L’Ouganda est l’un des plus beaux pays du monde et ses richesses agricoles et minérales potentielles sont considérables. Par sa magnificence, par la variété de ses formes et de ses couleurs, par la profusion de sa vie, de sa végétation, de ses oiseaux et de ses animaux sauvages, l’Ouganda est réellement la perle de l’Afrique ». C’est en ces mots que Winston Churchill décrivait l’Ouganda en 1908.
Souvent présenté comme un modèle de développement en Afrique, l'ancienne "perle de l'Afrique" britannique vote dès aujourd'hui pour élire (réélire ?) son président. L'occasion de vous proposer ici une série de billets sur ce pays encore méconnu des francophones.
L’Ouganda, du fait de sa situation privilégiée à l’intersection de la Corne de l’Afrique, des Grands Lacs et de l’Afrique centrale, dans un carrefour où se croisent les liaisons avec les autres régions du continent, est un espace géostratégique important. Le nouveau contexte stratégique qui a émergé après le 11 septembre a souligné les atouts particuliers de cette région qui constitue aussi une base arrière d’observation du Soudan et de la Corne de l’Afrique.
L’un de facteurs qui pousse à pondérer la réussite du modèle ougandais est sa volatilité politique. Le pays a longtemps été privé de partis politiques et l’opposition était constituée d’individus qui s’exprimaient au Parlement.
Le soutien des bailleurs de fonds n’a pas été qu’économique. Ils ont accepté le système de démocratie « sans parti » de la Constitution de 1995. Museveni considérait les partis comme étant à l’origine de tous les maux qu’a connu ce pays, car conçus par des « politiciens sectaires » qui les ont transformés en vecteurs de leurs intérêts claniques.
IL est vrai que l’Ouganda a longtemps fait les frais d’une « géographie de la guerre » (obsession du territoire). La nature de l’Etat est au cœur des conflits et nous y reviendrons dans un prochain billet.
Face aux irrégularités, les bailleurs de fonds appliquent désormais une politique de conditionnalité plaçant la démilitarisation du régime au centre des discussions préalables. Cependant, le pouvoir a conscience de l’importance de l’Ouganda dans la stratégie des puissances occidentales, notamment des Etats-Unis, et ne fait guère cas de ces pressions, d’autant qu’une rupture de l’aide risquerait de déstabiliser le pays. Le pays apparaît comme un véritable îlot de stabilité dans l’arc de crise qui va de la Somalie au Sahel. Il est donc encore perçu comme le vecteur d’une pax americana dans la région. On peut d’ailleurs interpréter sa participation à l’AMISOM (5200 hommes) ou la formation de soldats somaliens sur son territoire par une mission de l'UE (EUTM Somalia) comme une volonté ougandaise de se rendre indispensable dans la région même si cet interventionnisme participe aussi d’une stratégie interne d’occupation des troupes.
La réputation de bonne gouvernance du gouvernement ougandais est sérieusement remise en cause pour plusieurs raisons :
•Le niveau de corruption (127ème d’après le classement de Transparency International). Certains relie la corruption au fait que la société et les fonctionnaires ont longtemps dû se passer de l’Etat pour survivre, en créant le magendo qui est l’économie informelle locale. Pour lutter contre cette corruption, l’Etat a créé un corps de contrôle d’Etat, indépendant, dans le cadre de la constitution de 1995, c’est l’Inspector General of Government (IGG) ;
•Hausse récurrente des dépenses militaires. L’armée continue à jouer un rôle actif dans les affaires civiles de l’Etat ;
Par ailleurs, le régime politique, longtemps verrouillé par le président Museveni, semble s’ouvrir mais cette ouverture est un trompe l’œil. En effet, le Président Museveni dirige l’Ouganda depuis plus de vingt ans. Un référendum organisé en juillet 2005 à son initiative entérine le multipartisme comme une promesse d’ouverture politique. En fait, le multipartisme avait été troqué par le président contre la possibilité de briguer un nouveau mandat. Lors des dernières élections présidentielles en février 2006, les premières pluripartites depuis l’accession au pouvoir de Museveni, le candidat-président a dû affronter une vraie bataille politique malgré ses manquements à l’esprit du multipartisme. Refusant l’éventualité d’une défaite électorale, Museveni a mis l’appareil d’Etat au service de sa campagne et fait engager un procès contre Kizza Besigye (photo), son rival, pour garantir sa victoire. Il est réélu avec 60 % des voix après une campagne électorale qui désavantage les partis d’opposition. Kizza Besigye, remporte finalement 37% des suffrages. Le Mouvement conserve la majorité des deux-tiers au parlement (202 députés sur 308). Le principal parti d'opposition ougandais, le Forum pour le changement démocratique (Fdc) de M. Besigye a menacé de rejeter les résultats définitifs de ces élections dénonçant de «graves irrégularités», notamment la faible couverture médiatique du processus électoral et l'intimidation des électeurs avant et lors des scrutins. Les pressions des bailleurs de fonds n’ont pas été sans effet sur l’issue du procès Besigye et l’ouverture au multipartisme.
Le président doit désormais composer avec une opposition officielle, qui a des élus locaux et des relais dans la population. Pour ces nouvelles élections, Kizza Besigye s’opposera pour la troisième fois consécutive à Musevini aux côté de 6 autres candidats.
vendredi 18 février 2011
jeudi 17 février 2011
Les régimes autoritaires d'Afrique, du Maghreb et d'ailleurs...
Lors d'un chat sur le Monde.fr, le mardi 22 septembre 2009, Bertrand Badie, professeur à Sciences Po analysait l'autoritrisme. Selon lui il faut nuancer l'opposition démocratie-autoritarisme, qu'il juge "trop simple et en partie fausse". "D'autant qu'aucun régime, même en Europe, n'est épargné par une poussée autoritaire." Des propos qui conserventtoute leur actualité.
Régime autoritaire vs dictatorial :(…) « On a pris l'habitude de définir un régime autoritaire comme caractérisé par un pluralisme limité : la compétition pour le pouvoir est restreinte à certains candidats, la liberté d'expression est elle-même limitée, la protection juridique est imparfaite et même partielle, voire partiale. On est donc confronté à une logique en degrés : on dira d'un système qu'il est plus ou moins autoritaire, mais on ne saura pas toujours comment le borner.
En aucun cas ce concept ne saurait aboutir à une dualité opposant des régimes démocratiques à leur contraire C'est même dans la zone grise qui sépare ces deux pôles que se situent le plus grand nombre d'Etats.
La Russie est-elle un régime autoritaire ou une démocratie, quand on sait que la liberté y est restreinte et que les choix politiques ne sont pas totalement libres ?
Le Venezuela est-il un régime autoritaire alors que le président Chavez a été élu et qu'il a même accepté sa défaite devant un référendum où le "non" était majoritaire ? Israël apparaît comme une démocratie parfaite si l'on tient compte de la libre compétition pour le pouvoir, mais les Arabes israéliens sont des citoyens de seconde zone qui entachent ainsi gravement la qualité de démocratie de ce régime.
En bref, la notion nous invite à réfléchir à un certain nombre de critères mais elle ne nous conduit certainement pas à distinguer de façon tranchée entre catégories claires d'Etat.
La dictature est une notion plus restreinte. Elle implique le plein exercice du pouvoir par un homme seul, sans contrôle, sans limitation de ses compétences, sans limitation de la durée de son mandat. Un dictateur peut arriver au pouvoir par la force ou il peut être élu mais se maintenir contre le droit et par l'oppression.
Mais là encore, confronté à la réalité, le concept est moins clair qu'on pourrait le croire : la prolifération d'élections-simulacres rend difficile de distinguer entre un dictateur et un président autoritaire réélu dans des conditions de légalité et de transparence suspectes. De même, la suspension des libertés et des droits peut correspondre à des mécanismes institutionnels et aboutir à la mise en place de formes de dictature légales qui, à leur tour, viendraient brouiller les pistes. Pour nous résumer, je dirai que l'autoritarisme est davantage une question qu'une réponse, un instrument de diagnostic qu'un outil de classement, une problématique plus qu'une affirmation. »
(…)l'opposition démocratie-autoritarisme est trop simple et en partie fausse. La démocratie étant une technique de gouvernement et l'autoritarisme une posture plus ou moins affirmée, les deux concepts peuvent se combiner dans la pratique."
L’autoritarisme comme facteur de stabilité
« (…) Dans une tradition wilsonienne, on a pu établir, notamment depuis 1945, que la démocratie était facteur de paix là où les régimes les plus autoritaires conduisaient naturellement à la guerre. Cette thèse a même reçu un nom, celui de la "paix positive". Elle a en sa faveur des arguments forts : l'hostilité des opinions publiques à la guerre et à la violence internationale ; la corrélation entre les valeurs démocratiques et les valeurs de paix et de tolérance ; le jeu des contre-pouvoirs qui limitent les prétentions belliqueuses d'un dirigeant. Mais en même temps, cette thèse a été démentie par les faits.
Même si les démocraties ont tendance à faire davantage la guerre aux régimes autoritaires qu'à leurs semblables, elles sont loin de s'imposer comme des forces de paix. L'exemple du conflit israélo-palestinien est également là pour le rappeler. La seule bombe atomique qui ait été utilisée était également l'instrument militaire de la plus grande démocratie du monde d'alors.
Certains, dans ce sillage, ont fait valoir que la versatilité des opinions publiques pouvait conduire à la guerre plus qu'à la paix, tandis qu'effectivement, un régime autoritaire, ayant moins de comptes à rendre, peut prendre davantage de risques pour construire et imposer une diplomatie de paix.
En fait, les exemples abondent dans les deux sens : c'est bien pour se relégitimer que la dictature argentine s'est lancée dans la guerre des Malouines ; c'est aussi pour renforcer sa propre équation que le régime militaire grec s'est lancé dans une aventure militaire à Chypre. Et on pourrait continuer cette longue énumération, qui nous ramènerait au constat élémentaire que le point idéal serait la dictature platonicienne du sage qui imposerait la vertu à ses sujets et à ses voisins.
En réalité, une analyse internationale du sujet nous conduit à regarder ailleurs : à prendre en compte d'abord les conjonctures internationales, certaines favorisant les régimes dictatoriaux, d'autres promouvant de façon active la démocratie. Il faut regarder également les usages diplomatiques et stratégiques qui sont faits des régimes politiques en fonction des intérêts des uns et des autres.
On remarquera par exemple que les Etats-Unis ont favorisé l'essor des dictatures dans l'Amérique latine des années 1960 et 1970, pour au contraire favoriser le retour à la démocratie à la fin des années 1980 et jusque dans la période néoconservatrice récemment éprouvée. »
Sur l’interventionnisme : (…) « Nous sommes sortis de la période d'euphorie qui auréolait l'intervention extérieure. Celle-ci se faisait d'abord par conviction : la démocratie se parait des vertus du prosélytisme et du messianisme. Elle se faisait aussi par opportunité : la chute de l'URSS laissait aux "démocraties occidentales" le champ libre pour devenir le gendarme vertueux du monde et envoyer partout ce que François Mitterrand appelait les "soldats du droit". On a en fait trop vite confondu vertu et efficacité, solidarité et intervention, et on a tout simplement oublié qu'une démocratie ne pouvait dériver que d'un contrat social construit par les acteurs locaux eux-mêmes. Le pitoyable destin de l'élection récente en Afghanistan l'a rappelé d'une façon désormais indélébile.
En réalité, c'est tout le contraire de ce qui avait été souhaité qui est en train de se produire : une intervention mal maîtrisée est en train de ranimer partout dans le monde des fibres nationalistes, identitaristes et particularistes qui recomposent une violence internationale sans cesse plus forte.
On peut certes cyniquement jouer avec le régime de l'autre, mais on ne peut pas le transformer. C'est cette opposition mal comprise qui redevient aujourd'hui le facteur essentiel de l'échec des diplomaties occidentales. La démocratie ou la dictature peuvent être un paramètre de l'action diplomatique, mais certainement pas une finalité de celle-ci. »
Régime autoritaire vs dictatorial :(…) « On a pris l'habitude de définir un régime autoritaire comme caractérisé par un pluralisme limité : la compétition pour le pouvoir est restreinte à certains candidats, la liberté d'expression est elle-même limitée, la protection juridique est imparfaite et même partielle, voire partiale. On est donc confronté à une logique en degrés : on dira d'un système qu'il est plus ou moins autoritaire, mais on ne saura pas toujours comment le borner.
En aucun cas ce concept ne saurait aboutir à une dualité opposant des régimes démocratiques à leur contraire C'est même dans la zone grise qui sépare ces deux pôles que se situent le plus grand nombre d'Etats.
La Russie est-elle un régime autoritaire ou une démocratie, quand on sait que la liberté y est restreinte et que les choix politiques ne sont pas totalement libres ?
Le Venezuela est-il un régime autoritaire alors que le président Chavez a été élu et qu'il a même accepté sa défaite devant un référendum où le "non" était majoritaire ? Israël apparaît comme une démocratie parfaite si l'on tient compte de la libre compétition pour le pouvoir, mais les Arabes israéliens sont des citoyens de seconde zone qui entachent ainsi gravement la qualité de démocratie de ce régime.
En bref, la notion nous invite à réfléchir à un certain nombre de critères mais elle ne nous conduit certainement pas à distinguer de façon tranchée entre catégories claires d'Etat.
La dictature est une notion plus restreinte. Elle implique le plein exercice du pouvoir par un homme seul, sans contrôle, sans limitation de ses compétences, sans limitation de la durée de son mandat. Un dictateur peut arriver au pouvoir par la force ou il peut être élu mais se maintenir contre le droit et par l'oppression.
Mais là encore, confronté à la réalité, le concept est moins clair qu'on pourrait le croire : la prolifération d'élections-simulacres rend difficile de distinguer entre un dictateur et un président autoritaire réélu dans des conditions de légalité et de transparence suspectes. De même, la suspension des libertés et des droits peut correspondre à des mécanismes institutionnels et aboutir à la mise en place de formes de dictature légales qui, à leur tour, viendraient brouiller les pistes. Pour nous résumer, je dirai que l'autoritarisme est davantage une question qu'une réponse, un instrument de diagnostic qu'un outil de classement, une problématique plus qu'une affirmation. »
(…)l'opposition démocratie-autoritarisme est trop simple et en partie fausse. La démocratie étant une technique de gouvernement et l'autoritarisme une posture plus ou moins affirmée, les deux concepts peuvent se combiner dans la pratique."
L’autoritarisme comme facteur de stabilité
« (…) Dans une tradition wilsonienne, on a pu établir, notamment depuis 1945, que la démocratie était facteur de paix là où les régimes les plus autoritaires conduisaient naturellement à la guerre. Cette thèse a même reçu un nom, celui de la "paix positive". Elle a en sa faveur des arguments forts : l'hostilité des opinions publiques à la guerre et à la violence internationale ; la corrélation entre les valeurs démocratiques et les valeurs de paix et de tolérance ; le jeu des contre-pouvoirs qui limitent les prétentions belliqueuses d'un dirigeant. Mais en même temps, cette thèse a été démentie par les faits.
Même si les démocraties ont tendance à faire davantage la guerre aux régimes autoritaires qu'à leurs semblables, elles sont loin de s'imposer comme des forces de paix. L'exemple du conflit israélo-palestinien est également là pour le rappeler. La seule bombe atomique qui ait été utilisée était également l'instrument militaire de la plus grande démocratie du monde d'alors.
Certains, dans ce sillage, ont fait valoir que la versatilité des opinions publiques pouvait conduire à la guerre plus qu'à la paix, tandis qu'effectivement, un régime autoritaire, ayant moins de comptes à rendre, peut prendre davantage de risques pour construire et imposer une diplomatie de paix.
En fait, les exemples abondent dans les deux sens : c'est bien pour se relégitimer que la dictature argentine s'est lancée dans la guerre des Malouines ; c'est aussi pour renforcer sa propre équation que le régime militaire grec s'est lancé dans une aventure militaire à Chypre. Et on pourrait continuer cette longue énumération, qui nous ramènerait au constat élémentaire que le point idéal serait la dictature platonicienne du sage qui imposerait la vertu à ses sujets et à ses voisins.
En réalité, une analyse internationale du sujet nous conduit à regarder ailleurs : à prendre en compte d'abord les conjonctures internationales, certaines favorisant les régimes dictatoriaux, d'autres promouvant de façon active la démocratie. Il faut regarder également les usages diplomatiques et stratégiques qui sont faits des régimes politiques en fonction des intérêts des uns et des autres.
On remarquera par exemple que les Etats-Unis ont favorisé l'essor des dictatures dans l'Amérique latine des années 1960 et 1970, pour au contraire favoriser le retour à la démocratie à la fin des années 1980 et jusque dans la période néoconservatrice récemment éprouvée. »
Sur l’interventionnisme : (…) « Nous sommes sortis de la période d'euphorie qui auréolait l'intervention extérieure. Celle-ci se faisait d'abord par conviction : la démocratie se parait des vertus du prosélytisme et du messianisme. Elle se faisait aussi par opportunité : la chute de l'URSS laissait aux "démocraties occidentales" le champ libre pour devenir le gendarme vertueux du monde et envoyer partout ce que François Mitterrand appelait les "soldats du droit". On a en fait trop vite confondu vertu et efficacité, solidarité et intervention, et on a tout simplement oublié qu'une démocratie ne pouvait dériver que d'un contrat social construit par les acteurs locaux eux-mêmes. Le pitoyable destin de l'élection récente en Afghanistan l'a rappelé d'une façon désormais indélébile.
En réalité, c'est tout le contraire de ce qui avait été souhaité qui est en train de se produire : une intervention mal maîtrisée est en train de ranimer partout dans le monde des fibres nationalistes, identitaristes et particularistes qui recomposent une violence internationale sans cesse plus forte.
On peut certes cyniquement jouer avec le régime de l'autre, mais on ne peut pas le transformer. C'est cette opposition mal comprise qui redevient aujourd'hui le facteur essentiel de l'échec des diplomaties occidentales. La démocratie ou la dictature peuvent être un paramètre de l'action diplomatique, mais certainement pas une finalité de celle-ci. »
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mardi 15 février 2011
La contre-insurrection en République démocratique du Congo
La revue Sécurité Globale (ICI) propose dans sa dernière édition un excellent article d'Ilinca Mathieu sur la contre insurrection en République Démocratique du Congo
Résumé : "Etat faible, importantes ressources, ingérences étrangères, frontières poreuses et grande diversité ethnique : la République Démocratique du Congo réunit tous les ingrédients d’une faillite de l’Etat. Après en avoir rappelé le contexte historico-politique, cet article analysera la nature du défi posé par deux milices, les FDLR et le CNDP, principales actrices de la déstabilisation ayant
suivi les Accords de Pretoria. Il soulignera les particularités que présente la situation en RDC au regard de la doctrine classique de contre-insurrection, en analysant la stratégie mise en œuvre conjointement par Kinshasa et la MONUC. Cette stratégie s’avère particulièrement intéressante en ce qu’elle constitue une forme d’approche globale – combinant des aspects à la fois civils et militaires – qui illustre l’idée d’une convergence des doctrines du maintien de la paix et de la contre-insurrection modernes."
Résumé : "Etat faible, importantes ressources, ingérences étrangères, frontières poreuses et grande diversité ethnique : la République Démocratique du Congo réunit tous les ingrédients d’une faillite de l’Etat. Après en avoir rappelé le contexte historico-politique, cet article analysera la nature du défi posé par deux milices, les FDLR et le CNDP, principales actrices de la déstabilisation ayant
suivi les Accords de Pretoria. Il soulignera les particularités que présente la situation en RDC au regard de la doctrine classique de contre-insurrection, en analysant la stratégie mise en œuvre conjointement par Kinshasa et la MONUC. Cette stratégie s’avère particulièrement intéressante en ce qu’elle constitue une forme d’approche globale – combinant des aspects à la fois civils et militaires – qui illustre l’idée d’une convergence des doctrines du maintien de la paix et de la contre-insurrection modernes."
dimanche 13 février 2011
Prix des matières premières : une opportunité pour l'Afrique ?
Pourquoi la hausse du prix des matières premières n’a t-elle pas permis la réduction de la pauvreté?
Une première hypothèse : la croissance économique est phagocytée par une croissance démographique forte. En fait la croissance réelle n’arrive qu’à partir de 3% de croissance économique. A 3% de croissance économique vous stagnez ; à moins de 3% de croissance économique votre croissance démographique phagocyte votre croissance économique et vous êtes dans une spirale de sous développement.
Or prenons l'exemple du Sahel : sa population devrait doubler et compter 150 millions d’habitant d’ici 2040. Cette croissance affectera d'ailleurs certainement la sécurité humaine et notamment alimentaire de la région.
Et même les pays ayant connu une croissance supérieure bien supérieure à 3% n’ont réduit que de façon substantielle le taux de pauvreté. Pourquoi ?
Entre autres parce que la forte corruption ne permet pas la redistribution des richesses : l'ONG internationale Transparency International a publié, 26 octobre, son rapport 2010 de la perception de la corruption dans 178 pays (ICI) or la plupart des pays du continent se classe en bas du classement.
Une première hypothèse : la croissance économique est phagocytée par une croissance démographique forte. En fait la croissance réelle n’arrive qu’à partir de 3% de croissance économique. A 3% de croissance économique vous stagnez ; à moins de 3% de croissance économique votre croissance démographique phagocyte votre croissance économique et vous êtes dans une spirale de sous développement.
Or prenons l'exemple du Sahel : sa population devrait doubler et compter 150 millions d’habitant d’ici 2040. Cette croissance affectera d'ailleurs certainement la sécurité humaine et notamment alimentaire de la région.
Et même les pays ayant connu une croissance supérieure bien supérieure à 3% n’ont réduit que de façon substantielle le taux de pauvreté. Pourquoi ?
Entre autres parce que la forte corruption ne permet pas la redistribution des richesses : l'ONG internationale Transparency International a publié, 26 octobre, son rapport 2010 de la perception de la corruption dans 178 pays (ICI) or la plupart des pays du continent se classe en bas du classement.
samedi 12 février 2011
Législatives au Tchad
Su r les conséquences prévisibles des élections législatives de dimanche : retrouvez l'émission de Thierry Garcin, les enjeux internationaux ICI
vendredi 11 février 2011
mercredi 9 février 2011
Afrique du Sud : le défi de l'emploi
Début janvier l'OCDE a publié un rapport sur le taux de chômage qui toucherait en Afrique du Sud 24,5% de la population. Une augmentation par rapport au dernier chiffres de 2007 : 22,3%. Mais surtout il touche majoritairement la population noire (28,6% contre 4% chez les Blancs). L'Afrique du Sud aura besoin d'un taux de croissance supérieur à 5 % au cours des prochaines années pour infléchir ce chômage .
Le Center for Development and Enterprise de Johannesburg indiquait qu’en 2005, 65% des jeunes entre 15 et 25 ans étaient au chômage. On imagine que ces données ne sont guère meilleures aujourd'hui (Graphique : taux de chômage des jeunes 2008).
Pourtant Jacob Zuma avait promis de créer 500 000 emplois avant la fin 2009, en pleine crise économique et financière mondiale. Il vient encore de promettre :
-l'implantation d'usine à grande échelle censée créer 350 000 emplois dans les 10 années à venir
- l'économie verte promet d'en créer 300 000
- le développement des infrastructures : 250 000
- 10% de postes en plus dans la fonction publique
- 140 000 dans les mines
- 260 000 dans l'économie sociale
Les perspectives sociales inquiétantes (crime, exode des Blancs, chômage, réforme foncière au point mort…) sont très présentes au sein des classes moyennes blanches et noires. Certains observateurs soulignent même le passage d’une société de races à une société de classes. Mais l’utilisation de la rhétorique raciale est toujours utilisée en réponse aux critiques par l'ANC. De même que la référence à Mandela. Dans son premier spot de campagne, l’ANC avait ainsi fait de Mandela l’un des visages de sa campagne, et son apparition lors d’un rassemblement électoral de l’ANC dans l’Eastern Cape montre que le parti utilise plus son héritage historique que son bilan politique.
Le bilan de l’ANC : 14 millions de personnes de plus ont désormais un toit, et 80% sont raccordées au réseau électrique. En 1994, 51% de la population était considérée comme pauvre, contre 41% en 2007 (chiffres officiels). En 2008, 12 millions de personnes ont bénéficié d’aides de l’Etat, passant le programme d’aide de 6,4 milliards d’euros (72,3 milliards de rands) en 2005-2006 à une estimation de plus de 10 milliards d’euros (118,1 milliards de rands) pour 2009-2010.
Pourtant, en 2008, 43% des Sud-africains vivaient avec moins de deux dollars par jour (chiffres de l’ONU). Le creuset entre riches et pauvres ne cesse d’augmenter, malgré une croissance stable depuis 1994. Cette croissance continue n’a pas permis au parti de se remettre en question. Or, l’impôt, payé à 90% par la minorité blanche, et l’insécurité poussent les jeunes diplômés blancs à l’exil. L’Afrique du Sud enregistre l’un des taux de meurtres les plus élevés au monde. « Si l’apartheid criminalisait toute forme de manifestation politique, la lutte pour la libération politisait les actes criminels » .
Le candidat Zuma prônait des mesures populistes et radicales pour satisfaire la base de l’électorat de l’ANC, et l’aile gauche du parti qui le soutenait contre son prédécesseur. Le président Zuma doit composer avec un pays touché par la crise internationale et une crise structurelle interne.
Sources : SLG/ Afrique Asie
Le Center for Development and Enterprise de Johannesburg indiquait qu’en 2005, 65% des jeunes entre 15 et 25 ans étaient au chômage. On imagine que ces données ne sont guère meilleures aujourd'hui (Graphique : taux de chômage des jeunes 2008).
Pourtant Jacob Zuma avait promis de créer 500 000 emplois avant la fin 2009, en pleine crise économique et financière mondiale. Il vient encore de promettre :
-l'implantation d'usine à grande échelle censée créer 350 000 emplois dans les 10 années à venir
- l'économie verte promet d'en créer 300 000
- le développement des infrastructures : 250 000
- 10% de postes en plus dans la fonction publique
- 140 000 dans les mines
- 260 000 dans l'économie sociale
Les perspectives sociales inquiétantes (crime, exode des Blancs, chômage, réforme foncière au point mort…) sont très présentes au sein des classes moyennes blanches et noires. Certains observateurs soulignent même le passage d’une société de races à une société de classes. Mais l’utilisation de la rhétorique raciale est toujours utilisée en réponse aux critiques par l'ANC. De même que la référence à Mandela. Dans son premier spot de campagne, l’ANC avait ainsi fait de Mandela l’un des visages de sa campagne, et son apparition lors d’un rassemblement électoral de l’ANC dans l’Eastern Cape montre que le parti utilise plus son héritage historique que son bilan politique.
Le bilan de l’ANC : 14 millions de personnes de plus ont désormais un toit, et 80% sont raccordées au réseau électrique. En 1994, 51% de la population était considérée comme pauvre, contre 41% en 2007 (chiffres officiels). En 2008, 12 millions de personnes ont bénéficié d’aides de l’Etat, passant le programme d’aide de 6,4 milliards d’euros (72,3 milliards de rands) en 2005-2006 à une estimation de plus de 10 milliards d’euros (118,1 milliards de rands) pour 2009-2010.
Pourtant, en 2008, 43% des Sud-africains vivaient avec moins de deux dollars par jour (chiffres de l’ONU). Le creuset entre riches et pauvres ne cesse d’augmenter, malgré une croissance stable depuis 1994. Cette croissance continue n’a pas permis au parti de se remettre en question. Or, l’impôt, payé à 90% par la minorité blanche, et l’insécurité poussent les jeunes diplômés blancs à l’exil. L’Afrique du Sud enregistre l’un des taux de meurtres les plus élevés au monde. « Si l’apartheid criminalisait toute forme de manifestation politique, la lutte pour la libération politisait les actes criminels » .
Le candidat Zuma prônait des mesures populistes et radicales pour satisfaire la base de l’électorat de l’ANC, et l’aile gauche du parti qui le soutenait contre son prédécesseur. Le président Zuma doit composer avec un pays touché par la crise internationale et une crise structurelle interne.
Sources : SLG/ Afrique Asie
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lundi 7 février 2011
Sur les migrations Somalie/Yémen
A signaler l'excellent reportage de William Spindler (porte-parole du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en France) sur les "Migrants oubliés du Yémen" avec un reportage photographique de Rocco Nuri.
Résumé :
"Le Yémen ne semble pas être le premier endroit où l’on penserait se rendre en quête de sécurité ou d’une vie meilleure : extrême pauvreté, tribus rebelles, insurrections, conflits armés persistants, mers infestées de pirates… Pourtant chaque année, des dizaines de milliers de réfugiés arrivent depuis la Corne de l’Afrique avec l’espoir d’échapper à la guerre, aux persécutions, à la famine et à la sécheresse."
A lire, à voir ICI
Résumé :
"Le Yémen ne semble pas être le premier endroit où l’on penserait se rendre en quête de sécurité ou d’une vie meilleure : extrême pauvreté, tribus rebelles, insurrections, conflits armés persistants, mers infestées de pirates… Pourtant chaque année, des dizaines de milliers de réfugiés arrivent depuis la Corne de l’Afrique avec l’espoir d’échapper à la guerre, aux persécutions, à la famine et à la sécheresse."
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samedi 5 février 2011
Colloques cette semaine
lundi 7 février (9h30) Conférence de presse de présentation du nouveau trimestriel : AFRICA24 Magazine autour d’un petit déjeuner - AFRICA24 Magazine est un trimestriel de 200 pages, haut de gamme, basé sur l’analyse et la vision d’experts et de leaders entièrement dédié à l’économie Africaine, aux enjeux géopolitique et aux défis du continent. Lieu : Restaurant LADURÉE, 75 av des Champs Elysées, Paris 8è - Rens. Et inscription avant le 3 février 01 47 03 31 95 direction@etnium.com africa24mag@etnium.com
mercredi 9 février de 11h à 13h : Conférence dans le cadre du séminaire Afrique australe : Etat, Sociétés et Problèmes sociaux. Le séminaire organisé sous la responsabilité de Jean Copans et Ingolf Diener, propose d’analyser la dynamique des relations sociales et politiques dans les pays d’Afrique australe et dans la région en tant que telle. L’accent sera mis sur les dynamiques des sociétés post-coloniales et post-apartheid. - Lieu : Centre d’Etudes Africaines, salle de réunion (Ceaf) , 2e étage, 96 bd. Raspail, Paris 6è - Rens. : diener.ingolf@neuf.fr www.ipt.univ-paris8.fr/cerasa/
mercredi 9 février de 17h45 à 19h45 rencontre-débat sur : « Diaspora et Panafricanisme » Aujourd’hui, le panafricanisme anime les rêves et les réflexions d’une diaspora africaine dispersée dans le monde qui se vit comme porteur d’une vision et d’un humanisme dont on sent bien l’importance de sa contribution à la marche de notre planète. Avec Patrice Yengo, anthropologue, professeur à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales EHESS ; Lazare Ki-Zerbo, Burkinabé, philosophe de formation (doctorat à Poitiers en 1994), co-auteur du Recueil de textes sur le Mouvement panafricaniste au vingtième siècle (OIF, Paris), et Etudes africaines de géographie par le bas (CODESRIA). Chargé de projets droits de l’Homme à la rancophonie. http://fondationki-zerbo.org - dans le cadre du cycle I, 2010-2011, consacré au thème : « Que peuvent les productions littéraires africaines ? » - Lieu : Ecole Nationale d’Administration (ENA), amphithéâtre Parodi, 2 av de l'Observatoire, Paris 6ème, RER B : Luxembourg, Bus : 38 et 82 ) - Rens 01 43 48 14 67 cade@afrique-demain.org http://www.afrique-demain.org
vendredi 11 février de 9h30 à 12h30 Conférence-Débat :Les processus électoraux en Afrique, vecteur de démocratisation ou d'instabilité ? Études de cas : Côte d'Ivoire, Guinée, Kenya autour de : Nicholas Cheeseman, Chercheur au Centre d'Études Africaines d'Oxford ; Mathieu Merino, Chercheur CREPAO-CEAN, Chargé de missions d'observation électorale; Gilles Yabi, Directeur du Bureau de Dakar de l'International Crisis Group; Alain Antil, Responsable du programme Afrique subsaharienne de l'Ifri; Vincent Darracq, Chercheur invité à l'Ifri (Programme TAPIR) - Lieu : Ifri, salle de conférence, 27 rue de la Procession, Paris 15è, M° Volontaires (12) ou Pasteur (6) - rens. Victor Magnani 01 40 61 60 88 , 01 40 61 60 00 magnani@ifri.org ifri@ifri.org
mercredi 9 février de 11h à 13h : Conférence dans le cadre du séminaire Afrique australe : Etat, Sociétés et Problèmes sociaux. Le séminaire organisé sous la responsabilité de Jean Copans et Ingolf Diener, propose d’analyser la dynamique des relations sociales et politiques dans les pays d’Afrique australe et dans la région en tant que telle. L’accent sera mis sur les dynamiques des sociétés post-coloniales et post-apartheid. - Lieu : Centre d’Etudes Africaines, salle de réunion (Ceaf) , 2e étage, 96 bd. Raspail, Paris 6è - Rens. : diener.ingolf@neuf.fr www.ipt.univ-paris8.fr/cerasa/
mercredi 9 février de 17h45 à 19h45 rencontre-débat sur : « Diaspora et Panafricanisme » Aujourd’hui, le panafricanisme anime les rêves et les réflexions d’une diaspora africaine dispersée dans le monde qui se vit comme porteur d’une vision et d’un humanisme dont on sent bien l’importance de sa contribution à la marche de notre planète. Avec Patrice Yengo, anthropologue, professeur à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales EHESS ; Lazare Ki-Zerbo, Burkinabé, philosophe de formation (doctorat à Poitiers en 1994), co-auteur du Recueil de textes sur le Mouvement panafricaniste au vingtième siècle (OIF, Paris), et Etudes africaines de géographie par le bas (CODESRIA). Chargé de projets droits de l’Homme à la rancophonie. http://fondationki-zerbo.org - dans le cadre du cycle I, 2010-2011, consacré au thème : « Que peuvent les productions littéraires africaines ? » - Lieu : Ecole Nationale d’Administration (ENA), amphithéâtre Parodi, 2 av de l'Observatoire, Paris 6ème, RER B : Luxembourg, Bus : 38 et 82 ) - Rens 01 43 48 14 67 cade@afrique-demain.org http://www.afrique-demain.org
vendredi 11 février de 9h30 à 12h30 Conférence-Débat :Les processus électoraux en Afrique, vecteur de démocratisation ou d'instabilité ? Études de cas : Côte d'Ivoire, Guinée, Kenya autour de : Nicholas Cheeseman, Chercheur au Centre d'Études Africaines d'Oxford ; Mathieu Merino, Chercheur CREPAO-CEAN, Chargé de missions d'observation électorale; Gilles Yabi, Directeur du Bureau de Dakar de l'International Crisis Group; Alain Antil, Responsable du programme Afrique subsaharienne de l'Ifri; Vincent Darracq, Chercheur invité à l'Ifri (Programme TAPIR) - Lieu : Ifri, salle de conférence, 27 rue de la Procession, Paris 15è, M° Volontaires (12) ou Pasteur (6) - rens. Victor Magnani 01 40 61 60 88 , 01 40 61 60 00 magnani@ifri.org ifri@ifri.org
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vendredi 28 janvier 2011
Badie sur la démocratie et les élections
Le jeudi 20 janvier dans un chat sur le MOnde.fr Bertrand Badie a donné son analyse des évènements en Côte d'Ivoire et en Tunisie, extraits :
" (...) Une élection n'a de sens que si elle est approuvée comme mode de régulation politique par tous ceux qui y participent. Autrement dit : pas d'élection sans démocratie instituée, pas de démocratie possible sans Etat installé, et pas d'Etat concevable sans nation construite autour d'un contrat social. On voit bien, par exemple dans le cas ivoirien, que le vrai défi d'une élection est de faire en sorte que la minorité battue tienne son échec pour légitime. (...)
En bref, l'organisation matérielle d'élections dans des pays qui ne sont pas arrivés à bout de leur guerre civile et où la puissance publique n'est pas parfaitement structurée et légalisée a peu de chances d'aboutir à des résultats probants. Maintenant, si les élections sont contestées et si, comme en Côte d'Ivoire, le candidat réputé défait refuse d'admettre son échec, la "communauté internationale" peut-elle le faire changer d'avis ? Et comment ? Un candidat qui obtient 47 % des suffrages ne peut pas être tenu pour un dictateur isolé. Il a une base sociale. Dans le cas ivoirien, il incarne presque la moitié du pays. Une opération de commando à la Noriega ne serait donc pas suffisante. La vraie question qui se pose est de savoir si une armée étrangère peut reconstituer par la force un contrat social déchiré.(...)
La principale erreur des Nations unies est d'avoir pensé un processus électoral dans un contexte de démilitarisation et de démobilisation inachevées : l'Onuci n'a pas su faire ce qu'avait réussi la Minul au Liberia ou la Minusil en Sierra Leone. Le principal rôle de l'acteur onusien est de créer les conditions d'une vraie compétition électorale. En Côte d'Ivoire, l'élection n'apparaissait que comme le prolongement de la guerre intestine amorcée en 2002 en mobilisant d'autres moyens.
On ne s'étonnera pas que les résultats électoraux soient eux aussi le prolongement de la guerre civile par d'autres moyens. (....)
On est en fait confronté, à travers cette expérience, au danger de vouloir mêler, voire confondre, le rôle du juge et celui du médiateur. Etre médiateur suppose d'occuper une position intermédiaire et équidistante entre deux protagonistes ; être juge consiste à donner raison à l'un contre l'autre. Il s'agit bien, donc, de deux rôles distincts. Les Nations unies ont, dans l'affaire ivoirienne, jugé. Nous n'avons pas les moyens d'établir ici si elles ont accompli cette tâche de manière correcte. Mais s'y étant installées, elles s'interdisent désormais de jouer le rôle de médiateur. D'où l'apparition de toute une série d'acteurs nouveaux qui s'efforcent de tenir ce rôle ainsi laissé vacant : des chefs d'Etat de la Cédéao, le premier ministre kényan, ou, tout au début, l'ancien président sud-africain.(...)"
Sur la Tunisie : " (...) D'abord, la dictature a fait oublier la culture démocratique, a rasé la vie politique, a cassé les forces d'opposition et a aboli le débat public. Une élection n'est pas possible ni légitime sans que tous ces éléments se trouvent préalablement restaurés. D'autre part, cette révolution a une particularité remarquable : c'est peut-être la vraie première révolution post-léniniste que nous connaissons. C'est-à-dire sans leader, sans organisation, sans interlocuteur, donc, qui puisse parler au nom du mouvement social ou le confisquer. Or, l'élection est fondamentalement une institution élitiste, qui suppose un personnel politique, des partis, bref, une oligarchie qui sera portée par les urnes. Un temps de latence devient indispensable pour que se constitue cet autre préalable nécessaire.(...)
Prenons-la [la démocratie] comme un idéal, c'est-à-dire faisons-en une valeur partagée par tous, c'est-à-dire reconstruite par ceux-là même auxquels elle est censée s'adresser. Sa faiblesse se trouve dans sa dérive procédurale, dans son universalisme naïf, dans son formalisme, dans la volonté de plaquer et d'imposer de l'extérieur des modèles tout faits auxquels on ne cherche même pas à faire adhérer ceux auxquels on veut l'adresser. Peut-être que le fond du problème est là ; nous avons oublié chez nous que la démocratie était un idéal, nous n'en retenons plus que l'aspect facile de technique de gouvernement : on l'exporte telle quelle et on veut en faire en plus une technique d'action diplomatique ; on a alors tout faux.
" (...) Une élection n'a de sens que si elle est approuvée comme mode de régulation politique par tous ceux qui y participent. Autrement dit : pas d'élection sans démocratie instituée, pas de démocratie possible sans Etat installé, et pas d'Etat concevable sans nation construite autour d'un contrat social. On voit bien, par exemple dans le cas ivoirien, que le vrai défi d'une élection est de faire en sorte que la minorité battue tienne son échec pour légitime. (...)
En bref, l'organisation matérielle d'élections dans des pays qui ne sont pas arrivés à bout de leur guerre civile et où la puissance publique n'est pas parfaitement structurée et légalisée a peu de chances d'aboutir à des résultats probants. Maintenant, si les élections sont contestées et si, comme en Côte d'Ivoire, le candidat réputé défait refuse d'admettre son échec, la "communauté internationale" peut-elle le faire changer d'avis ? Et comment ? Un candidat qui obtient 47 % des suffrages ne peut pas être tenu pour un dictateur isolé. Il a une base sociale. Dans le cas ivoirien, il incarne presque la moitié du pays. Une opération de commando à la Noriega ne serait donc pas suffisante. La vraie question qui se pose est de savoir si une armée étrangère peut reconstituer par la force un contrat social déchiré.(...)
La principale erreur des Nations unies est d'avoir pensé un processus électoral dans un contexte de démilitarisation et de démobilisation inachevées : l'Onuci n'a pas su faire ce qu'avait réussi la Minul au Liberia ou la Minusil en Sierra Leone. Le principal rôle de l'acteur onusien est de créer les conditions d'une vraie compétition électorale. En Côte d'Ivoire, l'élection n'apparaissait que comme le prolongement de la guerre intestine amorcée en 2002 en mobilisant d'autres moyens.
On ne s'étonnera pas que les résultats électoraux soient eux aussi le prolongement de la guerre civile par d'autres moyens. (....)
On est en fait confronté, à travers cette expérience, au danger de vouloir mêler, voire confondre, le rôle du juge et celui du médiateur. Etre médiateur suppose d'occuper une position intermédiaire et équidistante entre deux protagonistes ; être juge consiste à donner raison à l'un contre l'autre. Il s'agit bien, donc, de deux rôles distincts. Les Nations unies ont, dans l'affaire ivoirienne, jugé. Nous n'avons pas les moyens d'établir ici si elles ont accompli cette tâche de manière correcte. Mais s'y étant installées, elles s'interdisent désormais de jouer le rôle de médiateur. D'où l'apparition de toute une série d'acteurs nouveaux qui s'efforcent de tenir ce rôle ainsi laissé vacant : des chefs d'Etat de la Cédéao, le premier ministre kényan, ou, tout au début, l'ancien président sud-africain.(...)"
Sur la Tunisie : " (...) D'abord, la dictature a fait oublier la culture démocratique, a rasé la vie politique, a cassé les forces d'opposition et a aboli le débat public. Une élection n'est pas possible ni légitime sans que tous ces éléments se trouvent préalablement restaurés. D'autre part, cette révolution a une particularité remarquable : c'est peut-être la vraie première révolution post-léniniste que nous connaissons. C'est-à-dire sans leader, sans organisation, sans interlocuteur, donc, qui puisse parler au nom du mouvement social ou le confisquer. Or, l'élection est fondamentalement une institution élitiste, qui suppose un personnel politique, des partis, bref, une oligarchie qui sera portée par les urnes. Un temps de latence devient indispensable pour que se constitue cet autre préalable nécessaire.(...)
Prenons-la [la démocratie] comme un idéal, c'est-à-dire faisons-en une valeur partagée par tous, c'est-à-dire reconstruite par ceux-là même auxquels elle est censée s'adresser. Sa faiblesse se trouve dans sa dérive procédurale, dans son universalisme naïf, dans son formalisme, dans la volonté de plaquer et d'imposer de l'extérieur des modèles tout faits auxquels on ne cherche même pas à faire adhérer ceux auxquels on veut l'adresser. Peut-être que le fond du problème est là ; nous avons oublié chez nous que la démocratie était un idéal, nous n'en retenons plus que l'aspect facile de technique de gouvernement : on l'exporte telle quelle et on veut en faire en plus une technique d'action diplomatique ; on a alors tout faux.
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