dimanche 18 septembre 2011

Somalie : Gate of hope

Une belle vidéo, résumant le drame somalien à travers l'aide médical apportée par l'AMISOM.



jeudi 15 septembre 2011

Enfin la chute des Shabaab en Somalie ?

Quand les médias occidentaux, sensibilisaient encore l’opinion publique, au drame humanitaire qui touche une partie de la Corne de l’Afrique, un autre sujet fut également médiatisé (très relativement il est vrai) : le retrait des Shabaab de Muqdisho. Cet évènement inaugure-t-il un tournant stratégique dans la lutte contre le jihadisme en Somalie ?

Le 6 août 2011, le président somalien annonçait le retrait des Shabaab de Muqdisho. Pour le porte-parole du mouvement radical, Sheikh Ali Mohamud Rage, ce retrait est tactique et temporaire, les radicaux conserveront leurs positions dans le reste du Sud de la Somalie (le Somaliland étant indépendantiste et le Puntland autonomiste). Néanmoins les difficultés du mouvement sont-elles temporaires ? Peuvent-elles expliquer ce retrait ? Plusieurs facteurs interviennent :

1) L’offensive des forces de l'Union africaine (Amisom) et des troupes gouvernementales, contre les Shabaab menée depuis plusieurs semaines sur le marché stratégique de Bakara, bastion des insurgés, et dans le nord-est de la capitale, a mis à mal les efforts des Shabaab. Acculé, le mouvement extrémiste aurait perdu une centaine d’hommes. Par ailleurs, il souffrait de difficultés d’approvisionnement en munitions et de difficultés financières, entre autres parce que les transferts de fonds venus des Etats-Unis se tarissent.
2) Il existait de nombreuses divisions internes. Ces divisions furent exacerbées par la gestion de la sécheresse et l’accès aux zones, sous leur contrôle, aux humanitaires. La manne financière liée à la mobilisation internationale est aussi devenu un véritable enjeu. A titre illustratif, les extrémistes réclamaient 10 000$ de taxes pour l’accès à une zone qu’ils contrôlaient, auxquels il s’agit d’ajouter 10 000$ de frais d’enregistrement, plus 6 000$ tous les 6 mois et 20% de taxes sur les marchandises importées sur leurs zones (y compris la nourriture). Même les populations sont taxées et certains chefs guerre se taillent de véritables principautés. Cet été, les Shabaab ont réclamé 30$ par hectare de terres irriguées aux agriculteurs vivant le long du Juba dans la région du Lower Juba (en rouge sur la carte). (ICI, ICI, et ICI)
3) Des divisions aussi, quant aux objectifs du mouvement. Lorsque les Shabaab ont traité le président du Gouvernement Fédéral de Transition (GFT) de traitre et d’apostat, Ben Laden s’en ait fait l’écho, comparant Cheikh Sharif Cheikh Ahmed au président Afghan, Hamid Karzai, et appelant au “jihad” contre son régime. Puis, le mouvement a prêté allégeance à al-Qāʿida (septembre 2009), mais les liens semblent plus symboliques qu’effectifs. Cette déclaration s’inscrit dans une volonté des fondamentalistes somaliens de s’aligner sur l’agenda global de la nébuleuse terroriste et d’être reconnus comme l’une de ses « filiales », tout en restant indépendants. Elle implique l’arrivée de combattants extérieurs et l’apparition d’un discours jihadiste menaçant les pays voisins. L’État islamique voulu en Somalie par certains groupes militants dépasse les frontières actuelles de l’État et englobe des régions peuplées de Somalis, en Éthiopie et au Kenya notamment (Grande Somalie), d’autres souhaitent lutter comme le GFT perçu comme illégitime. Des divisions claniques apparaissent aussi, paradoxalement il reste à espérer que ces divisions claniques, qui font aussi obstacle à l’émergence d’un pouvoir central en Somalie, et que dénonce officiellement le discours trans-clanique des intégristes, seront aussi celles susceptibles de les faire tomber.


4) Les difficultés rencontrées ces derniers mois furent également exacerbées par des défaillances au sein de l’appareil de commandement. Ainsi, la mort en juin de Fazul Abdullah Mohamed, le cerveau des attentats du Kenya et de Tanzanie en 1998, les blessures de Bilal al Berjawi, le cerveau des attentats de Kampala en juillet 2010, celles de l’émir Ibrahim Afghani, la mort de cinq commandant fin juillet, ont affaibli le mouvement. Des changements ont rapidement eu lieu dans le leadership, ainsi Ibrahim Haji Jama Mee'aad , un Somalo-américain, est devenu le chef des Shabaab, à la place d’Ahmed Godane. Ce dernier serait devenu responsable des affaires étrangères et des relations avec al-Qāʿida à la place de Fazul Abdullah Mohammed.

Ainsi, la guerre se poursuit (ICI et ICI) et les Shabaab cherchent déjà de nouveaux soutiens à l’extérieur et misent sur la diaspora. Ils gardent toujours le contrôle d’une large partie de la Somalie du Sud où sévit la famine. Par ailleurs, les armes continuent d’arriver par le Yémen. Si l’AMISOM et les troupes somaliennes ont repris le contrôle des zones délaissées par les Shabaab à Muqdisho, des craintes apparaissent quant à une possible résurgence des chefs de guerre sur ces zones (ICI). Ces chefs auraient d’ailleurs toujours à leur disposition des milices. Celles-ci furent même utilisées dans la bataille de Mogadiscio ces dernières semaines.
Enfin, et surtout, les ingérences étrangères se poursuivent.



Et tant que le conflit qui oppose l’Ethiopie à l’Erythrée ne sera pas réglé, toute résolution de la crise somalienne sera compromise. En effet, ce conflit persistant est au cœur de la déstabilisation de la Corne de l’Afrique. Après la guerre de 1998-2000, un accord de paix est signé le 18 juin 2000suite à la médiation de la présidence algérienne de l'Organisation de l’Union Africaine. Elle prévoit la mise en place d'une commission frontalière chargée de délimiter et démarquer la frontière. Les deux parties acceptent, par avance, la décision de la commission comme définitive et contraignante et le 13 avril 2002, la commission arbitrale attribue Badme à l’Erythrée.Dès lors l’Éthiopie, qui a militairement gagné la guerre, refuse la décision et laisse ses troupes dans cette région, qu’elle occupe depuis le XIXème siècle. Depuis, le processus de paix est en panne et l’Erythrée reproche à la communauté internationale de n’avoir rien fait à l’encontre de l’Éthiopie pour la forcer à appliquer la décision de la cour d’arbitrage. Ce positionnement a entrainé au fil des ans la radicalisation du régime érythréen. Il sert aussi l’Ethiopie qui en période de crise interne utilise la rhétorique nationaliste pour renforcer sa légitimité interne.
Il est fondamental d’analyser ce conflit pour comprendre la politique étrangère des acteurs étatiques régionaux. Les protagonistes de ce conflit ont, par la suite, interféré dans le conflit somalien. Et ils contribuent toujours à l’attiser.


mardi 13 septembre 2011

VIIe Congrès international des Victimes du terrorisme

L'Association Nationale des Auditeurs Jeunes de l'IHEDN, partenaire de l'Association française des Victimes du Terrorisme, organise le "VIIe Congrès international des Victimes du terrorisme", du jeudi 15 au samedi 17 septembre 2011, à l"École militaire (Amphithéâtre Foch).


Programme :
Jeudi 15 septembre 2011

14h00 Cérémonie d’ouverture
15h00 Parole de victimes
17h00 Avis d’experts : L’efficacité de la collaboration entre les États dans la
lutte contre les organisations terroristes. L’exemple franco-espagnol

Hôtel de Ville de Paris, Place de l’Hôtel de Ville, 75004 Paris
20h00 Cocktail dînatoire

Vendredi 16 septembre 2011

09h30 Table ronde : Le cas particulier de la prise d’otages
11h30 Table ronde : Impact d’un attentat terroriste sur l’environnement
familial des victimes
15h00 Avis d’experts : Évolution de la menace terroriste.
Recrutement de la jeunesse par les organisations terroristes
16h30 Table ronde : Victimes du terrorisme et société :
rôles des États, des employeurs et de la société civile

Théâtre du Châtelet, Place du Châtelet, 75001 Paris
20h00 Genèse de la Fédération Internationale des Victimes du Terrorisme
20h30 Concert de musique classique

Samedi 17 septembre 2011
09h00 Présentation du projet «I AM YOU »
09h30 Parole de victimes
11h30 Projection du documentaire «Killing in the name »

Mur pour la Paix, Champ de Mars, 75007 Paris
13h00 Cérémonie publique solennelle


Inscription obligatoire à l'adresse : contact@afvt.org
(Nom, Prénom, Pays, Mail et Numéro de téléphone)

Plus d'informations sur www.afvt.org


dimanche 11 septembre 2011

Un comité Afrique à l'ANAJ-IHEDN

L'ANAJ-IHEDN vient de créer un comité Afrique !

La réunion de lancement de ce nouveau comité aura lieu le 29 septembre à 18H30 (salle de comité 1 à l'Ecole militaire) pour échanger sur les initiatives à porter au sein de ce comité. Si vous souhaitez rejoindre cette nouvelle aventure ou si vous connaissez des personnes intéressées mais non membre de l'association, un système de parrainage est possible pour rejoindre l'ANAJ, donc n'attendez plus !

POURQUOI LE COMITE AFRIQUE ?

L’Afrique, longtemps considérée comme un continent en marge, est aujourd’hui animée par des dynamiques qui en font un espace plus que jamais intégré aux grandes questions stratégiques internationales.

Avec une croissance exceptionnelle depuis plusieurs années, certains parlent d’une « embellie historique », d’autres affirment que « les perspectives sont plus favorables que jamais ». Attirés par les perspectives économiques les puissances mondiales convoitent son potentiel encore largement inexploité, ses terres, ses richesses naturelles… L’Afrique est aussi devenue un terrain d’affrontement dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.


REJOIGNEZ CE COMITE DES LA RENTREE

Conscients des multiples enjeux liés au développement et à la stabilité de ce continent aux portes de l’Europe le comité vous propose d’engager une réflexion sur l’ensemble de ces questions au sein du comité Afrique.

Le 29 septembre le comité discutera d’un projet de conférences à la rentrée sur le terrorisme en Afrique et de l’organisation des conférences/débats avec des personnalités qui font l’Afrique d’aujourd’hui et de demain. Pour participer à cette réunion, inscription obligatoire (jusqu'au 26 septembre pour l'accès au site de l'Ecole militaire) à : afrique@anaj-ihedn.org

vendredi 9 septembre 2011

Piraterie : un impact économique limité ?

Voici quelques extraits de la présentation faite au colloque Guerre et économie organisé par le Club participation et progrès et l'Alliance GéoStratégique le 1er juillet 2011 à l'Ecole militaire. Cette présentation s'intitulait "la piraterie un business porteur ?". Les actes de colloque sont en préparation.



Pour mesurer le coût de la piraterie, doivent être pris en compte :
-le paiement des rançons qui s’élèverait à 240 millions de dollars cumulés depuis 2009 ;
-le surplus occasionné par le détournement d’une minorité de navires vers le cap de Bonne Espérance. Une minorité de navire ont fait ce choix car le passage par le détroit de Bab El Mandeb permet un gain de temps de 14 jours et une économie de carburant entre 800 000 et 2,7 millions de dollars selon le navire. Par ailleurs, il semblerait que seul un navire sur 400 soit détourné mais ce chiffre est soumis à caution puisqu’il ne prend pas en compte les actes de piraterie locaux;
-l’augmentation du prix des marchandises. Après l’attaque contre le Sirius Star le prix du pétrole aurait augmenté de 1,4% ;
-le coût pour les pays voisins : le gouvernement seychellois estime la perte à 12 millions d’euros par an, les prises de thon auraient diminué de 20%, la production de conserverie de 11%, les activités du port de 40%, les revenus du tourisme de 10% et le gouvernement doit allouer 2,3millions d’euros par an (4,3% du PIB) à la lutte contre la piraterie . Les lignes ravitaillant la Tanzanie et le Kenya sont directement touchées, les navires doivent effectuer un détournement de ces lignes qui entraine un surcoût estimé à 5 millions de dollars par an ;
-pour les pêcheurs locaux à qui les pirates ponctionnent des vivres et du carburant. En se prenant au commerce local et régional ils risquent de déstabiliser des économies déjà fragiles ;
-le coût humain : 500- 700 otages actuellement, 4000 personnes ont été maintenues par les pirates ;
-le coût humain pour les Somaliens. Atalante est aussi une mission de protection des navires affrétés par le PAM (Programme alimentaire mondial) et par l’AMISOM.
Une économie de la lutte contre la piraterie s’est développée : les assurances, la construction navale, les sociétés militaires privées et les fabricants d’armes non-létales…

Figure : Coût total de la piraterie (par an)
Rançons                              176 millions $
Primes d'assurance             Entre 460 millions $ et 3,2 milliards $
Routage des navires           2,4 à 3 milliards $
Équipements de sécurité    363 millions $ à 2,5 milliards $
Forces navales                    2 milliards $
Poursuites judiciaires         31 millions $
Opérations dissuasives       19,5 millions $
Coût pour l'économie régionale 1,25 milliards $
dont l'Egypte                      642 millions $
dont le Kenya                     414 millions $
dont les Seychelles             6 millions $
TOTAL                              7 à 12 milliards $ par an

Source : Anna Bowden, The Economic costs of maritime piracy

Bien que la piraterie ait fortement augmentée dans cette zone elle reste peu couteuse par rapport au chiffre d’affaire de l’industrie du transport maritime et le coût de l’opération militaire de lutte contre ce phénomène excède de loin le total des rançons versées aux pirates . Ainsi, d'après K. Menkhaus, « le volume total du contingent suédois constitué de 152 personnes, deux corvettes et un navire de soutien stationné pendant quatre mois en 2009 est supposé avoir couté 285 millions de couronnes suédoises (soit 36.5 millions de dollars) (…) soit l’équivalent de l’ensemble des rançons versées en 2008 entre 20 et 40 millions de dollars US »
Le total du montant des rançons s’élèverait à 240 millions de dollars depuis 2009, mais la lutte contre la piraterie, donc le surcoût par la communauté internationale (avec les navires de défense), serait estimé entre 10 et 16 milliards de dollars. La piraterie représenterait 1/1000 du coût total du transport maritime.
Globalement l’impact économique de la piraterie est donc limité même si elle reste une menace stratégique, humaine et politique intolérable.


Lire :
- Anna Bowden (dir.), « The Economic Cost of Maritime Piracy », décembre 2010, 26p, ICI
- Michèle Battesti, « Entretien avec S. E. M. Claude Morel, ambassadeur de la République des Seychelles en France », Lettre de l’Irsem n°4 -2011, ICI
- Gascon Alain, « La piraterie dans le golfe d'Aden : les puissances désarmées?», in Hérodote, 2009/3 n° 134, p. 107-124.
- « Rapport d’information déposé en application de l’article 145 du règlement par la commission de la défense nationale et des forces armées sur la piraterie maritime et présenté par m. Christian Ménard », Assemblée Nationale, n°1670, 13 mai 2009
-K. Menkhaus, « Dangerous Waters », in Survival, vol.51, n°1, 2009, p.23-24
-Jean-Marc Le Quilliec, « Reprendre l’initiative dans la lutte contre la piraterie au large de la Somalie », in Revue Défense Nationale, Tribune n°71 ICI
- Anne Gallais Bouchet, François Guiziou, « Piraterie : Perturbation de l'économie maritime? », Note de Synthèse N°128, ISEMAR, octobre 2010, p.1 ICI

samedi 27 août 2011

La politique africaine de la Libye (2/2)

II.Des actions d’une grande diversité sans réelle cohérence


Marginalisé dans le monde arabe, M. Kadhafi s’est tourné vers l’Afrique, se déclarant africain avant tout. C'est sa façon de jouer un rôle à l’échelle du continent et de tenter d'exister sur la scène internationale. Cette stratégie s’est déployée de manière chaotique, mais la pénétration de l’Islam en Afrique est aujourd’hui incontestable.


a) L’échec de l’action militaire directe

L’intégration par la conquête militaire a été sans aucun doute le premier objectif de Kadhafi. En témoigne la conquête et l’occupation temporaire du Tchad au début des années 1980 qui a tourné au fiasco militaire pour les forces armées libyennes. Cette incursion a obéi à une analyse stratégique, Kadhafi voulait se protéger d’éventuelles incursions soudanaises en agrandissant son territoire au Sud dans la bande d’Aozou (ICI). Cet échec n’a pas fait renoncer le Président libyen à sa volonté de domination militaire, pas plus que le raid punitif américain qui a tué son fils et détruit sa résidence, mais il l’a fait plus prudemment : il est arrivé accompagné de plus de 3 000 soldats en 1997 au Tchad où il n’est pas resté plus d’une semaine, il a installé en 1997 et 1998, des bases militaires en Centrafrique et à Gbadolite au Nord de la République Démocratique du Congo pour soutenir la rébellion, positions qu’il a abandonnées après une nouvelle défaite militaire cuisante près de Gbadolite. La Libye n’avait pas vraiment les moyens de ses ambitions et à perdu, avec la chute de l’URSS, le principal soutien de ses actions en Afrique.
Elle a tenté de repositionner sa politique étrangère en utilisant la médiation plutôt que l’intervention militaire pour poursuivre sa politique d’influence sur le continent. Ainsi on peut penser que la Libye est passé d’une stratégie de puissance , à une stratégie d’influence assimilée au Soft Power.

b) Un leadership politique qui peine à s’imposer

La politique internationale du Guide résulte d’une ambition personnelle et d’une volonté de domination sur l’Afrique. Le régime cherche, notamment dans le cadre de l’Union Africaine, à fédérer les États africains. D’ailleurs c’est en partie sous l’impulsion de la Libye que l’Organisation de l’Unité Africaine (1963), en perte de vitesse, a été remplacée en 2002 par l’Union Africaine. Aujourd’hui son projet d’Etats-Unis d’Afrique est soutenu par certains obligés de la Libye , mais refusé par de nombreux pays, menés par l’Afrique du Sud et le Nigeria.
Après avoir refusé en 2004 la présidence de l’Union Africaine « parce qu’il pensait qu’il devait aider l’Afrique à réaliser son unité continentale indépendamment de toute position officielle », le « Frère Guide de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste, Roi des rois africains » (tel qu’il a demandé à être appelé après son élection à Benghazi par les chefs traditionnels du continent les 28 et 29 août 2008) a accepté la présidence en 2009 et s’est réinvesti dans la gestion des conflits. Il a notamment défendu une position différente de celle du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine, en prônant la non-application de sanctions contre la junte putschiste du général Mohamed Ould Abdel Aziz.
Malgré tout, les deux vecteurs de l’interventionnisme sont plutôt d’ordre économique et idéologique.

c) Les pétrodollars : soutien au prosélytisme religieux

Le discours sur le panarabisme étant moins porteur Kadhafi a réactivé la composante religieuse de sa rhétorique. Il paraît vouloir étendre son influence sur les États les plus fragiles pour ensuite les dominer de manière plus progressive et lente. Ainsi l’influence libyenne se développe vers trois ensembles géographiques : d’abord vers les pays du Sud. 
Naturellement le Tchad, pays proche, puis la République Démocratique du Congo, via la Centrafrique et même des ramifications en Afrique du Sud. La Libye aimerait un plus grand rapprochement avec le Niger et le Tchad car elle y a une volonté de regroupement hégémonique, qu’elle a tenté d’accomplir par des moyens militaires, mais qui désormais passe par les moyens économiques. Elle finance aussi des projets au Cameroun, au Gabon et au Nigeria. Ensuite vers l’Afrique de l’Ouest : la Sierra Leone et le Liberia , via le Niger, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. Afin de favoriser l’expansion musulmane elle essaie de créer une emprise islamique dans cet axe. La Mauritanie et le Sénégal restent assez méfiants face aux velléités d’expansion libyennes. Enfin, vers l’Afrique de l'Est (notamment en Somalie) malgré une concurrence avec l’Égypte et des réticences de certains pays comme le Soudan.
Il convient de rappeler que la situation économique libyenne est liée naturellement aux ressources, mais aussi aux choix politique du régime. Le pétrole est à la fois la richesse et l’arme de la Libye. La production se situe entre 1,3 à 1,7 million de barils/jour (11ème rang mondial) qu'elle ambitionne de porter à 3 millions b/j à l'horizon 2010. Les réserves estimées à environ 43 milliards de barils. Ce pétrole représente 95% des exportations et un tiers du PNB. Outre l’achat d’armes, la manne pétrolière autorise de grands travaux lancés au nom de la diversification de l’économie. Le pays possède des réserves de gaz de 1.500 milliards de m3 pour une production de 2.600 millions de pieds cubes par jour.
Le pays n’a que des échanges économiques limités en termes de volume et de finances avec l’Afrique. Ce mobile ne joue donc qu’un rôle secondaire, voir mineur, dans la politique d’influence libyenne. En outre, le développement économique du pays est freiné par l’étroitesse économique et le manque de main d’œuvre. L’appel à l’immigration est donc indispensable. On compterait près de 50% de main d’œuvre étrangère venant d’Afrique, du Maghreb et d’Asie. Cet afflux de main d’œuvre est un moyen de pression considérable sur les pays d’origine économiquement dépendants des devises de leurs immigrés et menaces de déstabilisation politique en cas de retour massif de ces populations. La Libye oscille entre répression et tolérance à l’égard de cette population. En effet, un rapport de l’ONG Human Rights Watch du 12 septembre 2006 intitulé « Endiguer la marée : exactions à l’encontre des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés » dénonce les traitements infligés aux ressortissants subsahariens par les autorités libyennes. Pour justifier la répression les Libyens reprochent aux étrangers d’être responsables de la progression de la criminalité et de la propagation de certaines maladies (notamment le Sida).
Kadhafi utilise donc ses moyens financiers pour aider à l’islamisation du continent notamment par le canal d’une organisation la Daawa Islamiyya (la Pastorale islamique) qui fait du prosélytisme religieux en distribuant des denrées alimentaires, des médicaments….dans les pays pauvres du Sahel mais aussi en construisant dans chaque capitale des mosquées et des instituts de formation d’imams locaux. Les méthodes sont d’une grande diversité : des dons ou prêts financiers aux régimes amis qui deviennent des obligés du Guide aux ONG soutenues par la Libye qui disposent de fonds très substantiels pour attribuer des aides réservées aux musulmans africains.


Kadhafi n’avait pas de politique panafricaine car il n’avait pas de stratégie pour le continent. Ses objectifs étaientassez flous et difficiles à cerner. Il n’avait pas renoncé à jouer un rôle primordial en Afrique, mais a dû abandonner son soutien officiel au terrorisme. Seul constante : son désir de vouloir nuire aux intérêts occidentaux.

mardi 23 août 2011

La politique africaine de la Libye (1/2)

Alors que le « roi des rois traditionnels d’Afrique » vacille et que certains analystes y voient un échec de l'Union africaine, nous nous proposons de republier un billet datant de mai 2010 sur la politique africaine du président Libyen. Espérant qu'il permettra de mieux comprendre l'impact de la chute du Guide sur le continent africain. Ce premier billet revient sur l'idéologie qui anime la politique étrangère de Kadhafi.


La Libye est le quatrième plus grand Etat d’Afrique en superficie (1 757 000 km²) mais 14 fois moins peuplée que l’Egypte, riche d’un pétrole (40% des réserves africaines, 2ème exportateur du continent) qui lui permet toujours de peser politiquement. Elle bénéficie d’une situation privilégiée sur la façade méditerranéenne mais ne néglige pas le poids de sa partie continentale. En effet, le désert s’étend sur la quasi-totalité du territoire et la circulation de nomades dans cet espace n’est pas sans répercussion sur les intentions géopolitiques du pays. Carrefour entre le Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie, auxquels on ajoute parfois la Mauritanie et le Soudan) et le Moyen Orient, la Libye est faite d’une profonde dualité culturelle : arabité et africanité. Dans un ouvrage publié en 1986 M. Kadhafi déclarait : « Les pays africains et les pays arabes connaissent une situation analogue, sinon identique, d’autant que plus de la moitié des peuples arabes vit en Afrique ?» Ainsi l’idéal de l’unité africaine se trouvait dès l’origine en filigrane de la politique africaine de la Libye. 



Ce billet propose de répondre à une interrogation principale : le colonel Kadhafi a-t-il une politique panafricaine ? Il convient pour y répondre de comprendre comment se manifeste la politique d’influence de la Libye en Afrique, vers quels pays est-elle dirigée, quels sont les vecteurs de cette influence ? Nous nous proposons d’analyser la portée idéologique de cette politique puis les vecteurs de l’influence libyenne sur le continent noir.


I.Une politique éminemment idéologique

a)Une vision unioniste et tribale


La politique d’influence libyenne est conçue et dirigée par le Colonel Kadhafi. La République arabe libyenne a pour principes fondamentaux : la liberté, l’union, la justice sociale et fait référence à l’Islam et à l’arabisme. L’idéologie kadhafiste se fonde aussi sur une volonté unioniste contre ce qu’il considère comme l’ennemi sioniste et contre l’Occident accusé d’avoir divisé le monde arabe. En 1974 il déclare : « la lutte contre Israël est éternelle » et en 1978 : « Nous sommes des unionistes depuis 1959, date de la constitution du mouvement des officiers unionistes libres. L’unité arabe est un destin, un objectif et en même temps une nécessité impérieuse. Nous avons peiné pour l’unité arabe et nous avons payé le prix depuis que nous étions étudiants en 1961, lorsque nous vivions sous les menaces de la persécution. L’unité est notre manière d’entrer en politique et elle en est la justification ». Dans les années 1969-1975 la Libye soutient de nombreux mouvements de libération dans le monde et tout particulièrement dans son voisinage africain : le Frolinat au Tchad, les Erythréens, les colonies portugaises, l’ANC en Afrique du Sud. Cet activisme pousse plusieurs pays d’Afrique à rompre leurs liens avec Israël. L’unionisme est une composante fondamentale de la politique de Kadhafi et un axe essentiel de son action politique.
En 1977, M. Kadhafi annonce la Jamahiriya (assemblée triviale) et publie le Livre Vert qui se veut une « troisième théorie universelle », différente du capitalisme et du marxisme, se fondant sur la société tribale bédouine, l’arabisme selon sa version nassérienne et la religion musulmane. H. Bleuchot considère que la tribu a joué un rôle fondamentale dans l’élaboration du Livre Vert : « la conception de Kadhafi (..) est celle-ci : le lien sociale véritable et naturel est celui du sang. L’individu est lié aux autres d’abord et avant tout à sa famille. La tribu est à son tour une famille élargie et la nation un groupe de tribus. Voilà la société naturelle. On a reconnu la société bédouine traditionnelle » .
Kadhafi s’est voulu l’héritier de Nasser et a voulu porter l’arabisme après la disparition de celui-ci en 1970. En effet, dans les années 1960 et 1970 on observe un grand rayonnement de la pensée nassérienne. Pourtant le moteur de la vision unioniste de Kadhafi diffère de celui de Nasser pour qui le projet d’unité était beaucoup moins utopique et correspondait davantage à des motifs stratégiques d’incarnation du leadership arabe . Djaziri paraphrase Sivan en considérant que le projet unitaire kadhafien comme un mythe politique arabe comme l’est l’islamisme . Les tentatives d’union qu’il proposera avec la Tunisie, le Maroc, l’Egypte et d’autres pays ne sont pourtant pas des succès (Soudan-Egypte en 69 , Egypte-Syrie en 71, Egypte en 72, Tunisie en 1974, Syrie en 1980, Tchad en 1981, Maroc en 1984, Soudan en 90). Citons également une tentative d’union régionale : la MENA (Middle East and North Africa). Elle obéit sur le plan régional à une logique d’emboitement de centres (capables d’exercer une influence politique, économique, démographique ou religieuse au niveau régional comme l’Arabie Saoudite, l’Egypte, l’Iran, la Turquie et Israël) et de périphéries (inégalement intégrées au système mondial dont fait partie la Libye). En effet, les économies de la MENA restent dans l’ensemble marginalisées, périphériques et peu compétitives. Ainsi, le PIB de la Ligue arabe avec 870 milliards de dollars en 2005 est inférieur à celui de l’Espagne . Aucune puissance régionale ne parvient à fédérer la région. Plusieurs logiques partagent ces pays : l’unité arabe avec la création en 1945 de la Ligue arabe encore fragile ; l’OPAEP (Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole) qui s’est effondrée dans les années 1980 ; l’Union du Maghreb arabe créée en 1989 mais paralysée par les tensions régionales (Sahara Occidentale) ; le Gafta ou Great Arab Free Trade Area qui réunit 17 membres de la Ligue arabe sur 22 et entré en vigueur en 2005 mais qui pâtit de la faiblesse des échanges dans la zone ; l’Organisation de la Conférence islamique elle aussi ralentit par les rivalités interétatiques.

Actuellement le mouvement panarabe est fortement battu en brèche par la montée récente de l’islamisme. L’arabisme, l’idéologie officielle des pouvoirs en place, a perdu de son potentiel révolutionnaire.

Vidéo : Mouammar Kadhafi à propos de l'influence de Nasser et du conflit au Proche-Orient



b)La promotion d’un islam réformiste


Kadhafi est partisan d’un islam réformiste et surveille la menace représentée par les mouvements islamistes notamment celui des Frères musulmans. La Libye fait néanmoins partie de l’Organisation de la conférence islamique. Ses thèses socialistes trouvent, selon lui, leurs fondements dans le Coran. Cet islam socialiste est théorisé dans le livre vert. Ces oppositions tendent à isoler la Libye des Etats défenseurs d’un islam orthodoxe notamment l’Arabie Saoudite, qui est allée jusqu'à financer les projets américains de déstabilisation du régime. Le guide joue des affrontements entre chiites et sunnites en critiquant le régime saoudien qui « vise les chiites et complote contre le Hezbollah, la fierté de l’islam, des Arabes et de la résistance contre Israël ». Le 31 mars 2007 le Guide a même appelé dans un discours prononcé au Niger en présence des chefs de tribus Touareg, à l’établissement d’un second Etat fatimide chiite en Afrique du Nord, sur le modèle de l’Empire fatimide (10ème- 13ème siècle) qui regroupait l’Afrique du Nord, l’Egypte et une partie du Croissant fertile. Cependant les Saoudiens se sont réconcilier au Sommet de Doha (1er avril 2009) avec les Libyens mais une lutte d’influence se ressent toujours entre la Libye, l’Arabie Saoudite et même l’Iran.

c)Une constante : l’hostilité à l’égard de l’Occident


Le « Guide » libyen n'hésite pas à user et abuser d'une rhétorique populiste anti-blanc ou anti-occidentale et se faire passer ainsi pour le champion de la lutte contre le néocolonialisme. En cela, il trouve des opportunités lorsqu'un pays africain a des différents avec son ancienne métropole (Côte d'Ivoire ou Zimbabwe par exemple).
Son interventionnisme sur les différentes scènes internationales a toujours traduit une volonté de réduire l’influence occidentale et de faire progresser ses objectifs unitaires. Les positions propalestinnienne du leader libyen l’ont très vite opposé aux Etats-Unis et à Israël. A la suite d’un processus de reconnaissance et de recherche d’acceptabilité internationale, l’ONU et l’Union européenne ont levé leurs sanctions en septembre 2003, et le 15 mai 2006 les Etats-Unis ont retiré la Libye de leur liste des états terroristes. Mais il faut attendre juillet 2007 et la résolution de l’affaire des infirmières bulgares et fin 2008 l’indemnisation des victimes des attentats aériens pour que le Guide trouve un semblant de respectabilité.

A lire :
- Kadhafi l'Africain par Moussa Diop pour RFI
- "Les amis africains de Kadhafi" par Jeffrey Gettleman (Courrier International)
- "L’Afrique et Kadhafi : enjeux économiques et financiers" Les Afriques

vendredi 19 août 2011

Somalie : le conflit accentue la famine

Le New York Times proposait dans son édition du 16 août (ICI), deux cartes pour comprendre la famine, qui touche aujourd'hui une partie de la Corne de l'Afrique. On y apprend que dans les régions les plus touchées le prix des céréales est à 260% plus cher qu'en 2010.

mercredi 17 août 2011

Crimes de guerre en Somalie : pas de responsable, tous responsables

Signalons la sortie du denier rapport (15 août 2011) de Human Rigts Watch consacré aux crimes de guerre Somalie : "“You Don’t Know Who to Blame”: War Crimes in Somalia". Le rapport est consultable ICI
Le communiqué de presse : ICI


D'après ce rapport tant les troupes de l'Amisom que les troupes gouvernementales et les insurgés d'Al Shabaab, ont commis des crimes de guerre et tué des civils. Tous coupables d'avoir recouru «à l’artillerie de façon indiscriminée dans la capitale Mogadiscio, entraînant des pertes civiles». Le rapport accuse également l’Éthiopie et le Kenya de soutenir des milices. Il revient sur les abus commis par la police kenyane et les crimes de bandits sur les réfugiés somaliens au Kenya.

lundi 15 août 2011

Hillary Clinton sur la famine en Somalie du Sud

Le 11 août dernier, Hillary Rodham Clinton, revenait sur la famine en Somalie et le rôle des Etats-Unis, dans une interview de Scott Pelley pour CBS.


QUESTION: What are your concerns about al-Shabaab in Somalia?

SECRETARY CLINTON: Well, I have many concerns about al-Shabaab. Al-Shabaab is a terrorist group. Al-Shabaab has been particularly brutal, even barbaric, to the people under their control, even before this famine has so devastated the Somali people. Al-Shabaab has imposed the worst kind of punishments for what they consider to be violations of their particularly perverted, distorted view of Islam. And so they have posed a threat to the United States and to our friends and neighbors. They were behind an attack in Kampala, Uganda because Uganda has been very important in our efforts to try to beat back al-Shabaab, and we’ve made progress, thanks to an organized African effort supported by the United States and others.

But what we’ve seen in recent weeks just beggars the imagination, Scott. I mean, it’s one thing to have a view of religion that is so brutal and totally at odds with anything that anyone else believes, but it’s something entirely different to prevent women and children from getting to a place where they could be saved, where the children could be fed, where women wouldn’t be watching their babies die in their arms. And we have seen no indication that al-Shabaab has a heart. This is Ramadan. If there were ever a time for a group that claims to be adhering to their own form of Islam – they apparently don’t know what Ramadan means, because they are doing nothing to assist the international community or even on their own to assist the people that they control.

And I’ve called on them and their leaders to show some mercy and some compassion. We can get back to squaring off against one another after we save the lives of women and children. So far, we’ve seen no evidence that they’re willing to do that.

QUESTION: Is the United States Government aiding the training of anti-Shabaab militias in Somalia?

SECRETARY CLINTON: Well, the United States Government helps to fund the AMISOM Mission, and the AMISOM Mission has made the difference between clawing back territory from al-Shabaab and losing all of Somalia to this terrorist group. So we have, for a long time, supported African troops under an African mission to work with the Transitional Federal Government that is in place in Mogadishu. And I have seen progress over the last two and a half years. I met with the head of the TFG in Kenya in August of 2009 and --

QUESTION: The Transitional Federal Government.

SECRETARY CLINTON: The Transitional Federal Government. Look, they have a long way to go. They are only learning on the job, so to speak, about how to govern. Somali-Americans have gone home to Mogadishu to try to help prevent this perversion that al-Shabaab practices from destroying their country.

But Somalia has been in turmoil and living with violence for a very long time now. We all remember, first, President George H. W. Bush and then President Clinton trying to help the Somali people in the early ’90s. And it was a very terrible incident with our soldiers being killed and mistreated. So the world, for a number of years, said, “Look, Somalia is just too violent, too complex. We cannot deal with it.” And at that time, there was a lot of – it was mostly an inter-clan conflict.

But what we’ve seen in the last several years is the rise of al-Shabaab, which proudly claims some affinity with al-Qaida, which tries to work with al-Qaida in the Arabian Peninsula, al-Qaida in the Islamic Maghreb. And so this then became a direct threat to us, not just a tragedy on the ground in Somalia, but a threat to not only the United States but the rest of the world.

QUESTION: In addition to the African Union forces, are we supporting or providing training or providing the money for training of other militias inside Somalia?

SECRETARY CLINTON: Well, I think we’re doing what we can to support Uganda and others who are part of the AMISOM Mission to do what they need to do to help not only beat back al-Shabaab, but to help train an indigenous Somali force to stand on its own against al-Shabaab.

QUESTION: And training is integral to that?

SECRETARY CLINTON: Of course it is. I mean, part of the challenge is making sure that people are trained to use equipment, to know how to engage in the kind of warfare to deal with the threat of suicide bombers. I mean, there’s a lot that has to be learned. It’s – it is certainly welcome that people would want to stand up and fight for their family and their country, but they need to be able to know how to do it.

QUESTION: When you see these pictures that are coming out of the famine emergency, what do you think?

SECRETARY CLINTON: Right. Well, it just breaks my heart because there is no doubt that some of this is the unfortunate consequence of weather patterns, of drought. But I would say most of it is because of bad policies and bad people, and that’s what really upsets me.

An act of God is an act of God. You deal with an earthquake, you deal with a tsunami. But there is so much more we could do to help in this, and we’ve tried to. We fund something called the Famine Early Warning System Network. It gave us an indication last year that a famine was on the way, and not just because of weather patterns but because of violence, because of conflict, because of inaccessible areas to be able to provide support. So we pre-position food. And we’ve worked with the Governments of Ethiopia and Kenya. We’ve certainly worked to support the UN and both American and international NGOs. But then you see these pictures and you know how many people are dying because they can’t get help where they are, because you have this terrorist group, al-Shabaab, that has no regard for the lives of the people in the areas they control.

QUESTION: How is the United States responding to the emergency?

SECRETARY CLINTON: Well, I think we are responding very effectively in the face of a very large challenge. We’re by far the largest donor, over $550 million that we have put into trying to help save lives. We’re not only providing emergency foodstuffs – particularly what is needed when you’re terribly malnourished and you can’t eat whole food; you have to have nutritional supplements – but also we’re helping with water, we’re helping with sanitation and healthcare, we’re trying to vaccinate people so that there are not epidemics in the refugee camps. We’re supporting Kenya, which has been an extremely gracious host to hundreds of thousands of Somalis who have come over their border over the last years because of the fighting there. And we’re working with the Government of Ethiopia.

But at the same time, Scott – and I want to emphasize this because the American people are very generous and we do respond to tragedies and natural disasters – we have to change the trajectory here. And so what we did from the very beginning of this Administration was to say, look, we are the best at responding to food disasters. The United States is the major supporter of the World Food Program. We’re there with food. We set up this early warning system. We are great at responding to disasters.

But we’ve got to do more to change the underlying conditions. So we started a program called Feed the Future, which represents the best thinking in agricultural productivity, in nutritional supplementation, in marketing of food, everything that goes into what makes for greater self-sufficiency. And Ethiopia and Kenya are two of the countries we’ve been working with over the last two and a half years. What are policies that need to be changed at the governmental level that encourage more food production?

And the last time there was a famine in Ethiopia – I’m old enough to remember, the pictures were very similar to what you’re showing – it affected 12 million people. This year, this famine is affecting about 5 million in the area. Now, 5 million is still an unacceptably high number, but it’s a big improvement because we’ve worked with both farmers and pastoralists to try to help them do more to sustain themselves – drought-resistant seeds, for example, better irrigation techniques and the like. So it’s not just that we’re responding to the emergency, first and foremost. We’re also trying to change the underlying conditions.

QUESTION: Last question: You mentioned the United States has contributed more than half a billion dollars --

SECRETARY CLINTON: Right.

QUESTION: -- to this emergency in --

SECRETARY CLINTON: Right.

QUESTION: -- the Horn of Africa. Some reasonable people would say this is a terrible, terrible tragedy, but we can’t afford that.

SECRETARY CLINTON: Well --

QUESTION: And I wonder what you would say to them.

SECRETARY CLINTON: I would say look at these pictures. And the one thing that Americans are so well known for, not only through our government but through our religious faith-based institutions, through private charities, through individual giving, is our heart. No matter what anybody says about us anywhere in the world, people have to admit that when there’s trouble anywhere, Americans are there. We’re there to help, and we’re there to do the very best we can to try to alleviate suffering. That’s part of the DNA of the American character. We certainly can afford to do what is necessary now.

Obviously, we’re all having to tighten our belts in this tough budgetary climate, but I have the great honor of heading the State Department and USAID, our two civilian agencies that – we don’t carry weapons; we carry food and we negotiate treaties, we try to help governments get better. It’s an insurance policy both against tragedy happening, but it’s also our way of responding when the inevitable – because given human nature, we’re going to face these kinds of terrible calamities – that we show who we are as a people. And I would hate to think that our country would ever back off from that.