vendredi 14 janvier 2011

Le Japon à DJibouti (1/2)

Suite de mon billet ICI



Une rupture dans sa posture stratégique
La projection des forces d’autodéfense (FAD) japonaises dans le Golfe d’Aden peut porter à débat lorsqu’on connaît les limites constitutionnelles du pays. En effet, le Japon a adopté après la seconde guerre mondiale une « Constitution Pacifiste » célèbre pour son article 9 interprété comme bannissant l’utilisation de la force armée dans la défense des intérêts nationaux et le maintien d’une armée : « le peuple japonais renonce à jamais à la guerre en tant que droit souverain de la nation ou à l’usage de la force comme moyen de règlement des conflits internationaux. (…) il ne sera jamais maintenu de forces de terre, de mer et de l’air, ainsi que tout autre potentiel de guerre ». La Constitution ne reconnaît pas non plus le droit de belligérance au sens de l’article 51 de la charte des Nations Unies (3). Pourtant à la suite de la Guerre de Corée (50-53) et de la Guerre Froide, le Japon s’est doté de Forces d’autodéfense aujourd’hui parmi les armées les plus développées (4) et le tropisme maritime de l’archipel fait de sa marine l’une des meilleures. Mais pour beaucoup de Japonais cette clause est un obstacle aux ambitions internationales de Tokyo notamment pour sa participation aux opérations de maintien de la paix. Aussi certaines évolutions comme la transformation fin 2006 de l’Agence de défense en ministère lui permettant ainsi de faire des lois, des arrêtés, d’avoir un budget traduit la volonté du pays de se « normaliser ». Dès 2003 avec la guerre en Irak, les Japonais ont modifié leur constitution afin de pouvoir déployer des troupes dans le cadre d’opérations de reconstruction ou d’aide humanitaire ou de pouvoir s’associer à des activités dites de police internationale. Ainsi, la Constitution ne s’oppose pas à la présence des FAD à l’étranger l’une des conditions est la demande du pays concerné et que leurs activités ne les poussent pas à faire usage de la force.


Un engagement croissant dans la lutte contre la piraterie
Pour le Japon la piraterie au large de la Somalie est une extension du phénomène constaté en Asie du Sud Est et pour lequel Tokyo avait joué un rôle de premier plan notamment par la formation des gardes côtes Malaisiens, Singapouriens et Indonésiens. La liberté de circulation sur les voies maritimes est vitale pour les pays occidentaux et asiatiques. En outre, la dépendance énergétique du Japon explique pourquoi le pays s’est doté d’une des plus importantes marines militaire au monde afin d’assurer la sécurité de son approvisionnement énergétique. En effet, la route maritime passant par le détroit de Bab El Mandeb est d’un intérêt majeur pour un pays qui exporte massivement ses technologies. Sur les 20 000 bateaux qui passent dans le détroit 10% sont propriétés ou contiennent des marchandises japonaises et 90% des exportations japonaises empruntent cette route. L’opinion publique s’est largement mobilisée à la suite d’attaques de piraterie (5) et le Japon a décidé à l’été 2009 de déployer 2 destroyers (6) et 2 avions de patrouille maritime P-3C Orion pour son auto-défense alors que seuls 5 pays ont envoyé des avions (dont la France, les Etats-Unis, l’Espagne et l’Allemagne). Les observateurs ont été très étonnés de la rapidité de cette décision peu habituelle en générale au pays du soleil Levant (7).
Dans le cadre de la lutte anti piraterie les navires de guerre japonais sont placés sous l’application de la loi anti pirate du 24 juillet 2009. A l’origine les navires ont été déployés pour escorter les bateaux japonais selon l’article 82 de la loi sur les Forces d’autodéfense mais la loi du 24 juillet leur permet de protéger les bateaux portant n’importe quel pavillon, alors que les autres forces multinationales ont adopté le principe de « corridor » : chacun surveillant une zone précise et coordonnant à son tour de rôle l’action dans le corridor IRTC (8). En effet, nous l’avons vu, de part son article 9, la Constitution interdit aux Japonais de recourir à toute force militaire y compris dans un cadre collectif sauf en cas de légitime défense.
Par ailleurs, le Japon participe de façon indirecte au renforcement des capacités régionales. En effet, un montant de 15 millions de dollars du budget consacré à la piraterie sert à soutenir la mise en œuvre du code de conduite de Djibouti par l’Organisation Maritime Internationale (9). Or cette organisation est largement financée par le Japon. Plusieurs axes ont été définis par ce code notamment l’établissement de 3 centres d’information : au Kenya (Mombassa), en Tanzanie (Dar Es Salam), au Yémen (Sanaa) et d’un centre de formation à Djibouti. Ces centres informeront sur les attaques, les avaries, l’immigration clandestine…. La construction du centre de formation et de documentation des gardes côtes devrait débuter en octobre à Doraleh (Djibouti). Si l’Union Européenne prend en charge le financement pédagogique (1,5 million d’euros par an), le Japon assure pour sa part le financement direct à hauteur de 4 millions d’euros du complexe (amphithéâtre, réfectoire, dortoirs) qui devra accueillir dès 2011 une soixantaine de personnes venant de 22 pays (10) car si la piraterie touche les côtes d’Afrique de l’Est elle est aussi endémique dans le Golfe de Guinée par exemple....(la suite le 20 janvier)

2 Entretien de l’auteure à Djibouti le 5 juin 2010.
3 Général Henri Paris, « Du néant à la force de réserve policière, puis à la force armée », in Géostratégiques, n°26, 2010, p.67.
4 Le budget reste fixé à 1% du PIB (5180 milliards de dollars en 2008). Le pays se place au 5ème rang mondial (en valeur absolu).
5 En octobre 2007 le chimiquier Golden Nori n’a été libéré par les pirates qu’après avoir exigé une rançon d’un million de dollars, en avril 2008 le pétrolier Takayama a été attaqué au lance-roquette, une tentative d’abordage en février 2010 contre un porte-conteneurs. ..
6 Le Sazanami (DD-113, classe Takanami) et le Samidare (DD-106, classe Murasame), dotés de systèmes de détection, de transmission, d’hélicoptères SH-60J et de 200 marins.
7 Entretien de l’auteure à Addis Abeba le 21 juin 2010.
8 Nicolas Gros-Verheyde, « 18 mois après le début d’Atalanta. Un dernier bilan », in Blog Bruxelles 2, 11 mai 2010.
9 Le code est disponible à cette adresse : http://www.fco.gov.uk/resources/en/pdf/pdf9/piracy-djibouti-meeting
10 « A Djibouti, un centre de formation pour gardes-côtes », in Jeune Afrique, n°2577 du 30 mai au 5 juin 2010.

jeudi 13 janvier 2011

Quel statut pour les forces japonaises à Djibouti ?

La dernière Lettre de l'Océan Indien (LOI) nous apprend que d'après une note diplomatique japonaise, les Forces d'auto-défense du Japon et ses Gardes-côtes bénéficieront globalement des mêmes avantages que ceux des autres forces armées étrangères basées à Djibouti.


Et la LOI d'ajouter : "Selon cet accord passé avec le gouvernement djiboutien pour une durée de douze mois renouvelable automatiquement, les militaires japonais pourront porter leurs uniformes, conduire des véhicules militaires immatriculés au Japon et leurs installations à Djibouti jouiront de l'immunité de juridiction. Ainsi, elles ne pourront faire l'objet "d'aucune perquisition, réquisition, saisie ou mesure d'exécution". Toutes les importations destinées aux activités de ces troupes ou à l'usage personnel de leurs membres seront exemptes de droits de douane, taxes et redevances similaires. Les militaires japonais auront "la liberté de déplacement et de circulation sur le territoire de la République de Djibouti, y compris ses eaux et son espace aérien". Ils pourront utiliser leurs propres réseaux de communication, y compris par satellite. (...)"
Pour plus d'informations sur la base militaire Japonaise à Djibouti : mon précédent billet ICI

mardi 11 janvier 2011

Colloques cette semaine

Demain de 11h à 13h : Économie politique de l’Afrique du Sud. Dans le cadre du séminaire Afrique australe : Etat, Sociétés et Problèmes sociaux. Le séminaire organisé sous la responsabilité de Jean Copans et Ingolf Diener, propose d’analyser la dynamique des relations sociales et politiques dans les pays d’Afrique australe et dans la région en tant que telle. Les premières séances seront consacrées à une présentation synthétique et didactique du sub-continent, de ses sociétés, de leur histoire et de leur économie. Ensuite, en variant les approches disciplinaires et les domaines thématiques, le séminaire fera intervenir chercheurs confirmés, doctorant(e)s ainsi qu’invité(e)s en provenance de la région. L’accent sera mis sur les dynamiques des sociétés post-coloniales et post-apartheid. - Lieu : Centre d’Etudes Africaines, salle de réunion, 2e étage, 96 bd. Raspail, Paris 6è - Rens. : diener.ingolf@neuf.fr www.ipt.univ-paris8.fr/cerasa/

jeudi 13 janvier 2011 de 17h45 à 19h45 conférence exceptionnelle sur le thème : «La décentralisation en marche en Afrique subsaharienne » avec Mwayila Tshiyembe, Jeremy Lees, Jean-Loïc Baudet et Bertrand Leveaux - Organisé par CADE Coordination pour l’Afrique de Demain et l'ENA, Ecole Nationale d’Administration - Lieu ENA, amphithéâtre Parodi, 2, avenue de l'Observatoire - Paris 6ème, RER B : Luxembourg, Bus : 38 et 82 - Tens. cade@afrique-demain.org - Inscription sur le site de la CADE http://afrique-demain.org/inscriptions

lundi 10 janvier 2011

L'"Etat pétrolier" du Sud Soudan : une réalité pas si rose

On lit ça et là que l'indépendance du Sud Soudan devrait devrait voir naitre un Etat pétrolier.


Quelques petites précisions semblent nécessaires :
- tout d'abord le Sud Soudan n'est pas un géant pétrolier. Il produit environ 550 000 barils/jour et ce pétrole n'est pas de bonne qualité. Cette manne de plus de 2,5 milliards de dollars est partagée à parts égales entre le Nord et le Sud.
- le pétrole est effectivement au Sud mais les pipelines sont au Nord et en théorie Khartoum peut interrompre la production. Or aujourd'hui 98% du budget du Sud vient de la redevance pétrolière que leur versent les Nordistes.
- Par ailleurs on présente la région d'Abyei comme une "région riche en pétrole et pâturages que les deux bords revendiquent" or, et d'après Gérard Prunier, cette région n'a pas si riche en pétrole et déjà sur 3 champs pétroliers l'un est en extinction.

Pour Gérard Prunier personne ne veut la guerre mais celle ci peut arriver car nous sommes face à des "mécaniques d'une situation qui dépassent le choix des hommes"

dimanche 9 janvier 2011

Le Sud Soudan vote

Aujourd'hui 3 931 000 électeurs sud-soudanais inscrits sur les listes électorales ont commencé à voter sur l'avenir de leur région. Plus de 3000 bureaux de vote ont ouvert leurs portes. Afin que les résultats du référendum soient valides, le taux de participation doit être supérieur à 60% et l’une des deux options (unité ou séparation) doit remporter la majorité absolue des voix. Le référendum s’échelonne du 9 au 15 janvier.



A écouter : Les enjeux internationaux sur France CUlture
Résumé : "Depuis des décennies, la Corne de l’Afrique est rongée par des crises, des conflits, voire des guerres. L’Éthiopie elle-même, si l’on regarde la carte, est entourée de voisins instables : l’Érythrée agressive (affrontement guerrier au début des années 2000), la Somalie effondrée et d’ailleurs balkanisée (au point qu’on peut parler de trois Somalie), le Kenya parcouru par de profonds troubles politiques depuis quelques années, le Soudan (dont le chef de l’État est accusé de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide par la Cour pénale internationale de La Haye).Si le référendum sur l’autodétermination se tient à partir du 9 janvier (en respect d’un accord de 2005, signé sous la houlette des États-Unis), le processus de partition s’enclenchera. Ce qui est un précédent détestable pour d’autres régions d’Afrique et qui concernera l’une des zones les plus troublées du continent.Quelles conséquences prévisibles ? " ICI

Sources : Opérations de paix

mercredi 5 janvier 2011

Réflexions sur les relations de la France avec l'Afrique


Depuis 20 ans, la France, avec des politiques pleines de bonnes intentions mais qui se sont souvent révélées ne pas être en adéquation avec son pragmatisme de terrain, a assurément perdu une grande partie de la confiance des Africains. Alternant volontarisme, désengagement et attentisme, elle a sérieusement brouillé son image tant sur le continent qu'auprès de la communauté internationale.
Les différents gouvernements, et surtout les différents présidents français, se sont progressivement déconnectés des réalités d'une Afrique en pleine mutation. Entretenant des relations de forte proximité, avec leurs homologues africains (eux-mêmes coupés de leurs populations), ils n'ont pas su les inciter à impulser de véritables politiques de développement ou une amélioration de la redistribution des richesses produites. De plus, dans les esprits, les coups d'État ou les transitions « fantaisistes » restent toujours associés à une activité souterraine française.
Ainsi, les populations africaines se reconnaissent de moins en moins dans les actions politiques françaises en Afrique. Ce constat est surtout vrai pour une jeune génération urbaine qui se retrouve aujourd'hui sans perspectives d'avenir. Cette jeunesse frustrée et désœuvrée trouve en la France le responsable de tous ses maux. Se développe alors un sentiment anti-français qui est bien souvent instrumentalisé ou récupéré par des dirigeants et des meneurs populistes sans scrupules. Ces derniers utilisent ce sentiment pour tirer profit de l'exacerbation de la concurrence en Afrique entre grandes puissances.
À la France de gagner le cœur des Africains par des actions plus en adéquation avec les aspirations de la jeunesse africaine ; à la France de « pousser vers la sortie » les « dinosaures » africains dont la présence rappelle les pires collusions et la « France-à-frique » ; à la France de favoriser les pays qui se sont engagés dans la voie de la démocratie ...

lundi 3 janvier 2011

L’enseignement supérieur en Éthiopie : futur acteur du développement socio-économique du pays.



A signaler : la parution de l'ouvrage "Politiques éducatives, émancipation humaine et inégalités sociales dans les pays en développement"
Résumé : "Les théories du développement mettent en évidence le rôle émancipateur de l'éducation sur la personne humaine. Les politiques éducatives occupent donc une place centrale dans le processus du développement. L'incohérence des politiques éducatives, surtout universitaires, dans bon nombre de pays en développement, explique-t-elle le retard et les lacunes dans la formation du capital humain ? Les modes de sélection scolaire freinent-ils l'émergence d'une technocratie ?"


Les politiques éducatives sont déterminantes dans l’évolution des systèmes d’enseignement, dans la formation et la gestion du capital humain, dans la coordination de celle- ci avec les politiques économiques. L’on peut même établir qu’une politique éducative participe souvent d’un mode de gouvernance affectant l’ensemble des politiques publiques.
Dans l'analyse du cas de l’Éthiopie (Chapitre 2) les changements de régime
politique et l’évolution de l’enseignement tertiaire(universitaire) sont mis en valeur, à travers la prise en compte de deux transitions politiques cruciales : le coup d’État du Derg, en 1974, etle renversement de Mengistu Haile Mariam, en 1991.
Au régime d’orientation « marxiste » correspond la centralisation du système universitaire, la création d’une agence de contrôle idéologique et le contrôle des contenus d’enseignement, mais aussi les efforts faits pour faciliter l’accès aux études dans les zones rurales et les provinces. A la révolution de 1991, l’on peut faire correspondre les multiples programmes de réforme de l’enseignement supérieur, élaborés depuis 1995 qui intervient une fois l’entrée en vigueur de la nouvelle constitution. Vers 1999/2000, l’on continue à évoquer les principaux handicaps structurels de l’enseignement supérieur éthiopien, dont la massification mal régulée, le sous-encadrement professoral, la mauvaise qualité du travail pédagogique, le déficit relatif ou absolu en étudiants dans les filières dites des « sciences dures» et un financement insuffisant. Ce diagnostic, loin d’isoler le cas éthiopien, représente un concentré, voire un cas idéal typique des dysfonctionnements connus par nombre de systèmes universitaires des pays « en développement ».

samedi 1 janvier 2011

Politique africaine ou politique française en Afrique?

.... "Le jour où, au lieu de se targuer d'une "politique africaine" censée faire le bonheur du continent noir, il existera une politique française en Afrique, qu'on pourra présenter aux citoyens-électeurs-contribuables français comme étant de leur intérêt, la France aura tourné la page de son passé colonial" ....
Extrait : Antoine GLASER, Stephen SMITH, Comment la France a perdu l'Afrique, Paris, Seuil, 2005, p.268

jeudi 30 décembre 2010

De la Françafrique à l' Eurafrique ?


« La France n’a pas vocation à maintenir indéfiniment des forces armées en Afrique » annonçait en février 2008 le président N. Sarkozy au Cap. Ce nouveau dispositif serait une réponse plus adapté à la future organisation militaire de l’Union Africaine et à la vocation interarmées des opérations .

Pour autant de nombreux Etats africains sont loin d’être favorables à un désengagement de la France qui pourrait les fragiliser. L’européanisation que la France souhaite intégrée à sa politique et dans les nouveaux accords de défense est mal perçue.
« De la Françafrique à l'Eurafrique » , pour reprendre la formule de Michel Barnier, telle semble être la position française vis-à-vis de ses anciennes colonies africaines. N. Sarkozy souhaite amener l'UE à s'engager plus massivement en Afrique afin de mutualiser les efforts européens pour une meilleure efficacité d'action. Ce processus est le constat d'une polarisation presque absolue de la diplomatie 
française sur les questions de construction européenne. En effet, le processus d’intégration a changé la diplomatie française. Paris est plus enclin à développer une stratégie multilatérale. Une stratégie qui ne plait pas aux dirigeants du continent qui préfèrent la politique du tête à tête, alors que la machine européenne peut imposer des sanctions économiques aux Etats non démocratiques.
Il convient tout de même de relativiser l’action de N. Sarkozy dans ce processus déjà entamé avant son arrivée au pouvoir. Comme le soulignait Dominique de Villepin en 2003, « la convention de Cotonou, les sommets Europe-Afrique et la mise en place, aujourd'hui en Ituri, d'une opération militaire européenne, témoignent d'avancées importantes. À Bruxelles, nous appuyons les réflexions menées par le commissaire Nielsen sur le financement d'une capacité africaine de construction de la paix. Nous insistons également pour raccourcir les délais d'intervention post-crise et améliorer l'adéquation des instruments de la Commission, en vue d'un véritable partenariat eurafricain » . Ou Jacques Chirac en 2005 : « l'Europe ne se désintéresse pas de l'Afrique (…), le cas échéant, la France rappellerait l'Union européenne à ses responsabilités vis-à-vis de son voisin du sud, le continent africain. L'Union européenne a parfaitement conscience qu'elle ne peut pas envisager l'avenir sans avoir un lien fort avec son voisin du sud qui n'est pas seulement l'Afrique du Nord, mais également l'Afrique toute entière » . 



NB : La politique française de sécurité et de défense en Afrique a toujours été une des composantes majeures de la puissance de la France en Afrique. Les accords de coopération ou d’assistance militaire technique (AMT) concernent 24 États africains : Afrique du Sud, Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Djibouti, Gabon, Guinée équatoriale, Guinée, Madagascar, Mali, Maurice, Mauritanie, Niger, Rwanda, Sénégal, Seychelles, Tchad, Togo et RDC.. Les accords de défense concernent 8 États africains (Cameroun, Togo, Gabon, République centrafricaine, Sénégal, Djibouti, Comores et Côte d’Ivoire). De nouveaux accords "de partenariat de défense" ont été signés avec les quatre premiers pays. Trois autres sont en négociation.

mardi 7 décembre 2010

Nil : quelles conséquences de l'indépendance du Sud Soudan ?



Le Nord et le Sud Soudan doivent négocier les termes de l’indépendance du Sud dans de nombreux domaines et les discussions sont lentes voir non entamées parfois. La question de la gestion et du partage des eaux du Nil en fait partie. Il faut garder en tête que le Soudan est le pays du Nil. Le Nil blanc venu du Burundi et du Rwanda rencontre le Nil Bleu venu des hauts plateaux éthiopiens à Khartoum. L’utilisation et le partage des eaux du Nil représentent un facteur d’instabilité majeur dans la région.


Pourtant cette question est loin d’être une priorité dans une région où la guerre menace. La question des conséquences de l’indépendance du Sud Soudan sur le partage des eaux du Nil est donc une question largement hypothétique et semble t-il pas d’actualité dans les négociations sur place.  Si cette question n’est pas prioritaire pour le Sud Soudan elle l’est pour d’autres acteurs du jeu politique régional comme l’Egypte.
Le traité actuel de gestion des eaux du Nil est celui conclu en 1929 entre l'Egypte et la Grande-Bretagne coloniale , puis revu en 1959 . Il accorde aux Egyptiens un quota de 55,5 milliards de m3 et de 18,5 mds aux Soudanais, soit au total 87% du débit du fleuve.

Les quote parts de l’Egypte et du Soudan sont fondées sur l’hypothèse d’une utilisation nulle des eaux du Nil par les riverains en amont. Cependant cette hypothèse n’est plus d’actualité aujourd’hui. Par ailleurs, toute augmentation du débit naturel du Nil sera partagée à part égales entre les 2 pays et non pas au prorata de leurs quote-parts. Le même principe d’égalité sera appliqué aux eaux traditionnelles résultant des travaux dans la région du Sudd (à négocier aujourd’hui). Or la séparation du Sud Soudan bouleverse le bassin du Nil et pose la question de la prise en compte des besoins de ce nouvel Etat en eau. La quote part du Soudan sera t–elle divisée entre le Nord et le Sud, le Sud aura-t-il le même statut que les pays en amont (donc hypothèse d’une utilisation nulle). La renégociation du traité de 1959 est une nouvelle fois posée.
IL faut être réaliste l'accord de paix de 2005 prévoyait une démarcation de la frontière entre le Nord et le Sud, or 5 ans plus tard la démarcation n'est toujours pas effectuée. De même un accord préliminaire sur le partage des eaux du Nil vient juste d’avoir lieu (fin novembre). Lors des négociations le Sud Soudan a réclamé la moitié de la quote part du Soudan (9 milliards de m3 d'après l'accord de 1959) : irréaliste ! Il y a eu beaucoup d’accord abandonnés au Soudan ça ne serait pas le 1er...




Accord de 1929 (milliard de m3)
Accord de 1959 (milliard de m3)
Egypte
48
55,5
Soudan
4
18,5
Non alloué
32
0
Stockage
0
10
Total
84
84