mercredi 19 mai 2010
Une nouvelle approche pour la Somalie ?
A lire (ou relire) le rapport de Bronwyn E.Bruton (Council on Foreign relattions) : partant du constat du sentiment anti américaniste au sein de la population (et d'un rejet plus général de l’étranger) et qui pourrait accroitre le soutien à Al Qaïda, propose une nouvelle approche : le « désengagement constructif » en encourageant les fissions au sein des groupes fondamentalistes sans chercher à faire émerger un gagnant mais en signalant sa volonté de travailler avec n’importe quel groupe ou gouvernement qui émergerait s’il accepte de renoncer à : ses actes belliqueux à l’encontre des pays voisins, à son ambition djihadiste et accepte les organisations humanitaires occidentales sur le territoire somalien. De même au lieu de concentrer ses efforts sur la construction d’un Etat central il faut encourager les initiatives localisées de développement économique. L’expert le reconnaît cette stratégie est risquée mais les alternatives sont beaucoup plus dangereuses....
Le rapport : Somalia : a new approach à télécharger ICI
lundi 17 mai 2010
Des fleuves et des hommes : le Nil
A la suite de mon billet sur le partage des eaux du Nil hier : voici un extrait de l'excellente émission Des fleuves et des hommes sur le Nil.
Téléchargez la vidéo dans sa totalité ICI
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dimanche 16 mai 2010
Partage des eaux du Nil : l'Egypte refuse toute négociation
L’Ethiopie, l’Ouganda, le Rwanda et la Tanzanie ont le 14 mai à Entebbe (Ouganda) un nouvel accord sur le partage des eaux du Nil, malgré le boycott de l’Egypte et du Soudan, et en l’absence du Burundi et de la République démocratique du Congo (RDC), pays du Bassin du fleuve. Dans une déclaration, le Kenya a affirmé son soutien au nouveau texte, sans le signer pour le moment.
L’Egypte et le Soudan, qui estiment avoir des « droits historiques » sur le Nil, et qui sont les principaux bénéficiaires du dernier traité de partage des eaux datant de 1959, n’étaient pas présents à la cérémonie. Les deux pays avaient clairement exprimé depuis plusieurs mois leur hostilité à ce projet de nouvel accord cadre. « Les accords sur le partage des eaux du Nil sont sacrés et ne peuvent être remis en question car ils relèvent du principe de l’intangibilité des frontières », a déclaré Hossam Zaki. Le porte-parole du ministère égyptien des Affaires étrangère a estimé que l’accord signé entre quatre pays aux sources du Nil à Entebbe n’était pas contraignant pour l‘Egypte. La presse cairote de ce samedi révèle que les autorités égyptiennes ont commencé une campagne auprès des bailleurs de fonds internationaux pour empêcher la réalisation de tout projet pouvant réduire son quota. Avec 55 milliards et demi de mètres cube par an, l’Egypte dispose de plus de la moitié du débit du Nil.
Le traité actuel a été conclu en 1929 entre l'Egypte et la Grande-Bretagne coloniale, puis revu en 1959. Il accorde aux Egyptiens un quota de 55,5 milliards de m3 et de 18,5 mds aux Soudanais, soit au total 87% du débit du fleuve calculé à la hauteur d'Assouan, en Haute-Egypte. Le Caire dispose en outre d'un droit de veto sur les travaux en amont susceptibles d'affecter le débit du fleuve, comme des barrages, des stations de pompage ou des installations industrielles pour l'irrigation. Or 85% du Nil provient du territoire éthiopien. Addis-Abeba souhaiterait imposer sa vision de l’aménagement du Nil en empêchant Le Caire de réaliser ses grands projets hydriques et en le forçant à s’asseoir à la table des négociations.
Avec une population de 80 millions d'habitants -la plus importante du monde arabe- en forte croissance, les besoins en eau de l'Egypte dépasseront en 2017 ses ressources hydrauliques, selon des statistiques officielles. L’Egypte est donc confrontée à un stress hydrique, démographique et social. Le pays doit se tourner vers le Nil et réaliser des projets très couteux, qui ne seront pas sans incidence sur les autres nations en amont. Ainsi, le barrage d’Assouan (1971), entre l’Egypte et le Soudan suscite quelques tensions.
Pour Hani Raslan, du Centre al-Ahram d'études stratégiques du Caire, "la seule solution réside dans la coopération" autour notamment de 22 projets en matière d'énergie, d'irrigation ou d'économies d'eau examinés dans le cadre de l'Initiative du Bassin du Nil (IBN), qui regroupe tous les pays concernés. En coulisses, les diplomates égyptiens font observer que les pays africains de l'amont ont peu de chances de trouver les financements internationaux nécessaires pour de grands travaux sur le fleuve s'il n'y a pas consensus entre les pays du bassin. Le ministre égyptien de l'Eau et de l'Irrigation, Mohammed Allam, a quant à lui affirmé devant le Parlement que l'Egypte "se réserve le droit de prendre toutes les mesures pour défendre ses droits".
"Les Égyptiens se comportent avec les Africains comme ils reprochent aux Israéliens de le faire avec les Palestiniens: ils disent vouloir négocier, mais sans rien céder sur les questions épineuses", ironise un diplomate occidental au Caire.
Rappelons quelques éléments géopolitiques.
Avec ses 6671 km, le Nil est le plus long fleuve du monde. Il prend sa source dans la région des Grands Lacs. Son bassin couvre une superficie équivalente à six fois la France (3 030 700 km ²) et ses affluents s’étendent sur dix pays. L’irrigation et la production hydro-électrique constituent les principaux enjeux de ce fleuve.
Plus d’informations sur l’aspect juridique du partage des eaux : ICI
L’Egypte et le Soudan, qui estiment avoir des « droits historiques » sur le Nil, et qui sont les principaux bénéficiaires du dernier traité de partage des eaux datant de 1959, n’étaient pas présents à la cérémonie. Les deux pays avaient clairement exprimé depuis plusieurs mois leur hostilité à ce projet de nouvel accord cadre. « Les accords sur le partage des eaux du Nil sont sacrés et ne peuvent être remis en question car ils relèvent du principe de l’intangibilité des frontières », a déclaré Hossam Zaki. Le porte-parole du ministère égyptien des Affaires étrangère a estimé que l’accord signé entre quatre pays aux sources du Nil à Entebbe n’était pas contraignant pour l‘Egypte. La presse cairote de ce samedi révèle que les autorités égyptiennes ont commencé une campagne auprès des bailleurs de fonds internationaux pour empêcher la réalisation de tout projet pouvant réduire son quota. Avec 55 milliards et demi de mètres cube par an, l’Egypte dispose de plus de la moitié du débit du Nil.
Le traité actuel a été conclu en 1929 entre l'Egypte et la Grande-Bretagne coloniale, puis revu en 1959. Il accorde aux Egyptiens un quota de 55,5 milliards de m3 et de 18,5 mds aux Soudanais, soit au total 87% du débit du fleuve calculé à la hauteur d'Assouan, en Haute-Egypte. Le Caire dispose en outre d'un droit de veto sur les travaux en amont susceptibles d'affecter le débit du fleuve, comme des barrages, des stations de pompage ou des installations industrielles pour l'irrigation. Or 85% du Nil provient du territoire éthiopien. Addis-Abeba souhaiterait imposer sa vision de l’aménagement du Nil en empêchant Le Caire de réaliser ses grands projets hydriques et en le forçant à s’asseoir à la table des négociations.
Avec une population de 80 millions d'habitants -la plus importante du monde arabe- en forte croissance, les besoins en eau de l'Egypte dépasseront en 2017 ses ressources hydrauliques, selon des statistiques officielles. L’Egypte est donc confrontée à un stress hydrique, démographique et social. Le pays doit se tourner vers le Nil et réaliser des projets très couteux, qui ne seront pas sans incidence sur les autres nations en amont. Ainsi, le barrage d’Assouan (1971), entre l’Egypte et le Soudan suscite quelques tensions.
Pour Hani Raslan, du Centre al-Ahram d'études stratégiques du Caire, "la seule solution réside dans la coopération" autour notamment de 22 projets en matière d'énergie, d'irrigation ou d'économies d'eau examinés dans le cadre de l'Initiative du Bassin du Nil (IBN), qui regroupe tous les pays concernés. En coulisses, les diplomates égyptiens font observer que les pays africains de l'amont ont peu de chances de trouver les financements internationaux nécessaires pour de grands travaux sur le fleuve s'il n'y a pas consensus entre les pays du bassin. Le ministre égyptien de l'Eau et de l'Irrigation, Mohammed Allam, a quant à lui affirmé devant le Parlement que l'Egypte "se réserve le droit de prendre toutes les mesures pour défendre ses droits".
"Les Égyptiens se comportent avec les Africains comme ils reprochent aux Israéliens de le faire avec les Palestiniens: ils disent vouloir négocier, mais sans rien céder sur les questions épineuses", ironise un diplomate occidental au Caire.
Rappelons quelques éléments géopolitiques.
Avec ses 6671 km, le Nil est le plus long fleuve du monde. Il prend sa source dans la région des Grands Lacs. Son bassin couvre une superficie équivalente à six fois la France (3 030 700 km ²) et ses affluents s’étendent sur dix pays. L’irrigation et la production hydro-électrique constituent les principaux enjeux de ce fleuve.
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vendredi 14 mai 2010
Perspectives régionales d'une indépendance du Sud Soudan
Au début des années 90 aucun chercheur n'avait travaillé sur les conséquences des bouleversements qui touchaient la Corne de l'Afrique (chute de Siaad Barre en Somalie, chute Menguistu en Éthiopie, naissance d'un nouvel État : l'Érythrée, guerre civile à Djibouti). Peu de recherche aujourd'hui traite des conséquences régionales de la naissance d'un nouvel Ethan en Afrique. L'ICG nous propose un rapport sur le Sud Soudan: Regional Perspectives on the Prospect of Southern Independence.
Résumé :
South Sudan is just eight months away from a self-determination referendum that will likely result in its secession from the North. Much remains to be done to implement the outstanding elements of Sudan’s Comprehensive Peace Agreement (CPA), and time is running out. The agreement’s underlying aim of “making unity attractive” has failed, and most Southerners thus appear determined to choose independence. Neighbouring states are increasingly focused on the fragile circumstances in Sudan and the likelihood of a newly independent state in the region. Support from Sudan’s neighbours for the referendum process and respect for its result will be crucial to ensuring peace and stability in the country and the region.
Kenya, Uganda, Ethiopia, and Egypt are among the immediate regional states that matter most, as well as Eritrea and Libya. If a credible referendum is held in accordance with the CPA and the Interim National Constitution, and Khartoum endorses the process, recognition of a new Southern state should prove relatively uncomplicated for the region and CPA signatories more broadly. If, however, the process does not go according to plan – particularly if Khartoum attempts to manipulate, deny or delay the exercise or its result – regional states and institutions will need to consider how best to respond to ensure respect for the CPA and the right of self-determination and to avoid a new conflict. Not enough planning is being done in this regard.
Each border state has interests at stake and will be directly affected by either peaceful separation or a return to conflict. Despite differing views on unity, all are likely to accept the referendum on self-determination and honour its outcome, provided it goes ahead as planned. While the decision of the South Sudanese is paramount, strategic considerations will undoubtedly play a role in how each state responds if the process is disrupted. Responses will depend largely on circumstances and events, but an assessment of historical relationships, recent engagement and strategic interests sheds light on the positions of the key regional actors.
Having hosted and led the regional Intergovernmental Authority on Development (IGAD) peace process that yielded the CPA, Kenya has a particularly strong interest in seeing it implemented successfully. As the economic powerhouse in the region, it stands to benefit from the development of a considerable market and major infrastructure in the South, including as a conduit for oil. Kenya long managed to be pro-South without being anti-North, but diplomatic relations with Khartoum have shown signs of strain as its Southern leanings have become increasingly clear.
Uganda, the most unambiguous supporter of independence, seeks a stable buffer on its northern border, not least to ensure that the Lord’s Resistance Army (LRA) insurgency does not return to its doorstep. Trade has tripled in recent years with the South, which is now the largest importer of Ugandan goods. While the official policy is respect for the CPA and the will of the Southern people, some officials in Kampala are privately encouraging independence.
Egypt prefers unity and has arguably done more than Khartoum to make it attractive. It opposed including self-determination in the CPA talks, preferring instead to promote its own initiative premised on unity. It has recently redoubled diplomatic efforts to prevent partition, in part because it fears a new state – and an unstable one at that – could pose a threat both to regional stability and its precious supply of Nile water.
While its support to South Sudan is evident, Ethiopia has multiple interests to balance, so it is careful to toe a neutral line on independence. It provided military support to the SPLM in the 1990s, in part to counter Islamist elements in Khartoum whose destabilizing activities posed a threat to Ethiopian and regional security. Regional security remains its primary concern, given the volatile situation in Somalia, continued confrontation with Eritrea and its own domestic fragility. Addis can afford neither renewed war in Sudan nor to antagonise Khartoum, lest it find itself with another hostile neighbour. It supports the right of self-determination and will respect independence but is more likely to seek a common regional position than be out front on any difficult decisions if the process is derailed.
As with other foreign policy issues, Libya’s Sudan policy is driven personally by Muammar Qaddafi, and unsurprisingly, the outspoken Colonel has proven unpredictable on this issue. While he has several times pledged support for Southern independence, he has also cautioned Juba on the dangers of forging a new state. Eritrea’s position on Southern independence is likewise unreliable. During the last civil war, Asmara and its army provided critical backing to the SPLA/M (Sudan People’s Liberation Army/Movement) and other opposition groups in Sudan, supporting regime change in Khartoum. However, Isaias Afwerki’s recent actions indicate that his policy may be driven more by self-preservation than principle. Increasingly isolated in the region and beyond and in need of economic assistance, Asmara’s dwindling list of allies has led it to a rapprochement with Khartoum.
The referendum is to be held six months before the end of the CPA’s six-year Interim Period. If Southerners choose to go their own way, it is during the ensuing half-year window that any disputes over, as well the transition to, independence must be resolved. While pragmatic tones are emerging in Khartoum, attempts to delay or derail the exercise are not out of the question. Neither the SPLM nor its regional supporters want a unilateral declaration of independence (UDI). The SPLM is aware of the risks that would accompany it and is working hard to avoid such a scenario. But if pushed into a corner, the possibility of UDI is very real.
If either side abrogates the CPA, a return to conflict is likely and would undoubtedly affect the region and draw in some of its militaries. This must be avoided. Regional actors will face a delicate task in calibrating their response if the referendum is denied or its result contested, including the possibility of extending recognition to the South. The broader international community will seek to adjust its response in light of African opinion. Policy coherence between IGAD and the African Union (AU) is crucial. IGAD’s members will likely be the first to make any recommendations regarding Southern Sudan’s post-referendum status, but ensuring AU participation in, and ultimate backing of, that policy is crucial if an independent South is to secure maximum legitimacy. The weight of the AU – an instinctively pro-unity institution – and the importance of its recognition cannot be ignored. The AU High-Level Implementation Panel (AUHIP) can play a leading role in lining up the body’s 53 member states in support of realities on the ground.
Regional states must prepare for South Sudan’s possible independence by engaging Khartoum and Juba on practicalities of the referendum and peaceful implementation of its outcome. This includes insistence per the March 2010 IGAD summit communiqué calling for the referendum commissions to be established by May 2010 and reiterating firm support for the referendum timeline. Preparations should include clear modalities for extending official recognition to the South if it votes for independence and developing policy responses to alternative scenarios, including UDI. In the event of disputes over the referendum or its result, regional states should engage the AUHIP and IGAD to ensure the right of self-determination is fully respected and modalities for implementation of its outcome are agreed.
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mercredi 12 mai 2010
La Bretagne en première ligne dans la formation pour prévenir le risque de prise d'otages (actualisé)
L'association Otages du Monde a eu l'excellente (et indispensable) initiative d'organiser une formation pour préparer les humanitaires bretons des petites et moyennes associations qui partent dans les régions à risques d'Afrique subsaharienne dans le cadre d'actions humanitaires.
La formation est destinée aux Bretons pas par sectarisme je vous rassure mais parce que la Bretagne est une région très active dans le domaine de la Solidarité Internationale. Ainsi l’universitaire rennais Jean Ollivro a montré « la formidable dynamique de la solidarité dans notre région ». Les estimations réalisées sur le tissu associatif breton évaluent le nombre d’organisation humanitaire à près de 1000, faisant de la Bretagne, en valeur relative, la deuxième région française par le nombre d’associations de solidarité internationale.
Cette formation se tiendra à Saint-Ségal (29), près de Châteaulin avec le soutien du conseil général du Finistère et du conseil régional de Bretagne, les 5 et 6 novembre 2010. Les modalités d'inscription et les détails de la formation seront dévoilés lors d'un conférence de presse le 4 juin prochain.
Je devrais pour ma part participer à la formation avec une présentation du contexte géopolitique des régions africaines dans lesquelles vont se rendre les stagiaires.
Informations :
Contacter Martine GAUFFENY au 06 75 76 09 39
Site : Otages du Monde
Programme complet de la formation : ICI
Soures : Otages du Monde
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mardi 11 mai 2010
Révision de la Constitution djiboutienne
A Djibouti, la Constitution du 15 septembre 1992 a été révisée pour la troisième fois le 19 avril.
Après son adoption par la seule Assemblée Nationale, par un vote unanime de 59 des 65 députés, la LOI CONSTITUTIONNELLE N°92/AN/10/6ème L a été promulguée, le 21 avril 2010, par Ismaïl Omar Guelleh.
Cette troisième révision n’est pas anodine. Elle inscrit quelques progrès – par exemple, l’abolition de la peine de mort et l’institution d’un médiateur -, mais elle lève également le verrou de la limitation du nombre de mandats présidentiels, pour permettre au Chef de l’Etat en exercice de briguer un troisième mandat en 2011.
La révision constitutionnelle fixe également un âge limite de 75 ans pour les candidats à la présidence et réduit le mandat présidentiel de six à cinq ans.
En outre, l'article 1er de la Constitution stipule désormais que "l'Islam est la religion de l'Etat" -une disposition qui figurait auparavant dans le préambule de la Constitution- un Sénat est institué, et le cumul de la fonction de député avec un poste ministériel interdit.
L'opposition, qui avait boycotté le dernier scrutin législatif en 2008 et n'est pas représentée à l'Assemblée, a condamné cette réforme.
Ancienne colonie française, Djibouti est majoritairement peuplé d'Afar et d'Issas. Les pouvoirs sont répartis entre ces groupes par la Constitution. Lors de l'élection présidentielle d'avril 2005, Ismael Omar Guelleh était seul candidat à la succession et avait été réélu, l'opposition ayant appelé au boycott.
Après son adoption par la seule Assemblée Nationale, par un vote unanime de 59 des 65 députés, la LOI CONSTITUTIONNELLE N°92/AN/10/6ème L a été promulguée, le 21 avril 2010, par Ismaïl Omar Guelleh.
Cette troisième révision n’est pas anodine. Elle inscrit quelques progrès – par exemple, l’abolition de la peine de mort et l’institution d’un médiateur -, mais elle lève également le verrou de la limitation du nombre de mandats présidentiels, pour permettre au Chef de l’Etat en exercice de briguer un troisième mandat en 2011.
La révision constitutionnelle fixe également un âge limite de 75 ans pour les candidats à la présidence et réduit le mandat présidentiel de six à cinq ans.
En outre, l'article 1er de la Constitution stipule désormais que "l'Islam est la religion de l'Etat" -une disposition qui figurait auparavant dans le préambule de la Constitution- un Sénat est institué, et le cumul de la fonction de député avec un poste ministériel interdit.
L'opposition, qui avait boycotté le dernier scrutin législatif en 2008 et n'est pas représentée à l'Assemblée, a condamné cette réforme.
Ancienne colonie française, Djibouti est majoritairement peuplé d'Afar et d'Issas. Les pouvoirs sont répartis entre ces groupes par la Constitution. Lors de l'élection présidentielle d'avril 2005, Ismael Omar Guelleh était seul candidat à la succession et avait été réélu, l'opposition ayant appelé au boycott.
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lundi 10 mai 2010
Niger : calendrier de transition
Le porte-parole du Conseil suprême pour la restauration de la démocratie, à fixer la durée de la transition à douze mois à compter de son arrivée au pouvoir le 18 février 2010, conformément à la proposition du Conseil consultatif national.
Rappelons que le 4 août 2009 une nouvelle Constitution qui renforçait les pouvoirs du président déchu Tanja et lui accordait au moins trois ans de plus à la tête du pays avait été voté par référendum. La convocation des législatifs faisait parti des dispositions de cette nouvelle Constitution. Ce référendum controversé, boycotté par l’opposition et décrié par la Communauté internationale, s’etait tenu après que le Président Tandja ait dissout tour à tour le parlement puis la Cour constitutionnelle et modifié la loi électorale. Les élections anticipées s'étaient tenues pour tous les sièges de l'Assemblée nationale. 51,27% de participation.
Victoire du Mouvement national pour la société du développement (MNSD) (75 sièges sur 112).
Le 18 février 2010, le président Tandja a été renversé par un coup d’Etat militaire. Les militaires qui ont pris le pouvoir ont institué un « Conseil suprême pour la restauration de la démocratie » (CSRD), présidé par le Chef d’escadron Salou DJIBO, désormais chef de l’Etat (photo). Les premières mesures ont été de suspendre la Constitution et de dissoudre les institutions qui en découlaient.
Le CSRD a annoncé trois objectifs principaux : assainir la situation (lutte contre la corruption), réconcilier les Nigériens et restaurer la démocratie. Les membres du CSRD et du gouvernement se sont engagés à ne pas se présenter aux futures élections présidentielles.
précédent billet ICI
Rappelons que le 4 août 2009 une nouvelle Constitution qui renforçait les pouvoirs du président déchu Tanja et lui accordait au moins trois ans de plus à la tête du pays avait été voté par référendum. La convocation des législatifs faisait parti des dispositions de cette nouvelle Constitution. Ce référendum controversé, boycotté par l’opposition et décrié par la Communauté internationale, s’etait tenu après que le Président Tandja ait dissout tour à tour le parlement puis la Cour constitutionnelle et modifié la loi électorale. Les élections anticipées s'étaient tenues pour tous les sièges de l'Assemblée nationale. 51,27% de participation.
Victoire du Mouvement national pour la société du développement (MNSD) (75 sièges sur 112).
Le 18 février 2010, le président Tandja a été renversé par un coup d’Etat militaire. Les militaires qui ont pris le pouvoir ont institué un « Conseil suprême pour la restauration de la démocratie » (CSRD), présidé par le Chef d’escadron Salou DJIBO, désormais chef de l’Etat (photo). Les premières mesures ont été de suspendre la Constitution et de dissoudre les institutions qui en découlaient.
Le CSRD a annoncé trois objectifs principaux : assainir la situation (lutte contre la corruption), réconcilier les Nigériens et restaurer la démocratie. Les membres du CSRD et du gouvernement se sont engagés à ne pas se présenter aux futures élections présidentielles.
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dimanche 9 mai 2010
Côte d’Ivoire : sécuriser le processus électoral
Synthèse et recommandations de l'International Crisis Group :
La Côte d’Ivoire est encore loin d’une élection présidentielle déjà reportée à six reprises. Deux mois après la dissolution par le président Gbagbo de la Commission électorale indépendante (CEI) et du gouvernement, la préparation de cette élection est en panne et le processus qui doit y conduire est déjà porteur de risques de violences. La présence sur le terrain de groupes armés et de milices, combinée à la résurgence dans le débat politique du concept d’ivoirité et à une situation économique difficile, constitue un environnement explosif qui menace la stabilité de ce pays clef de l’Afrique de l’Ouest. Si les responsables politiques ne se décident pas immédiatement à accélérer le rythme du processus électoral et à abandonner les discours incendiaires ; si l’ONU et les autres partenaires étrangers de la Côte d’Ivoire ne mettent pas rapidement en place les mécanismes politiques et sécuritaires à même de prévenir la violence, le processus de paix ivoirien risque de dérailler avec des conséquences graves pour la Côte d’Ivoire et ses voisins.
Rappel : La guerre civile ivoirienne a été déclenchée en septembre 2002 quand une fraction de l’armée a tenté de faire un coup d’Etat. Ce putsch a échoué. Mais ses auteurs ont réussi à prendre le contrôle de la moitié nord du pays. Rejoints par de jeunes intellectuels dirigés par l’ancien responsable syndical estudiantin, Guillaume Soro, ils ont souligné dans leur discours que les ressortissants du Nord étaient traités comme des citoyens de seconde classe. Une situation de conflit armé larvé s’est poursuivi jusqu’à la signature de l’Accord politique de Ouagadougou (APO) en mars 2007, qui a considérablement apaisé la situation. Cependant, depuis le milieu de l’année 2009, les tensions ont ressurgi autour du processus électoral et de la question de la nationalité.
Les manifestations qui ont suivi l’annonce de la double dissolution du 12 février 2010 sont la preuve concrète de la résurgence de ces tensions. Organisées par l’opposition, elles ont fait sept morts et plusieurs dizaines de blessés. A Gagnoa, les forces de l’ordre ont tiré à balles réelles sur des manifestants. De tels incidents pourraient se reproduire, si les responsables politiques ne trouvent pas rapidement un compromis pour remettre en route la machine électorale. Mais plus que ce compromis particulier, ils doivent revenir au climat pacifié et à l’esprit de concertation qui a prévalu durant les mois qui ont suivi la signature de l’APO.
Le seul acquis de l’élection à venir est l’existence d’une liste électorale issue de la phase d’enrôlement. Cette phase a permis d’identifier plus de 6,3 millions d’électeurs potentiels. Après une opération de vérification, 5,3 millions d’électeurs ont été autorisés à figurer sur la liste provisoire. Le reste a été reversé sur une seconde liste car leur nationalité n’a pas pu être vérifiée. La phase suivante dite du contentieux a provoqué une dispute entre le parti au pouvoir et l’opposition. Ce désaccord a conduit à la dissolution de la CEI et à un blocage du processus. Une nouvelle CEI a certes été mise en place fin février. Elle s’est remise au travail mais n’a toujours pas défini clairement et totalement les modalités d’une nouvelle période de contentieux, devant servir à l’élaboration d’une liste électorale définitive. De même, elle reste muette sur le plan global pour la distribution des cartes d’électeurs, du matériel électoral et pour la centralisation des résultats qu’elle doit pourtant élaborer.
Parce qu’elle lui est défavorable et qu’elle comporterait de nombreux « étrangers », le camp présidentiel entend revenir sur l’acquis que constitue la liste des 5,3 millions d’électeurs en procédant à son « audit ». Or, cette liste a été réalisée sur la base d’un mode opératoire consensuel validé par l’ensemble des partis politiques. Elle a en outre été implicitement validée par le Représentant du Secrétaire général de l’ONU en Côte d’Ivoire. Elle ne peut donc être remise en cause. Les partisans du président font en outre du désarmement de l’ex-rébellion des Forces Nouvelles (FN) un préalable à la tenue de la présidentielle. Cette position maximaliste est difficilement acceptable par l’opposition et doit être revue à la baisse car elle met en danger l’esprit de concertation hérité de l’APO.
Le climat de paix relative qui a prévalu depuis la signature de cet accord est menacé, non seulement par l’intransigeance des uns et des autres, par les insultes à caractère personnel, mais aussi par le retour sur le devant de la scène du concept d’ivoirité et par l’utilisation des notions dangereuses d’ « étrangers » et de « vrais Ivoiriens ». L’emploi d’arguments d’exclusion ne peut que renforcer un sentiment de peur de l’autre, déjà très diffus dans la société ivoirienne et moteur puissant de la violence. Les responsables politiques doivent absolument s’abstenir d’en faire usage. Faute de quoi, ils prépareront le terrain soit d’un dérapage avant terme du processus, soit d’une élection aussi calamiteuse que celle de 2000.
L’utilisation de la xénophobie à des fins politique s’effectue sur fond de paix armée. Dans la zone contrôlée par l’ex-rébellion, le désarmement est toujours une promesse. A l’extrême ouest du pays, les milices pro-gouvernementales sont encore en place. Elles entretiennent un climat d’insécurité permanent et entravent le déroulement normal de la vie démocratique. Il est très difficile d’envisager une campagne électorale sereine dans cette région. A Abidjan, les groupements patriotiques et leurs propos xénophobes ont toujours pignon sur rue, entraînant en réaction la formation de groupe de jeunes militants de l’opposition, prêts pour une éventuelle riposte. On peut craindre qu’en cas de nouvelles manifestations de l’opposition, la capitale économique ne serve, une fois de plus, de théâtre d’affrontements à ces deux jeunesses antagonistes mais animées de la même peur et du même mépris de l’adversaire.
Les acteurs locaux et internationaux doivent se mettre d’accord sur un nouveau plan de sécurisation pour les élections. Ils doivent se servir de ce plan pour renforcer la confiance de la population et engager un dialogue avec les responsables politiques et administratifs ivoiriens. Le plan de sécurisation actuel est insuffisant car basé sur la promesse, sans cesse repoussée, d’une force mixte ivoirienne issue pour moitié des Forces de défense et de sécurité (FDS) et pour l’autre des FN. Cette force mixte, doit être appuyée par le contingent de l’ONUCI et la force française Licorne, qui disposent de capacités de police insuffisantes. Il appartient à la communauté internationale, de combler, le cas échéant, ces vides.
La communauté internationale a, jusqu’alors, fait le choix de la patience et de la prudence. La dissolution de la CEI et du gouvernement ainsi que les violences de février n’ont guère suscité de réactions de sa part. Elle n’a pas été non plus capable de tracer une ligne rouge que les acteurs ivoiriens ne doivent pas dépasser. Cette position timide est finalement peu en phase avec la gravité des enjeux. Plus généralement, la communauté internationale doit être plus prompte à désigner des responsables de violence et du blocage électoral. Le Conseil de sécurité de l’ONU qui doit réexaminer le mandat de l’ONUCI, le 31 mai prochain, doit sérieusement considérer la possibilité d’adopter des sanctions individuelles supplémentaires. Dans le passé, de telles sanctions ont fait la preuve de leur efficacité pour pacifier le climat.
RECOMMANDATIONS
Au président Laurent Gbagbo et à son parti:
1. Respecter à la lettre les dispositions de l’APO et de ses accords complémentaires, notamment celles par lesquelles les signataires se sont engagés à créer les conditions « d’élections libres, ouvertes, transparentes et démocratiques » et à entretenir « un esprit de dialogue permanent basé sur la confiance mutuelle ». En particulier, renoncer à l’utilisation d’un discours stigmatisant les « étrangers », les « ennemis de la Côte d’Ivoire » et consistant plus généralement à faire porter la responsabilité actuelle de la crise ivoirienne à des puissances étrangères et à certaines communautés ivoiriennes ou ouest-africaines.
2. Donner un signal clair de leur engagement à aller rapidement aux élections en abandonnant le préalable qui consiste à revoir complètement la liste des 5,3 millions. Minimiser les revendications concernant la restructuration de la CEI et la composition de ses 415 bureaux locaux.
3. Se démarquer clairement des organisations miliciennes. Ce démarquage passera dans un premier temps par une modification du règlement intérieur du Front populaire ivoirien (FPI) en interdisant à ses membres le cumul d’une position de responsabilité au sein du parti en même temps qu’un rôle de dirigeant dans une ou plusieurs de ces milices.
Au ministère de l’Intérieur :
4. Garantir la sécurité de l’ensemble des populations du Grand Ouest en y augmentant le nombre de membres des forces de l’ordre. Ces renforts doivent recevoir un ordre de mission précis afin de ne plus être passifs et d’appréhender ceux qui se rendent coupables de viols et de braquages. Ces mesures visent à faire baisser le niveau général de violence dans la région afin que les élections puissent s’y dérouler dans un climat pacifié.
5. S’abstenir de recourir à l’usage d’unités de sécurité comme le Centre de commandement des opérations de sécurité (CECOS), dédié à la répression du grand banditisme, pour encadrer des manifestations à caractère politique. Assurer en coordination avec la communauté internationale la formation d’unités des forces de sécurité rompues au travail de contrôle des foules. Donner aux forces de sécurité des ordres allant dans le sens d’une riposte graduée et appropriée face à d’éventuels troubles qui pourraient découler de ces manifestations. Sanctionner les éléments de ces forces qui auront recours aux tirs à balles réelles contre les foules non armées.
Au Premier ministre et secrétaire général des Forces Nouvelles (FN), Guillaume Soro :
6. Poursuivre les pressions sur les responsables politiques et militaires des FN pour accélérer le désarmement dans leur zone, afin de renforcer la paix et la confiance et d’enlever au camp présidentiel un éventuel argument lui permettant de retarder le processus électoral.
Aux Forces Nouvelles :
7. S’engager à faciliter le travail de déploiement du matériel électoral et la distribution des cartes d’électeurs en levant l’ensemble des barrages routiers lors de ces opérations qui doivent être conduites par la CEI et l’ONUCI. Associer des représentants de la CEI et de l’ONUCI aux réunions que les responsables des FN tiendront pour se concerter sur l’attitude à adopter vis-à-vis de l’organisation de l’élection dans leur zone.
Au Gouvernement Ivoirien :
8. Empêcher le mécontentement social de la population de se transformer en violences en renforçant la gouvernance avec pour objectif primordial une amélioration des conditions de vie, en garantissant un approvisionnement régulier en électricité et en eau potable.
9. Débloquer le budget nécessaire à la mise en place de la force mixte. Ce budget devra permettre de payer la solde des membres de cette force issue des FN et de les doter en matériel de transport et de communication.
10. Rendre public les grandes lignes du plan de sécurisation de l’élection une fois qu’il aura été élaboré par l’ONUCI, le Centre de commandement intégré (CCI) en collaboration avec la CEI.
A la Commission électorale indépendante (CEI) :
11. Produire une liste électorale définitive et consensuelle ainsi qu’un nouveau calendrier électoral. Etablir à partir de la liste définitive une carte complète des bureaux de vote et construire en partenariat avec l’ONUCI un plan d’ensemble pour la distribution des cartes d’électeurs, du matériel électoral et la centralisation des résultats. Formuler auprès de l’ONUCI une demande d’aide en matériel de transport la plus précise possible.
12. Etablir pour ces cadres un système de primes ou de sanctions financières liées à l’obtention de résultats concrets dans l’avancée des travaux préparatoires aux élections. Ce projet devra se faire en concertation avec le gouvernement ivoirien.
Aux partis politiques d’opposition :
13. Respecter le code de bonne conduite signé en avril 2008 et s’abstenir d’utiliser dans les discours publics et dans les médias un vocabulaire insultant vis-à-vis de l’adversaire.
A l’ONU et au Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies en Côte d’Ivoire :
14. Assurer la sécurité du processus électoral en :
a) Maintenant intact les effectifs de l’ONUCI sur le terrain et, si possible, en envoyant un contingent de police supplémentaire à l’ouest de la Côte d’Ivoire durant le déroulement de l’élection.
b) Aller à la rencontre de certaines autorités locales, notamment les maires des grandes communes populaires d’Abidjan qui ont une expertise unique du terrain qu’ils administrent depuis environ une décennie. Prendre en compte leurs avis et conseils.
c) Renforcer la sécurité du Premier ministre afin de prévenir toute tentative d’atteinte à son intégrité physique par des membres marginalisés de l’ex-rébellion.
15. Le Représentant du Secrétaire général doit faire un usage plus large de son mandat de certification et prendre une position plus ferme et plus explicite, en condamnant les dérapages répétés de la presse écrite et la partialité des médias publics audio-visuels.
16. Le Conseil de sécurité de l’ONU doit affirmer clairement son intention de prononcer des sanctions individuelles contre ceux qui bloqueraient le processus électoral, inciteraient à la violence ou profiteraient de leur position de commandement pour se rendre coupables de violences organisées durant le processus électoral.
Au facilitateur, Blaise Compaoré :
17. Appuyer sans relâche les pressions du Premier ministre sur l’appareil des FN pour que celui-ci commence un désarmement effectif.
18. Organiser à Ouagadougou, avant le début de la campagne, une réunion du Cadre permanent de concertation (CPC) durant laquelle les principaux responsables politiques se réengageront devant l’opinion ivoirienne et la communauté internationale à respecter le code de bonne conduite qu’ils ont signé en avril 2008.
Au Panel des sages de l’Union africaine :
19. Commencer le travail préparatoire pour l’envoi d’une mission à Abidjan qui aura pour priorité stratégique la prévention des violences électorales, en particulier en définissant les lignes rouges à ne pas franchir pendant l’ensemble de la période électorale, y compris toute incitation à la violence et toute tentative de manipulation ou de rejet des résultats, et en engageant un dialogue avec toutes les parties pour résoudre les litiges électoraux de manière pacifique.
A l’Union européenne :
20. Accélérer :
a) Les négociations en cours en vue de l’adoption d’une position commune de ses Etats membres. Cette position commune doit inclure la prise de sanctions individuelles en cas d’incitation à la violence ou de blocage manifeste du processus électoral.
b) Le délai d’exécution d’un projet mené avec les autorités ivoiriennes pour la remise en service d’un tribunal à Guiglo. Ce tribunal est indispensable pour juger les nombreux crimes commis dans le Moyen Cavally et pour créer dans cette région à haut risque un climat pacifié. L’Union européenne doit aider à la réinstallation de ce tribunal dans un délai d’un semestre et non de 24 mois comme initialement prévu.
A tous les représentants de la Communauté économique impliqués en Côte d’Ivoire :
21. Rappeler à tous les protagonistes de la crise ivoirienne que les mécanismes de la justice nationale et internationale sont disponibles pour poursuivre tous ceux qui seraient tentés d’activer la violence autour de la période des élections et qu’ils sont prêts à soutenir ces mécanismes.
La Côte d’Ivoire est encore loin d’une élection présidentielle déjà reportée à six reprises. Deux mois après la dissolution par le président Gbagbo de la Commission électorale indépendante (CEI) et du gouvernement, la préparation de cette élection est en panne et le processus qui doit y conduire est déjà porteur de risques de violences. La présence sur le terrain de groupes armés et de milices, combinée à la résurgence dans le débat politique du concept d’ivoirité et à une situation économique difficile, constitue un environnement explosif qui menace la stabilité de ce pays clef de l’Afrique de l’Ouest. Si les responsables politiques ne se décident pas immédiatement à accélérer le rythme du processus électoral et à abandonner les discours incendiaires ; si l’ONU et les autres partenaires étrangers de la Côte d’Ivoire ne mettent pas rapidement en place les mécanismes politiques et sécuritaires à même de prévenir la violence, le processus de paix ivoirien risque de dérailler avec des conséquences graves pour la Côte d’Ivoire et ses voisins.
Rappel : La guerre civile ivoirienne a été déclenchée en septembre 2002 quand une fraction de l’armée a tenté de faire un coup d’Etat. Ce putsch a échoué. Mais ses auteurs ont réussi à prendre le contrôle de la moitié nord du pays. Rejoints par de jeunes intellectuels dirigés par l’ancien responsable syndical estudiantin, Guillaume Soro, ils ont souligné dans leur discours que les ressortissants du Nord étaient traités comme des citoyens de seconde classe. Une situation de conflit armé larvé s’est poursuivi jusqu’à la signature de l’Accord politique de Ouagadougou (APO) en mars 2007, qui a considérablement apaisé la situation. Cependant, depuis le milieu de l’année 2009, les tensions ont ressurgi autour du processus électoral et de la question de la nationalité.
Les manifestations qui ont suivi l’annonce de la double dissolution du 12 février 2010 sont la preuve concrète de la résurgence de ces tensions. Organisées par l’opposition, elles ont fait sept morts et plusieurs dizaines de blessés. A Gagnoa, les forces de l’ordre ont tiré à balles réelles sur des manifestants. De tels incidents pourraient se reproduire, si les responsables politiques ne trouvent pas rapidement un compromis pour remettre en route la machine électorale. Mais plus que ce compromis particulier, ils doivent revenir au climat pacifié et à l’esprit de concertation qui a prévalu durant les mois qui ont suivi la signature de l’APO.
Le seul acquis de l’élection à venir est l’existence d’une liste électorale issue de la phase d’enrôlement. Cette phase a permis d’identifier plus de 6,3 millions d’électeurs potentiels. Après une opération de vérification, 5,3 millions d’électeurs ont été autorisés à figurer sur la liste provisoire. Le reste a été reversé sur une seconde liste car leur nationalité n’a pas pu être vérifiée. La phase suivante dite du contentieux a provoqué une dispute entre le parti au pouvoir et l’opposition. Ce désaccord a conduit à la dissolution de la CEI et à un blocage du processus. Une nouvelle CEI a certes été mise en place fin février. Elle s’est remise au travail mais n’a toujours pas défini clairement et totalement les modalités d’une nouvelle période de contentieux, devant servir à l’élaboration d’une liste électorale définitive. De même, elle reste muette sur le plan global pour la distribution des cartes d’électeurs, du matériel électoral et pour la centralisation des résultats qu’elle doit pourtant élaborer.
Parce qu’elle lui est défavorable et qu’elle comporterait de nombreux « étrangers », le camp présidentiel entend revenir sur l’acquis que constitue la liste des 5,3 millions d’électeurs en procédant à son « audit ». Or, cette liste a été réalisée sur la base d’un mode opératoire consensuel validé par l’ensemble des partis politiques. Elle a en outre été implicitement validée par le Représentant du Secrétaire général de l’ONU en Côte d’Ivoire. Elle ne peut donc être remise en cause. Les partisans du président font en outre du désarmement de l’ex-rébellion des Forces Nouvelles (FN) un préalable à la tenue de la présidentielle. Cette position maximaliste est difficilement acceptable par l’opposition et doit être revue à la baisse car elle met en danger l’esprit de concertation hérité de l’APO.
Le climat de paix relative qui a prévalu depuis la signature de cet accord est menacé, non seulement par l’intransigeance des uns et des autres, par les insultes à caractère personnel, mais aussi par le retour sur le devant de la scène du concept d’ivoirité et par l’utilisation des notions dangereuses d’ « étrangers » et de « vrais Ivoiriens ». L’emploi d’arguments d’exclusion ne peut que renforcer un sentiment de peur de l’autre, déjà très diffus dans la société ivoirienne et moteur puissant de la violence. Les responsables politiques doivent absolument s’abstenir d’en faire usage. Faute de quoi, ils prépareront le terrain soit d’un dérapage avant terme du processus, soit d’une élection aussi calamiteuse que celle de 2000.
L’utilisation de la xénophobie à des fins politique s’effectue sur fond de paix armée. Dans la zone contrôlée par l’ex-rébellion, le désarmement est toujours une promesse. A l’extrême ouest du pays, les milices pro-gouvernementales sont encore en place. Elles entretiennent un climat d’insécurité permanent et entravent le déroulement normal de la vie démocratique. Il est très difficile d’envisager une campagne électorale sereine dans cette région. A Abidjan, les groupements patriotiques et leurs propos xénophobes ont toujours pignon sur rue, entraînant en réaction la formation de groupe de jeunes militants de l’opposition, prêts pour une éventuelle riposte. On peut craindre qu’en cas de nouvelles manifestations de l’opposition, la capitale économique ne serve, une fois de plus, de théâtre d’affrontements à ces deux jeunesses antagonistes mais animées de la même peur et du même mépris de l’adversaire.
Les acteurs locaux et internationaux doivent se mettre d’accord sur un nouveau plan de sécurisation pour les élections. Ils doivent se servir de ce plan pour renforcer la confiance de la population et engager un dialogue avec les responsables politiques et administratifs ivoiriens. Le plan de sécurisation actuel est insuffisant car basé sur la promesse, sans cesse repoussée, d’une force mixte ivoirienne issue pour moitié des Forces de défense et de sécurité (FDS) et pour l’autre des FN. Cette force mixte, doit être appuyée par le contingent de l’ONUCI et la force française Licorne, qui disposent de capacités de police insuffisantes. Il appartient à la communauté internationale, de combler, le cas échéant, ces vides.
La communauté internationale a, jusqu’alors, fait le choix de la patience et de la prudence. La dissolution de la CEI et du gouvernement ainsi que les violences de février n’ont guère suscité de réactions de sa part. Elle n’a pas été non plus capable de tracer une ligne rouge que les acteurs ivoiriens ne doivent pas dépasser. Cette position timide est finalement peu en phase avec la gravité des enjeux. Plus généralement, la communauté internationale doit être plus prompte à désigner des responsables de violence et du blocage électoral. Le Conseil de sécurité de l’ONU qui doit réexaminer le mandat de l’ONUCI, le 31 mai prochain, doit sérieusement considérer la possibilité d’adopter des sanctions individuelles supplémentaires. Dans le passé, de telles sanctions ont fait la preuve de leur efficacité pour pacifier le climat.
RECOMMANDATIONS
Au président Laurent Gbagbo et à son parti:
1. Respecter à la lettre les dispositions de l’APO et de ses accords complémentaires, notamment celles par lesquelles les signataires se sont engagés à créer les conditions « d’élections libres, ouvertes, transparentes et démocratiques » et à entretenir « un esprit de dialogue permanent basé sur la confiance mutuelle ». En particulier, renoncer à l’utilisation d’un discours stigmatisant les « étrangers », les « ennemis de la Côte d’Ivoire » et consistant plus généralement à faire porter la responsabilité actuelle de la crise ivoirienne à des puissances étrangères et à certaines communautés ivoiriennes ou ouest-africaines.
2. Donner un signal clair de leur engagement à aller rapidement aux élections en abandonnant le préalable qui consiste à revoir complètement la liste des 5,3 millions. Minimiser les revendications concernant la restructuration de la CEI et la composition de ses 415 bureaux locaux.
3. Se démarquer clairement des organisations miliciennes. Ce démarquage passera dans un premier temps par une modification du règlement intérieur du Front populaire ivoirien (FPI) en interdisant à ses membres le cumul d’une position de responsabilité au sein du parti en même temps qu’un rôle de dirigeant dans une ou plusieurs de ces milices.
Au ministère de l’Intérieur :
4. Garantir la sécurité de l’ensemble des populations du Grand Ouest en y augmentant le nombre de membres des forces de l’ordre. Ces renforts doivent recevoir un ordre de mission précis afin de ne plus être passifs et d’appréhender ceux qui se rendent coupables de viols et de braquages. Ces mesures visent à faire baisser le niveau général de violence dans la région afin que les élections puissent s’y dérouler dans un climat pacifié.
5. S’abstenir de recourir à l’usage d’unités de sécurité comme le Centre de commandement des opérations de sécurité (CECOS), dédié à la répression du grand banditisme, pour encadrer des manifestations à caractère politique. Assurer en coordination avec la communauté internationale la formation d’unités des forces de sécurité rompues au travail de contrôle des foules. Donner aux forces de sécurité des ordres allant dans le sens d’une riposte graduée et appropriée face à d’éventuels troubles qui pourraient découler de ces manifestations. Sanctionner les éléments de ces forces qui auront recours aux tirs à balles réelles contre les foules non armées.
Au Premier ministre et secrétaire général des Forces Nouvelles (FN), Guillaume Soro :
6. Poursuivre les pressions sur les responsables politiques et militaires des FN pour accélérer le désarmement dans leur zone, afin de renforcer la paix et la confiance et d’enlever au camp présidentiel un éventuel argument lui permettant de retarder le processus électoral.
Aux Forces Nouvelles :
7. S’engager à faciliter le travail de déploiement du matériel électoral et la distribution des cartes d’électeurs en levant l’ensemble des barrages routiers lors de ces opérations qui doivent être conduites par la CEI et l’ONUCI. Associer des représentants de la CEI et de l’ONUCI aux réunions que les responsables des FN tiendront pour se concerter sur l’attitude à adopter vis-à-vis de l’organisation de l’élection dans leur zone.
Au Gouvernement Ivoirien :
8. Empêcher le mécontentement social de la population de se transformer en violences en renforçant la gouvernance avec pour objectif primordial une amélioration des conditions de vie, en garantissant un approvisionnement régulier en électricité et en eau potable.
9. Débloquer le budget nécessaire à la mise en place de la force mixte. Ce budget devra permettre de payer la solde des membres de cette force issue des FN et de les doter en matériel de transport et de communication.
10. Rendre public les grandes lignes du plan de sécurisation de l’élection une fois qu’il aura été élaboré par l’ONUCI, le Centre de commandement intégré (CCI) en collaboration avec la CEI.
A la Commission électorale indépendante (CEI) :
11. Produire une liste électorale définitive et consensuelle ainsi qu’un nouveau calendrier électoral. Etablir à partir de la liste définitive une carte complète des bureaux de vote et construire en partenariat avec l’ONUCI un plan d’ensemble pour la distribution des cartes d’électeurs, du matériel électoral et la centralisation des résultats. Formuler auprès de l’ONUCI une demande d’aide en matériel de transport la plus précise possible.
12. Etablir pour ces cadres un système de primes ou de sanctions financières liées à l’obtention de résultats concrets dans l’avancée des travaux préparatoires aux élections. Ce projet devra se faire en concertation avec le gouvernement ivoirien.
Aux partis politiques d’opposition :
13. Respecter le code de bonne conduite signé en avril 2008 et s’abstenir d’utiliser dans les discours publics et dans les médias un vocabulaire insultant vis-à-vis de l’adversaire.
A l’ONU et au Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies en Côte d’Ivoire :
14. Assurer la sécurité du processus électoral en :
a) Maintenant intact les effectifs de l’ONUCI sur le terrain et, si possible, en envoyant un contingent de police supplémentaire à l’ouest de la Côte d’Ivoire durant le déroulement de l’élection.
b) Aller à la rencontre de certaines autorités locales, notamment les maires des grandes communes populaires d’Abidjan qui ont une expertise unique du terrain qu’ils administrent depuis environ une décennie. Prendre en compte leurs avis et conseils.
c) Renforcer la sécurité du Premier ministre afin de prévenir toute tentative d’atteinte à son intégrité physique par des membres marginalisés de l’ex-rébellion.
15. Le Représentant du Secrétaire général doit faire un usage plus large de son mandat de certification et prendre une position plus ferme et plus explicite, en condamnant les dérapages répétés de la presse écrite et la partialité des médias publics audio-visuels.
16. Le Conseil de sécurité de l’ONU doit affirmer clairement son intention de prononcer des sanctions individuelles contre ceux qui bloqueraient le processus électoral, inciteraient à la violence ou profiteraient de leur position de commandement pour se rendre coupables de violences organisées durant le processus électoral.
Au facilitateur, Blaise Compaoré :
17. Appuyer sans relâche les pressions du Premier ministre sur l’appareil des FN pour que celui-ci commence un désarmement effectif.
18. Organiser à Ouagadougou, avant le début de la campagne, une réunion du Cadre permanent de concertation (CPC) durant laquelle les principaux responsables politiques se réengageront devant l’opinion ivoirienne et la communauté internationale à respecter le code de bonne conduite qu’ils ont signé en avril 2008.
Au Panel des sages de l’Union africaine :
19. Commencer le travail préparatoire pour l’envoi d’une mission à Abidjan qui aura pour priorité stratégique la prévention des violences électorales, en particulier en définissant les lignes rouges à ne pas franchir pendant l’ensemble de la période électorale, y compris toute incitation à la violence et toute tentative de manipulation ou de rejet des résultats, et en engageant un dialogue avec toutes les parties pour résoudre les litiges électoraux de manière pacifique.
A l’Union européenne :
20. Accélérer :
a) Les négociations en cours en vue de l’adoption d’une position commune de ses Etats membres. Cette position commune doit inclure la prise de sanctions individuelles en cas d’incitation à la violence ou de blocage manifeste du processus électoral.
b) Le délai d’exécution d’un projet mené avec les autorités ivoiriennes pour la remise en service d’un tribunal à Guiglo. Ce tribunal est indispensable pour juger les nombreux crimes commis dans le Moyen Cavally et pour créer dans cette région à haut risque un climat pacifié. L’Union européenne doit aider à la réinstallation de ce tribunal dans un délai d’un semestre et non de 24 mois comme initialement prévu.
A tous les représentants de la Communauté économique impliqués en Côte d’Ivoire :
21. Rappeler à tous les protagonistes de la crise ivoirienne que les mécanismes de la justice nationale et internationale sont disponibles pour poursuivre tous ceux qui seraient tentés d’activer la violence autour de la période des élections et qu’ils sont prêts à soutenir ces mécanismes.
samedi 8 mai 2010
La politique africaine de la Libye (2/2)
II.Des actions d’une grande diversité sans réelle cohérence
Marginalisé dans le monde arabe, M. Kadhafi s’est tourné vers l’Afrique, se déclarant africain avant tout. C'est sa façon de jouer un rôle à l’échelle du continent et de tenter d'exister sur la scène internationale. Cette stratégie s’est déployée de manière chaotique, mais la pénétration de l’Islam en Afrique est aujourd’hui incontestable.
a) L’échec de l’action militaire directe
L’intégration par la conquête militaire a été sans aucun doute le premier objectif de Kadhafi. En témoigne la conquête et l’occupation temporaire du Tchad au début des années 1980 qui a tourné au fiasco militaire pour les forces armées libyennes. Cette incursion a obéi à une analyse stratégique, Kadhafi voulait se protéger d’éventuelles incursions soudanaises en agrandissant son territoire au Sud dans la bande d’Aozou. Cet échec n’a pas fait renoncer le Président libyen à sa volonté de domination militaire, pas plus que le raid punitif américain qui a tué son fils et détruit sa résidence, mais il l’a fait plus prudemment : il est arrivé accompagné de plus de 3 000 soldats en 1997 au Tchad où il n’est pas resté plus d’une semaine, il a installé en 1997 et 1998, des bases militaires en Centrafrique et à Gbadolite au Nord de la République Démocratique du Congo pour soutenir la rébellion, positions qu’il a abandonnées après une nouvelle défaite militaire cuisante près de Gbadolite. La Libye n’avait pas vraiment les moyens de ses ambitions et à perdu, avec la chute de l’URSS, le principal soutien de ses actions en Afrique.
Elle a tenté de repositionner sa politique étrangère en utilisant la médiation plutôt que l’intervention militaire pour poursuivre sa politique d’influence sur le continent. Ainsi on peut penser que la Libye est passé d’une stratégie de puissance , à une stratégie d’influence assimilée au Soft Power qui « consiste à tenter d’abord d’obtenir par la persuasion séductrice les résultats que l’on pourrait aussi atteindre par la force. Il s’agit d’amener les autres à adhérer à des normes et des institutions qui incitent ou induisent au comportement désiré. Le Soft Power peut prendre appui sur la capacité d’établir l’ordre du jour de manière à façonner les préférences des autres » .
b) Un leadership politique qui peine à s’imposer
La politique internationale du Guide résulte d’une ambition personnelle et d’une volonté de domination sur l’Afrique. Le régime cherche, notamment dans le cadre de l’Union Africaine, à fédérer les États africains. D’ailleurs c’est en partie sous l’impulsion de la Libye que l’Organisation de l’Unité Africaine (1963), en perte de vitesse, a été remplacée en 2002 par l’Union Africaine. Aujourd’hui son projet d’Etats-Unis d’Afrique est soutenu par certains obligés de la Libye , mais refusé par de nombreux pays, menés par l’Afrique du Sud et le Nigeria.
Après avoir refusé en 2004 la présidence de l’Union Africaine « parce qu’il pensait qu’il devait aider l’Afrique à réaliser son unité continentale indépendamment de toute position officielle », le « Frère Guide de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste, Roi des rois africains » (tel qu’il a demandé à être appelé après son élection à Benghazi par les chefs traditionnels du continent les 28 et 29 août 2008) a accepté la présidence en 2009 et s’est réinvesti dans la gestion des conflits. Il a notamment défendu une position différente de celle du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine, en prônant la non-application de sanctions contre la junte putschiste du général Mohamed Ould Abdel Aziz.
Malgré tout, les deux vecteurs de l’interventionnisme sont plutôt d’ordre économique et idéologique.
c) Les pétrodollars : soutien au prosélytisme religieux
Le discours sur le panarabisme étant moins porteur Kadhafi a réactivé la composante religieuse de sa rhétorique. Il paraît vouloir étendre son influence sur les États les plus fragiles pour ensuite les dominer de manière plus progressive et lente. Ainsi l’influence libyenne se développe vers trois ensembles géographiques : d’abord vers les pays du Sud. Naturellement le Tchad, pays proche, puis la République Démocratique du Congo, via la Centrafrique et même des ramifications en Afrique du Sud. La Libye aimerait un plus grand rapprochement avec le Niger et le Tchad car elle y a une volonté de regroupement hégémonique, qu’elle a tenté d’accomplir par des moyens militaires, mais qui désormais passe par les moyens économiques. Elle finance aussi des projets au Cameroun, au Gabon et au Nigeria. Ensuite vers l’Afrique de l’Ouest : la Sierra Leone et le Liberia , via le Niger, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. Afin de favoriser l’expansion musulmane elle essaie de créer une emprise islamique dans cet axe. La Mauritanie et le Sénégal restent assez méfiants face aux velléités d’expansion libyennes. Enfin, vers l’Afrique de (notamment en Somalie) malgré une concurrence avec l’Égypte et des réticences de certains pays comme le Soudan.
Il convient de rappeler que la situation économique libyenne est liée naturellement aux ressources, mais aussi aux choix politique du régime. Le pétrole est à la fois la richesse et l’arme de la Libye. La production se situe entre 1,3 à 1,7 million de barils/jour (11ème rang mondial) qu'elle ambitionne de porter à 3 millions b/j à l'horizon 2010. Les réserves estimées à environ 43 milliards de barils. Ce pétrole représente 95% des exportations et un tiers du PNB. Outre l’achat d’armes, la manne pétrolière autorise de grands travaux lancés au nom de la diversification de l’économie. Le pays possède des réserves de gaz de 1.500 milliards de m3 pour une production de 2.600 millions de pieds cubes par jour.
Le pays n’a que des échanges économiques limités en termes de volume et de finances avec l’Afrique. Ce mobile ne joue donc qu’un rôle secondaire, voir mineur, dans la politique d’influence libyenne. En outre, le développement économique du pays est freiné par l’étroitesse économique et le manque de main d’œuvre. L’appel à l’immigration est donc indispensable. On compterait près de 50% de main d’œuvre étrangère venant d’Afrique, du Maghreb et d’Asie. Cet afflux de main d’œuvre est un moyen de pression considérable sur les pays d’origine économiquement dépendants des devises de leurs immigrés et menaces de déstabilisation politique en cas de retour massif de ces populations. La Libye oscille entre répression et tolérance à l’égard de cette population. En effet, un rapport de l’ONG Human Rights Watch du 12 septembre 2006 intitulé « Endiguer la marée : exactions à l’encontre des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés » dénonce les traitements infligés aux ressortissants subsahariens par les autorités libyennes. Pour justifier la répression les Libyens reprochent aux étrangers d’être responsables de la progression de la criminalité et de la propagation de certaines maladies (notamment le Sida).
Kadhafi utilise donc ses moyens financiers pour aider à l’islamisation du continent notamment par le canal d’une organisation la Daawa Islamiyya (la Pastorale islamique) qui fait du prosélytisme religieux en distribuant des denrées alimentaires, des médicaments….dans les pays pauvres du Sahel mais aussi en construisant dans chaque capitale des mosquées et des instituts de formation d’imams locaux. Les méthodes sont d’une grande diversité : des dons ou prêts financiers aux régimes amis qui deviennent des obligés du Guide aux ONG soutenues par la Libye qui disposent de fonds très substantiels pour attribuer des aides réservées aux musulmans africains.
Kadhafi n’a pas de politique panafricaine car il n’a pas de stratégie pour le continent. Ses objectifs sont assez flous et difficiles à cerner. Il n’a pas renoncé à jouer un rôle primordial en Afrique, mais a dû abandonner son soutien officiel au terrorisme. Seul constante : son désir de vouloir nuire aux intérêts occidentaux.
Depuis la disparition du président gabonais Omar Bongo, le colonel Kadhafi n’est pas le plus âgé mais le plus ancien chef d’Etat africain. Alors qu’il fête cette année le 40ème anniversaire de la « révolution » libyenne, on est en mesure de s’interroger encore et toujours sur les bienfaits de son influence sur le reste du continent car plutôt qu’un « Guide » c’est d’un véritable leader, sur le plan démocratique, dont a besoin le continent.
Marginalisé dans le monde arabe, M. Kadhafi s’est tourné vers l’Afrique, se déclarant africain avant tout. C'est sa façon de jouer un rôle à l’échelle du continent et de tenter d'exister sur la scène internationale. Cette stratégie s’est déployée de manière chaotique, mais la pénétration de l’Islam en Afrique est aujourd’hui incontestable.
a) L’échec de l’action militaire directe
L’intégration par la conquête militaire a été sans aucun doute le premier objectif de Kadhafi. En témoigne la conquête et l’occupation temporaire du Tchad au début des années 1980 qui a tourné au fiasco militaire pour les forces armées libyennes. Cette incursion a obéi à une analyse stratégique, Kadhafi voulait se protéger d’éventuelles incursions soudanaises en agrandissant son territoire au Sud dans la bande d’Aozou. Cet échec n’a pas fait renoncer le Président libyen à sa volonté de domination militaire, pas plus que le raid punitif américain qui a tué son fils et détruit sa résidence, mais il l’a fait plus prudemment : il est arrivé accompagné de plus de 3 000 soldats en 1997 au Tchad où il n’est pas resté plus d’une semaine, il a installé en 1997 et 1998, des bases militaires en Centrafrique et à Gbadolite au Nord de la République Démocratique du Congo pour soutenir la rébellion, positions qu’il a abandonnées après une nouvelle défaite militaire cuisante près de Gbadolite. La Libye n’avait pas vraiment les moyens de ses ambitions et à perdu, avec la chute de l’URSS, le principal soutien de ses actions en Afrique.
Elle a tenté de repositionner sa politique étrangère en utilisant la médiation plutôt que l’intervention militaire pour poursuivre sa politique d’influence sur le continent. Ainsi on peut penser que la Libye est passé d’une stratégie de puissance , à une stratégie d’influence assimilée au Soft Power qui « consiste à tenter d’abord d’obtenir par la persuasion séductrice les résultats que l’on pourrait aussi atteindre par la force. Il s’agit d’amener les autres à adhérer à des normes et des institutions qui incitent ou induisent au comportement désiré. Le Soft Power peut prendre appui sur la capacité d’établir l’ordre du jour de manière à façonner les préférences des autres » .
b) Un leadership politique qui peine à s’imposer
La politique internationale du Guide résulte d’une ambition personnelle et d’une volonté de domination sur l’Afrique. Le régime cherche, notamment dans le cadre de l’Union Africaine, à fédérer les États africains. D’ailleurs c’est en partie sous l’impulsion de la Libye que l’Organisation de l’Unité Africaine (1963), en perte de vitesse, a été remplacée en 2002 par l’Union Africaine. Aujourd’hui son projet d’Etats-Unis d’Afrique est soutenu par certains obligés de la Libye , mais refusé par de nombreux pays, menés par l’Afrique du Sud et le Nigeria.
Après avoir refusé en 2004 la présidence de l’Union Africaine « parce qu’il pensait qu’il devait aider l’Afrique à réaliser son unité continentale indépendamment de toute position officielle », le « Frère Guide de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste, Roi des rois africains » (tel qu’il a demandé à être appelé après son élection à Benghazi par les chefs traditionnels du continent les 28 et 29 août 2008) a accepté la présidence en 2009 et s’est réinvesti dans la gestion des conflits. Il a notamment défendu une position différente de celle du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine, en prônant la non-application de sanctions contre la junte putschiste du général Mohamed Ould Abdel Aziz.
Malgré tout, les deux vecteurs de l’interventionnisme sont plutôt d’ordre économique et idéologique.
c) Les pétrodollars : soutien au prosélytisme religieux
Le discours sur le panarabisme étant moins porteur Kadhafi a réactivé la composante religieuse de sa rhétorique. Il paraît vouloir étendre son influence sur les États les plus fragiles pour ensuite les dominer de manière plus progressive et lente. Ainsi l’influence libyenne se développe vers trois ensembles géographiques : d’abord vers les pays du Sud. Naturellement le Tchad, pays proche, puis la République Démocratique du Congo, via la Centrafrique et même des ramifications en Afrique du Sud. La Libye aimerait un plus grand rapprochement avec le Niger et le Tchad car elle y a une volonté de regroupement hégémonique, qu’elle a tenté d’accomplir par des moyens militaires, mais qui désormais passe par les moyens économiques. Elle finance aussi des projets au Cameroun, au Gabon et au Nigeria. Ensuite vers l’Afrique de l’Ouest : la Sierra Leone et le Liberia , via le Niger, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. Afin de favoriser l’expansion musulmane elle essaie de créer une emprise islamique dans cet axe. La Mauritanie et le Sénégal restent assez méfiants face aux velléités d’expansion libyennes. Enfin, vers l’Afrique de (notamment en Somalie) malgré une concurrence avec l’Égypte et des réticences de certains pays comme le Soudan.
Il convient de rappeler que la situation économique libyenne est liée naturellement aux ressources, mais aussi aux choix politique du régime. Le pétrole est à la fois la richesse et l’arme de la Libye. La production se situe entre 1,3 à 1,7 million de barils/jour (11ème rang mondial) qu'elle ambitionne de porter à 3 millions b/j à l'horizon 2010. Les réserves estimées à environ 43 milliards de barils. Ce pétrole représente 95% des exportations et un tiers du PNB. Outre l’achat d’armes, la manne pétrolière autorise de grands travaux lancés au nom de la diversification de l’économie. Le pays possède des réserves de gaz de 1.500 milliards de m3 pour une production de 2.600 millions de pieds cubes par jour.
Le pays n’a que des échanges économiques limités en termes de volume et de finances avec l’Afrique. Ce mobile ne joue donc qu’un rôle secondaire, voir mineur, dans la politique d’influence libyenne. En outre, le développement économique du pays est freiné par l’étroitesse économique et le manque de main d’œuvre. L’appel à l’immigration est donc indispensable. On compterait près de 50% de main d’œuvre étrangère venant d’Afrique, du Maghreb et d’Asie. Cet afflux de main d’œuvre est un moyen de pression considérable sur les pays d’origine économiquement dépendants des devises de leurs immigrés et menaces de déstabilisation politique en cas de retour massif de ces populations. La Libye oscille entre répression et tolérance à l’égard de cette population. En effet, un rapport de l’ONG Human Rights Watch du 12 septembre 2006 intitulé « Endiguer la marée : exactions à l’encontre des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés » dénonce les traitements infligés aux ressortissants subsahariens par les autorités libyennes. Pour justifier la répression les Libyens reprochent aux étrangers d’être responsables de la progression de la criminalité et de la propagation de certaines maladies (notamment le Sida).
Kadhafi utilise donc ses moyens financiers pour aider à l’islamisation du continent notamment par le canal d’une organisation la Daawa Islamiyya (la Pastorale islamique) qui fait du prosélytisme religieux en distribuant des denrées alimentaires, des médicaments….dans les pays pauvres du Sahel mais aussi en construisant dans chaque capitale des mosquées et des instituts de formation d’imams locaux. Les méthodes sont d’une grande diversité : des dons ou prêts financiers aux régimes amis qui deviennent des obligés du Guide aux ONG soutenues par la Libye qui disposent de fonds très substantiels pour attribuer des aides réservées aux musulmans africains.
Kadhafi n’a pas de politique panafricaine car il n’a pas de stratégie pour le continent. Ses objectifs sont assez flous et difficiles à cerner. Il n’a pas renoncé à jouer un rôle primordial en Afrique, mais a dû abandonner son soutien officiel au terrorisme. Seul constante : son désir de vouloir nuire aux intérêts occidentaux.
Depuis la disparition du président gabonais Omar Bongo, le colonel Kadhafi n’est pas le plus âgé mais le plus ancien chef d’Etat africain. Alors qu’il fête cette année le 40ème anniversaire de la « révolution » libyenne, on est en mesure de s’interroger encore et toujours sur les bienfaits de son influence sur le reste du continent car plutôt qu’un « Guide » c’est d’un véritable leader, sur le plan démocratique, dont a besoin le continent.
jeudi 6 mai 2010
La politique africaine de la Libye (1/2)
Je complète sur ce blog le billet publié en parallèle sur AGS :
La Libye est le quatrième plus grand Etat d’Afrique en superficie (1 757 000 km²) mais 14 fois moins peuplée que l’Egypte, riche d’un pétrole (40% des réserves africaines, 2ème exportateur du continent) qui lui permet toujours de peser politiquement. Elle bénéficie d’une situation privilégiée sur la façade méditerranéenne mais ne néglige pas le poids de sa partie continentale. En effet, le désert s’étend sur la quasi-totalité du territoire et la circulation de nomades dans cet espace n’est pas sans répercussion sur les intentions géopolitiques du pays. Carrefour entre le Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie, auxquels on ajoute parfois la Mauritanie et le Soudan) et le Moyen Orient, la Libye est faite d’une profonde dualité culturelle : arabité et africanité. Dans un ouvrage publié en 1986 M. Kadhafi déclarait : « Les pays africains et les pays arabes connaissent une situation analogue, sinon identique, d’autant que plus de la moitié des peuples arabes vit en Afrique ? » Ainsi l’idéal de l’unité africaine se trouvait dès l’origine en filigrane de la politique africaine de la Libye.
Ce billet propose de répondre à une interrogation principale : le colonel Kadhafi a-t-il une politique panafricaine ? Il convient pour y répondre de comprendre comment se manifeste la politique d’influence de la Libye en Afrique, vers quels pays est-elle dirigée, quels sont les vecteurs de cette influence ? Nous nous proposons d’analyser la portée idéologique de cette politique puis les vecteurs de l’influence libyenne sur le continent noir.
I.Une politique éminemment idéologique
a)Une vision unioniste et tribale
La politique d’influence libyenne est conçue et dirigée par le Colonel Kadhafi. La République arabe libyenne a pour principes fondamentaux : la liberté, l’union, la justice sociale et fait référence à l’Islam et à l’arabisme. L’idéologie kadhafiste se fonde aussi sur une volonté unioniste contre ce qu’il considère comme l’ennemi sioniste et contre l’Occident accusé d’avoir divisé le monde arabe. En 1974 il déclare : « la lutte contre Israël est éternelle » et en 1978 : « Nous sommes des unionistes depuis 1959, date de la constitution du mouvement des officiers unionistes libres. L’unité arabe est un destin, un objectif et en même temps une nécessité impérieuse. Nous avons peiné pour l’unité arabe et nous avons payé le prix depuis que nous étions étudiants en 1961, lorsque nous vivions sous les menaces de la persécution. L’unité est notre manière d’entrer en politique et elle en est la justification ». Dans les années 1969-1975 la Libye soutient de nombreux mouvements de libération dans le monde et tout particulièrement dans son voisinage africain : le Frolinat au Tchad, les Erythréens, les colonies portugaises, l’ANC en Afrique du Sud. Cet activisme pousse plusieurs pays d’Afrique à rompre leurs liens avec Israël. L’unionisme est une composante fondamentale de la politique de Kadhafi et un axe essentiel de son action politique.
En 1977, M. Kadhafi annonce la Jamahiriya (assemblée triviale) et publie le Livre Vert qui se veut une « troisième théorie universelle », différente du capitalisme et du marxisme, se fondant sur la société tribale bédouine, l’arabisme selon sa version nassérienne et la religion musulmane. H. Bleuchot considère que la tribu a joué un rôle fondamentale dans l’élaboration du Livre Vert : « la conception de Kadhafi (..) est celle-ci : le lien sociale véritable et naturel est celui du sang. L’individu est lié aux autres d’abord et avant tout à sa famille. La tribu est à son tour une famille élargie et la nation un groupe de tribus. Voilà la société naturelle. On a reconnu la société bédouine traditionnelle » .
Kadhafi s’est voulu l’héritier de Nasser et a voulu porter l’arabisme après la disparition de celui-ci en 1970. En effet, dans les années 1960 et 1970 on observe un grand rayonnement de la pensée nassérienne. Pourtant le moteur de la vision unioniste de Kadhafi diffère de celui de Nasser pour qui le projet d’unité était beaucoup moins utopique et correspondait davantage à des motifs stratégiques d’incarnation du leadership arabe . Djaziri paraphrase Sivan en considérant que le projet unitaire kadhafien comme un mythe politique arabe comme l’est l’islamisme . Les tentatives d’union qu’il proposera avec la Tunisie, le Maroc, l’Egypte et d’autres pays ne sont pourtant pas des succès (Soudan-Egypte en 69 , Egypte-Syrie en 71, Egypte en 72, Tunisie en 1974, Syrie en 1980, Tchad en 1981, Maroc en 1984, Soudan en 90). Citons également une tentative d’union régionale : la MENA (Middle East and North Africa). Elle obéit sur le plan régional à une logique d’emboitement de centres (capables d’exercer une influence politique, économique, démographique ou religieuse au niveau régional comme l’Arabie Saoudite, l’Egypte, l’Iran, la Turquie et Israël) et de périphéries (inégalement intégrées au système mondial dont fait partie la Libye). En effet, les économies de la MENA restent dans l’ensemble marginalisées, périphériques et peu compétitives. Ainsi, le PIB de la Ligue arabe avec 870 milliards de dollars en 2005 est inférieur à celui de l’Espagne . Aucune puissance régionale ne parvient à fédérer la région. Plusieurs logiques partagent ces pays : l’unité arabe avec la création en 1945 de la Ligue arabe encore fragile ; l’OPAEP (Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole) qui s’est effondrée dans les années 1980 ; l’Union du Maghreb arabe créée en 1989 mais paralysée par les tensions régionales (Sahara Occidentale) ; le Gafta ou Great Arab Free Trade Area qui réunit 17 membres de la Ligue arabe sur 22 et entré en vigueur en 2005 mais qui pâtit de la faiblesse des échanges dans la zone ; l’Organisation de la Conférence islamique elle aussi ralentit par les rivalités interétatiques.
Actuellement le mouvement panarabe est fortement battu en brèche par la montée récente de l’islamisme. L’arabisme, l’idéologie officielle des pouvoirs en place, a perdu de son potentiel révolutionnaire.
b)La promotion d’un islam réformiste
Kadhafi est partisan d’un islam réformiste et surveille la menace représentée par les mouvements islamistes notamment celui des Frères musulmans. La Libye fait néanmoins partie de l’Organisation de la conférence islamique. Ses thèses socialistes trouvent, selon lui, leurs fondements dans le Coran. Cet islam socialiste est théorisé dans le livre vert. Ces oppositions tendent à isoler la Libye des Etats défenseurs d’un islam orthodoxe notamment l’Arabie Saoudite, qui est allée jusqu'à financer les projets américains de déstabilisation du régime. Le guide joue des affrontements entre chiites et sunnites en critiquant le régime saoudien qui « vise les chiites et complote contre le Hezbollah, la fierté de l’islam, des Arabes et de la résistance contre Israël ». Le 31 mars 2007 le Guide a même appelé dans un discours prononcé au Niger en présence des chefs de tribus Touareg, à l’établissement d’un second Etat fatimide chiite en Afrique du Nord, sur le modèle de l’Empire fatimide (10ème- 13ème siècle) qui regroupait l’Afrique du Nord, l’Egypte et une partie du Croissant fertile. Cependant les Saoudiens se sont réconcilier au Sommet de Doha (1er avril 2009) avec les Libyens mais une lutte d’influence se ressent toujours entre la Libye, l’Arabie Saoudite et même l’Iran.
c)Une constante : l’hostilité à l’égard de l’Occident
Le « Guide » libyen n'hésite pas à user et abuser d'une rhétorique populiste anti-blanc ou anti-occidentale et se faire passer ainsi pour le champion de la lutte contre le néocolonialisme. En cela, il trouve des opportunités lorsqu'un pays africain a des différents avec son ancienne métropole (Côte d'Ivoire ou Zimbabwe par exemple).
Son interventionnisme sur les différentes scènes internationales a toujours traduit une volonté de réduire l’influence occidentale et de faire progresser ses objectifs unitaires. Les positions propalestinnienne du leader libyen l’ont très vite opposé aux Etats-Unis et à Israël. A la suite d’un processus de reconnaissance et de recherche d’acceptabilité internationale, l’ONU et l’Union européenne ont levé leurs sanctions en septembre 2003, et le 15 mai 2006 les Etats-Unis ont retiré la Libye de leur liste des états terroristes. Mais il faut attendre juillet 2007 et la résolution de l’affaire des infirmières bulgares et fin 2008 l’indemnisation des victimes des attentats aériens pour que le Guide trouve un semblant de respectabilité.
La Libye est le quatrième plus grand Etat d’Afrique en superficie (1 757 000 km²) mais 14 fois moins peuplée que l’Egypte, riche d’un pétrole (40% des réserves africaines, 2ème exportateur du continent) qui lui permet toujours de peser politiquement. Elle bénéficie d’une situation privilégiée sur la façade méditerranéenne mais ne néglige pas le poids de sa partie continentale. En effet, le désert s’étend sur la quasi-totalité du territoire et la circulation de nomades dans cet espace n’est pas sans répercussion sur les intentions géopolitiques du pays. Carrefour entre le Maghreb (Maroc, Algérie, Tunisie, auxquels on ajoute parfois la Mauritanie et le Soudan) et le Moyen Orient, la Libye est faite d’une profonde dualité culturelle : arabité et africanité. Dans un ouvrage publié en 1986 M. Kadhafi déclarait : « Les pays africains et les pays arabes connaissent une situation analogue, sinon identique, d’autant que plus de la moitié des peuples arabes vit en Afrique ? » Ainsi l’idéal de l’unité africaine se trouvait dès l’origine en filigrane de la politique africaine de la Libye.
Ce billet propose de répondre à une interrogation principale : le colonel Kadhafi a-t-il une politique panafricaine ? Il convient pour y répondre de comprendre comment se manifeste la politique d’influence de la Libye en Afrique, vers quels pays est-elle dirigée, quels sont les vecteurs de cette influence ? Nous nous proposons d’analyser la portée idéologique de cette politique puis les vecteurs de l’influence libyenne sur le continent noir.
I.Une politique éminemment idéologique
a)Une vision unioniste et tribale
La politique d’influence libyenne est conçue et dirigée par le Colonel Kadhafi. La République arabe libyenne a pour principes fondamentaux : la liberté, l’union, la justice sociale et fait référence à l’Islam et à l’arabisme. L’idéologie kadhafiste se fonde aussi sur une volonté unioniste contre ce qu’il considère comme l’ennemi sioniste et contre l’Occident accusé d’avoir divisé le monde arabe. En 1974 il déclare : « la lutte contre Israël est éternelle » et en 1978 : « Nous sommes des unionistes depuis 1959, date de la constitution du mouvement des officiers unionistes libres. L’unité arabe est un destin, un objectif et en même temps une nécessité impérieuse. Nous avons peiné pour l’unité arabe et nous avons payé le prix depuis que nous étions étudiants en 1961, lorsque nous vivions sous les menaces de la persécution. L’unité est notre manière d’entrer en politique et elle en est la justification ». Dans les années 1969-1975 la Libye soutient de nombreux mouvements de libération dans le monde et tout particulièrement dans son voisinage africain : le Frolinat au Tchad, les Erythréens, les colonies portugaises, l’ANC en Afrique du Sud. Cet activisme pousse plusieurs pays d’Afrique à rompre leurs liens avec Israël. L’unionisme est une composante fondamentale de la politique de Kadhafi et un axe essentiel de son action politique.
En 1977, M. Kadhafi annonce la Jamahiriya (assemblée triviale) et publie le Livre Vert qui se veut une « troisième théorie universelle », différente du capitalisme et du marxisme, se fondant sur la société tribale bédouine, l’arabisme selon sa version nassérienne et la religion musulmane. H. Bleuchot considère que la tribu a joué un rôle fondamentale dans l’élaboration du Livre Vert : « la conception de Kadhafi (..) est celle-ci : le lien sociale véritable et naturel est celui du sang. L’individu est lié aux autres d’abord et avant tout à sa famille. La tribu est à son tour une famille élargie et la nation un groupe de tribus. Voilà la société naturelle. On a reconnu la société bédouine traditionnelle » .
Kadhafi s’est voulu l’héritier de Nasser et a voulu porter l’arabisme après la disparition de celui-ci en 1970. En effet, dans les années 1960 et 1970 on observe un grand rayonnement de la pensée nassérienne. Pourtant le moteur de la vision unioniste de Kadhafi diffère de celui de Nasser pour qui le projet d’unité était beaucoup moins utopique et correspondait davantage à des motifs stratégiques d’incarnation du leadership arabe . Djaziri paraphrase Sivan en considérant que le projet unitaire kadhafien comme un mythe politique arabe comme l’est l’islamisme . Les tentatives d’union qu’il proposera avec la Tunisie, le Maroc, l’Egypte et d’autres pays ne sont pourtant pas des succès (Soudan-Egypte en 69 , Egypte-Syrie en 71, Egypte en 72, Tunisie en 1974, Syrie en 1980, Tchad en 1981, Maroc en 1984, Soudan en 90). Citons également une tentative d’union régionale : la MENA (Middle East and North Africa). Elle obéit sur le plan régional à une logique d’emboitement de centres (capables d’exercer une influence politique, économique, démographique ou religieuse au niveau régional comme l’Arabie Saoudite, l’Egypte, l’Iran, la Turquie et Israël) et de périphéries (inégalement intégrées au système mondial dont fait partie la Libye). En effet, les économies de la MENA restent dans l’ensemble marginalisées, périphériques et peu compétitives. Ainsi, le PIB de la Ligue arabe avec 870 milliards de dollars en 2005 est inférieur à celui de l’Espagne . Aucune puissance régionale ne parvient à fédérer la région. Plusieurs logiques partagent ces pays : l’unité arabe avec la création en 1945 de la Ligue arabe encore fragile ; l’OPAEP (Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole) qui s’est effondrée dans les années 1980 ; l’Union du Maghreb arabe créée en 1989 mais paralysée par les tensions régionales (Sahara Occidentale) ; le Gafta ou Great Arab Free Trade Area qui réunit 17 membres de la Ligue arabe sur 22 et entré en vigueur en 2005 mais qui pâtit de la faiblesse des échanges dans la zone ; l’Organisation de la Conférence islamique elle aussi ralentit par les rivalités interétatiques.
Actuellement le mouvement panarabe est fortement battu en brèche par la montée récente de l’islamisme. L’arabisme, l’idéologie officielle des pouvoirs en place, a perdu de son potentiel révolutionnaire.
b)La promotion d’un islam réformiste
Kadhafi est partisan d’un islam réformiste et surveille la menace représentée par les mouvements islamistes notamment celui des Frères musulmans. La Libye fait néanmoins partie de l’Organisation de la conférence islamique. Ses thèses socialistes trouvent, selon lui, leurs fondements dans le Coran. Cet islam socialiste est théorisé dans le livre vert. Ces oppositions tendent à isoler la Libye des Etats défenseurs d’un islam orthodoxe notamment l’Arabie Saoudite, qui est allée jusqu'à financer les projets américains de déstabilisation du régime. Le guide joue des affrontements entre chiites et sunnites en critiquant le régime saoudien qui « vise les chiites et complote contre le Hezbollah, la fierté de l’islam, des Arabes et de la résistance contre Israël ». Le 31 mars 2007 le Guide a même appelé dans un discours prononcé au Niger en présence des chefs de tribus Touareg, à l’établissement d’un second Etat fatimide chiite en Afrique du Nord, sur le modèle de l’Empire fatimide (10ème- 13ème siècle) qui regroupait l’Afrique du Nord, l’Egypte et une partie du Croissant fertile. Cependant les Saoudiens se sont réconcilier au Sommet de Doha (1er avril 2009) avec les Libyens mais une lutte d’influence se ressent toujours entre la Libye, l’Arabie Saoudite et même l’Iran.
c)Une constante : l’hostilité à l’égard de l’Occident
Le « Guide » libyen n'hésite pas à user et abuser d'une rhétorique populiste anti-blanc ou anti-occidentale et se faire passer ainsi pour le champion de la lutte contre le néocolonialisme. En cela, il trouve des opportunités lorsqu'un pays africain a des différents avec son ancienne métropole (Côte d'Ivoire ou Zimbabwe par exemple).
Son interventionnisme sur les différentes scènes internationales a toujours traduit une volonté de réduire l’influence occidentale et de faire progresser ses objectifs unitaires. Les positions propalestinnienne du leader libyen l’ont très vite opposé aux Etats-Unis et à Israël. A la suite d’un processus de reconnaissance et de recherche d’acceptabilité internationale, l’ONU et l’Union européenne ont levé leurs sanctions en septembre 2003, et le 15 mai 2006 les Etats-Unis ont retiré la Libye de leur liste des états terroristes. Mais il faut attendre juillet 2007 et la résolution de l’affaire des infirmières bulgares et fin 2008 l’indemnisation des victimes des attentats aériens pour que le Guide trouve un semblant de respectabilité.
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