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mardi 27 avril 2010
Omar El-Béchir réélu à la tête d'un régime difficile à cerner
On s’y attendait c’est confirmée, avec 68,24% des voix, le président soudanais Omar el-Béchir a été reconduit à la tête du Soudan, hier lors de son premier test électoral après 21 ans de pouvoir. "En ce jour, je remercie Dieu parce que c'est lui qui donne la victoire. Ce n'est pas une victoire pour le NCP (Parti du congrès national) seul, mais pour tous les Soudanais" a-t-il déclaré.
Le Soudan est un géant aux pieds d’argile. Il a tous les attributs d’une puissance régionale : c’est le plus vaste pays d’Afrique, c’est un pays stratégiquement situé, au carrefour du monde arabe et de l’Afrique, c’est aussi un important producteur de pétrole, et son potentiel agricole et minier est également important. Pourtant ce pays est fragile. Le Soudan est une mosaïque de peuples (572 langues), son pouvoir est contrôlé depuis l’indépendance par les Arabes, minoritaires (30% de la population) et surtout le pays est divisé entre un centre plutôt favorisé et des périphéries marginalisées : Sud, mais aussi Est et Ouest (Darfour), qui se rebellent. Plus qu’une guerre de religion entre un Nord islamique et un Sud chrétien et/ou animiste, ce sont plutôt deux cultures, une tribale traditionaliste au Sud et une arabo-musulmane au nord, qui s'opposent. On peut aussi y analyser une opposition entre le Centre (concentrant tous les infrastructures, les banques...) et la périphérie (les ressources pétrolières sont au sud et à l’ouest). En outre, la crise du Darfour a remis en cause la grille d’analyse traditionnelle qui permettait d’expliquer la situation au Soudan par le clivage Nord (musulman) /Sud (chrétien). Il est donc difficile de comprendre le fonctionnement du régime soudanais. Petit rappel des faits :
L’ISOLEMENT DU POUVOIR ISLAMISTE SOUDANAIS DANS LES ANNEES 1990
En 1989, le général Omar el-Béchir, sous l’influence d’Hassan al-Tourabi (photo) et du Front National Islamique (FNI), arrive au pouvoir après un coup d’Etat. 1989 représente une véritable césure islamiste dans le pays. L’islam politique d’inspiration wahhabite triomphe représenté par Hassan el Tourabi, chef du Front National Islamique. Ses ambitions et son activisme l'avaient mené à sa perte, au moment où le pouvoir projetait de briser son isolement international. Ainsi, Hassan el Tourabi est mis à l’écart en 1999.
Au niveau international, dès 1989, le Soudan dispose d’une mauvaise image internationale. Le régime a même été soupçonné de soutenir le terrorisme islamiste en accueillant Ben Laden. En réponse la communauté internationale se veut très ferme. Ce statut « d’Etat–paria » favorise le rapprochement de Khartoum avec certains pays asiatiques (Chine, Malaisie, Inde), notamment dans le secteur pétrolier et minier.
LE REGIME S’OUVRE ET SORT DE SON ISOLEMENT AU DEBUT DU XXIEME SIECLE.
Entre août 1998 et septembre 2001, un changement important se fait dans l’équilibre interne du pouvoir à Khartoum. Avant 1998, le régime avait mobilisé à la fois une approche traditionnelle de la sécurité nationale, centrée sur l’État, et une approche panislamiste plus radicale. Deux approches qui, suivant les périodes, étaient soient rivales soient associées. En décembre 1999, le président Bechir suspend l’Assemblée nationale, écarte Tourabi et purge le parti unique (le Congrès national) des plus importants partisans de ce dernier.
Depuis les années 1980 on peut remarquer que les islamistes soudanais aiment séduire, manipuler et infiltrer. Ils fonctionnent comme une société secrète. Officiellement, c’est le président Omar el-Béchir qui gouverne. L’alliance, créée en 1989, avec le FNI se poursuit. L’armée occupe la plus haute fonction de l’Etat, elle s’enrichit et investit dans le secteur pétrolier et la finance.
Voir : Omar El Bechir est l'objet d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale depuis le 4 mars 2009, article ICI
La nouvelle stratégie américaine pour le Soudan ICI
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lundi 26 octobre 2009
La justice internationale en Afrique
Le procès de Karadzic s’ouvre aujourd’hui mais l’ex-chef des Serbes de Bosnie refuse de comparaître à l’ouverture de son procès. L’occasion pour nous de faire un bilan des personnalités devant rendre des comptes à la justice international. Un constat s’impose l’Afrique est dans la ligne de mire. Car à l’exception du procès de Kank Kev Eav (directeur du centre de torture S-21 sous la dictature khmère) et d’Oussama Ben Laden, Ratko Mladic (général yougoslave de l’armée des Serbes de Bosnie) et Izzat Ibrahim al-Douri (n°2 du régime de Saddam Hussein) toujours recherchés, les personnalités accusés sont originaires du continent noir.
Omar EL-Béchir (Réclamé) : Objet d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale depuis le 4 mars 2009. Le président du Soudan est recherché pour crime de guerre et crimes contre l’humanité au Darfour (qui aurait fait 300 000 morts et 3 millions de déplacés depuis 2003). En outre, la Cour pénale internationale a ouvert lundi 19 octobre ses audiences contre le chef rebelle du Darfour, Bahar Idriss Abou Garda, poursuivi pour crimes de guerre accusé de l’assassinat de 12 soldats de la paix lors de l’attaque de la base militaire d’Haskanita, au nord Darfour, en septembre 2007.
Charles Taylor (En jugement) : L’ancien président du Libéria est poursuivi pour avoir armé et financé les rebelles de la Sierra Leone, afin de faire main basse sur les diamants. Il comparait depuis 2007 pour crimes contre l’humanité devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone à La Haye (vidéo ICI). Le tribunal spécial établi en 2002 en Sierra Leone pour juger les plus importants responsables des crimes commis durant la guerre civile (1991-2001) rend, aujourd’hui, son ultime verdict, dans le procès en appel de trois anciens chefs rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF). Seul le procès de Charles Taylor se poursuit encore aux Pays-Bas, pour des raisons de sécurité.
Jean-Pierre Bemba (Arrêté) : L’ancien vice-président de la RDC est poursuivi pour crimes contre l’humanité commis par sa milice de 2002 à 2003 (pillages, viols et actes de cannibalisme chez les pygmées selon l’ONU). Il a été arrêté à Bruxelles en mai 2008. En janvier 2009 il rejetait les accusations de la Cour (vidéo ICI).
Idelphonse Nizeyimana (Arrêté) : Le « Boucher de Butare », officier du renseignement de l’Akazu serait responsable du massacre de 800 000 Tutsis et Hutus modérés en 1994. Arrêté le 6 octobre en Ouganda et traduit devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda et inculpé de génocide. Nizeyimana est accusé par le Tribunal d'Arusha d'avoir notamment planifié le massacre d'étudiants et d'enseignants tutsis de l'université. C'est lui qui dressait les listes de personnes à assassiner. C'est lui encore qui ordonne l'assassinat de la reine douairière Rosalie Gicanda, veuve du Roi Mutara III, et figure symbolique pour les Tutsis. Le 14 octobre il a plaidé non coupable de vant la Cour (vidéo ICI). Le Tribunal avait déjà, en août dernier, mis la main sur un autre génocidaire présumé, Grégoire Ndahimana arrêté en RDC.
Le 2 juillet, lors du treizième sommet de l'Union africaine (UA), une quinzaine de chefs d'Etat (à l’exception du Botswana) ont décidé à Syrte de ne pas « coopérer avec la CPI dans le dossier Omar El Béchir ». Pourtant « ce sont surtout les pays africains qui ont demandé avec insistance cette cour », affirmait Louis-Moreno Ocampo, procureur de ladite cour, dès le lendemain. Rappelons que trente Etats africains ont signé le Statut de Rome, instrument fondateur de la Cour. Ils constituent le groupe régional le plus large parmi un total de 108 Etats. Or ce traité les oblige à en respecter les clauses, dont l'une a trait, justement, à la coopération en matière de poursuite de criminels de guerre. Selon un communiqué de la CPI seuls trois Etats africains, parties au Statut de Rome, à savoir, l'Ouganda, la République démocratique du Congo et la République centrafricaine, ont renvoyé à la Cour des situations survenant sur leur territoire.
La CPI révèle aussi que le Conseil de sécurité des nations unies lui a déféré la situation au Darfour, au Soudan, un Etat qui n'est pas partie au Statut.
La volonté affichée « d’africaniser » la justice pénale internationale a été mis plusieurs fois en exergue malgré l’absence de compétence des juridictions panafricaines en matière pénale. En effet, ni la Cour de justice de l’UA, ni la CADHP ne sont compétentes pour traiter des crimes massifs commis par les individus.
mercredi 23 septembre 2009
Les dessous de Khartoum
Salah Gosh, à la tête des services secrets soudanais depuis la fin des années 90, a été nommé conseiller spécial pour la sécurité auprès de la présidence en août. "Le président de la république... Omar el-Béchir, a émis un décret dans lequel il nomme Salah Abdallah conseiller présidentiel. Le président a émis un autre décret dans lequel il nomme le général Mohammed Atta al-Moula directeur général de la sécurité nationale et du renseignement", écrit l'agence de presse officielle dans un communiqué sans préciser les raisons de ce changement.
Pourquoi lui consacrer ce post ? Parce que ce départ pose une question : Gosh est il toujours en odeur de sainteté auprès du président Al-Bachir ?
En effet, l’ancien chef du National Security and Intelligence Service (NSIS), présent auprès du président depuis la prise de pouvoir en 1989, est l’un des leaders les plus influents au Soudan. Lorsque la CPI a émis un mandat d’arrêt contre le président l’hiver dernier beaucoup voyait Salah Gosh à sa succession. Ses détracteurs lui reprochent d’avoir été un interlocuteur privilégié de la CIA dans la lutte contre Al Qaïda en Irak et en Somalie et d’avoir échoué à mobiliser les rebelles tchadiens dans le but de renverser le président Deby. L’armée lui en voulait aussi de ne pas avoir alerté le pouvoir de la planification de l’attaque des rebelles darfourien du JEM (Mouvement pour la justice et l'égalité) sur Khartoum en mai 2008, bien que pour sa défense il affirmait que l’armée avait été infiltrée par les rebelles.
Cette nomination pourrait bien viser à affaiblir l’influence de cet homme clé à la veille des élections législatives et présidentielles de 2010.
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