Un évènement intéressant s’est déroulé fin juillet, malheureusement en pleine période estivale nous n’y avons pas prêté une grande attention, je vais même apprendre l’information pour ceux qui ont préféré la plage aux journaux !
Le 28 juillet les 9 ministres de l'Eau des pays du bassin du Nil (l'Érythrée assistait en tant qu'observateur) ont reporté de six mois la signature d'un accord de partage des eaux du fleuve, en raison de l'opposition de l'Egypte et du Soudan. Ces derniers affirment que l'Accord cadre de coopération (CFA), élaboré en juin en République démocratique du Congo, ignore leurs revendications historiques. En effet, en 1929 un accord entre l'Egypte et la Grande-Bretagne accordait au Caire un droit de veto sur les projets construits en amont.
Les problèmes liés au partage des eaux du Nil ont bien souvent failli tourner aux conflits.
Rappelons quelques éléments géopolitiques.
Avec ses 6671 km, le Nil est le plus long fleuve du monde. Il prend sa source dans la région des Grands Lacs. Son bassin couvre une superficie équivalente à six fois la France (3 030 700 km ²) et ses affluents s’étendent sur dix pays.
L’irrigation et la production hydro-électrique constituent les principaux enjeux de ce fleuve et la question du partage des eaux du Nil est majeure en Afrique de l’Est depuis des décennies. L’Egypte est dans la position inconfortable du pays qui est en aval sur le cours du fleuve et pour qui celui-ci constitue quasiment la seule ressource en eau. Son sort est donc lié aux décisions prises par les pays en amont.
L’Egypte considère comme une menace stratégique toute diminution de son quota tel que prévu par le traité de 1959, signé avec le Soudan et excluant les autres pays du Nil notamment l’Ethiopie qui lésée n’a jamais accepté cet accord. Or 85% du Nil provient du territoire éthiopien. Addis-Abeba souhaiterait imposer sa vision de l’aménagement du Nil en empêchant Le Caire de réaliser ses grands projets hydriques et en le forçant à s’asseoir à la table des négociations. A plusieurs reprises, les tensions entre l’Egypte et l’Ethiopie ont failli dégénérer. Mais plutôt que de se combattre directement, ces deux pays s’affrontent par ennemis interposés.
L’augmentation de la population et le désir de développement économique amènent aussi les pays plus en amont à envisager d’exploiter à une grande échelle leurs ressources en eau. L’Egypte est donc confrontée à un stress hydrique, démographique et social. Le pays doit se tourner vers le Nil et réaliser des projets très couteux, qui ne seront pas sans incidence sur les autres nations en amont. Ainsi, le barrage d’Assouan (1971), entre l’Egypte et le Soudan suscite quelques tensions.
Le risque de conflit autour des eaux du Nil est important. Il faut éviter que le Nil ne devienne « la cause de la prochaine guerre dans la région » comme le craignait Boutros Boutros-Ghali en 1985.
Bonjour,
RépondreSupprimerBravo pour la création de votre blog et votre analyse.
S'agissant d'un risque de conflit entre l'Egypte et l'Ethiopie, il me semble qu'il pourra difficilement dépasser (à moyen terme) le stade de conflit "par ennemi interposés" pour les raisons suivantes :
- l'Egypte et l'Éthiopie sont deux pièces maitresses des Etats--Unis dans la lutte contre le terrorisme international (en Somalie et au Proche -Orient)
- les deux pays n'ont pas de frontières commune ce qui imposerait de faire entrer le Soudan dans ce "grand jeu" du bassin du Nil mais ce dernier est en position de force au plan hydrographique, voire politique (pour ce dossier)
Cordialement
SD
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RépondreSupprimerMerci pour cette remarque. J ajouterai que l’Egypte joue contre l’Ethiopie de façon récurrente. C’est une position quasiment structurelle elle est par exemple toujours opposée à l’Ethiopie sur la Somalie.
RépondreSupprimerPar ailleurs il semble que les liens Etats-Unis/Ethiopie se distendent de plus en plus :
1/ Les autorités éthiopiennes n’ont pas du tout apprécié le dernier rapport du département d’Etat américain sur les violations des droits de l’homme. Le ministère des affaires étrangères a même indiqué qu’il tenait l’ambassade des Etats-Unis, en particulier l’ambassadeur Donald Yamamoto (de retour à Washington pour y travailler avec Johnie Carson, l’Assisstant Secretary of State for African Affairs) pour responsable de ce mauvais rapport.
2/ Hillary Clinton a soigneusement évité de rendre visite à « l’allié » éthiopien lors de sa dernière tournée africaine.
3/ Les élections de 2010 semblent placer les Etats-Unis dans une position attentiste.