Alors que de nouveaux spécialistes du Sahel, de l'Afrique de l'Ouest ou encore de la Somalie, apparaissent un peu partout dans les médias ces derniers jours, les discours colportés font souvent état d'un "islam noir". Nous vous proposons ici d'analyser cette question.
Tout d'abord, gardons-nous de toute
analyse qui donnerait une représentation fallacieuse de l’islam dans la région.
Bien qu’il soit teinté de tradition animiste et soufie, rappelons comme René
Otayek et Benjamin Soares (ouvrage à droite) que cet islam dit « africain » n’a pourtant
pas autant de pratiques particulières qu’on le laisse souvent entendre. Le
culte des saints, par exemple, est aussi répandu dans le reste du monde
musulman. Néanmoins, il est vrai que dans des pays comme le Mali, la
pratique religieuse inclus souvent des éléments extérieurs à l’islam
(personnages mythiques non musulmans, recours au fétichisme…). Nous émettons donc
des réserves face à ce qu’il est habituellement appeler un « islam
africain » profondément soufi et perçu comme « notoirement
syncrétique, tolérant et assimilationniste » sur lequel les colonisateurs français et
britanniques appuyaient leur pouvoir et que certains invoquent aujourd’hui afin
d’endiguer la montée de l’islamisme dans la région. Cette vision manichéenne
donne une image erronée d’une situation qui cache une réalité beaucoup plus
complexe. Bien sûr, on observe de fortes divergences entre les sunnites, wahhabites
et les traditionnalistes mais ces oppositions sont plus souvent des commodités
de langage. L’islam dans la région est pluriel. Les solidarités familiales,
ethniques… sont souvent plus actives que l’identification religieuse et sont
entretenues par les structures sociales, économiques et politiques de la
société.
L’islam, comme le christianisme,
ont réinvesti l’espace public profitant du vide politique laissé après des
années d’autoritarisme et cette demande de sacré est aussi une demande de sens.
Au Mali, Chérif Ousmane Haïdara, chef traditionnel d’un ordre
soufi , a rempli les stades
mais peu d'autres membres de l’élite musulmane ne bénéficient d’un public aussi important
et n’ont réussi à se substituer aux chefs soufis, aux marabouts….
Ainsi même si les
discours des nouveaux intellectuels musulmans ont parfois des résonnances
islamistes, cette visibilité est trompeuse par rapport à leur influence réelle
dans la population. Au Mali, ils peuvent invoquer la Charia mais ils n’ont pas nécessairement
de légitimité populaire et ne sont pas représentatifs. Par ailleurs, il ne faut
pas confondre islamisme et jihadisme. De même tous les islamistes ne sont pas
des radicaux.
On lira avec intérêt :
René Otayek et Benjamin Soares, « Islam et politique en Afrique » in Islam, Etat et société en Afrique, Paris, Karthala, 2009
Benjamin Soares, « L’islam au Mali à l’ère néolibérale » in Islam, Etat et société en Afrique, Paris, Karthala, 2009
Louis Brenner, « La culture arabo-islamique au Mali », in Le radicalisme islamique au sud du Sahara. Da’wa, arabisation et critique de l’Occident, René Otayek (sous la dir.), Paris, Karthala, 1993
On lira avec intérêt :
René Otayek et Benjamin Soares, « Islam et politique en Afrique » in Islam, Etat et société en Afrique, Paris, Karthala, 2009
Benjamin Soares, « L’islam au Mali à l’ère néolibérale » in Islam, Etat et société en Afrique, Paris, Karthala, 2009
Louis Brenner, « La culture arabo-islamique au Mali », in Le radicalisme islamique au sud du Sahara. Da’wa, arabisation et critique de l’Occident, René Otayek (sous la dir.), Paris, Karthala, 1993
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