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vendredi 22 mai 2015

L’armée dans tous ses états. Armées, États, économies et sociétés en Afrique

La revue Afrique contemporaine publie un appel à communication sur les armées en Afrique. Vous trouverez ci-dessous l'annonce :
"L’objet de ce dossier est d’analyser les liens entre armées, États, économies et sociétés en Afrique aujourd’hui. Sur ces différents points, les armées jouent fréquemment un rôle de premier plan dans le parcours historique des pays africains depuis leur indépendance et dans la construction des États. La question alors posée est de savoir pourquoi et comment elles ont acquis une place aussi déterminante. Tel est l’objectif de ce dossier de la revue Afrique contemporaine.
Instruments du pouvoir, centre de/du pouvoir, mais aussi et souvent acteurs économiques et sociaux, les armées en Afrique sont des objets d’analyse incontournables pour comprendre la réalité africaine contemporaine. Il importe évidemment de prendre en compte la très grande hétérogénéité des armées selon les pays.
Dans de nombreux pays, la centralité de l’armée est incontestablement un legs de la période coloniale, elle-même fortement différenciée selon les « modèles » de colonisation, en ce qui concerne la continuité des acteurs, des structures administratives et institutionnelles, des registres d’action, des méthodes de gestion, mais, plus d’un demi-siècle après les indépendances, leur rôle et leur place dans les États, les sociétés et les économies ont évolué. 
 
 

Les armées en Afrique au cœur du politique

Dans le champ du politique et dans bien des pays africains, les forces armées sont souvent présentes sur le devant de la scène : soit pour s’emparer du pouvoir par les armes, et ce aux dépens des urnes (coups d’État, régimes militaires) ; soit pour apporter une réponse à des blocages politiques (Guinée, Mauritanie, Niger, Guinée Bissau) ou à des crises post-électorales ; soit pour jouer un rôle dans la neutralisation des affrontements entre des mouvements populaires et citoyens et les pouvoirs autoritaires en place (cas de la Tunisie ou de l’Égypte lors des « printemps arabes »). Et ce sans compter des régimes militaires ou des régimes politiques dominés, officiellement ou non, par des militaires, d’anciens militaires, des gardes présidentielles.
Il importe donc de contextualiser les différentes places des armées dans les pays africains. Certaines sont « faillies », « fragiles » ou « fragilisées », alors que d’autres dominent les champs social, politique et économique. En outre, elles sont de plus en plus concurrencées dans leurs fonctions régaliennes de détention du monopole de l’usage de la violence par des groupes armés de tous types (milices et groupes d’auto-défense villageoise, mouvements djihadistes, gangs, etc).
Dans les situations post-conflit, la réintégration des « rebelles » dans les forces armées et la construction d’une armée nationale (cas de la Côte d’Ivoire, du Mali) sont des enjeux centraux pour la construction de la stabilité des pays concernés. De plus, les armées nationales ont souvent des moyens limités, si bien que des forces étrangères, africaines ou non, régionales ou multilatérales, sont engagées pour pallier ces défaillances. Les conflits armés ont aujourd’hui changé de nature. Les guerres entre États, opposant des armées nationales, sont très rares et les affrontements armés relèvent actuellement d’enchevêtrement d’acteurs, si bien que les armées tendent à n’être que l’un d’entre eux.

Les armées : nouveaux acteurs économiques?

Beaucoup moins appréhendés par les sciences humaines et sociales, le rôle économique des armées ainsi que leur place souvent importante dans les économies de certains pays, en Afrique mais pas seulement, mérite de faire l’objet d’études scientifiques. Sur le continent africain en effet, les armées sont impliquées dans l’économie de rente ou de prédation, voire dans des activités illégales ou criminelles (la Guinée Bissau et le trafic de la cocaïne originaire d’Amérique Andine, etc.). De telles trajectoires résultent, dans certains cas, du fait que les forces armées sont soumises à de fortes contraintes budgétaires qui impactent notamment le paiement des salaires (RDC, RCA, etc.).
Mais, toujours dans le champ de l’économie, les armées sont aussi un régulateur d’activité et donc indirectement de l’emploi par le biais des entreprises qu’elles contrôlent. Cette implication dans l’économie peut aller jusqu’à la création de complexes militaro-industriels (il en est ainsi des oligarchies pétrolières en Angola ou en Algérie).

Les armées : catalyseur social?

Les armées jouent enfin un rôle social non négligeable comme lieu de formation, de socialisation et d’intégration des jeunes, de brassage de populations d’origines diverses, d’accès des femmes à des postes de responsabilité, voire de constitution d’une citoyenneté. Plusieurs pays ont par ailleurs institué des services civiques ou militaires à des fins de développement (Madagascar, etc.). Il en est plus ou moins de même par leur implication dans des programmes de désarmement, démobilisation et réintégration des combattants en fin de conflit, comme au Liberia, en Sierra Leone, en RDC ou en Côte d’Ivoire.
Souvent, seules institutions publiques structurées dans les pays au lendemain des indépendances, les armées ont développé des services publics. Elles ont souvent leurs propres dispositifs de protection sociale, conduisent des politiques familiales, gèrent des complexes hospitaliers (Égypte), font de la recherche. Plus largement, l’armée participe à la construction de représentations autour de la masculinité, de l’organisation familiale, de la division du travail et de la répartition des rôles sociaux, mais donne chair au monopole légitime de la violence (cf. les missions régaliennes de l’Etat selon Max Weber) versus la constitution de groupes d’autodéfense et la liberté (de jure ou de facto) de port d’armes.

Argumentaire

Diverses disciplines relevant des sciences humaines ont abordé, chacune avec leur approche et leur méthodologie, la question des armées en Afrique. Mais, elles l’ont généralement fait par le biais de chemins de traverse¬. Les relations internationales et la science politique, tout comme les War & Peace Studies anglo-saxonnes, privilégient traditionnellement dans l’étude des affaires militaires une approche que l’on pourrait qualifier de schizophrène. Dans le même ordre d’idée, le caractère belliqueux et violent des armées ou leur rôle dans les renversements de régimes politiques et les coups d’État sont mis en exergue. Inversement, telles un Janus bifrons, les armées peuvent être des acteurs clés de stabilisation, voire de « pacification » pour reprendre une nomenclature coloniale, du fait de leur implication dans les processus de construction de la paix (programmes de DDR mentionnés ci-dessus). Cette schizophrénie abolit la distinction entre temps de guerre et temps de paix et révèle de nouveau que les armées sont des acteurs incontournables de l’évolution politique des Etats.
L’abondante littérature sur les Réformes du Secteur de la Sécurité (RSS) et de la Défense ne s’est pas ou peu penchée sur ce qu’était véritablement l’armée dans les pays africains. Elle s’est davantage focalisée sur les échecs et les succès de cet outil, sous l’angle des composantes sécuritaires de l’aide au développement, sur les dysfonctionnements des forces armées et les moyens à mettre en œuvre pour les réformer. Ces RSS ont légitimé ainsi la communauté internationale pour intervenir dans un domaine qui relève de la souveraineté des États, ce qui, d’une certaine façon, renvoie aux programmes d’ajustement structurel, fort intrusifs, des années 1980 – 1990. Les approches « Sécurité et Développement » sont quant à elles devenues dans les années 1990 – 2000, tout comme la RSS, le parangon dans les pays du Sud d’une problématisation qui fait un large appel à la thématique de l’insécurité, et ce tant par la communauté internationale que par les agences de développement, qu’elles soient bi ou multilatérales. 
Sans nier l’apport de ces approches à la compréhension du fait militaire en Afrique et à la connaissance des armées, le grand absent est, paradoxalement, l’armée en tant que telle et ceux qui la composent, donc les militaires. 
Dans une optique pluridisciplinaire, à un carrefour entre sciences politiques, économie politique, sociologie, histoire sociale et anthropologie, ce dossier a pour ambition de repenser les armées en Afrique, leurs élites militaires tout comme les hommes de troupe. 
Ce numéro de la revue Afrique contemporaine sera donc centré sur le rôle social, politique et économique des armées en Afrique. Il visera à inscrire dans leurs parcours historiques et leurs contextes la place, dans différents domaines, des forces armées des pays africains et à analyser leur rôle spécifique dans l’histoire et les évolutions de ces pays . Il abordera également la différenciation au sein des armées et les possibles rivalités internes qui en découleraient : entre régiments, armes et corps, entre garde présidentielle et armée de terre, entre troupes d’élite (comme les régiments de parachutistes et l’infanterie). Et ce sans oublier la forte spécificité de la gendarmerie en Afrique. Il visera également à comprendre la place qu’occupent les forces armées nationales à côté des armées régionales ou multilatérales et des forces armées privées (mercenariats, sociétés privées de sécurité et de défense, milices, services de renseignement, etc.).
 Il accordera une attention particulière aux études de terrain (enquêtes, observations participantes, entretiens), mais également aux analyses comparatives et aux archives. Le travail quotidien, les relations de ces acteurs avec leur institution ou d’autres organismes de l’État, ainsi qu’avec les pouvoirs politiques et économiques, seront traités par les articles de ce dossier. Les trajectoires socioprofessionnelles pourront être mises en perspective afin de répondre aux questions : Que fait l’armée ? Qui sont ces hommes et ces femmes qui la composent ? Pourquoi ont-ils choisi d’embrasser les carrières militaires ou policières ? En quoi ont-ils le monopole de la violence légitime ? Comment se situent les gardes prétoriennes ou systèmes de sécurité présidentielle, proches des pouvoirs politiques, par rapport aux armées ? De quelle logistique disposent les forces armées en Afrique ? Quelle sont les sources de financements, les rémunérations et les équipements ? Comment les autorités nationales exercent-elles des arbitrages entre des dépenses militaires assurant la sécurité et les autres dépenses du budget de l’Etat, notamment sociales ?
L’objectif final étant de replacer ces réflexions dans le temps long de ce qu’est aujourd’hui l’armée en Afrique, mais également, par rapport aux ruptures liées à la nature des nouveaux conflits qui dominent en Afrique depuis la fin de la guerre froide (guerres asymétriques, emboîtements d’échelles, diversité des acteurs, etc.).
L’approche comparative s’attachera, ainsi de manière complémentaire, à décrypter les évolutions des armées, de leur organisation et de leur positionnement à la lumière des transformations de la conflictualité et l’émergence exponentielle de nouveaux acteurs, privés et publics, de la sécurité, qu’ils soient nationaux, régionaux ou internationaux et des rapports de pouvoir qui en découlent.
Il importera également d’expliquer pourquoi les armées ne sont plus exclusivement, ni souvent prioritairement, des institutions purement militaires et pourquoi elles investissent les champs social, politique et économique plus que ceux du sécuritaire et de la défense.

Conditions de soumission

Faire acte de candidature en envoyant une courte note d’une page (problématique du texte, exposé du déroulé de l’argumentaire, exposé des données, des sources et terrains mobilisés). 
Les articles devront avoir un format de 35 000 signes espaces compris (notes de bas de page et bibliographie comprises) dans leur version destinée à la publication, ainsi qu’un court résumé de 800 signes (espaces compris), des mots clés et la biographie de l’auteur (150 signes). Les auteurs pourront intégrer à leur article des iconographies (cartes, graphiques, photos, dessins, etc.)
Ils suivront la procédure d’évaluation scientifique auprès de deux référés anonymes et du comité de lecture d’Afrique contemporaine. La soumission des appels à propositions et des articles se fait sur la plateforme Editorial Manager à l’adresse suivante : http://www.editorialmanager.com/afriquecontemporaine/
Vous pouvez nous contacter pour toutes précisions aux adresses suivantes : ncnicolascourtin@gmail.com et fortuiti@afd.fr

Calendrier

Envoi de la proposition d’article : le 1er juillet 2015.
Réponse de la rédaction d’Afrique contemporaine aux auteurs : le 10 juillet 2015 au plus tard.
Envoi d’une première version des articles présélectionnés : le 1er septembre 2015.
Publication du numéro : mars 2016.

BIBLIOGRAPHIE 

Ouvrages:

  • Augé A., Kloursen, P. (dir.), Réformer les armées africaines. En quête d’une nouvelle stratégie, Paris, Karthala, 2010. Bangoura, D., Les armées africaines, 1960-1990, », CHEAM, Paris, 1992.
  • Bazenguira-Gonga, Makki S, (eds), Sociétés en guerre. Ethnographie des mobilisations violentes, Editions Maison des sciences de l’homme, Paris, 2013.
  • Belkaïd, A., Lehmici, H., Égypte, La toute-puissance de l’armée, …
  • Bourrat F (ed) La place et le rôle des armées dans le monde arabe contemporain, « Champ de Mars N°23, IRSEM, La documentation française, 2012.
  • Clapham, C., African Guerillas, Oxford: James Currey, 1998.
  • Courmont B, Ribrikar D, Les guerres asymétriques, IRIS, Paris, 2002.
  • Dawisha, A., Zartman, W., Beyond Coercicion: the Durability of the Arab State, Croom Helm, 1988 – 310 pages.
  • Daguzan, J.-F., Le dernier rempart ? Forces armées et politiques de défense au Maghreb, Publisud, Paris, 1998.
  • Daguzan J-F, « Armées et société dans le monde arabe :entre révoltes et conservatisme », Note N005/13 Fondation pour la recherche stratégique, pp1-14, Fev 2013.
  • Debos, M., Les armées au Tchad, Col (CERI) …
  • Decalo, S., Coups and Army Rune in Africa: Studies in Military Style, New Haven : Yale University Press, 1976.
  • Decalo, S., “The Morphology of Radical Military Rule in Africa”, Journal of Communist Studies, Volume 1, Issue 3-4, 1985.
  • Droz-Vincent, P., « Le militaire et le politique en Égypte », Maghreb-Machrek Monde Arabe, n°162, juillet-septembre 1999.
  • Dupont, H., « La nouvelle armée libanaise : instrument du pouvoir ou acteur politique », in Confluences Méditerranée, n° 29, printemps 1999 (sous le pseudonyme de Hubert Dupont).
  • Eboe Hutchful, Abdoulaye Bathily (dir.), The Military and Militarism in Africa, eds. Dakar : CODESRIA, 1998. – xiii-617 p. (CODESRIA Book Series).
  • Hamon, L. (ed), Le rôle extra militaire de l’armée dans le Tiers Monde, Entretiens de Dijon, PUF, 1966, in Vol 7 N°28 pp 795-798.
  • Hugon Ph, Géopolitique de l’Afrique et contributions dans Vettoglia J-P, Déterminants des conflits et nouvelles formes de prévention, Bruxelles, Bruylant, 2013.
  • Huntington S, The Soldier and the State, Cambridge Mass Press, 1957.
  • Janowitz, M., The Military in the Political Development of New Nations, University Chicago Press, 1964.
  • Marchal, R., « Les frontières de la guerre à la paix », Politix, N°58, 2002.
  • Messinga, E. C., Les forces armées camerounaises face aux enjeux militaires dans le golfe de Guinée: le cas du conflit de Bakassi, Master en science politique, Université de Yaoundé II-SOA, 2007.
  • Metogo, G., « Armées du Golfe de Guinée : Vers l’émergence de deux puissances sous-régionales », Revue africaine de défense, N°2, bureau d’étude et d’information, Yaoundé, 2000.
  • Moghira Mohammed Anouar, Les armées arabes et le pouvoir d’Etat. Militaires du peuple ou du régime? (XIXe-XXIe siècle), Karthala, 2015, 336 pages.
  • Mohamed Abde Elsalam, « The military and the developments in its role in the Arab World », in Carsten Jensen (ed.), Developments in Civil-Milatry Relations in the Middle East, Royal Danish Defence College, 2008.
  • Moncef, O., Militaires, élites et modernisation dans la Libye contemporaine, L’Harmattan, Paris, 2009.
  • Oren, B., The Lebanese Army: A National Institution in a Divided Society, State University of New York Press, 2009, 272 p.
  • Perlmuter, A., The Military and Politics in Modern Times, Yale University Press, 1977.
  • Perlmuter, A., Military and Politics in Israel: Nation Building and Expansion, Yale University Press, 1969.
  • Perlmuter, A., Egypt and the Praetorian State, Yale University Press, 1974.
  • Perlmutter A., Political Roles and Military Rulers, Franck Cass London, 1981.
  • Perouse de Montclos, M.-A., Les humanitaires dans la guerre, La Documentation française, Paris 2012.
  • Picard, E., « Arab Military in Politics : From Revolutionary Plot to Authoritarian State », in Giacomo Luciani (ed), The Arab State, Routledge, London, 1990.
  • Pichon,F « Les armées privées en Afrique », Géopolitique africaine, N° 28 oct-déc 2007 pp 153-184.
  • Rouquié, R., « Le rôle des forces armées en Amérique latine. Etat des travaux », Revue française de sciences politiques, 1969.
  • Rubin, B., Kennedy, T., Armed Forces in the Middle East : Politics and Strategy, Londion Franck Cass, 2002.
  • Seznec, J.-F., « Les forces militaires saoudiennes sous le règne de Fahd Abdelaziz », Maghreb-Machrek, n° 174, octobre-novembre 2001, pp. 38-51.
  • Sarkesian, S., The professional Army in a Changing society, Nelson-Hall Co, 1975. Paul R (ed), No Peace, no war. An Anthropology of Compares Armed Conflicts, Ohio University press 2005.
  • Siddiqa, A., Military Inc.: Inside Pakistan’s Military Economy, Pluto Press, London, 2007, 304 pages.
  • Sorensen, D. S., Civil-military relations in North Africa, Middle east Policy, décembre 2007, http://www.thefreelibrary.com/Civil-military+relations+in+North+Africa, p. 12.
  • Zartmann, W., Elites on the Middle East, 1966.

Dossier de revues :

  • « L’Etat militaire à l’épreuve des transitions », Revue internationale de politique comparée, vol 15, pp. 151-162, 2008.
  • « Military Marxist Regimes in Africa », Journal of Communist Studies, Volume 1, Issue 3-4, 1985.
  • « Militaires et pouvoirs au Moyen-Orient », Vingtième Siècle, Presse de Sciences Po, n° 124, 2014/4, 256 pages.
  • « Amérique latine : l’état militaire à l’épreuve des transitions », Revue internationale de politique comparée, vol. 15, n° 1, 2008, p. 153.

dimanche 9 décembre 2012

Nouveau numéro de Jambo



Le Comité « Afrique » de l’ANAJ-IHEDN est heureux de vous annoncer la sortie du numéro 5 de la revue Jambo



Au sommaire de ce numéro
- L’Angola lance son fonds souverain
- La Bancarisation de la paie des fonctionnaires
- Piraterie : L’anticipation béninoise
- Pages spéciales sommet de la Francophonie : interviews et enjeux.
- La formation des jeunes en Afrique, une composante sous-exploitée du processus de gestion de crise
- Quelle place pour un service de renseignement au sein d’un dispositif diplomatique ?
- Le fondateur de Blackwater s?intéresse aux infrastructures africaines ?
- PUBLICATION Julie d’Andurain, La capture de Samory . L’achèvement de la conquête de l’Afrique de l’Ouest.


Vous pouvez gratuitement télécharger le numéro ICI

mercredi 28 novembre 2012

Angola : un fond souverain ambitieux



Un ami, B.P., nous propose ce billet sur un fond souverain que vient de créer l'Angola.

Deuxième producteur d'or noir du continent africain, l'Angola a crée officiellement son fond souverain. Avec 5 milliards de dollars de dotation initiale, les ambitions du fond angolais sont un cran supérieures à celles du Gabon ou du Nigéria. 


Cette création reflète tout d'abord une stratégie de diversification entamée par un Etat fortement dépendant de ses recettes pétrolières. C'est d'ailleurs la rente pétrolière qui permettra au fond d'investir sur le territoire angolais. Au niveau nationale, le fond investira en premier lieu dans les infrastructures, le développement des PME et dans les secteurs de l'agriculture, de l'hôtellerie, de la formation ou encore de l'accès à l'eau et l'électricité. Ce nouveau fond affiche également les ambitions géopolitiques de l'Angola dont les autorités ont déjà fait savoir que le " Fundo Soberano de Angola" aura pour mission d'investir dans les économies émergentes avec pour zones de prédilection, l'Afrique et l'Asie. "Transparence, rentabilité des investissements et amélioration des conditions de vie des angolais" seront les principes qui guideront l'action du fond d'après José Filomeno dos Santos, président du Conseil d'Administration. Les autorités angolaises ont  d'ores et déjà fait  savoir que le fond se conformera aux principes de Santiago qui définissent les bonnes pratiques relatives à la gestion des fonds souverains.

samedi 3 mars 2012

L'Angola : nouvelle puissance régionale ?

Le 23 février, Thierry Garcin recevait dans son émission "les Enjeux internationaux", Antoine Glaser (journaliste et écrivain).

Résumé : "Luanda, qui est de plus en plus courtisée par les pays occidentaux pour ses exportations pétrolières, s'affirme de plus en plus comme une puissance régionale désireuse de concurrencer directement, sur de nombreux dossiers diplomatiques, l'influence des deux géants africains : l'Afrique du Sud et la Nigéria."



Cette question n'est pas nouvelle. En 1997, déjà, un article de Philippe Leymarie dans le Monde diplomatique s'interrogeait sur la puissance angolaise : "L’Angola, nouvelle puissance régionale". Lire aussi, l'article "L’Angola, une nouvelle puissance africaine" dans le journal Les Afriques. Ainsi que le numéro 110 de la revue Politique Africaine consacré à ce pays (ICI).

Réécoutez l'émission ICI

lundi 18 octobre 2010

Angola : se donner les moyens de la puissance



L'armée angolaise n'a pas a rougir de ses effectifs par rapport à ses voisins (107,000 hommes), son expérience dans le conflit avec l'Afrique du Sud puis en interne (la guerre a pris fin en avril 2002) et dans la région (RDC et Congo) est reconnue, pourtant le pays s'est peu investi dans le maintien de la paix sur le continent (seuls 2 hommes engagés dans la MICOPAX). Son rôle dans les conflits du continent est resté mineur :
- lors de la guerre civile au Libéria, ses efforts de médiation ont été largement éclipsés par le Nigéria ;
- en RDC, la diplomatie angolaise s’est surtout employée à soutenir le Président Kabila sans initiative d’envergure, contrairement à son autre rival l’Afrique du Sud ;
- sur le dossier du Zimbabwe, le Président Dos Santos a longtemps défendu sans nuance la légitimité du pouvoir du Président Mugabe.

Malgré tout l'Angola semble vouloir enfin s'engager, ainsi le gouvernement a répondu favorablement aux demandes du gouvernement somalien (sous la bannière ONU) et de la Guinée-Bissau (à la place des forces de la CEDEAO) de former leurs armées. Elle vient même de promettre 30 millions de dollars à la Guinée Bissau pour mettre en oeuvre la réforme de son secteur de sécurité et de défense.
C'est par ces initiatives que l'Angola peut espérer devenir, à échéance de quelques années, un acteur diplomatique de premier plan en Afrique.

samedi 9 janvier 2010

CAN 2010 : Foot, revendications indépendantistes et terrorisme…



Le car transportant les joueurs de l’équipe nationale de football des Eperviers du Togo a été attaqué à Cabinda vendredi alors qu'il franchissait la frontière entre le Congo-Brazzaville et ce territoire angolais, une bande de terre enclavée entre les deux Congo (Brazzaville et Kinshasa) et distant de 50 km du reste de l'Angola. Trois morts, deux joueurs et des dirigeants ont été blessés. L’attaque a été revendiquée par le tout nouveau mouvement de résistance du FLEC/PM (Forces de Libération de l’État du Cabinda/Position Militaire) Rodrigues Mingas, son secrétaire général s'est expliqué : "Nous regrettons que ce soit le bus du Togo qui a été pris pour cible. On n'a pas fait exprès de tirer sur un bus de joueurs. C'aurait tout aussi bien pu être le bus des Ivoiriens, le bus de n'importe qui... On est en guerre, tous les coups sont permis. L'Angola veut faire croire à une paix effective au Cabinda, mais la paix n'existe pas."
Dans son message de fin d'année, il l'annonçait déjà : "Les patriotes résistants du FLEC/PM, sont décidés à mener autrement la lutte réelle de libération de notre pays le Cabinda, dans ce challenge je peux vous dire que les choses sérieuses vont commencer (...) Veuillez recouvrir l’espoir, le changement arrive ! Oui, nous pouvons vous garantir que les choses vont bouger comme jamais et un vent nouveau va souffler sur la lutte de Libération Cabindaise dans les jours à venir pour le bien de notre peuple tout entier.".

Rappel historique : Cette zone tampon a longtemps été le témoin des rivalités européennes, du fait de sa position géographique, près de l’embouchure du fleuve Congo. Le royaume de Cabinda était sous le protectorat du royaume du Portugal à partir d’un traité signé le 1er février 1895 et cet acte constitue aujourd’hui le texte de référence des indépendantistes, puisqu’il établit juridiquement l’existence politique de Cabinda. Selon eux, la cessation du protectorat aurait dû s’accompagner d’un retour à l’indépendance de ce royaume Or en 1956, le Portugal a placé le Cabinda et l’Angola sous l’autorité d’un administrateur unique, sans modifier le traité, et en contradiction avec la constitution portugaise, qui distinguait ces deux territoires. En 1963, Henrique Tiago Nzita et Ranque Franck créent le FLEC (Front de libération de l’Etat de Cabinda) dont l’objectif est l’indépendance du Cabinda. Avant l’indépendance de l’Angola, le contrôle du Cabinda était vital pour permettre au MPLA (mouvement au pouvoir ayant lutté pour l’indépendance de l’Angola) d’acheter des armes avec la rente pétrolière (les gisements pétroliers d’Angola ne sont entrés en exploitation qu’à partir de 1980).
En 1975, quelques mois avant l’indépendance de l’Angola trois mouvements politico-militaires indépendantistes angolais et le Portugal ont proclamé le rattachement du Cabinda à l’Angola. En 2002, à la fin de la guerre civile angolaise, Cabinda n’est pas pacifiée. Pourtant depuis 2006, le gouvernement central assure que l'enclave l’est en raison de la signature d'un accord de paix avec Antonio Bento Bembe, un des dirigeants politiques du FLEC. Cette guerre larvée se poursuit et l’action des forces gouvernementales contre la population civile continue à ternir l’image de l’Angola à l’étranger. (voir le rapport de Human Rights Watch en juin dernier ICI)
(drapeau de Cabinda)

Mode d’action :
Au début des années 1990 les grandes puissances, attirées par la manne pétrolière se sont désintéressées des indépendantistes. En outre, en 1991 les soldats cubains ont quitté l’Angola, et les militaires sud-africains la Namibie. Les mouvements armés indépendantistes cabindais ont donc changé leur tactique pour obtenir des fonds et ont commencé à prendre des otages parmi les étrangers salariés des grandes entreprises. Cette tactique a partiellement fonctionné puisque des négociations se sont ouvertes avec le gouvernement angolais. Mais l’incapacité des indépendantistes (notamment) à unifier leurs stratégies a sonné le glas des négociations. Ainsi, l’accord de paix signé à la mi-2006 avec le Front de libération de l’enclave de Cabinda prévoyait notamment la nomination de nouveaux vice-ministres dans plusieurs zones mais il n’a pas tardé à être dénoncé par certains des leaders du Front, qui avaient été exclus des négociations.

La solution militaire reste l’hypothèse envisagée par le gouvernement angolais face à cette multitude de groupuscules. Au niveau international la division du camp indépendantiste a rendu le message cabindais inaudible. Ayant perdu leurs soutiens régionaux, les indépendantistes recherchent de nouveaux alliés.

Le chemin vers la paix ?
: Il n’y a aucune force de maintien de la paix actuellement, ni l’Union Africaine, ni les Casques bleus. Plusieurs médiations se sont succédées sans succès : Omar Bongo en 11997 et 1998 (président du Gabon) et Sassou Nguesso en 2006 (président du Congo Brazzaville).

L'occasion tendue par la CAN 2010 est unique : les médias internationaux et les observateurs pourront s’intéresser à la cause cabindaise.

L'occasion est donnée pour le FLEC de Nzita de revendiquer ouvertement l'indépendance du Cabinda. Mais à quel prix ? Le risque est grand pour le mouvement indépendantiste de discréditer sa cause en frappant au hasard par des actions terroristes.

Après les affrontements liés au match Egypte/Algérie, et cette attaque pour médiatiser une cause, le football apparaît comme un reflet actif du monde. Pour Pascal Boniface, penseur de la géopolitique du foot, il existe un parallèle entre football et mondialisation, parce que le football s’est étendu à l’échelle planétaire et le foot reflète les tensions géopolitiques :
- affrontements entre les supporters croates du Dynamo de Zagreb et les Serbes de l’Étoile rouge de Belgrade avant la désagrégation de la Yougoslavie,
-lors de la phase éliminatoire de la Coupe du monde 1958, les pays du groupe Afrique-Asie ont refusé de jouer contre Israël.
- en1966, quinze pays africains susceptibles de participer à la Coupe du monde en Angleterre décident de se retirer, en raison de la sous-représentation de leur continent.
- plus récemment, les tensions entre l’Algérie et l’Egypte qui reflèteraient selon Pascal Boniface deux visions du nationalisme arabe.

- la participation de la Corée du Nord à la prochaine coupe du monde en Afrique du Sud permettrait à Pyongyang de redorer son image.
Donc, le football est devenu un instrument diplomatique. Il permet de promouvoir une image plus ou moins positive du pays, d’endiguer ou de prolonger des tensions régionales.

Site du FLEC : ICI
La vidéo de l'évènement sur France 24 (interview de joueur après l'attaque) : ICI
Le récit d'Adedayor le capitaine de l'équipe du Togo : ICI

Sources : Le Monde / « Les indépendantistes dans l’impasse au Cabinda » par la Commission des recours des réfugiés de la Cour National du droit d’asile /Cabinda Monde Info

mercredi 30 décembre 2009

Achat des terres agricoles (2/2) : une opportunités de développement ?



Suite du précédent billet "Terres agricoles (1/2) : les richesses agricoles africaines".
La guerre pour le contrôle des terres agricole dans les pays pauvres est ouverte. Mais « la terre est une patate chaude » (Jacques Diouf, directeur de la FAO). Explications :
1) Les acheteurs : La Chine (40% des agriculteurs du monde pour 9% des terres agricoles de la planète) a signé une trentaine d’accords avec des entreprises chinoises pour un accès aux terres agricoles étrangères qu’elles louent ou achètent afin d’y installer des exploitations de riz, soja, maïs…, l’Inde, le Japon, la Malaisie, la Corée du Sud, l’Egypte, les Emirats Arabes Unies, la Libye, Bahreïn, la Jordanie, le Koweït, le Qatar, l’Arabie Saoudite, l’Afrique du Sud. Dans le cadre du Conseil de Coopération du Golfe, les Etats du Golfe ont conclu des accords « pétrole contre terres agricoles pour leurs entreprises.
2) Les pays d’accueil : le Soudan, le Kenya, l’Ethiopie, et la Somalie principalement mais la plupart des pays africains également soulignant les retombées économiques pour leur pays (infrastructures..)

- Genèse :
La hausse du prix des matières premières agricoles : Jusqu’en 2003, les prix des principales matières premières étaient inférieurs à leur valeur d’il y a 20 ans. Puis, le resserrement de la situation mondiale de l'offre et de la demande céréalière a entraîné une hausse des prix de toutes les céréales.
Pour la plupart des économistes, la hausse quasi générale des prix des matières premières depuis à peu près 2003 n'est pas qu’une poussée conjoncturelle mais un phénomène de fond structurel. L’édition 2007 du Cyclope donne son opinion : « Au-delà des aléas climatiques, il semble évident que le trend des prix agricoles mondiaux (pour les grandes productions végétales) sera orienté à la hausse sur les prochaines décennies : la rechute des prix (comme cela fut le cas dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix) parait exclue sur longue période du fait de la dynamique de la demande alors même que les obstacles au développement harmonieux des biotechniques sont loin d’être tous levés».
On peut relever cinq raisons majeurs de la hausse des cours des matières premières.
La première concerne la hausse de la consommation mondiale, la demande mondiale qui va croissant depuis plusieurs années, du fait de la poussée de la Chine et d’autres pays émergents (Inde notamment). Face à cette poussée du coté demande, l’offre réagit. En outre, la hausse des prix des produits agricoles s’explique par l’augmentation de la population et de l’évolution des modes de consommation dans ces mêmes pays émergents. De même, la hausse de la demande mondiale nécessiterait d'augmenter de 20 % à 30 % les surfaces cultivées ; on peut difficilement, sauf à provoquer des déforestations, dans le bassin du Congo par exemple. Il faudrait alors augmenter la productivité ; or il serait nécessaire de recourir aux OGM qu'une partie de l'opinion refuse.
L’autre explication tient aux craintes pesant sur la production. La guerre en Irak, la crise au Moyen-Orient, en Iran, les politiques menées au Venezuela et en Russie entament la confiance des marchés énergétiques.
Ensuite, la production ne suit pas la consommation. Ainsi, les récoltes ne sont pas forcément en baisse mais elles ne suffisent pas à couvrir la demande et à remonter le niveau des stocks.
L’essor des agro carburants (biocarburants) à travers le monde commence à concurrencer la production alimentaire, et à bouleverser le jeu. Les Etats-Unis conservent leur maïs pour le transformer en bioéthanol, et ne l’écoulent donc plus sur le marché mondial. Selon le rapport 2007-2016 de l’OCDE et de la FAO, la production d’agro carburants devrait augmenter de façon drastique et provoquer une hausse importante des prix des produits alimentaires. En Afrique, plusieurs projets « biocarburants » voient le jour. La compétition entre les cultures vivrières et énergétiques devrait rapidement exploser. La concurrence pour la terre arable profiterait en outre aux gros producteurs de monocultures, aux dépens de petits producteurs vivriers.
Les aléas climatiques ont des incidences toutes particulières sur les économies africaines, dépendantes de leurs ressources en matières premières. Durant les dernières années, la raréfaction des pluies (d’autant plus que le réseau d’irrigation est très limité) ou leur violence lorsqu’elles surviennent (Mozambique), a accru les handicaps. En outre, la déforestation, la désertification de nouveaux espaces, les invasions d’insectes entament le potentiel agricole du continent.

Cette dynamique est mondiale :
- l’Egypte a signé un contrat avec le Soudan, pour produire du blé dans le Nord du pays,
- en août 2008, la compagnie suédoise Alpcot-Agro exploitait 135 000 ha en Russie pour les céréales et les oléagineux.
-Mitsui (Japon) a acheté en novembre 2007, 100 000 ha de terres agricoles au Brésil pour produire du soja
- en 2008, le gouvernement libyen échange fourniture de gaz et de pétrole contre l’exploitation de 250 000 ha de terres en Ukraine.
- la Chine a acquis ces dernières années des centaines de milliers d’hectares de terres au Cameroun, en Australie, au Laos, aux Philippines

Intérêts des pays vendeurs ou loueurs :
- Ce sont des pays souvent peu peuplés ;
- disposant de vastes réserves de terres cultivables : au Mozambique ou en Angola, par exemple, seules 10 % des terres seraient aujourd’hui exploitées.
- Ces terres ne sont pas chères.

Opportunités de développement ou néocolonialisme ? :
Ces pays manquent d’infrastructures et de matériels (entrepôts, silos, routes…) pour soutenir une production agricole et justement les pays acquéreurs ou les sociétés privées peuvent les financer.
Problèmes :
- en créant des marchés non concurrentiels, ces acquisitions contournent les règles du commerce international
- certains achats de terre ne relèvent pas d’une logique de développement agro-industriel, mais d’une logique financière (achat par des hedge funds, c’est-à-dire des fonds d’investissement).

D’ailleurs, les cartes de la sous alimentation et celles des pays loueurs ou vendeurs de terres se superposent comme le Soudan qui a bénéficié de la plus grosse opération du PAM (Programme Alimentaire Mondial) en 2008.



La lettre de l’Océan Indien nous apprend que l’Ethiopie sera à l'honneur d'un des premiers reportages de la nouvelle émission Terre d'enquête d’M6, présenté par Guy Lagache. L’émission enquête sur la cession des terres et aurait connu quelques difficultés de tournage dans le pays.

Sources :
CHALMIN (Philippe), « Les marchés mondiaux », Paris, 2007, Cyclope
La Lettre de l’Océan Indien
« Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2007-2016 », OCDE/FAO, 2007, 97p.
« Terres agricoles : une autre délocalisation? », in Le Dessous des cartes, 26/06/09, ARTE