dimanche 20 octobre 2013

Good Morning Afrika dans les médias

A la suite de l'attaque du Westgate Mall à Nairobi, nous avons eu l'occasion d'intervenir à plusieurs reprises dans les médias, nous vous proposons ici les liens vers ces interviews :



- "Affaiblis en Somalie les Shebab ont porté la terreur au Kenya, " dans Libération le 24 septembre 2013 : ici

- "Actualité internationale - Attentat de Nairobi : du conflit régional au jihad global", CulturesMonde (France Culture), le 27 septembre 2013, ici

- "Y a-t-il un projet panislamiste radical en Afrique?", Du grain à moudre (France Culture), le 15 octobre 2013, ici

-"Les Shebabs sont affaiblis, mais pas faibles. Malgré des dissensions internes, l'organisation terroriste garde une forte capacité de nuisance", Slate Afrique, le 16 octobre 2013, ici

jeudi 17 octobre 2013

L’UNESCO ou la victoire de la Realpolitik

Le 4 octobre dernier, la directrice générale sortante de l’UNESCO, Irina Bokiva, était réélue pour quatre ans à son poste, au premier tour de scrutin par 39 voix sur 58. Ils étaient trois en lice pour prendre la tête de l’Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture: la directrice sortante, la Bulgare Irina Bokova, le Franco-Libanais Joseph Maïla et le Djiboutien Rachad Farah. La défaite est rude pour ce dernier, qui jouait la course à la victoire jusqu’au dernier jour.


L’ambassadeur, représentant du Sud, avait réussi l’exploit de recueillir les promesses de votes des 14 représentants africains, de l’Union Africaine, de l’IGAD et de l’OCI, soit 25 voix au total, qui, si elles avaient été tenues, lui auraient au moins permis d’accéder au second tour. Auditionné le mercredi 2 octobre par le conseil exécutif de l'institution les échos sont bons, l’ambassadeur a réussi son grand oral. Comment expliquer cette défaite ? Les promesses de vote ne se sont pas avérées suffisantes puisque Rachad Farah n’a finalement recueilli que 13 voix, et le candidat du Liban, Joseph Maila, en a recueilli 6. Rachad Farah a confié à Jeune Afrique qu’« une fois de plus la solidarité multilatérale n’a pas fonctionné. Elle n’est qu’une déclaration d’intention sans conséquence concrète ».

Les défections sont à compter parmi les membres de l’OCI en particulier l’Arabie Saoudite, Bangladesh, Pakistan et l’Egypte. L’Algérie, quant à elle, lui a donné sa voix. Les appels de l’Ethiopie et les consignes de vote de l’UA en faveur du candidat djiboutien ne sont pas avérés suffisants. Le Congo Brazaville, le Gabon, le Mali, le Burkina Faso et la Tunisie n’ont su s’autonomiser et se sont alignés sur le vote de la France en faveur de la candidate sortante. Selon la Lettre de l’Océan Indien, celle-ci aurait bénéficié du lobbying de Jean-Paul Carteron « fondateur et président du Crans Montana Forum, ambassadeur des Iles Salomon auprès de l’UNESCO et consul honoraire de Bulgarie à Monaco ».
NB : La victoire est revenue au candidat ayant obtenu 30 voix sur un total de 58 pour une réélection au premier tour par le Conseil exécutif de l'Organisation. Ce dernier est composé de 58 membres. Les votes se font à bulletins secrets. Composition du  Conseil Exécutif : ICI

Le programme de Rachad Farah : ICI

Les oppositions : ICI

lundi 14 octobre 2013

Le groupe al-Shabaab et l’attaque de Nairobi (2/2)

Nous vous proposons ici la suite d'une note publié pour le CDEF dont la première partie est parue hier.

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 La prévisible attaque du Westgate Mall

Le Kenya, une cible idéale

Les incursions répétées des Shebabs et de diverses milices armées en territoire kenyan, la découverte de réserves d’hydrocarbures dans le Nord et donc la nécessité de sécuriser cette zone, ainsi que les enlèvements de touristes britanniques, français et espagnols sont autant de motifs d’intervention qui précipitent l’opération kenyane Linda N’chi le 14 octobre 2011 . Cette intervention laisse craindre un enlisement des troupes kenyanes qui sont, quelques mois plus tard, intégrées à l’AMISOM dont le concept stratégique est révisé. En effet, cette mission se limite alors au contrôle de quelques quartiers de la capitale somalienne. De plus, elle a beau être une mission multinationale elle était essentiellement composée de troupes ougandaises et sous commandement ougandais. Il s’agit également de renforcer les moyens de la mission.


Les Shebabs promettent alors des représailles qui ne tardent pas à suivre . Le 24 octobre 2011, deux attaques à la grenade font trois morts et 25 blessés à Nairobi. Les Etats-Unis avertissement également de l’imminence d’attaques contre des lieux fréquentés par les étrangers (centre commerciaux, boîtes de nuits, etc). Les attaques, attribuées à des militants Shebabs en territoires kenyans se multiplient en novembre 2011 et en 2012 (on pense notamment à l’attaque contre les églises de Garissa en juillet). Le 7 janvier 2012 les Shebabs diffusent une vidéo déclarant que le Kenya est une « House of war ». Le Kenya est une cible d’autant plus facile pour les Shebabs qu’ils auraient établi une présence permanente au Kenya dès juillet 2011, en particulier au sein de la large diaspora somalienne et la population somalie résidant le quartier de Eastleigh à Nairobi et le camp de réfugiés de Dadaab dans le Nord. Des réseaux semblent aussi établis avec les non somalis à Eldoret et sur la côte .
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Par ailleurs, rappelons qu’au début des années 1990, Al-Qaïda n’était pas parvenu à s’implanter en Somalie. D’une part, parce que la population se méfiait de ces étrangers qui prônaient un islam peu populaire en Somalie. Ce sentiment était exacerbé par la xénophobie des milices armées locales. D’autre part, Al-Qaïda ne semble alors pas avoir mesuré l’importance de l’islam traditionnel, spécifique à la Somalie , et les représentants de la nébuleuse ne surent pas s’adapter aux renversements fréquents d’alliances entre clans et sous-clans et durent faire face à des difficultés logistiques considérables, au manque de sécurité, etc. En revanche, la nébuleuse aurait réussi à établir des réseaux au Kenya où le comorien Mohamed Fazul Abdallah la représentait. Ces réseaux planifient les attaques contre les ambassades américaines de Nairobi et de Dar-Es-Salam en 1998, ainsi que les attaques de Mombassa en 2002. L’essor des Shebabs redonne une seconde vie à ces réseaux.

Une attaque à l’envergure surprenante

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Le 21 septembre 2013, armé d’armes légères, de fusils d’assaut et de grenades, un commando d’une dizaine d’individus, d’ethnie somalie et de différentes nationalités, a pénétré dans le centre commercial de Nairobi, le Westgate Mall. Revendiquée par le porte-parole des Shebabs, cette attaque est commentée en direct par les militants du groupe sur twitter, via différents comptes, au fur et mesure de leur suspension par l’administration du réseau social.
Cette attaque rappelle fortement celle de Bombay en novembre 2008. Elle est remarquable par son envergure. C’est la première fois que les Shebabs effectuent une prise d’otages de cette ampleur, avec l’impact psychologique que cela implique au niveau national et international. Une opération de communication menée avec succès donc. Le choix de cette cible, un centre très fréquenté le samedi par les kenyans de diverses communautés et les expatriés, révèle une grande préparation, la volonté d’avoir un impact médiatique internationale et le désir d’instaurer un climat de peur. Les Shebabs voyant leur ambition de prendre le pouvoir en Somalie s’éloigner, leur stratégie semble être de déstabiliser les régimes ennemis dans une sorte de stratégie d’exportation de la guerre au-delà des frontières somaliennes. Enfin, l’attaque révèle « un véritable saut qualitatif et le passage à une autre dimension opérationnelle ».
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Les conséquences de l’attaque pour le Kenya

L’attaque du Westgate Mall risque d’avoir des répercussions plus graves que les attentats de 1998 sur le Kenya. En premier lieu, l’image du pays se trouve dégradée et les recettes touristiques, dont dépend fortement l’économie nationale, pourraient s’en trouver diminuées. Politiquement cette attaque pourrait renforcer la légitimité du mandat du Président Kenyatta alors même qu’il était, avec son vice-Président, inculpé de crimes contre l’humanité par la Cour Pénale Internationale, suite aux émeutes ayant suivi les élections de 2007. Néanmoins, la cohésion nationale et l’unité du pays face à cette attaque risque d’être limitées dans le temps. Les communautés somalies, considérés avec une certaine suspicion par les autorités de Nairobi en raison des revendications sécessionnistes de la post-indépendance et de la porosité actuelle de la frontière avec la Somalie qui permet tous

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les traffics, ainsi que les communautés musulmanes, déjà marginalisées et occupant des territoires pauvres, pourraient porter le prix de la responsabilité aux yeux des autres Kenyans, au risque de pousser les plus jeunes membres de ces communautés à rejoindre les groupes jihadistes ou sécessionnistes (le Monbassa Republican Council par exemple). En effet, La pauvreté et le sentiment de marginalisation sont les meilleurs agents recruteurs et le défi est grand pour le régime kenyan qui avait déjà la responsabilité de tourner la page des divisions internes, de réformer l’Etat suite à la nouvelle Constitution adoptée en 2010.

dimanche 13 octobre 2013

Le groupe al-Shabaab et l’attaque de Nairobi (1/2)

Nous nous proposons de reproduire ici, la première partie d'une note réalisée pour le Centre de Doctrine et d'Emploi des Forces (CDEF).

Le 21 septembre 2013, le groupe Harakat al-Shabab al-Mujahideen revendiquait une fusillade dans le Westgate Mall, un centre commercial de Nairobi. La prise d’otages qui suivit fût exceptionnellement longue et meurtrière avec 68 morts et près de 200 blessés. Alors qu’on pensait le groupe terroriste affaibli par des dissensions internes et par la perte de contrôle d’une partie du territoire de la Somalie du Sud, cette action, montre que sa capacité de nuisance reste intacte et marque une évolution dans la stratégie du groupe. Avant de revenir plus en détail sur l’attaque de Nairobi et ses répercussions (2), il convient de comprendre l’évolution du mouvement (1).


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Al-Shabaab, un mouvement jeune à l’internationalisation récente

Al-Shabaab signifie « jeune/jeunesse » en arabe. Ce groupe l’est pour deux raisons : son émergence récente et sa composition. En effet, l’utilisation du terme « Shebab » est, au départ, une appellation générique reflétant la jeunesse de ses membres. La déliquescence de l’Etat somalien, après la chute de Syaad Barre en 1991, et la succession de conflits qui suivirent, générèrent un contexte idéal à la « mooryanisation » et au recrutement de jeunes par des mouvements combattants comme les Shebabs. Un recrutement souvent plus opportuniste qu’idéologique.

De l’émergence d’un groupe local…

Les informations concernant la genèse du mouvement sont rares et discordantes mais on peut retenir que le groupe aurait été fondé en 2002/03 par d’anciens combattants jihadistes revenus d’Afghanistan. Entre 2004 et 2006, ce groupe, qui s’apparente alors à une milice, se rapproche de l’Union des Tribunaux Islamique (UTI). Après l’intervention éthiopienne, la défaite de l’UTI en décembre 2006 et le ralliement de Cheick Sharif Cheick Ahmed, un ancien chef de l’Union des Tribunaux Islamiques, au gouvernement fédéral de transition, les Shebabs deviennent un véritable groupe à l’idéologie et l’organisation propre, et le premier groupe insurrectionnel du pays. Son objectif est alors d’amener les troupes étrangères à se retirer de Somalie, de renverser le Gouvernement Fédéral de Transition (GFT), et d’imposer un régime islamiste régit par la Sharia. L’objectif du mouvement reste d’instaurer un Emirat islamique sur l’ensemble du territoire somalien, comme préalable à la réalisation de l’Umma. Les objectifs du mouvement ont évolué, jusqu’à projeter d’étendre son action au-delà du territoire national somalien dans une vision pansomalienne. Dès 2009, le groupe révélait clairement ses ambitions transnationales, bien qu’on puisse penser que dans le contexte de l’époque cela relevait plus de la propagande afin d’attirer des combattants et des financements étrangers.

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…au développement d’un mouvement combattant transnational

Les liens avec la nébuleuse globale Al-Qaïda sont de plus en plus forts. Dès 2006, le mouvement se rapproche d’Al-Qaïda . En réponse, Ben Laden relaie les accusations de trahison portées par les Shebabs à l’encontre du nouveau président somalien, Cheick Sharif Cheick Ahmed, qu’ils comparent au président afghan Hamid Karzaï et appellent au jihad contre son régime. Les Shebabs prêtent ensuite formellement allégeance à Al-Qaïda et Al-Zawahiri reconnaît le ralliement du groupe à la nébuleuse en février 2011.

Le 11 juillet 2010, le groupe montre qu’il a les capacités et l’ambition d’étendre son champ d’action à des cibles au-delà des frontières somaliennes. Il mène sa première grande opération en dehors de Somalie, des attentats-suicides pendant la retransmission de la coupe du monde de football à Kampala en 2010. L’Ouganda est visé en représailles à son engagement au sein de la mission de l’Union Africaine en Somalie (AMISOM) et à la présence de milliers de soldats ougandais en Somalie. Le groupe est de plus en plus actif dans la région. Dès 2010, il mène également de nombreuses incursions dans le Nord du Kenya contre les forces kenyanes.
Suite à l’intervention kenyane de 2011 et au recul des Shebabs sur le terrain, l’idéologie globale a pris le pas sur une idéologie initialement nationale qui visait à défendre le pays contre la présence éthiopienne, assimilée, de façon caricaturale, à une invasion chrétienne, bien que les forces étrangères présentes en Somalie (Ethiopie, Kenya, Ouganda, Burundi, etc.), et leurs soutiens, restent des ennemis à combattre.

Un basculement vers la guérilla et le terrorisme conséquence d’un repli sur le terrain

Les premières cibles des Shebabs sont les représentants du Gouvernement Fédéral de Transition, les forces de sécurité somaliennes, les personnels de l’AMISOM et leurs alliés en Somalie. L’attaque de Kampala en 2010 marque donc un premier tournant dans la stratégie du groupe. De même, si les premiers raids en territoire kenyans sont limités, des attaques en 2010 et 2011 contre des postes de sécurité kenyans proches de la frontière, marquent une nouvelle étape.


En général, les Shebabs évitent de s’engager directement face à une armée conventionnelle. Après le départ des troupes éthiopiennes en 2009, les insurgés Shebabs sont parvenus rapidement à prendre le contrôle de villes de province sans beaucoup combattre. En effet, les forces gouvernementales et les milices locales étaient soient absentes, soient incapable de faire face à ce type d’insurrection. De fait les Shebabs rencontrèrent peu de résistance. Néanmoins, si des alliances locales leur permettent d’intervenir sur des zones étendues, le contrôle social n’y est pas direct. Le morcellement du territoire somalien ne doit pas être appréhendé comme une logique de blocs. Les membres d’Al-Shabaab sont présents sur tout le territoire mais ils n’en contrôlent que certaines parties. En réalité, le contrôle effectif du territoire par le groupe est assez faible.
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Lorsqu’ils ont commencé à reculer, et à perdre leurs fiefs notamment le port de Kismayo qui était un vecteur de ressources important, les Shebabs ont adopté des tactiques de la guérilla. Ce fut notamment le cas à Mogadiscio lors de leur retrait en août 2011. Le porte-parole des Shebabs le qualifiera de « retrait tactique » et le groupe est alors passé d’une guerre de position, afin de conserver le contrôle de la capitale, à de la guérilla urbaine. Une tactique privilégiée au fur et à mesure que les Shebabs perdent le contrôle de nombreuses villes majeures du Sud du pays.
Les influences extérieures se reflètent dans l’utilisation de moyens longtemps ignorée en Somalie comme les engins explosifs improvisés et surtout les attentats-suicides auxquels ils ont recourt dès 2006. Le groupe utilise de plus en plus les assassinats politiques. En juin 2011, il utilise pour la première fois une femme kamikaze afin de tuer le ministre de l’Intérieur du GFT. Certains rapports évoquent également le développement de capacités maritimes.

lundi 16 septembre 2013

Sahel : soutien aux otages

10 Français sont actuellement détenus en otage dans le monde. Parmi eux, Pierre Legrand, originaire de Couffé, est retenu prisonnier depuis le 16 septembre 2010 au Sahel avec trois compagnons, Marc Féret, Thierry Dol et Daniel Larribe. Les associations Otages du Monde et Soutien aux otages d’Arlit lancent en soutien aux otages et à leurs familles, pour un grand rassemblement ce samedi 21 septembre 2013 à la Cité des Congrès de Nantes à partir de 14 heures


L’auteure de ce blog a l’honneur d’y être invitée et d’apporter par ce biais son soutien aux familles des otages. Cette journée est dédiée aux otages pour ne pas les oublier et  exiger leur retour au plus vite ! Elle se tiendra sous  le parrainage et en présence de Madame Ingrid Betancourt, avec le soutien de Nantes Métropole et de la Ville de Nantes.
En première partie, une table ronde sera animée par Benoît Duquesne (France Télévision), sur le thème : 

« Où va le Sahel ? Enjeux pour les otages ».

Des experts seront présents : Serge Michaïlof, auteur, chercheur associé à l'IRIS, ancien directeur à la Banque Mondiale et à l'AFD, Sonia Le Gouriellec, enseignant chercheur, ainsi que des journalistes anciens otages  Philippe Rochot, Jean-Louis Normandin.

En deuxième partie, des témoignages alterneront avec des prestations d'artistes ayant souhaité exprimer ainsi leur soutien : musiques, chants, poèmes, seront  interprétés par des musiciens, comédiens et chanteurs qui apportent leur soutien à tous les  otages détenus dans le monde. Parmi eux  Jean-Louis Jossic (Tri-Yann), Michel Valmer (comédien),  Mood (chant), Daniel Trutet (violoncelle), Cécile Gravot (harpe), Doremus et Ben Vover (chant), les groupes Moustache Museum et After the bees….

vendredi 6 septembre 2013

Saisissant "A Hijacking" (fiche ciné)

En 2007, le MV Rozen et son équipage (six Kenyans et six Sri lankais) étaient capturés par des pirates au large de la Somalie. Après 40 jours de négociations le cargo était relâché. On le sait de la réalité à la fiction il n’y a qu’un pas qu’a franchi avec brio le réalisateur danois de « A Hijacking – Kapringen ». Ainsi, dans ce film sorti en France le 10 juillet dernier, on retrouve le MV Rozen au cœur d’une prise d’otage.



Le scénariste de Borgen (de nombreux acteurs de la série sont présents dans le film) et réalisateur, Tobias Lindholm, signe ici un drame aux accents de thriller. On peut y suivre la mésaventure de Mikkel (Pilou Asbaek), sympathique cuisiner du cargo dont le cargo est détourné par des pirates somaliens. Néanmoins, ce sont les négociations qui sont au cœur de ce film. D’ailleurs, celui-ci s’ouvre sur une scène de négociations entre le chef de la compagnie maritime où travaille Mikkel et des hommes d’affaires japonais, sur le montant
d’un accord. Les négociations sont rudes mais Peter, froid et sûr de lui, obtient le montant qu’il souhaitait alors qu’il fait mine de quitter la table de négociations. Cette scène donne le ton du film qui, plus qu’un film sur la piraterie (on ne voit pas l’abordage), est un drame au suspens éprouvant où les négociations pour délivrer les otages mettent le spectateur dans une angoisse permanente.

Tout au long du film, le pirate Omar, mène les négociations de sa cabine à bord du Rozen. Il semble être le chef des pirates bien qu’il s’en défende violemment, refusant d’être réduit à ce statut. Il se présente comme un simple intermédiaire chargé de la traduction. A plusieurs milliers de kilomètres, Peter décide de mener lui-même les négociations, comme il a l’habitude de le faire dans ses affaires, et contre l’avis d’un consultant extérieur engagé pour superviser les procédures. Il se donne pour objectif de faire baisser la rançon de départ qui s’élève à 15 million de dollars. Le leadership et la prise de décision en situation de crise sont autant de thématiques abordées par ce film. On voit le pirate, Omar, utiliser le chantage émotionnel sur les otages pour arriver à ses fins et faire plier Peter. Mais rien n’y fait, le temps s’écoule, les jours se transforment en semaines puis en mois. Les personnages sont épuisés. Peter, le chef d’entreprise danois, qui paraissait froid et très sûr de lui au départ, semble douté de sa capacité à mener sans émotion ces négociations. On le voit faiblir, douter, perdre le contrôle.


A aucun moment l’Etat danois n’intervient. L’action se passe uniquement entre les cabines du Rozen et le bureau de Peter transformé en cellule de crise. Cette ambiance calfeutrée met le spectateur dans une atmosphère de tension. On apprécie tout particulièrement le réalisme de la réalisation. Tobias Lindholm montre les difficultés quotidiennes des membres de l’équipage (saleté, promiscuité, manque de nourriture et d’eau). L’angoisse monte et le désespoir apparaît. Les otages tuent le temps avec les pirates, apprennent à les connaitre, rient avec eux (et d’eux) parfois, bien qu’ils ne parlent pas la même langue. Ils apparaissent comme de véritables businessman et bien qu’Omar leur négociateur se défende d’être un pirate, on comprend qu’il n’en est pas à son premier coup d’essai.

Il n’y a pas vraiment de méchants dans A Hidjaking. Les pirates ont un visage et une rationalité que le simple récit, voir décompte statistique froid des actes de piraterie, ferait oublier. Le réalisateur n’en fait pas des caricatures même si on aurait aimé les voir plus et peut être remonter aux racines de ce phénomène qui a explosé au large des côtes somaliennes en 2008. La piraterie n’est donc pas la thématique centrale du film malgré son titre. Mais les affaires sont les affaires et l’une des dernières scènes du film est d’une violence extrême, elle remet l’humain au cœur du film et montre le caractère destructeur des événements sur la vie de ces hommes pris au cœur de tractations qui les dépassent.

La bande annonce  :





vendredi 19 juillet 2013

Publication (Diplomatie) : La victoire de Kenyatta sur fond de crime contre l'humanité

Nous sommes ravie de vous annoncer notre dernière publication dans la revue Diplomatie n°63. Cette contribution porte sur les dernières élections au Kenya et les défis qui attendent la nouvelle équipe au pouvoir. Vous trouverez ci-dessous l'introduction : 



Uhuru Kenyatta, fils du « père de l’indépendance » et candidat vainqueur à l’élection présidentielle kenyane, a été investi le 9 avril 2013. Certes, son élection a été contestée juridiquement mais les résultats ont été confirmés par la Cour Suprême le 30 mars 2013. Ces dernières élections présidentielles sont certainement les plus importantes et les plus complexes depuis que le pays a renoué avec le multipartisme, il y a deux décennies. 86% des électeurs kenyans se sont ainsi rendus aux urnes pour élire, non seulement le Président, mais aussi les députés, sénateurs, gouverneurs de « counties » (départements) et représentants locaux. Bien que les observateurs et les analystes aient pu craindre de voir se reproduire les violences qui avaient entachées les élections de 2007, ces nouvelles élections se sont déroulées dans un climat relativement plus serein avec une forte mobilisation électorale. Elles font entrer le Kenya dans une ère nouvelle qui devrait voir la démocratie se renforcer.  

Pourtant, cette dynamique vertueuse ne doit pas occulter les défis internes et internationaux que doit relever le nouveau gouvernement. Ce dernier va devoir se battre sur deux fronts distincts : si le pays lui réclame de tourner la page des divisions internes tout en assurant la réforme de l’Etat et un développement économique maîtrisé, il devra composer avec un environnement international complexe. Alors que le contexte régional pourrait mettre à mal la stabilité du Kenya, le Président aura à éviter l’isolement international qui pourrait être imposé au pays, du fait des accusations de la Cour pénale internationale (CPI) qui pèsent sur son vice-président et sur lui-même.

vendredi 28 juin 2013

Dernier café stratégique : rencontrez-nous !

L’Alliance géostratégique organise son dernier café de l’année le 4 juillet 2013 au café Concorde à 19h.  A cette occasion, nous vous proposons tout simplement de sortir du petit écran et de nous rencontrer.


Vous retrouverez : CIDRIS Cyberwarfare (cybersécurité), De La Terre à la Lune (espace), Good Morning Afrika (Afrique), Historicoblog (histoire militaire), les Carnets de Clarisse (information), la Voie de l'Epée, Mars Attaque, la Plume & le Sabre, War Studies Publications (défense) et Zone d'Intérêt (renseignement et technologie militaire).

lundi 17 juin 2013

Les relations Afrique - Chine

Jusqu’au 4 juillet, vous pouvez accéder gratuitement aux articles du dernier numéro de la revue African Studies Review, consacrés aux relations entre la Chine et l’Afrique. Précipitez-vous pour télécharger ces articles ICI !



Sommaire :

-Introduction, Jamie Monson and Stephanie Rupp
-Remembering Work on the Tazara Railway in Africa and China, 1965-2011: When "New Men" Grow Old, Jamie Monson
-Chinese Devils, the Global Market, and the Declining Power of Togo's Nana-Benzes, Nina Sylvanus
-African Pentecostal Migrants in China: Marginalization and the Alternative Geography of a Mission Theology, Heidi Østbø Haugen
-Ghana, China, and the Politics of Energy, Stephanie Rupp
-Perceptions of Chinese in Southern Africa: Constructions of the "Other" and the Role of Memory, Yoon Jung Park

-China and Africa Rebooted: Globalization(s), Simplification(s), and Cross-Cutting Dynamics in "South-South" Relations, Julia C. Strauss

vendredi 14 juin 2013

Etudes éthiopiennes et yéménites

Un nouveau numéro de la revue Pount vient de sortir : Etudes éthiopiennes et yéménites.


Sommaire :

Didier MORIN, La participation française à l’Encyclo-paedia Aethiopica – 
Paul Marie GLAOUAËR, Comment l’Encyclopaedia Aethiopica a failli être française – 
Alain ROUAUD, La bibliothèque éthio-pienne du cardinal Tisserant – 
Alain GASCON, La 18e Conférence internationale des Études éthiopiennes –
Franck MERMIER, Le Yémen au miroir de publications anglophones récentes – *Documents : 1. Maxime Rodinson : « Les souvenirs d’un marginal », suite –  2. Un siècle de diplômés d’amharique des Langues O’ (1898-2008) –*
Stéphane ANCEL, Les sièges épiscopaux en Éthiopie – 
Bertrand LIONEL-MARIE, L’esclave éthiopien avant le ras Tafari : les dispositions du Fetha-nagast –
Robert BEYLOT, Recherches sur l’homiliaire éthiopien en l’honneur d’Ouriel –
Laurent JOLLY, Le Bataillon Somali dans la Grande Guerre – 
* Comptes rendus : C. Lucarelli, 2010 (A. GASCON & A. TURCO) – J. Miran (ed.), NAS, 1, 2012 (Ph. PÉTRIAT) – Tibebe Eshete, 2009 (S.  DEWEL)

Résumé de l’éditeur : Edward Ullendorff (25 janvier 1920 – 6 mars 2011) n’est plus, mais le savant éthiopisant britannique nous laisse plusieurs ouvrages qui seront pour longtemps des références riches et sûres : The Ethiopians, Ethiopia and the Bible, A Tigrinya chrestomathy, etc. Jean Leclant (8 août 1920 – 16 septembre 2011), nous a quittés, lui aussi. Égyptologue, homme de pouvoir et d’influence, il a contrôlé, bien qu’il se soit défendu d’être un éthiopisant, des décennies durant l’archéologie française (et accessoirement d’autres disciplines) en Éthiopie. À ce titre, il a contribué à l’état actuel des études éthiopiennes françaises, question sur laquelle on lira « La participation française à l’Encyclopaedia Aethiopica, ou Du déclin des études éthiopiennes en France » complété par « Comment l’Encyclopaedia Aethiopica a failli être française ».
Comme toutes les études, les études éthiopiennes ou yéménites commencent pour le chercheur ou l’amateur par une connaissance sans faille de la bibliographie (« Le Yémen au miroir de publications anglophones récentes ») et des lieux où se trouvent les sources (« La bibliothèque éthiopienne du cardinal Tisserant »). Mais la vie ou la carrière des orientalistes (« Maxime Rodinson : "Les souvenirs d’un marginal" : suite ») et l’histoire des institutions (« Un siècle de diplômés d’amharique et de civilisation éthiopienne des Langues O’ [1898-2008] ») apportent leur écot à la discipline, tout comme les manifestations scientifiques (« La 18e Conférence internationale des Études éthiopiennes »).
L’Éthiopie chrétienne est toujours là par son histoire religieuse (« Les sièges épiscopaux en Éthiopie ») et par sa littérature, soit religieuse (« Recherches sur l’homiliaire éthiopien en l’honneur d’Ouriel »), soit juridique (« L’esclave éthiopien avant le ras Tafari : les dispositions du Fetha-nagast »). Cette dernière contribution permet d’aborder un riche champ d’investigation laissé – pour de très mauvaises raisons – en friche : l’esclavage oriental.
Problème identitaire pour les pays concernés, le destin des troupes coloniales (« Le Bataillon Somali dans la Grande Guerre ») est-il aussi spécifiquement pathétique qu’on le dit ? En d’autres termes, pas beaucoup moins français que le paysan Bas-Breton mobilisé, le tirailleur somali qui était engagé avait-il moins de raisons que lui d’aller mourir dans les tranchées et était-il vraiment plus à plaindre ?
Les comptes rendus passent en revue un roman remarquable (La huitième vibration), le numéro spécial de la revue américaine Northeast African Studies consacré à la mer Rouge et l’ouvrage d’un évangéliste éthiopien sur sa religion (« The Evangelical Movements in Ethiopia. Resistance and Resilience).


Pour commander ce numéro, contactez : Les Ethiopisants associés, pount2@yahoo.fr ou www.pount.fr