higher percentage of the country's oil wealth and a cleanup of villages polluted by oil. This September 2008 photograph shows MEND members celebrating a recent victory against the Nigerian military. On Jan. 30, 2010, MEND reneged on a unilateral cease-fire it had adopted the previous October, which has led to widespread fear of kidnappings and attacks against oil companies.

jeudi 11 février 2010

L'Afrique et les biocarburants



Une véritable « biocarburant-mania » est en train de se répandre en Afrique depuis la forte poussée de fièvre du baril de pétrole en 2008.
Au Sénégal, le président Abdoulaye Wade, qui se veut le champion africain des biocarburants, a révélé, le 28 décembre dernier dans son adresse à la nation à l’occasion du Nouvel An, que la production de biocarburants a bien démarré dans le pays avec la mise en valeur de 10 000 hectares de jatropha, un arbre originaire du Brésil très présent dans les pays sahéliens, où il est plus communément appelé pourghère ou bagani, et dont les graines non comestibles produisent une huile aux propriétés comparables à celles du diesel. « En faisant planter par chaque communauté rurale 1000 ha, nous aurons 3 210 000 tonnes de jatropha, soit 1,134 million de litres de biodiésel, correspondant à notre indépendance énergétique », a notamment précisé le chef d’Etat sénégalais.
Selon les statistiques de la Commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), « la filière sucre de l’espace UEMOA représente un marché potentiel de 570 000 tonnes pour une production réelle de 330 000 tonnes, un chiffre d’affaires de 120 milliards de francs CFA par an. Elle emploie directement 28 000 personnes, représentant une masse salariale de 30 milliards de francs CFA par an, une valeur ajoutée de 65 milliards de francs CFA par an et une contribution au budget de Etats de l’ordre de 26 milliards de francs CFA annuellement ».
L'Afrique du Sud autre pays en pointe sur le continent pour la promotion de cette nouvelle énergie grâce au géant Ethanol Africa, voit désormais grand et envisage l’ouverture de huit usines de bioéthanol en 2010. Ethanol Africa compte aussi investir en Angola, en Zambie, en Tanzanie et au Mozambique pour produire du biocarburant à partir du maïs et de la canne à sucre. De son côté, le Burkina lorgne de plus en plus les biocarburants. La première unité de production de biodiesel à base de graines de jatropha devrait prochainement voir le jour à Kossodo, à l’initiative du chef traditionnel Larlé Naba.

Au Mali, le jatropha, appelé également « l’or vert du désert », est exploité depuis deux ans dans la production de biodiesel.
Au Zimbabwe, qui fut pionnier en Afrique en matière de production des biocarburants issus de la canne à sucre dès le début des années 80, les regards se tournent aussi vers le jatropha, avec la plantation de 60 000 hectares l’an passé. Transload, une unité de fabrication d’agro-carburants implantée près de Harare, produit également depuis 2008 du biodiesel à partir de graines de coton, de soja et de tournesol.

L’Ile Maurice concentre ses efforts sur la canne à sucre tandis que le Cameroun produit déjà son biocarburant à partir de l’huile de palme. Le Nigeria s’est, quant à lui, lancé dans la production de bioéthanol à partir du manioc. Au total, une trentaine de pays africains produisent déjà des agro-carburants, selon l’Association africaine des producteurs de biocarburants (AAPB), née en novembre 2006 à Ouagadougou en marge d’un atelier sur le développement de la filière biocarburants dans l’espace UEMOA. Selon les experts, l’engouement africain pour les agro-carburants s’explique essentiellement par la volonté de réduire la dépendance énergétique et, accessoirement, par le souhait de créer des emplois dans le milieu rural. « Les pays africains qui misent sur les biocarburants sont majoritairement attirés par les perspectives d’allègement de la facture énergétique et de création d’emplois », explique Joël Blin, bio-énergéticien, responsable du laboratoire Biomasse-énergie et biocarburant (LBEB) au Burkina Faso. Mais, s’il est vrai que la majorité des pays africains produisent des biocarburants pour les besoins du marché intérieur, il n’en demeure pas moins que quelques-uns d’entre eux exportent déjà cette énergie vers le Nord. Le groupe sucrier soudanais Kenana a, pour la première fois le 27 décembre dernier, exporté 5 millions de litres d’éthanol d’une valeur de 3,3 millions de dollars vers l’Union européenne. « Quatre autres cargaisons, de 5 millions de litres chacune, doivent encore partir pour l’UE d’ici la fin février 2010 », révèle Majdi Hassan, directeur des ventes du groupe, cité par l’AFP. Le Soudan emboîte ainsi le pas à l’Ile Maurice et au Zimbabwe, qui exportent depuis quelques années du biodiesel vers le marché communautaire.



Qu’ils soient destinés au marché intérieur ou à l’export, les biocarburants font, depuis 2008, année marquée par des émeutes de la faim dans plusieurs pays africains, l’objet de vives critiques sur le continent. Au Sénégal, le Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR) a dénoncé avec véhémence le programme national des biocarburants, qui ne constitue pas, selon lui, « une priorité pour le monde rural ». Une étude sur les biocarburants au Sénégal, publiée début 2009 par les ONG Wetlands International et Action-aid, a estimé que le développement des biocarburants pourrait à terme menacer les cultures vivrières et ouvrir la voie à une compétition dangereuse entre les 800 millions d’automobilistes et les 2 milliards d’humains qui vivent sous le seuil de pauvreté dans le monde. Une autre étude menée par des ONG et intitulée « Jatropha, un piège socioéconomique pour le Mozambique » a également révélé que les jatrophas du Mozambique ont été majoritairement plantés sur des terres arables. Conséquence de cette forte mobilisation : la 2e Conférence internationale sur les biocarburants, tenue du 10 au 12 novembre dernier à Ouagadougou (site de la conférence, synthèse des présentations ICI), a reconnu explicitement la responsabilité directe des biocarburants dans la crise alimentaire et recommandé le lancement de politiques d’autosuffisance alimentaire en parallèle aux stratégies de développement des agro-carburants.
Les agro carburants (biocarburants) sont des substituts à l’essence : l’éthanol est fait à partir de la canne à sucre, de betterave ou de blé ; et des substituts au diesel : huiles faite à partir de colza, soja, huile de palme. Le bilan énergétique de l’éthanol à partir du blé est faible. Le bilan des huiles de colza comme substitut au diesel est un peu meilleur.

Notes :Les agro carburants représentent 1% des terres cultivables du monde mais sur des marchés comme le maïs, l’ambitieux programme américain d’éthanol qui utilise ¼ de la production américaine contribue significativement à la hausse des prix . Les Etats-Unis représentent 40% de la production mondiale (la production d'éthanol croît de 15 à 20 % par an depuis 2002) mais ils sont utilisés aussi de manière importante au Brésil avec la production d’éthanol de canne à sucre et en Allemagne (colza pour le diesel). L'Espagne et la Pologne ambitionnent aussi de développer une capacité de production d'éthanol, à partir des céréales, afin de respecter les objectifs communautaires d'incorporation de biocarburants sans recourir aux importations.
Lire : Les biocarburants en Afrique de l'Institut de Coopération au Développement Economique et Social : ICI

Sources : Les Afriques / Walid Kéfi / Le Gouriellec

mercredi 27 janvier 2010

Le Nigeria au bord de l'implosion ?

Un article sur le Nigeria parut en parallèle sur le site Alliance stratégique.



Un président hospitalisé depuis le 23 novembre en Arabie Saoudite, un vice-président chargé par la Haute Cour fédérale d’assurer les pouvoirs du chef de l’État jusqu’à son retour, des affrontements entre factions de la secte islamiste Kala-Kato fin décembre, des Nigérians placés sur la liste américaine des passagers à surveiller après la tentative d’attentat d’Umar Farouk Abdulmutallab, des centaines de morts à Jos (au centre du pays) lors d’affrontements entre chrétiens et musulmans… Qu’arrive t-il au Nigéria ? Le leader régional est-il en passe d’imploser ?


Sur le plan interne


Eléments de géopolitique interne : l’une des particularités du Nigéria est d’avoir été construite par le colonisateur britannique sur la base de la juxtaposition au sein d’un même territoire de deux aires géographiques (aires soudanaise et guinéenne). Bien qu’associées, ces deux parties ont été maintenues dissociées au niveau géographique, politique et administratif jusqu’à l’indépendance du pays. Effectivement, le Nigéria est partagée en trois avec au Nord les Haoussas et les Fulanis qui sont des musulmans, à l’Est les Ibos (catholiques) et à l’Ouest les Yorubas (autant de musulmans que de protestants), auxquels il faut ajouter près de 250 ethnies. Il existait différents cercles de colonisation, en fonction de la population et des intérêts économiques. Par exemple, le littoral était exploité directement par les Anglais alors que l’intérieur du pays l’était par l’intermédiaire des autorités locales. Le problème récurrent est donc de maintenir l’unité entre ces trois parties régionales qui luttent pour le contrôle du centre fédéral. Par ailleurs, il convient de relativiser ce modèle d’opposition géopolitique car au sein même des régions les divisions sont courantes (exemple : Biafra 1967).
Avec ses trente-six États et ses soixante-quatorze gouvernements locaux, le pays reste fragile, les forces centrifuges et le pouvoir central sont constamment en lutte et l’État fédéral a été remanié à plusieurs reprises depuis 1967 afin de satisfaire les demandes de partage émanant des minorités désireuses d’avoir un État propre (douze États en 1967, dix-neuf en 1976 puis vingt et un en 1988, trente en 1991 et trente-six en 1996).


Napoléon considérait que la puissance des États est dans leur géographie, l’important est la maitrise de l’espace. Or, avec 20 % de Yorouba, 18 % d’Ibo et 28 % d’Haoussa-Foulani, la population nigériane est autant un élément de puissance qu’un facteur déstabilisateur. Les problèmes ethnico-religieux internes renforcent l’idée que le Nigéria ne saurait réguler les comportements régionaux tant que sa situation interne n’est pas stable. À moins de sombrer dans une situation de type libanais, le Nigéria doit encourager les positions laïques. Mais une telle nécessité ne séduit pas les intégristes des différentes religions, notamment les fondamentalistes islamiques qui ont installé la charia (loi islamique) dans les États du nord. On assiste d’ailleurs à une radicalisation de l’islam nigérian. Le pays concentre le plus grand nombre de mouvements islamistes de la région (six sont listés par les services de sécurité nigérians). Une estimation globale indique que les islamistes radicaux représenteraient environ 20 % de la population musulmane, estimée à 60 millions environ. Un des grands enjeux reste la bonne intégration du nord-Nigéria, qui voit à la fois progresser l’application de la charia et qui doit lutter contre le déclin économique.

Par ailleurs, les progrès dans l’éducation et la santé ont été mineurs ces dernières années, le pays s’est avéré incapable de résoudre le problème chronique de la pénurie d’électricité et de produits dérivés du pétrole. Le trafic de drogue, le crime, les pogroms interethniques, les affrontements armés de factions militaires, les agressions, les vols et piratages, les réactions immédiates de justice expéditives sont en recrudescence. L’agriculture est tombée en déliquescence et le pays est devenu un grand importateur de denrées alimentaires. L’éducation et les systèmes de santé se sont effondrés. Le développement humain reste très modeste (158ème pays sur 182 d’après l’Indice de Développement Humain 2009). L’économie du Nigéria est fortement dépendante de l’industrie pétrolière qui représente près de la moitié du PIB, 95 % des exportations et plus de 70 % des recettes budgétaires. Les potentialités économiques et le poids démographiques du pays tranchent avec son état général. Le Nigéria est un pays très corrompu (130ème place sur 180 pays selon Transparency International en 2009), l’économie informelle place le pays au troisième rang des pays africains pour l’importance de ce secteur (58 % du PIB global en 1999-2000) et les chiffres officiels ne donnent pas une idée réelle de la situation du pays.

Sur le plan extérieur


Dans la région, le Nigéria est doté d’un fort potentiel particulièrement au regard des facteurs traditionnels de la puissance (démographie, espace, dispositif militaire, ressources). Le pays est considéré comme un « poumon économique » en Afrique de l’Ouest : sa population représente 25 % de la population africaine et 65 % de celle de la CEDEAO, ses exportations de produits manufacturés et son économie informelle (vente de produits pétroliers de la contrebande dans la région) sont importantes. Les Nigérians sont presque vingt fois plus nombreux que les Béninois et les Tchadiens (sept et huit millions d’habitants respectivement), plus de dix fois plus nombreux que les Nigériens (11 millions) et huit fois plus que les Camerounais (16 millions). Plus grand, plus riche le Nigéria a tendance à « aspirer » ses voisins.

En tant que puissance régionale, le Nigéria aspire à devenir le leader des pays qui l’entourent. Cependant, son inscription dans le monde anglophone l’isole des pays francophones voisins. Il se veut africain mais sa participation à l’OPEP renforce les liens de ses musulmans avec le Moyen-Orient ou le Maghreb.

Le géant régional contribue à promouvoir la CEDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) basée à Abuja et l’ECOMOG (Economic Community of West States Cease-fire Monitoring Group, ou Brigade de surveillance du cessez-le-feu aussi appelé « Casques blancs »), le bras armé de la CEDEAO où les contingents nigérians sont les plus nombreux. Du coup l’Ecomog apparaît comme un instrument de la politique extérieure du Nigéria, l’ancien secrétaire général de l’ONU l’a reconnu : « La contribution du Nigéria à l’Ecomog est si importante que si elle devait décliner, c’est la viabilité militaire de l’organisation qui serait menacée ».


Cependant, les interventions nigérianes ne sont pas toujours exemplaires. En 2000, un rapport au conseil de sécurité de l’ONU rédigé par le major général Vijay Jetley, commandant de la Minusil (Mission des Nations Unies en Sierra-Leone), dénonçait la collusion entre le général nigérian de l’Ecomog et les rebelles du Front uni révolutionnaire : « L’armée nigériane voulait rester en Sierra-Leone, en raison des bénéfices substantiels qu’elle tirait du commerce illicite de diamants ».

La contribution du Nigéria au maintien de la paix en Afrique de l’Ouest et sur le continent n’est reste pas moins indéniable et le pays souhaiterait être récompensé de son investissement en obtenant un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU. Le 5 janvier, il a obtenu une place de membre non permanent avec la Bosnie-Herzégovine, le Brésil, le Gabon et le Liban. Le nombre de missions onusiennes auxquelles les soldats nigérians ont participé (même en dehors du continent) est un argument de poids. En 2009, 5827 soldats et policier Nigérians participaient à des missions de l’ONU ou de l’UA (dont 3861 au Soudan) sur le continent africain.


Au-delà du cadre régional, le pays a multiplié les initiatives en matière de résolution des conflits. Des réunions de médiations ou de facilitations ont été organisées à Abuja notamment pour le Soudan, la République Démocratique du Congo (RDC), le Zimbabwe, le Togo et dernièrement la Côte d’Ivoire, bien que le Nigéria ne fût pas le seul acteur ni le plus influent. De plus, en 2003 le rayonnement du pays a été renforcé avec la tenue des jeux africains et l’organisation du 17ème Sommet des pays du Commonwealth en présence de la reine Elisabeth II ainsi qu’en décembre 2006 avec la Conférence de l’OPEP.

Cette position de leader régional s’est plus imposée au Nigéria qu’il ne l’a imposé à ses voisins plus faibles et plus petits. En effet, aucun autre pays environnant ne pouvait disputer au Nigéria ce statut. Bien que dans le contexte de la mise en place des Forces Africaines en Attente (FAA) c’est-à-dire des brigades régionales déployables en 14 jours par rotation, le Sénégal s’avère être un deuxième pilier en Afrique de l’Ouest. Le Nigéria semble plus empêtré dans ses problèmes internes et pas vraiment intéressé par cette affaire.

Le Nigéria possède beaucoup des atouts traditionnels de la puissance – espace, population, richesses naturelles et même, depuis la hausse du prix du pétrole, argent. Il lui manque, naturellement, les atouts nouveaux – technologie en particulier. Mais il lui manque surtout ce qui, aujourd’hui comme hier, constitue le fondement essentiel de la puissance : la cohésion nationale, ce que Zaki Laïdi nomme la capacité de l’État à « faire sens ».

lundi 11 janvier 2010

A lire, à voir, à écouter cette semaine !

Un rapport du Chatham House par Edward Thomas : « Decisions and Deadlines: A Critical Year for Sudan » ICI
« Jonglei's Tribal Conflicts: Countering Insecurity in South Sudan » de l’International Crisis Group ICI. De plus Marc Lavergne sera l’invité de Thierry Garcin mardi dans les Enjeux Internationaux pour présenter les conséquences régionales de l’indépendance probable du Sud en 2011.
Sur le site du Conseil on Foreign Relations (ICI) : « Abdulmutallab is More Than Just Al-Qaeda », « Paying the Price for Apartheid », « Time Online: Somalis in Yemen: Intertwined Basket Cases », et « Nigeria's Leadership Vacuum ».
Cette semaine aussi la sortie d’« Invictus » de Clint Eastwood avec Morgan Freeman et Matt Damon. Un long-métrage qui montre comment, après l’apartheid, Nelson Mandela tenta de réunir les Sud-Africains en organisant la Coupe du monde de rugby.
Le synopsis : En 1994, l'élection de Nelson Mandela consacre la fin de l'Apartheid, mais l'Afrique du Sud reste une nation profondément divisée sur le plan racial et économique. Pour unifier le pays et donner à chaque citoyen un motif de fierté, Mandela mise sur le sport, et fait cause commune avec le capitaine de la modeste équipe de rugby sud-africaine. Leur pari : se présenter au Championnat du Monde 1995...
Et bien sur je ne peux que vous recommander de lire… mon article sur « L’Afrique noire en mal de champion. L’Afrique Noire : le Nigeria et l’Afrique du Sud » dans « Les Grandes puissances du XXIème siècle » (ICI)

jeudi 7 janvier 2010

Les tournées africaines du début d'année


Parce que le jeu des influences passe par des visites bilatérales de coopération ou de courtoisie. Petit coup de projecteurs sur les tournées françaises et chinoises de début d’année.
Bernard Kouchner a entamé aujourd'hui sa tournée africaine de quatre jours qui le mènera dans 5 pays :
-Au Rwanda avec qui la France vient de renouer des relations diplomatiques (voir précédent billet). Jacques Kabale, actuel responsable juridique du département des ressources humaines de la BAD, a été nommé le mois dernier ambassadeur à Paris et Laurent Contini l'actuel ambassadeur de France au Zimbabwe et ancien membre du cabinet de Bernard Kouchner, devrait être nommé à Kigali ;
-En République démocratique du Congo (RDC) : afin d’aborder la situation intérieure, les aspects régionaux et l'avenir de la Mission des Nations unies en RDC (Monuc) qui vient d’être reconduite pour 5 mois ;
-Congo-Brazzaville : les discussions porteront sur la sécurité régionale et le changement climatique notamment la protection de la forêt d'Afrique centrale.
-Burkina Faso : pour évoquer les médiations du président Blaise Compaoré en Guinée, en Côte d'Ivoire et au Togo ;
-Côte d'Ivoire : cette visite « permettra notamment de rappeler l'attachement de la France à ce que la Côte d'Ivoire retrouve la voie de la stabilité et du développement », indique le communiqué de presse.
Le ministre des Affaires étrangère chinois, Yang Jiechi, a débuté lui aussi une tournée africaine au Kenya, au Nigeria, en Sierra Leone, en Algérie et au Maroc.


Officiellement pour entretenir l'amitié traditionnelle sino-africaine, et renforcer le partenariat gagnant/gagnant. Sur les perceptions africaines de la Chine, voir billet ICI

dimanche 13 décembre 2009

Lectures de la Semaine

La Chatham House propose cette transcription du discours d’HE Ulla Tørnæs (Ministre du développement et de la Coopération du Danemark) lors d’une conférence le 26 novembre 2009 : « Private Sector-led Growth in Africa: Obstacles, Opportunities and Dilemmas on the Road Ahead »

Le Council on Foreign Relations : « How to Avoid Civil War in Guinea » par John Campbell et Ralph Bunche.

« Christian-Muslim Relations in Nigeria » également de John Campbell, Ralph Bunche du Council on Foreign Relations. Document audio à écouter ICI



« Examining U.S. Counterterrorism Priorities and Strategy Across Africa's Sahel Region » de Lianne Kennedy-Boudali (Rand Corporation)

A paraître : « Eritrea's External Relations: Understanding its Regional Role and Foreign Policy »

mercredi 25 novembre 2009

Le sommet du Commonwealth



Le 27 et 28 novembre le sommet du Commonwealth se tiendra à Trinité et Tobago.
Le Commonwealth of Nations, créé après la Première Guerre mondiale, associe des États de l’ancien Empire britannique. Le souverain du Royaume-Uni dirige le Commonwealth à titre symbolique. Les pays membres sont unis par des intérêts communs, mais restent souverains. Ils ne sont liés par aucun traité. Ils peuvent rester neutres en cas de conflit impliquant l’un d’entre eux. Le Commonwealth promeut des valeurs communes : égalité, non-discrimination, démocratie et primauté du droit. Le JDD annonçait, la semaine dernière, la sortie d’un rapport présenté lundi dernier aux dirigeants politiques du Commonwealth. Selon cette étude, réalisée par le club de réflexion politique du Commonwealth, l'organisation doit défendre plus activement la démocratie et se montrer plus dur envers les régimes autocratiques. Nombre de gouvernements du Commonwealth "n'encouragent pas, ou n'approuvent même pas une concurrence politique ouverte" et utilisent l'appareil d'État pour réprimer la dissidence.
Rappelons que 18 pays africains sont membres de cette association libre de 53 Etats indépendants souverains.

Le Cameroun le Mozambique et la Namibie n’avaient jamais connu la domination britannique. Par ailleurs, le Soudan, la Somalie (britannique) et le Sud Cameroun n’ont pas rejoint l’association. Les membres africains :
Afrique du Sud depuis 1998 (suspendu durant l'apartheid de 1961 à 1994, Voir ICI l’excellente vidéo de l’INA « L'Afrique du Sud quitte le Commonwealth » dans Les Actualités Françaises –le 22 mars 1961 - 02min00s)
Botswana 1966
Cameroun 1995
Gambie 1965
Ghana 1957
Kenya 1963
Lesotho 1966
Maurice 1968
Mozambique 1995
Namibie 1990
Nigéria 1960 (suspendu de 1995 à 1999)
Ouganda 1962
Seychelles 1976
Sierra Leone
Swaziland 1968
Tanzanie 1961
Zambie 1961
Le Zimbabwe, suspendu du Commonwealth depuis les présidentielles truquées de mars 2002, a quitté en 2003 le Commonwealth à la demande de son président Robert Mugabe.

L’émission de Thierry Garcin jeudi traitera du Commonwealth. A quoi sert l’organisation qui tient son sommet cette semaine? Vous pouvez écouter ou voir la bibliographie proposer l’émission ICI

lundi 16 novembre 2009

Infos en vrac



Nigeria / Brésil : Le Nigeria et le Brésil ont exprimé leur volonté de collaborer étroitement au niveau du Conseil de sécurité des Nations unies pour accélérer le règlement des conflits et le développement en Afrique. Le Nigeria et le Brésil ont été élus membres non permanents du Conseil de sécurité le 15 octobre dernier lors de la 64e session de l'Assemblée générale des Nations unies, qui se termine en décembre. Selon un communiqué signé lundi à Abuja par le porte-parole du ministère des Affaires étrangères du Nigeria, Ayo Olukanni, l'accord a été conclu vendredi en marge de la visite au Nigéria du Représentant permanent du Brésil à l'ONU, Maria Viotti. Elle a déclaré que les deux pays s’étaient engagés à travailler en étroite collaboration puisqu’ils se préparent à siéger en tant que membres du Conseil de sécurité des Nations Unies en janvier 2010. «Les enjeux de la paix, de la sécurité et de la résolution des conflits sur le continent africain continuera à recevoir beaucoup d'attention en raison des situations dans des pays comme le Soudan, la Somalie, la Guinée et la République du Niger, entre autres », indique le communiqué.

Corée du Sud / Afrique : La Corée du Sud abritera du 23 au 25 novembre le deuxième Forum Afrique-Corée dont l’objectif est de renforcer le partenariat dans divers domaines entre les deux parties. Selon la Commission de l’UA, le forum se tiendra sous le thème: « Vers un partenariat fort Corée-Afrique ». Le premier Forum Afrique-Corée a eu lieu du 7 au 9 novembre 2006 à Séoul. «Le forum offre une opportunité unique aux deux parties pour échanger des idées sur les questions d’intérêt commun et d’explorer davantage le renforcement de la coopération économique et le partage d’expérience dans plusieurs secteurs d’intérêt commun. Par conséquent on espère que ce deuxième forum consolidera les réalisations enregistrées jusqu’ici dans le cadre du partenariat”, a expliqué l’UA. Durant les dernières années, l’UA a tenu des programmes similaires avec la Chine, l’Amérique du Sud, la Turquie et d’autres régions.

UE / Somalie : Le Représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies pour la Somalie, Ahmedou Ould-Abdallah, a approuvé le plan proposé par le Conseil des ministres de l'Union européenne de former jusqu'à 2.000 policiers Somaliens et le personnel militaire.

Le plan comprend la formation, l'équipement et le paiement des salaires pendant au moins un an. La déclaration de l'UE est intervenue au moment où le président Somalien, Sheikh Sharif Sheikh Ahmed, prenait part, le week-end dernier, au Forum Arabie Saoudite-Afrique de l’est dans la capitale éthiopienne, Addis-Abeba, pour discuter de la coopération économique régionale. «La communauté internationale doit accélérer et concentrer ses efforts à tous les niveaux pour soutenir le gouvernement afin de permettre aux Somaliens d’avoir une fondation solide sur laquelle construire avant la fin du mandat de ce gouvernement en août 2011 si nous voulons voir une Somalie transformée », a déclaré le Représentant spécial. Le Représentant spécial de l’Onu en Somalie a déclaré que le Conseil de sécurité s'attendait à voir des mesures concrètes prises avant sa prochaine réunion sur la piraterie prévue le 19 novembre. L'Union africaine et l'autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) ont, de leur côté, formulé un certain nombre de déclarations et de propositions sur la sécurité et la piraterie au large des côtes somaliennes.
Source : APA

vendredi 9 octobre 2009

Info en vrac : dernière minute


Crainte de catastrophe écologique au Cameroun après l'incendie d'un pétrolier ghanéen
L’incendie d’un pétrolier ghanéen survenu mercredi dans l'Océan Atlantique dans le Sud-ouest du Cameroun, transportant quatorze mille tonnes de carburant, pourrait entraîner une catastrophe écologique dans les eaux territoriales camerounaises, craignent des ONG de défense de l'environnement.
Deux jours après l’incident intervenu au lieu dit Debunsha (Sud-ouest), localité située à une soixantaine de kilomètres du port de Douala, on craint sérieusement des conséquences écologiques.
« Nous sommes inquiets des conséquences que pourrait causer cet incendie avec le déversement de quatorze mille tonnes de carburant dans l’eau », a indiqué l’Organisation pour la protection de l’environnement (OPE).
« Lorsqu’on voit les conséquences que ce type d’incident a provoqué ailleurs, y compris dans les pays développés qui disposent des moyens appropriés, on peut nourrir quelques inquiétudes ».
Les risques écologiques concernent aussi bien la flore que la faune dans cette partie de l’Océan Atlantique prisées par les pêcheurs située non loin de la zone de Bakassi riche en ressources halieutiques.
D’après cette association, jusqu’à ce vendredi, l’incendie n’était toujours pas éteint et tout porte à croire que le bateau finira par se consumer totalement avant de sombrer dans la mer.
Le brigade de gendarmerie de Idenau (Sud-ouest) qui conduit les enquêtes a révélé que le pétrolier ghanéen provenait du Nigeria.
Source : APA

jeudi 8 octobre 2009

La rébellion Touaregue prête à déposer les armes ?


La faction historique de la rébellion touarègue au Niger, le Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ), a annoncé sa décision de déposer les armes mardi après-midi, en marge d’une cérémonie dans la ville libyenne de Sebha, en présence de Mouammar Kadhafi.
L’attaque, en février 2007, de la garnison d’Iferouane a marqué l’apparition du MNJ dans le Nord du Niger. La rébellion se constitue de déserteurs, d’anciens rebelles et de jeunes Agadeziens, tous frustrés par leur situation sociale, matérielle et politique. La décentralisation est le thème principal des revendications du MNJ. Elle était apparue lors des accords de paix de 1995 mais la lenteur de la réforme a remis en cause les conditions de la paix. Le traitement de la crise alimentaire de 2005 a mis en évidence les lacunes des infrastructures étatiques vis-à-vis des populations du Nord qui ne bénéficièrent pas des messages d’alerte précoces. Par ailleurs, les conditions de vie des populations pastorales (plus de 410 000 personnes) se sont aggravées du fait de diminution des zones pastorales sous la pression foncière des agriculteurs du Sud. La paupérisation de ces populations pousse les Touaregs a transformer leur mode de vie et à s’installer en périphérie des villes. Donc la mise en œuvre effective de la décentralisation, le développement économique, le respect de la diversité culturelle, la plus grande représentation des populations du Nord dans les instances étatiques, l’administration et l’armée sont au cœur des revendications touaregs. Cependant afin d’éviter une trop grande coloration ethnique de ses demandes le mouvement reprend des thématiques comme celles de la rente uranifère, et des subventions accrues pour les régions du Nord dans lesquelles l’ensemble des populations de ces régions se retrouve.
C’est par l’intermédiaire de la question environnementale que le MNJ a intégré la question uranifère à ses revendications. Il a repris le rapport de l’association Sherpa2 et du CRIIRAD3 sur les pollutions radioactives et les conditions sanitaires des travailleurs à Arlit. Le MNJ demande explicitement un versement de 50 % des revenus des sociétés d’exploitation au profit des collectivités locales. Le MNJ s’appuie sur un contexte international favorable, avec l’adoption le 14 septembre 2007 par l’Assemblée Générale de l’ONU de la déclaration des peuples autochtones qui stipule que ces peuples ne peuvent pas être expulsés de leur territoire sans leur consentement libre et informé.
Notes géopolitiques : Le Niger se trouve happé dans les rivalités géopolitiques qui opposent les capitales arabes (Libye et Algérie) pour le contrôle du Sahel. Ces pays, prennent une importance grandissante eu égard à la lutte antiterroriste, et sont en train de devenir un pôle majeur. La Libye aimerait faire du Niger (et du Tchad) des zones d’intérêt stratégique, mais ses moyens ne le lui permettent plus. Elle a, dans cette région, une volonté de regroupement hégémonique, qu’elle a tenté d’accomplir par des moyens militaires, mais qui désormais passe par les moyens économiques. Dans cette zone, la Libye tente de sauvegarder ou d’accroître. En outre, certains rebelles seraient revenus d’exil en Algérie et en Libye et le MNJ bénéficierait de soutiens financiers et matériels des Touaregs algériens et libyens. Il semble que les rebelles n’ont pas de problème pour se procurer des armes dans cette région poreuse (il est difficile de surveiller la frontière nigéro-algérienne longue de 900km). Un marché parallèle existerait avec des armes venant de Côte d’Ivoire. Sur le terrain, l’État nigérien a privilégié une logique de répression contre les soutiens supposés du MNJ avec l’envoi de renforts militaires. Cette attitude répond à un agenda politique particulier, le Niger se trouvant en effet dans une année préélectorale (voir ce billet).
Donc les accusations répétées de collusion avec les rebelles, portées par le gouvernement contre le groupe Areva dans le passé, sont un moyen pour l’Etat nigérien de redistribuer les cartes en discréditant le groupe Areva. Pour autant la France et le groupe conserve une place de premier plan dans le pays car le Niger est très dépendant de l’extérieur pour son approvisionnement en produits alimentaire de base, en énergie et en produits industriels. La compagnie Areva se doit de diversifier ses sources d’approvisionnement. Elle a déjà racheté des gisements en Namibie, en Afrique du Sud et en Centrafrique et entend développer son activité au Canada et au Kazakhstan.

mercredi 30 septembre 2009

Le rapport 2009 de Transparency International est arrivé

Comme chaque année l’organisation Transparency International nous propose son rapport sur la corruption dans le monde. Cette année le secteur privé est « à l’honneur » si on peut dire. On y apprend que les pots-de-vin versés à des politiciens corrompus et à des fonctionnaires d’État ont atteint jusqu’à 40 milliards de dollars par an. La corruption augmenterait les coûts des projets d’au moins 10 %.
Un chapitre est consacré à « la corruption et le secteur informel en Afrique subsaharienne » (p.308). En 2005, l’économie souterraine dépasse 40 pour cent des PIB officiels (50 % au Nigeria et en Tanzanie). Gavin Hayman, directeur de campagnes chez Global Witness, analyse la situation comme suit : « En 2006, les exportations de pétrole et de minéraux de l’Afrique ont atteint environ 249 milliards de dollars, soit près de huit fois la valeur des produits agricoles exportés (32 milliards de dollars) et près de six fois la valeur de l’aide internationale (43 milliards de dollars) [….] S’il était employé à bon escient, cet argent pourrait fournir l’une des meilleures occasions en une génération de sortir de leur pauvreté bon nombre des citoyens les plus démunis et les plus déshérités de la planète. L’histoire prouve, toutefois, étrangement, que les pays qui dépendent des revenus de l’exploitation pétrolière et minière tendent, à de rares exceptions près, à être pauvres, mal gérés et enclins à une instabilité violente : la « malédiction des ressources » est désormais un phénomène amplement étudié. »
Le document propose également des rapports par pays. Les cas du Burundi, du Cameroun, de l’Éthiopie, du Ghana, du Kenya, du Nigeria, du Rwanda et du Zimbabwe sont abordés. Ci-dessous le classement des 5 premiers pays, celui de la France et celui des pays d’Afrique sub-saharienne.

Indice de perception de la corruption 2008 (tel que le ressentent les milieux d’affaires et les analystes nationaux) :
1 Danemark
2 Nouvelle-Zélande
3 Suède
4 Singapour
5 Finlande
24 France
36 Botswana
41 Maurice
47 Cap-Vert
54 Afrique du Sud
56 Seychelles
61 Namibie
69 Ghana
78 Swaziland
81 Burkina Faso (1er pays francophone)
87 Madagascar
90 Sénégal
94 Lesotho
96 Bénin
97 Gabon
101 Mali
103 Djibouti
107 Rwanda
108 Tanzanie
116 Malawi
118 Mauritanie
119 Niger
120 Zambie
122 Nigeria
123 São Tomé-et-Principe
124 Togo
126 Érythrée
127 Éthiopie
132 Mozambique
135 Ouganda
134 Comores
138 Libéria
141 Cameroun
148 Kenya
152 République centrafricaine
153 Côte d’Ivoire
158 Angola
160 Burundi
161 Congo, République du
162 Gambie
163 Guinée-Bissau
164 Sierra Leone
170 Zimbabwe
171 Congo, République démocratique du
172 Guinée équatoriale
173 Tchad
174 Guinée
175 Soudan
180/180 Somalie
Et le rapport de préciser : « La pauvreté ne doit toutefois pas nécessairement enfermer un pays dans une spirale descendante de mauvaise gouvernance et de privation économique. […] le Botswana, le Cap-Vert, […] continuent d’afficher des niveaux relativement faibles de corruption perçue malgré leurs revenus relativement bas. Certains de ces pays peuvent donc être source d’inspiration en faveur de réformes. Dans le même temps, plusieurs pays riches en ressources naturelles obtiennent des résultats particulièrement médiocres. Ceci illustre le phénomène bien connu de la malédiction des ressources. »

A vos agendas et....librairies !

22/10/2009, 17:30-19:00, IFRI : « Les perspectives pour une gouvernance démocratique en Guinée Conakry », Conférence autour de : Sidya Touré, ex-Premier ministre de Guinée, président de l'Union des Forces Républicaines (UFR) Guinée, Alain Antil, responsable du programme Afrique subsaharienne à l'Ifri
13/10/2009, 11h00 - 19h00, CERI, « Religions et conflits », nous nous intéresserons plus particulièrement à la table ronde de 14h : « Les conflits religieux existent-ils ? », Jean-Pierre Filiu de Sciences Po sur l’Islamisme et Murray Last, de l’University College, Londres sur le Nigéria

7/10/2009, 19h30 : Collège des Bernardins (Petit Auditorium), 18 - 24 rue de Poissy, Paris, avec Henri Hude, « Les problèmes éthiques posés par les nouveaux conflits »

Et toujours,
Les lundis de l'IHEDN : "La puissance et l'influence de la France de demain. Quelle stratégie extérieure ?" le 12 octobre avec Monsieur Nicolas TENZER Haut fonctionnaire, directeur de la revue Le Banquet, auteur de nombreux rapports officiels Président d'Initiative pour le développement de l'expertise française à l'international et en Europe (IDEFIE) Auteur de Quand la France disparaît du monde (Grasset, 2008)

Frédéric Lasserre: "Les guerres de l’eau. L’eau au cœur des conflits du XXIe siècle"
Changements climatiques, pollution, surpopulation, la rareté de l’eau et sa mauvaise répartition sur la terre est une source croissante de tensions. Aujourd’hui 1,7 milliards de personnes manquent d’eau douce et sont au dessous du seuil de rareté établi par l’ONU. En 2025, elles seront 2,4 milliards. Que se passera-t-il lorsque l’eau s’épuisera à certains points du globe ? Déjà des conflits éclatent pour le contrôle de l’eau. En Israël, la volonté de s’approprier les eaux du Jourdain a été l’une des causes de la guerre des 6 jours. A qui appartient le Nil ? Le Tigre et l’Euphrate, sont source de tensions entre la Turquie, la Syrie et l’Irak. L’Hindus est l’objet d’un bras de fer entre les frères ennemis pakistanais et indiens. Les Etats-Unis doivent face à une pénurie d’eau croissante à l’ouest et lorgnent sur l’eau du Canada… L’eau sera-t-elle au coeur des conflits du XXIème siècle ? Une chose est certaine : il importe d’agir pour gérer une rareté croissante. Il ne reste que peu de temps avant que la pénurie d’eau ne devienne le catalyseur de tensions bien plus vives que celles que nous connaissons depuis le XXème siècle.
Paris, Delavilla, 2009. 250 pages, 14 x 22 cm, broché. 17 €

Bertrand Badie & Dominique Vidal (dir.): "Le grand tournant ? L’état du monde 2010"
Rarement le monde a changé aussi rapidement autour de nous. En quelques mois, le président Barack Obama a marqué, au moins verbalement, la rupture avec son prédécesseur. Le krach financier s'est transformé en crise économique et sociale mondiale, montrant à quel point le temps de la souveraineté avait cédé la place à celui de l'interdépendance - même si la fragmentation et le " chacun pour soi " restaient la tentation suprême. La poussée de l'Inde et de la Chine, le retour de la Russie, les ambitions du Brésil et de l'Afrique du Sud éprouvent la volonté occidentale de renforcer son hégémonie. S'agit-il pour autant d'un " grand tournant " ? A travers 50 analyses, rédigées par les meilleurs spécialistes du champ international, L'état du monde 2010 éclaire cette question décisive pour l'avenir.
Paris, La Découverte, 2009. 335 pages, 16 x 24 cm, broché.20,90 €