samedi 31 juillet 2010
Pas de bataillon djiboutien en Somalie
Au terme du 15ème Sommet des chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union africaine qui avait ouvert ses portes dimanche dernier à Kampala, j'ai été très surprise de voir la presse internationale (ICI) se faire l'écho de l'envoi d'un bataillon djiboutien en Somalie.
En effet l’UA a décidé d’envoyer 2000 soldats de la paix supplémentaires (8000 au total) en Somalie mais d'après le processus de Djibouti de 2008 les pays voisins de la Somalie ne peuvent pas envoyer de troupes. Le président Djiboutien l'a rappelé :
" La République de Djibouti est prête à apporter, à travers l'envoi de formateurs, une assistance technique dans les domaines de l'administration, notamment la gestion du personnel, du matériel et des finances des forces de sécurité du TFG".
“ Nous sommes également disposés à apporter une assistance technique au niveau opérationnel de l'Etat major" a t-il ajouté et de préciser aussi "l'envoi d'une mission technique militaire destinée a mettre en place une unité de génie civile afin d'aider à la réhabilitation des structures et des bâtiments militaires de ce pays".
Par ailleurs le mandat de l'AMISOM devrait permettre aux troupes d'"imposer" la paix et pas seulement de la maintenir. Mais le passage au chap.VII de la Charte des Nations Unies ne devrait pas être aisé.
Fin février 2007, le Conseil de sécurité des Nations Unies a autorisé la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM en anglais). Néanmoins l’AMISOM est trop faible et manque de moyens, de connaissances et de buts comme l’UNISOM auparavant. De plus seuls l’Ouganda et le Burundi ont envoyé des troupes soit la moitié des effectifs prévus. La mission était envisagée comme une opération transitoire jusqu’au déploiement d’une force onusienne or aucune des étapes prévues par le mandat de la mission n’a été réalisée : stabiliser la situation à Mogadiscio et consolider la stabilisation d’autres régions du Sud au moment où la force atteindrait sa pleine capacité opérationnelle. Le mandat même de la mission l’exposait dès le départ aux attaques des insurgés puisqu’elle devait protéger les Institutions fédérales de transition, elles-mêmes contestés. La seule solution envisagée est un renforcement des effectifs de l’AMISOM et son remplacement à court terme par une intervention multinationale agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte de l’ONU ou une opération de maintien de la paix onusienne.
Libellés :
Corne Afrique,
Djibouti,
Ouganda,
Somalie,
Union Africaine
vendredi 30 juillet 2010
Faut pas rever : le Mali
Ce soir l'émission Faut pas rêver proposait de voyager au Mali.
Au sommaire :
- La grande mosquée de Djenné fait l'objet d'un vaste programme de restauration, grâce à la fondation Aga Khan.
- Ousmane transporte les commerçants du marché à bord de son camion.
-Dans le village de Troula, dans l'Ouest malien, 200 des 2000 habitants sont partis travailler en France.
-Chaque année, la communauté des Hommes bleus organise un festival dans le désert.
-Gros plan sur l'autoroute fluviale du Niger.
-A Kokoyon, les hommes passent leurs journées sous terre, à récolter une terre ocre.
-Au Mali, 30 000 personnes sont albinos, victimes d'une anomalie génétique.
-A Mopti, femmes et enfants ramassent des déchets qui sont vendus à une usine de recyclage.
L'émission sera rediffusée à 2h sur France 3
Au sommaire :
- La grande mosquée de Djenné fait l'objet d'un vaste programme de restauration, grâce à la fondation Aga Khan.
- Ousmane transporte les commerçants du marché à bord de son camion.
-Dans le village de Troula, dans l'Ouest malien, 200 des 2000 habitants sont partis travailler en France.
-Chaque année, la communauté des Hommes bleus organise un festival dans le désert.
-Gros plan sur l'autoroute fluviale du Niger.
-A Kokoyon, les hommes passent leurs journées sous terre, à récolter une terre ocre.
-Au Mali, 30 000 personnes sont albinos, victimes d'une anomalie génétique.
-A Mopti, femmes et enfants ramassent des déchets qui sont vendus à une usine de recyclage.
L'émission sera rediffusée à 2h sur France 3
L'Union Africaine : un forum plus qu'une organisation ?
Dans son opus "Les Grandes Questions Internationales depuis la chute du mur de Berlin" Thierry Garcin dessine un tableau très sombre de l'Union Africain qui serait : "un forum plus qu'une organisation à part entière".
Il reconnaît les succès de l'organisation continentale dans ses interventions au Togo, en RCA, au Burundi, etc.
Mais rappelle aussi les conclusions d'un rapport d'audit de 2008 qui laissent songeurs...:
"De 2002 à 2007, 172 décisions avaient été prises la plupart sans suite. En 15 réunions, le Conseil exécutif (des ministres) avait adopté ...393 décisions. La Commission accusait un arriéré de 107 millions de dollars. 5241 voyages avaient été entrepris en 2006..."
Il reconnaît les succès de l'organisation continentale dans ses interventions au Togo, en RCA, au Burundi, etc.
Mais rappelle aussi les conclusions d'un rapport d'audit de 2008 qui laissent songeurs...:
"De 2002 à 2007, 172 décisions avaient été prises la plupart sans suite. En 15 réunions, le Conseil exécutif (des ministres) avait adopté ...393 décisions. La Commission accusait un arriéré de 107 millions de dollars. 5241 voyages avaient été entrepris en 2006..."
jeudi 29 juillet 2010
Unité soudanaise et intérêts égyptiens
A méditer … sur vos plages : cette citation rappelant l’aspiration de Égypte à maintenir le Soudan sous sa dépendance en évitant que Khartoum ne devienne ni trop fort ni trop faible (démembrement).
« Si le Soudan fait naturellement et géographiquement partie intégrante de l’Egypte, l’Egypte n’en est pas moins essentielle pour le développement du Soudan. De quelle utilité seraient le sol riche et les racines qui en jaillissent si le tronc était coupé ? » (W.Churchill, 1956)
mercredi 28 juillet 2010
Good Morning Afrika s'engage pour la formation des humanitaires
Je vous l'annonçais le 12 mai ICI et l'actualité rend d'autant plus nécessaire les stages de formation pour les volontaires des petites associations qui partent dans des régions comme le Sahel. "Contrairement aux grandes ONG de type CICR, Médecins du Monde, Action contre la Faim, les volontaires de ces petites organisations ne reçoivent aucune formation destinée à les préparer à des situations extrêmes, telle la prise d’otage. Or, sur le terrain, les volontaires des petites structures font le même travail et sont exposés aux mêmes risques"(Otages du Monde)
Cet type de formation est proposée par l'association Otages du Monde aux petites associations bretonnes (30% des associations de solidarité de France) se tiendra à Saint-Ségal (29), près de Châteaulin avec le soutien du conseil général du Finistère et du conseil régional de Bretagne, les 5 et 6 novembre 2010, en espérant qu'elle puisse s'étendre au reste du pays. En effet, cette initiative, financée par les conseils général du Finistère et régional de Bretagne, est une première en France selon Mme Gauffeny, secrétaire générale de l'association.
Je devrais pour ma part participer à la formation avec une présentation du contexte géopolitique des régions africaines dans lesquelles vont se rendre les stagiaires.
Le stage comprendra aussi l’examen de la gestion de sa sécurité en mission et les attitudes à adopter en cas de prises d’otages. La session s’achèvera par des témoignages d’ex-otages dont celui de Pierre Camatte, retenu au Mali de novembre 2009 à février 2010.
Informations :
Contacter Martine GAUFFENY au 06 75 76 09 39
Cet type de formation est proposée par l'association Otages du Monde aux petites associations bretonnes (30% des associations de solidarité de France) se tiendra à Saint-Ségal (29), près de Châteaulin avec le soutien du conseil général du Finistère et du conseil régional de Bretagne, les 5 et 6 novembre 2010, en espérant qu'elle puisse s'étendre au reste du pays. En effet, cette initiative, financée par les conseils général du Finistère et régional de Bretagne, est une première en France selon Mme Gauffeny, secrétaire générale de l'association.
Je devrais pour ma part participer à la formation avec une présentation du contexte géopolitique des régions africaines dans lesquelles vont se rendre les stagiaires.
Le stage comprendra aussi l’examen de la gestion de sa sécurité en mission et les attitudes à adopter en cas de prises d’otages. La session s’achèvera par des témoignages d’ex-otages dont celui de Pierre Camatte, retenu au Mali de novembre 2009 à février 2010.
Informations :
Contacter Martine GAUFFENY au 06 75 76 09 39
mardi 27 juillet 2010
Archives Foccart : des infos compromettantes ?
« Les archives répondront un jour à votre question » répondait Jacques Foccart, aux questions du journaliste Philippe Gaillard sur la mort de Moumié (nationaliste camerounais assassiné à Genève en 1960). L'heure est peu être arrivée et pourrait remettre en question beaucoup d'idées reçues.
Rappelons que Foccart était conseiller politique, secrétaire général de l'Élysée aux affaires africaines et malgaches de 1960 à 1974.
Selon l’historien Mamadou Diouf, professeur au Columbia University,les archives de Jacques Foccart,qui s'ouvrent aux Archives nationales de Paris, révèleraient des scandales impliquant d’anciens gouvernants africains.
Pour lui, contrairement à une croyance populaire, la France n’est pas responsable de tous les maux du continent.
«Il y a des choses, les Français n’y sont pour rien. Heureusement que les a archives de Foccart sont ouvertes maintenant : on va avoir plein de surprises», a affirmé le professeur.
Le terme « Archives Foccart » fait référence aux fonds public du secrétariat général pour la Communauté qui naît, au début de l’année 1959, des cendres de la France d’Outre-mer. Cette communauté portera le nom de secrétariat général des Affaires africaines et malgaches par la suite, dont Foccart sera le responsable jusqu’à sa dissolution en 1974.Le fonds public donc couvre l’ensemble des archives de travail de ce secrétariat (pas seulement le travail de Foccart).
Jean-Pierre Bat explique dans son article "Les « archives Foccart » aux Archives nationales"(ICI) :
"1 Un premier ensemble regroupe les dossiers de chargés de mission, français, africains et malgaches : ils participent à l’information quotidienne, à la préparation et à la diffusion des directives du secrétaire général par des notes, études et instructions, selon leurs attributions géographiques ou techniques.
2 Un second ensemble concerne l’action directe du président de la Communauté: protocole, voyage officiels, chancellerie, bureau interministériel du courrier et le service de documentation qui dispose d’une bibliothèque unique en France. Celle-ci a été versée à la Bibliothèque de Documentation Internationale Contemporaine (BDIC) à Nanterre.
3 Un troisième ensemble est composé par les dossiers de comptabilité et du personnel.Le fonds « privé », en revanche, comprend uniquement des archives reçues ou produites par Jacques Foccart ou en son nom, de telle sorte que l’on y retrouve beaucoup de dossiers composés par les chargés de mission, conseillers et autres membres du secrétariat.(...) dans le fonds « privé » on trouve plus fréquemment des notes plus personnelles concernant des personnes, des impératifs et des échéances politiques. Ces deux fonds sont étroitement mêlés, et complémentaires.(...) La communication des fonds « privé » et « public » est soumise à l’article premier du décret d’application de la loi de 1979 sur les archives : les documents produits par la présidence de la République ne peuvent être communiquées qu’au terme de soixante ans à partir de la date d’émission du document."(dérogations possibles)
Essentielles pour comprendre et démystifier les relations franco-africaines sur cette période les archives Foccart sont encore peu utilisées.
En plus des Archives Foccart les chercheurs peuvent avoir accès aux Archives Debré et les archives du Quai d'Orsay.
samedi 24 juillet 2010
Montagnes africaines
Entre le 28 juin et le 23 juillet, ARTE a diffusé une série documentaire consacrée aux « Montagnes du monde ». Vingt films pour vingt superbes voyages dont 4 se situaient en Afrique :
dont le 1 Ras Dashen (ci-dessous),
2 le Drakensberg en Afrique du Sud (à droite),
4 le mont Cameroun (ci-dessous).
Vous pouvez revoir les émissions ICI
dont le 1 Ras Dashen (ci-dessous),
2 le Drakensberg en Afrique du Sud (à droite),
3le Kilimandjaro en Tanzanie (à droite)
4 le mont Cameroun (ci-dessous).
Vous pouvez revoir les émissions ICI
Libellés :
Afrique du Sud,
Cameroun,
Ethiopie,
Tanzanie
vendredi 23 juillet 2010
Le Sahel et les insécurités récurrentes de l’ensemble de la région
Le 22 juillet, Eric Laurent, interviewait dans les Enjeux Internationaux Antoine Glaser, directeur de la Lettre du Continent, sur le Sommet au Tchad de la Communauté des États sahélo-sahariens et les insécurités récurrentes de l’ensemble de la région. Ecoutez l'émission ICI
Présentation : "L'insécurité croissante dans les pays de la zone sahélienne découle d'un ensemble de facteurs.
D'abord l'implantation croissante d'un mouvement armé qui se joue des frontières et qui est désormais proche d'Al-Qaeda, alors que les régimes de la zone de cette région sont beaucoup trop faibles pour engager une épreuve de force sécuritaire.
Pourtant, les Etats-Unis qui s'inquiètent du développement croissant du terrorisme en Somalie contemporainement à celui de la zone sahélienne y renforcent leur présence, mais sans pour autant coopérer avec les Français contrairement à ce qu' on pourrait croire .
L'autre élément de fragilisation de ces pays découle de problèmes touaregs, dont les revendications et tensions ne cessent de prendre de l'ampleur.
C'est un défi auquel aucun responsable de la région n'est en mesure de trouver une solution."
jeudi 22 juillet 2010
N.Sarkozy/V.Bolloré : amis sur le tard
Je viens de relire un article du Monde datant de 2007. Il nous rappelle que contrairement à ce qui est coutume de penser les liens entre le président N. Sarkozy et V. Bolloré ne sont pas si ténus ….du moins avant 2007.
Dans cet article on apprend que Vincent Bolloré « n'a jamais fait partie du cercle de patrons amis du président élu. Avant le scrutin présidentiel [de 2007], on le disait plutôt sensible au programme de François Bayrou. » Martin Bouygues et Arnaud Lagardère sont considérés plus proches. En effet, en 1997, Vincent Bolloré « lance un raid boursier inamical sur le groupe Bouygues voulant contraindre son jeune patron jugé inexpérimenté à céder ses activités dans la téléphonie mobile. Vincent Bolloré échoue […] Les relations entre les deux patrons sont devenues sur-le-champ exécrables. L'un des conseils et avocats de Martin Bouygues dans cette affaire était Nicolas Sarkozy. Un an auparavant, Martin Bouygues était témoin du mariage de Nicolas Sarkozy avec Cécilia et est devenu ensuite le parrain de son plus jeune fils Louis.»
C’est Gérard Longuet, sénateur (UMP) de la Meuse, conseiller politique de Nicolas Sarkozy et ancien beau-frère de Vincent Bolloré qui a travaillé à leur rapprochement.
Quelques mois plus tard à l’occasion de la sortie d'un livre écrit par le journaliste Jean Bothorel, Vincent Bolloré, une histoire de famille l'homme d'affaires revient sur cette relation et dit avoir proposé "à plusieurs reprises" son bateau à M. Sarkozy "au hasard de [leurs] conversations". "Le soir de sa victoire, il m'a très gentiment invité avec une soixantaine de personnes. C'est là qu'il a décidé d'aller se reposer sur le bateau et j'ai été, comme je l'ai déclaré, très honoré"
Le groupe Bolloré est présent en Afrique depuis 1927. En 2008 le groupe a créé Bolloré Africa Logistics qui doit fédérer les filiales et implantations du groupe dans le transport et la logistique (200 sites dans 47 pays : carte).
Dans cet article on apprend que Vincent Bolloré « n'a jamais fait partie du cercle de patrons amis du président élu. Avant le scrutin présidentiel [de 2007], on le disait plutôt sensible au programme de François Bayrou. » Martin Bouygues et Arnaud Lagardère sont considérés plus proches. En effet, en 1997, Vincent Bolloré « lance un raid boursier inamical sur le groupe Bouygues voulant contraindre son jeune patron jugé inexpérimenté à céder ses activités dans la téléphonie mobile. Vincent Bolloré échoue […] Les relations entre les deux patrons sont devenues sur-le-champ exécrables. L'un des conseils et avocats de Martin Bouygues dans cette affaire était Nicolas Sarkozy. Un an auparavant, Martin Bouygues était témoin du mariage de Nicolas Sarkozy avec Cécilia et est devenu ensuite le parrain de son plus jeune fils Louis.»
C’est Gérard Longuet, sénateur (UMP) de la Meuse, conseiller politique de Nicolas Sarkozy et ancien beau-frère de Vincent Bolloré qui a travaillé à leur rapprochement.
Quelques mois plus tard à l’occasion de la sortie d'un livre écrit par le journaliste Jean Bothorel, Vincent Bolloré, une histoire de famille l'homme d'affaires revient sur cette relation et dit avoir proposé "à plusieurs reprises" son bateau à M. Sarkozy "au hasard de [leurs] conversations". "Le soir de sa victoire, il m'a très gentiment invité avec une soixantaine de personnes. C'est là qu'il a décidé d'aller se reposer sur le bateau et j'ai été, comme je l'ai déclaré, très honoré"
Le groupe Bolloré est présent en Afrique depuis 1927. En 2008 le groupe a créé Bolloré Africa Logistics qui doit fédérer les filiales et implantations du groupe dans le transport et la logistique (200 sites dans 47 pays : carte).
mardi 20 juillet 2010
UA : trop de patients autour du malade ?
Hier S.E. l’ambassadeur Lawrence Rossin, secrétaire général adjoint délégué pour les opérations de l’Otan, a accordé un entretien à AGS ICI, il revient sur le rôle de l'OTAN dans le Golfe d'Aden, son soutien à l'UA et à sa mission en Somalie. A la lecture de cet entretien quelques réflexions et questions me sont venues.
Pour reprendre l’expression employée dans un article que j’ai récemment lu, concernant le soutien international aux capacités africaines de maintien de la paix, n’y a-t-il pas trop de médecins autour du patient?
Je m’explique. De nombreux programmes ont été mis sur pied pour soutenir les appropriations africaines
- entre autres EURORECAMP (France puis UE), ACOTA (USA) et des partenariats bilatéraux divers.
- De même autour de l’UA se multiplient aussi les soutiens internationaux (surtout l’UE avec le Partenariat pour la paix) et dans les années à venir l’US Africom devrait jouer un rôle important dans ces programmes militaires d’appui.
- Sans compter toutes les initiatives bilatérales pour accroître les capacités de l’organisation elle-même (construction par la Chine-150 millions de $- d’un centre de conférence à Addis Abeba -photo-, d’un nouveau bâtiment pour le département paix et sécurité par l’Allemagne -21 millions d'€…). Aussi les initiatives et les programmes de soutien et de formation ne manquent pas.
En quoi l’expertise apportée par l’OTAN est nécessaire et complémentaire ? Quel rôle concret joue l’OTAN dans la montée en puissance des FAA ?Au niveau de l’UA et/ou des brigades régionales ? Compte t-elle soutenir les brigades si ça n’est pas le cas ?
La question centrale semble aussi (surtout ?) être celle du financement des opérations. Ainsi même si les FAA sont déclarées opérationnelles il leur manquera toujours l’argent nécessaire pour fonctionner. L’OTAN envisage-t-elle une aide ?
« Cette aide à l’Union Africaine est dirigée par celle-ci et guidée par les principes de l’appropriation africaine». Quid des capacités des services centraux de l’UA à définir leurs besoins (par faute de moyens, d’infrastructures, de personnels)? Du coup quelle est l’utilisation effective de l’expertise offerte par l’OTAN ?
En effet, la capacité des services de l'UA à suivre les opérations de paix est insuffisant, exemple :
- 3 personnes sont affectées au Darfur Desk situé en dehors du siège de l'UA (photo) alors l'UA doit assurer avec l'ONU la codirection stratégique de cette opération.
- il n'y a pas suffisamment de personnel ni de centre de situation avec des systèmes de communication modernes pour effectuer la gestion opérationnelle des soldats burundais et ougandais déployés en Somalie.
Les réponses à ces questions sur le site AGS...
Sur les dépenses, et investissements actuels et à venir de l'UA voir ICI l'article de Jeune Afrique.
Libellés :
Appropriation,
Darfour,
FAA,
Sécurité alimentaire,
Somalie,
Union Africaine
Campagne au Rwanda : Kagamé dépassera t-il les 95% ?
Le Rwanda vient de lancer ce jour sa campagne pour l'élection présidentielle du 9 août 2010. A trois semaines des élections, la tension monte.
Chasse aux opposants :
-Le parti démocratique vert, lancé en août 2009, par des transfuges du Front patriotique rwandais (FPR), actuellement au pouvoir : qui n'a pas été agréé par les autorités et dont le premier vice-président André Kagwa Rwisereka a été assassiné la semaine dernière.
- Le parti social : Bernard Ntaganda son membre fondateur a été exclu du parti et arrêté le 24 juin et placé sous contrôle judiciaire (accusé de "terrorisme" et d'"incitation génocidaire"
- Les Forces démocratiques unifiées dont la présidente Victoire Ingabire a aussi été inculpée et placée sous contrôle judiciaire pour "propagation d'idéologie génocidaire".
Un pastiche d'opposition :
-Jean-Damascène Ntawukuriryayo, le vice-président de l'Assemblée nationale et l’ex ministre de la Santé,
-Prosper Higiro, vice-président du Sénat, ex ministre du Commerce et
- une femme Alvera Mukabaramba.
Tous ont le même discours que le FPR, et tous avaient soutenu Kagamé lors du dernier scrutin....
Par ailleurs, la presse indépendante est aussi réprimée :
- assassinat le 24 juin de Jean Léonard Rugambage journaliste et directeur adjoint du bimensuel Umuvugizi
- arrestation le 8 juillet d'Agnès Uwimana Nkusi la directrice du bimensuel Umurabyo
Paul Kagamé devrait être réélu mais quelle légitimité pour son pouvoir ? Pour Paul Simon Handy, chercheur camerounais interrogé par RFI, «je pense que ce vent de panique est plutôt provoqué par les dissensions internes au FPR... Ce dont le président Kagamé a véritablement peur, c'est de voir se former des partis d'opposition par d'anciens compagnons de route ».
Tout l'enjeu est de savoir si Kagamé battra le score de 2003 quand il avait obtenu 95% des voix !
Chasse aux opposants :
-Le parti démocratique vert, lancé en août 2009, par des transfuges du Front patriotique rwandais (FPR), actuellement au pouvoir : qui n'a pas été agréé par les autorités et dont le premier vice-président André Kagwa Rwisereka a été assassiné la semaine dernière.
- Le parti social : Bernard Ntaganda son membre fondateur a été exclu du parti et arrêté le 24 juin et placé sous contrôle judiciaire (accusé de "terrorisme" et d'"incitation génocidaire"
- Les Forces démocratiques unifiées dont la présidente Victoire Ingabire a aussi été inculpée et placée sous contrôle judiciaire pour "propagation d'idéologie génocidaire".
Un pastiche d'opposition :
-Jean-Damascène Ntawukuriryayo, le vice-président de l'Assemblée nationale et l’ex ministre de la Santé,
-Prosper Higiro, vice-président du Sénat, ex ministre du Commerce et
- une femme Alvera Mukabaramba.
Tous ont le même discours que le FPR, et tous avaient soutenu Kagamé lors du dernier scrutin....
Par ailleurs, la presse indépendante est aussi réprimée :
- assassinat le 24 juin de Jean Léonard Rugambage journaliste et directeur adjoint du bimensuel Umuvugizi
- arrestation le 8 juillet d'Agnès Uwimana Nkusi la directrice du bimensuel Umurabyo
Paul Kagamé devrait être réélu mais quelle légitimité pour son pouvoir ? Pour Paul Simon Handy, chercheur camerounais interrogé par RFI, «je pense que ce vent de panique est plutôt provoqué par les dissensions internes au FPR... Ce dont le président Kagamé a véritablement peur, c'est de voir se former des partis d'opposition par d'anciens compagnons de route ».
Tout l'enjeu est de savoir si Kagamé battra le score de 2003 quand il avait obtenu 95% des voix !
dimanche 18 juillet 2010
"Utiliser uniquement du papier toilette. Pas de dollars zimbabwéens"
"Utiliser uniquement du papier toilette. Pas de carton. Pas de vêtements. Pas de dollars zimbabwéens. Pas de journaux". Selon le blog Zimbabwe Absurdity, cette photo circulait par mail au Zimbabwe. Le cliché aurait été pris dans les toilettes d'un poste frontière entre l'Afrique du Sud et le Zimbabwe.
En effet, il y a un an il fallait débourser un million de dollars zimbabwéens pour une miche de pain rassis (10 milliards = 1€).
Depuis série de mesures macro-économiques et pro-marchées mises en place par le gouvernement peu de temps après son installation en février 2009 a vu l’inflation en baisse à partir d’un record mondial de 500 milliards pour cent à la fin de 2008.
La décision prise par le nouveau régime de Harare de se défaire de la monnaie en chute libre du pays, le dollar zimbabwéen, et d’adopter un panier de devises fortes comme monnaie légale a également contribué à stabiliser les prix des produits qui sont devenus facilement disponibles dans les magasins et détruit un marché noir florissant qui avait maintenu la pression sur l’inflation.
Les dissensions au sujet d’une loi controversée consistant à donner plus de pouvoirs aux Noirs ont déjà coûté au Zimbabwe des millions de dollars d’investissement étrangers, puisque les investisseurs n’attendent que la finalisation des règlements qui verrait les étrangers rendre au moins 51 pour cent des entreprises aux entreprises locales.
vendredi 16 juillet 2010
Afrique du Sud : gueule de bois après la fête ?
Le président sud-africain, Jacob Zuma, a invité les Sud-africains, et les étrangers vivant dans le pays à s’unir et à travailler ensemble pour isoler et signaler à la police toute menace de violences contre les étrangers, a annoncé vendredi, le bureau présidentiel. En effet, il s’inquiète d'informations (de l'Organisation Mondiale pour les Migrations) selon lesquelles, des ressortissants étrangers seraient en train de fuir le pays, du fait de menaces d’attaques xénophobes commises par des citoyens sud-africains.
Oublié le leitmotiv de la coupe du monde qui voulait que cette fête soit celle du continent ? Oublié le soutien à l'équipe Ghanéenne en quart de finale ?
Oui l'Afrique du Sud retrouve sa réalité et les défis qu'elle doit surmonter.
En mai 2008, déjà, des attaques xénophobes contre les immigrés du Zimbabwe, du Mozambique et du Niger (62 morts et plus de 100.000 personnes sans abri), et des mouvements sociaux contre la hausse du coût de la vie et les augmentations des tarifs d’électricité en juillet-août 2008, ont secoué le pays. Le climat social ne devrait pas s’apaiser avec la crise internationale et énergétique. Eskom, la compagnie sud-africaine de production et de distribution d’électricité, souhaite augmenter ses tarifs, alors que les gouvernements successifs ont maintenu des tarifs très bas pour l’électricité, sans accorder de crédits pour réaliser les investissements nécessaires. Selon les milieux d’affaires, le pays risque d’avoir, d’ici 2013, les tarifs d’électricité les plus élevés au monde, ce qui devrait amputer les efforts du gouvernement pour relancer l’investissement.
Le gouvernement devra aussi régler la question de la réforme foncière. L’ANC a promis, pendant la campagne, la redistribution de 30% des terres cultivables en faveur des communautés noires, à l’horizon 2014. Mais avec quelles ressources financières ? Cette promesse était déjà un objectif du parti au lendemain de l’apartheid, or seulement 5% des surfaces agricoles ont été redistribuées. La récession de 2009 et l’exemple du voisin zimbabwéen donnent à réfléchir.
Le creuset entre riches et pauvres ne cesse d’augmenter, malgré une croissance stable depuis 1994. Cette croissance continue n’a pas permis au parti de se remettre en question. Or, l’impôt, payé à 90% par la minorité blanche, et l’insécurité poussent les jeunes diplômés blancs à l’exil. L’Afrique du Sud enregistre l’un des taux de meurtres les plus élevés au monde.
Le taux de chômage, officiellement de 23% au moment des élections, atteint 24,5% alors que le nouveau président avait promis de créer 500 000 emplois avant la fin 2009, en pleine crise économique et financière mondiale. Le Center for Development and Enterprise de Johannesburg indiquait qu’en 2005, 65% des jeunes entre 15 et 25 ans étaient au chômage.
Oublié le leitmotiv de la coupe du monde qui voulait que cette fête soit celle du continent ? Oublié le soutien à l'équipe Ghanéenne en quart de finale ?
Oui l'Afrique du Sud retrouve sa réalité et les défis qu'elle doit surmonter.
En mai 2008, déjà, des attaques xénophobes contre les immigrés du Zimbabwe, du Mozambique et du Niger (62 morts et plus de 100.000 personnes sans abri), et des mouvements sociaux contre la hausse du coût de la vie et les augmentations des tarifs d’électricité en juillet-août 2008, ont secoué le pays. Le climat social ne devrait pas s’apaiser avec la crise internationale et énergétique. Eskom, la compagnie sud-africaine de production et de distribution d’électricité, souhaite augmenter ses tarifs, alors que les gouvernements successifs ont maintenu des tarifs très bas pour l’électricité, sans accorder de crédits pour réaliser les investissements nécessaires. Selon les milieux d’affaires, le pays risque d’avoir, d’ici 2013, les tarifs d’électricité les plus élevés au monde, ce qui devrait amputer les efforts du gouvernement pour relancer l’investissement.
Le gouvernement devra aussi régler la question de la réforme foncière. L’ANC a promis, pendant la campagne, la redistribution de 30% des terres cultivables en faveur des communautés noires, à l’horizon 2014. Mais avec quelles ressources financières ? Cette promesse était déjà un objectif du parti au lendemain de l’apartheid, or seulement 5% des surfaces agricoles ont été redistribuées. La récession de 2009 et l’exemple du voisin zimbabwéen donnent à réfléchir.
Le creuset entre riches et pauvres ne cesse d’augmenter, malgré une croissance stable depuis 1994. Cette croissance continue n’a pas permis au parti de se remettre en question. Or, l’impôt, payé à 90% par la minorité blanche, et l’insécurité poussent les jeunes diplômés blancs à l’exil. L’Afrique du Sud enregistre l’un des taux de meurtres les plus élevés au monde.
Le taux de chômage, officiellement de 23% au moment des élections, atteint 24,5% alors que le nouveau président avait promis de créer 500 000 emplois avant la fin 2009, en pleine crise économique et financière mondiale. Le Center for Development and Enterprise de Johannesburg indiquait qu’en 2005, 65% des jeunes entre 15 et 25 ans étaient au chômage.
Libellés :
Afrique du Sud,
chomage,
migrations,
xénophobie,
Zimbabwe
lundi 12 juillet 2010
Ouganda : des attentats prévisibles ? (actualisé)
2 attentats ont fait 74 morts dans la capitale Ougandaise, dans des lieux fréquentés par les étrangers (Ethiopan Bar et le Kyadondo Rugby Club), le groupe islamiste somalien Al Chabaab a revendiqué les deux attentats. Les Ougandais sont engagés dans le conflit somalien. En effet :
- le pays fournit (avec le Burundi) des troupes à l'AMISOM : 2700 militaires
- il accueille à Bihanga (250km de Kampala, photo à droite), un contingent complet de soldats somaliens, formés par les Européens (EUTM Somalia). Retrouvez l'entretien du général Wamala (UPDF) commandant des forces terrestres ougandaises ICI qui à la question : N'est-ce pas dangereux pour l’Ouganda de s’engager dans cette mission ? répondait : "Tout le monde sait que la Somalie est dangereuse. Et il faudrait être aveugle pour ne pas voir que c'est une partie du monde la plus dangereuse. Mais qu’est-ce que nous pouvons faire ? Fermer les yeux. Si nous faisons cela, notre comportement est incompréhensible. C’est comme quand vous vous êtes au soleil. Ce n’est pas en fermant les yeux que vous n’êtes pas exposés. La solution est là : plus nous aidons la Somalie, moins nous aurons à souffrir de l’instabilité. Avoir une Somalie en meilleure santé, c’est notre intérêt. Regardez l’Ouganda, nous sommes un pays enclavé. Nous dépendons de la mer pour nos importations, nos exportations. Si la piraterie continue, la situation va devenir intenable pour le commerce, les assurances vont augmenter, les produits. Croire que le problème de la Somalie va se résoudre tout seul, car c’est trop dangereux, est tout simplement irréaliste. Nous devons prendre le taureau par les cornes ; et dire oui : nous avons besoin d’une Somalie positive et voir ensemble ce que nous pouvons faire pour remplacer les institutions. "
- le 6 juillet l’armée ougandaise a rejetté les menaces du chef shebab qui appelait ses partisans à continuer de combattre les forces gouvernementales et les soldats de l’AMISOM à Mogadiscio. Selon l’armée ougandaise, « les menaces publiées par le cheikh n’ont rien de nouveau et visent à décourager les troupes de leur mission de maintien de la paix dans ce pays volatile ».
- Par ailleurs lors du dernier sommet extraordinaire de l'IGAD à Addis-Abeba l’Ouganda s'est dit prêt à contribuer davantage à l’AMISOM à la condition que le mandat de l’AMISOM soit renforcé. L’IGAD a ainsi promis de fournir 2000 soldats à l’AMISOM. Selon le ministre-adjoint des Affaires étrangères, Okello Oryem, « l’Ouganda est prêt à envoyer plus de troupes sur le terrain seulement si le mandat est changé de telle manière que l’on puisse poursuivre les shebab ».
Retour sur les difficultés de l'AMISOM :
Fin février 2007, le Conseil de sécurité des Nations Unies a autorisé la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM en anglais). Néanmoins l’AMISOM est trop faible et manque de moyens, de connaissances et de buts comme l’UNISOM auparavant. De plus seuls l’Ouganda et le Burundi ont envoyé des troupes soit la moitié des effectifs prévus. La mission était envisagée comme une opération transitoire jusqu’au déploiement d’une force onusienne or aucune des étapes prévues par le mandat de la mission n’a été réalisée :
1°stabiliser la situation à Mogadiscio et consolider la stabilisation d’autres régions du Sud au moment où la force atteindrait sa pleine capacité opérationnelle.
2°Le mandat même de la mission l’exposait dès le départ aux attaques des insurgés puisqu’elle devait protéger les Institutions fédérales de transition, elles-mêmes contestés.
La seule solution envisagée est un renforcement des effectifs de l’AMISOM et son remplacement à court terme par une intervention multinationale agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte de l’ONU ou une opération de maintien de la paix onusienne.
La piste de l'Armée de résistance du seigneur (LRA) n'est pas non plus écartée d'autant que les forces ougandaises ont mené ces derniers jours une vaste offensive contre les rebelles notamment en pénétrant en République centrafricaine (précédents billet ICI).
vendredi 9 juillet 2010
L’Erythrée prête à dialoguer ?
C’est en tout cas ce qu’on pourrait interpréter de la dernière décision politique du pays d’envoyer un représentant au siège de l’Union Africaine. En effet, pendant une décennie Érythrée était restée en retrait de l’organisation continentale dont le siège se situe chez son principal ennemi Éthiopie. Pourtant, Asmara vient de confirmer Mr Girma Asmerom (photo)au poste d’ambassadeur (bien que ses mouvements seront restreints à 40 km autour de la capitale Addis Abeba).
En début d’année l’Erythrée avait accusé l’Ethiopie de bloquer sa participation aux réunions de l’Union Africaine.
Girma Asmerom est aussi l’ancien ambassadeur de l’Erythrée auprès de l’Union Européenne. Les journaux éthiopiens insistent sur le rôle négatif de ce personnage, florilèges :
« (…)negative role in dissociating the people of Eritrea from the people of Ethiopia (…)Girma Asmerom had greater roles in aggravating the bloody conflict between Ethiopia and Eritrea, some independent sources said, adding that he had a considerable role in instigating Eritreans who were residing in Ethiopia to participate in illegal activities that he taught damages the security of the country (…)President Isaias Afwerki of Eritrea had insulted the AU as an organization with out teeth before ten years ago » (Ethiopian Journal)
….bref le loup dans la bergerie selon les Ethiopiens.
(interview de l'ambassadeur en 2005 sur CNN au sujet du différend frontalier avec l'Ethiopie)
Dans un rapport publié au début du mois le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, estimait que l'Erythrée faisait des progrès depuis l'année dernière, mais devait faire plus pour prouver qu'il se conforme aux résolutions de l'ONU : "Malgré les positions qu'il a adoptées de longue date sur la Somalie et Djibouti, le gouvernement érythréen a récemment pris un certain nombre d'initiatives pour engager un dialogue constructif avec ses voisins et la communauté internationale", relève ce rapport.
Outre le rétablissement de sa représentation au siège de l'Union africaine. Le gouvernement érythréen a participé à la Conférence d'Istanbul sur la Somalie en mai dernier et a accepté de retirer ses troupes de Djibouti à la suite de la médiation du Qatar.
En début d’année l’Erythrée avait accusé l’Ethiopie de bloquer sa participation aux réunions de l’Union Africaine.
Girma Asmerom est aussi l’ancien ambassadeur de l’Erythrée auprès de l’Union Européenne. Les journaux éthiopiens insistent sur le rôle négatif de ce personnage, florilèges :
« (…)negative role in dissociating the people of Eritrea from the people of Ethiopia (…)Girma Asmerom had greater roles in aggravating the bloody conflict between Ethiopia and Eritrea, some independent sources said, adding that he had a considerable role in instigating Eritreans who were residing in Ethiopia to participate in illegal activities that he taught damages the security of the country (…)President Isaias Afwerki of Eritrea had insulted the AU as an organization with out teeth before ten years ago » (Ethiopian Journal)
….bref le loup dans la bergerie selon les Ethiopiens.
(interview de l'ambassadeur en 2005 sur CNN au sujet du différend frontalier avec l'Ethiopie)
Dans un rapport publié au début du mois le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, estimait que l'Erythrée faisait des progrès depuis l'année dernière, mais devait faire plus pour prouver qu'il se conforme aux résolutions de l'ONU : "Malgré les positions qu'il a adoptées de longue date sur la Somalie et Djibouti, le gouvernement érythréen a récemment pris un certain nombre d'initiatives pour engager un dialogue constructif avec ses voisins et la communauté internationale", relève ce rapport.
Outre le rétablissement de sa représentation au siège de l'Union africaine. Le gouvernement érythréen a participé à la Conférence d'Istanbul sur la Somalie en mai dernier et a accepté de retirer ses troupes de Djibouti à la suite de la médiation du Qatar.
jeudi 8 juillet 2010
Mer Rouge 1993/2010 : naissance d'un théatre stratégique
Quelques lignes d’Hervé Coutau-Bégarie dans son opus « Géostratégie de l’Océan Indien » :
: « (…) la mer rouge voit passer un trafic de grande importance, entretien de multiples foyers d’instabilité qui peuvent à tout moment dégénérer, mais elle ne mobilise pour l’instant que de très faibles moyens. Au caractère embryonnaire des forces navales régionales, vient s’ajouter une présence extérieure extrêmement réduite, toujours très inférieur à celle qui a pu exister dans ou aux abords du golfe persique. La mer Rouge n’a donc jamais été véritablement reconnue comme un théâtre stratégique de premier plan. L’insuffisance de moyens des pays riverains devrait empêcher l’éclosion de combats sur mer de grande ampleur. Pour autant, l’absence de déploiement spectaculaire n’enlève en aucun cas son importance à la mer Rouge, qui mérite d’être suivie avec beaucoup plus d’attention que cela n’a été fait jusqu’à présent. Dans une mer aussi étroite, il n’est pas besoin de gros moyens pour menacer la liberté de navigation. »
Quelle clairvoyance et que de bouleversements plus 15 ans après. Ces lignes ont été écrites en 1993 alors que la Corne de l’Afrique vivait une période charnière :
- 27janvier 1991: Chute du régime Syaad Barre.
- 28 mai 1991 : Effondrement du régime éthiopien avec la chute de Mengistu Hailé Mariam. Indépendance de facto de l’Erythrée. Issaias Afeworki devient président en Erythrée et Meles Zenawi premier ministre en Ethiopie.
- 17 novembre 1991 : Déclenchement de la guerre civile à Mogadiscio.
- 1992/94 : guerre civile à Djibouti.
- 1993 : Indépendance de l’Erythrée
La région est en ébullition elle le restera puisque l’Ethiopie et l’Erythrée s’opposeront sur un litige frontalier en 1998/2002, naissance du terrorisme islamique, les tribunaux islamique en Somalie, guerre Erythrée/Djibouti…
Ces événements et leurs suites ont été un véritable bouleversement en termes de sécurité dans la région. Bien sûr, la fin de la Guerre froide, la chute du mur de Berlin, la dislocation du camp socialiste et de l’URSS en 1989 ont un lien avec ces transformations mais il convient de ne pas les surestimer comme cela a été souvent analysé. Les Etats-Unis et l’URSS ont cherché une position stratégique dans la Corne de l’Afrique mais les acteurs locaux ont leur propre autonomie et ont tenté de tirer profit de ce contexte.
: « (…) la mer rouge voit passer un trafic de grande importance, entretien de multiples foyers d’instabilité qui peuvent à tout moment dégénérer, mais elle ne mobilise pour l’instant que de très faibles moyens. Au caractère embryonnaire des forces navales régionales, vient s’ajouter une présence extérieure extrêmement réduite, toujours très inférieur à celle qui a pu exister dans ou aux abords du golfe persique. La mer Rouge n’a donc jamais été véritablement reconnue comme un théâtre stratégique de premier plan. L’insuffisance de moyens des pays riverains devrait empêcher l’éclosion de combats sur mer de grande ampleur. Pour autant, l’absence de déploiement spectaculaire n’enlève en aucun cas son importance à la mer Rouge, qui mérite d’être suivie avec beaucoup plus d’attention que cela n’a été fait jusqu’à présent. Dans une mer aussi étroite, il n’est pas besoin de gros moyens pour menacer la liberté de navigation. »
Quelle clairvoyance et que de bouleversements plus 15 ans après. Ces lignes ont été écrites en 1993 alors que la Corne de l’Afrique vivait une période charnière :
- 27janvier 1991: Chute du régime Syaad Barre.
- 28 mai 1991 : Effondrement du régime éthiopien avec la chute de Mengistu Hailé Mariam. Indépendance de facto de l’Erythrée. Issaias Afeworki devient président en Erythrée et Meles Zenawi premier ministre en Ethiopie.
- 17 novembre 1991 : Déclenchement de la guerre civile à Mogadiscio.
- 1992/94 : guerre civile à Djibouti.
- 1993 : Indépendance de l’Erythrée
La région est en ébullition elle le restera puisque l’Ethiopie et l’Erythrée s’opposeront sur un litige frontalier en 1998/2002, naissance du terrorisme islamique, les tribunaux islamique en Somalie, guerre Erythrée/Djibouti…
Ces événements et leurs suites ont été un véritable bouleversement en termes de sécurité dans la région. Bien sûr, la fin de la Guerre froide, la chute du mur de Berlin, la dislocation du camp socialiste et de l’URSS en 1989 ont un lien avec ces transformations mais il convient de ne pas les surestimer comme cela a été souvent analysé. Les Etats-Unis et l’URSS ont cherché une position stratégique dans la Corne de l’Afrique mais les acteurs locaux ont leur propre autonomie et ont tenté de tirer profit de ce contexte.
Libellés :
Corne Afrique,
Mer Rouge,
Piraterie,
Stratégie
mercredi 7 juillet 2010
Le coin du lecteur
A découvrir et à lire ... sur la plage :
- "Ne réveillez pas l'eau qui dort : les Maï Maï dans la guerre au Kivu" de Stéphane Mantoux (Historicoblog). Une analyse toujours aussi pointue et pertinente.
- Mondes n°3. Les cahiers du Quai d’Orsay Nouvelles dynamiques africaines
Paris, Grasset, 2010. 190 pages, 18,5 x 26 cm, broché. 18,05 €
- "Burundi : un Etat de droit ?": par Jean-Marie Fardeau,Directeur Human Rights Watch du bureau de Paris, répond aux questions de l'IRIS: Human Rights Watch a fait paraître au mois de mai un rapport sur les violences politiques au Burundi (« Nous allons vous ligoter et vous abattre : Les violences politiques restent impunies au Burundi »). Quelle est la situation sur place ? Dans ce contexte, comment s’est déroulée l’élection présidentielle de ce week-end ? Votre représentante vient d’être expulsée du Burundi. Comment HRW réagit-elle dans ce genre de situation ? Arrive-t-elle à maintenir la surveillance sur le pays ?
- "Les premières élections libres de la Guinée depuis l’indépendance" par Philippe Hugon, directeur de recherche IRIS
- "La projection économique des pays du Maghreb sur l'Afrique subsaharienne" par Nezha Alaoui
lundi 5 juillet 2010
Des Tribunaux Islamiques à Al-Shabaab : mythe et réalité de la menace islamiste en Somalie par Stéphane Mantoux
Aujourd'hui nous accueillons un article de Stéphane Mantoux en attendant sa contribution sur la guerre de l'Ogaden qui sera publiée prochainement sur AGS. Cette analyse est publiée en parallèle sur son blog : HistoricoBlog. Je me permets d'ajouter à fin le comentaire que j'y avais fait. Vous pouvez aussi relire les billets de son ancien blog sur l'Afrique ICI. A lire également "Les Maï Maï dans la guerre au Kivu" ICI
La prise de Mogadischio en juin 2006 par l'Union des Tribunaux Islamiques a brutalement ramené sur le devant de la scène un pays, la Somalie, que le monde occidental cherchait un peu à oublier depuis la mission des Nations Unies de 1992-1995 -en particulier les Etats-Unis, traumatisés par les pertes subies lors d'une opération spéciale au coeur de la capitale les 3-4 octobre 1993 (objet du fameux film La Chute du Faucon Noir de Ridley Scott, inspiré du livre de Mark Bowden). Depuis lors, la Somalie fait l'objet d'interventions directes et indirectes des Etats-Unis pour lutter contre ce que ceux-ci estiment être la menace d'un Etat islamiste s'installant sur les décombres du pouvoir somalien éclaté depuis 1991, et la chute du dictateur Siad Barre. Avec l'accroissement massif de la piraterie depuis 2007, un autre facteur d'inquiétude est venu s'ajouter au sujet de la Somalie, vue comme un « repaire de flibustiers » et une menace grave pour le commerce maritime mondialisé. Pourtant, une analyse sommaire de la situation montre que le constat est beaucoup plus nuancé ; c'est ce que nous allons présenter ici dans cette petite synthèse qui n'a pas l'ambition d'être exhaustive.
L'ascension des Tribunaux Islamiques (2002-2006) :
Le Gouvernement Fédéral de Transition (GFT) somalien, reconnu internationalement depuis octobre 2004 et l'élection de son président Abdullahi, installé d'abord à Nairobi, au Kenya, puis à Baidoa, en Somalie, n'avait pas pu s'installer dans la capitale, encore aux mains des seigneurs de guerre locaux. Déchiré par des querelles de personnes, il ne disposait pas, par ailleurs, de force armée digne de ce nom. Ce sont les seigneurs de guerre somaliens, héritiers de la décomposition de l'Etat à partir de la chute du dictateur Siad Barre en 1991, qui faisaient la loi dans le pays, en s'appuyant sur les gangs de jeunes souvent drogués, les mooryaans, tout en réalisant des bénéfices juteux par toute une série de trafics (commerce du khat, plante euphorisante locale, en particulier).
C'est pour réagir à la décomposition de la Somalie que s'étaient créés, en 1996, les premiers Tribunaux Islamiques, fédérés au sein de l'Union des Tribunaux Islamiques (UTI) depuis 2002, alors dirigée par Cheikh Sharif Cheik Ahmed . Le recrutement clanique de l'UTI se fait essentiellement chez les Hawiyé, et quelque peu chez un autre clan, les Haber Gidir. Or les Hawiyé se trouvent aussi dans le GFT somalien, et le clan est surtout présent en Somalie centrale. La ligne politique de l'UTI est d'ailleurs, au départ, assez floue : des modérés y côtoient des proches d'Al Qaida. Le succès des Tribunaux Islamiques est dû, au départ, à une volonté de remise en ordre de la société somalienne, certes d'après les principes de l'islam : lutte contre le banditisme, les rivalités de clans, une sorte de solidarité horizontale qui semble bien prendre, au départ. Son action est particulièrement appréciée dans les quartiers nord de Mogadischio.
L'UTI va réussir à prendre le contrôle de la Somalie en raison de la crainte des Américains, qui depuis les attentats du 11 septembre voient le pays comme un foyer potentiel d'islamisme radical. La CIA prétend y avoir repéré plusieurs proches de Ben Laden -par exemple le Comorien Fazoul Abdallah Mohamed, qui avaient organisé les attentats contre les ambassades américaines en Tanzanie et au Kenya en 1998. Les Américains s'inquiètent également des liens suspects entre certains milieux d'affaires somaliens et des organisations financières douteuses des pays du Golfe : les avoirs de la principale compagnie somalienne, al-Barakat, sont d'ailleurs gelés assez rapidement. Basées à Djibouti, au camp Lemonier, les forces spéciales américaines surveillent de près la Somalie, formant les troupes des alliés américains de la région (Ethiopie au premier chef), tout en utilisant des milices somaliennes pour enlever les personnes jugées proches d'Al Qaida. Le président du GFT, élu en octobre 2004, a d'ailleurs été volontairement appuyé par les Américains car il était proche de l'Ethiopie... Pour contrer une menace islamiste qu'elle juge de plus en plus dangereuse avec la formation de l'UTI, la CIA finance et arme une coalition des seigneurs de guerre baptisée, en février 2006, du titre ronflant d'Alliance pour le Rétablissement de la Paix et Contre le Terrorisme (ARPCT). Les services secrets américains utilisent en particulier le paravent que constitue la société privée de sécurité Select Armor . Le but est en réalité d'éradiquer l'UTI, qui ne s'y trompe pas et passe à l'offensive le 20 février 2006. Après trois mois de violents combats, Modagichio tombe aux mains de l'UTI le 16 juin. Il est significatif que cette intervention plus marquée des Américains arrive alors que la politique des Etats-Unis en Irak est violemment critiquée, au vu de la dégradation de la situation sur le terrain .
La guerre civile en Somalie se complique encore par l'intervention des voisins de la Corne de l'Afrique. L'Ethiopie et l'Erythrée, ennemis jurés depuis que la seconde s'est séparée de la première en 1993 après la lutte victorieuse de la rébellion érythréenne et la chute du régime du colonel Mengistu, se sont affrontées militairement entre 1998 et 2000. Le conflit larvé entre les deux Etats se traduit par un soutien apporté par chacun à l'un des deux camps en présence chez le voisin somalien. Comme l'Ethiopie soutient depuis le début le GFT somalien, l'Erythrée, pourtant Etat laïque, arme régulièrement l'UTI. On sait par ailleurs que d'autres Etats participent à l'approvisionnement en armes des deux camps : l'Arabie Saoudite soutient l'UTI, tandis que l'Egypte et le Yémen aident au contraire le GFT.
La presse internationale évoque alors une « talibanisation » rampante de la Somalie, à tort, car le contexte n'est pas du tout le même dans ce pays déchiré depuis 1991 qu'en Afghanistan. Si l'UTI est dirigée, à partir de la mi-2006, par le fondamentaliste Hassan Dahir Aweys, il n'en reste pas moins que son influence est limitée par le clanisme très fort encore présent en Somalie, qui avait d'ailleurs beaucoup coûté au dictateur Siad Barre, et qui a joué aussi dans la guerre civile déclenchée en 1991 jusqu'à aujourd'hui. L'UTI ne bénéficie pas d'un véritable soutien extérieur et les Hawiyés ne représentent que 20 % à peine de la population. Il semble aussi que les « durs » plus proches d'Al Qaïda n'est pas véritablement le contrôle de l'organisation de l'UTI.
Une présence d'Al Qaida en Somalie ? :
En Somalie, l'islam est arrivé dès les VIIème-VIIIème siècles de notre ère, surtout par le contact des marchands arabes. Aujourd'hui, 98 % de la population est musulmane. L'islam somalien se caractérise par la présence de confréries soufies, en particulier la Qaadiriya et l'Ahmediya. Le sunnisme orthodoxe est la norme, avec un clergé en général proche des élites dirigeantes. Il a fallu attendre la guerre civile consécutive à la chute de Siad Barre en 1991 pour voir l'islam véritablement jouer un rôle important en politique. Le mouvement Al-Ittihad, un des principaux groupes armées de la guerre civile somalienne, avait d'ailleurs été mis sur la liste des organisations terroristes par les Etats-Unis en 1998 ; on peut le considérer comme un surgeon des Frères Musulmans. Il avait des liens avérés avec la mouvance Al Qaïda.
Que dire d'ailleurs de la présence d'Al Qaïda en Somalie ? Il semblerait que les premiers éléments soient arrivés sur place en février 1993, depuis Peshawar, au Pakistan. Ils auraient même joué un rôle dans les attaques conduites contre les troupes de l'ONU et les Américains cette année-là. Plus vraisemblablement, la Somalie de l'immédiat après-Siad Barre était un excellent point de recrutement pour l'organisation, qui a surtout fourni de l'entraînement à certains Somaliens, fonctionnant un peu comme un camp de forces spéciales. Les membres d'Al Qaïda se heurtent d'ailleurs au problème clanique : leurs convois sont souvent attaqués, et le message a du mal à passer auprès d'une population soucieuse d'abord de se protéger contre les clans voisins. Il est intéressant de voir que l'organisation islamiste se heurte au même problème que les Américains : elle n'arrive pas à cerner le contexte local, et le discours salafiste grippe devant la question de l'enseignement soufi, très développé en Somalie. Elle arrive cependant à conquérir certains secteurs, en particulier le port de Ras Kamboni, sur l'Océan Indien, proche de la frontière avec le Kenya dans le sud du pays ; ce sera d'ailleurs l'un des bastions de l'UTI. Des camps d'entraînement y sont installés pour des volontaires étrangers, non sans opposition locale d'ailleurs .
De la chute des Tribunaux Islamiques à la résistance d'al-Shabaab (2006-2010) : « la guerre islamiste n'aura pas lieu » ?
A la mi-décembre 2006, l'UTI contrôle près de la moitié de la Somalie : seuls le Puntland, le Somaliland et la zone centre-sud de la Somalie, autour de la ville de Baidoa, échappent à son emprise. Le GFT somalien, installé près de Baidoa, ne survit que grâce à l'appui des troupes éthiopiennes, contre lesquelles Daweys lance le djihad, et tient un discours qui n'est pas sans rappeler les ambitions de « Grande Somalie » du dictateur Siad Barre qui avait mené à la guerre de l'Ogaden (1977-1978) contre l'Ethiopie. L'UTI revendique aussi un soutien aux deux mouvements de rébellion de l'Ogaden, le Front de Libération de la Somalie Occidentale, création de Siad Barre, et le Front de Libération Nationale de l'Ogaden ; le Front de Libération Oromo, un autre mouvement rebelle d'une province éthiopienne, basé à Asmara en Erythrée, serait lui aussi soutenu par l'UTI. Les Américains et les Ethiopiens, en décembre 2006, affirment que l'UTI est désormais contrôlée par la mouvance radicale al-Shabaab, un mouvement qui regroupe des jeunes gens dont la plupart ont été formés en Afghanistan ou ont combattu au sein des divers théâtres d'opérations de « l'internationale islamiste », si l'on peut dire. L'UTI revendique en tout cas un pouvoir fort et centralisé pour la Somalie : elle s'est imposée en dehors de Mogadischio d'abord par la force militaire plutôt que par le ralliement politique, comme le montre la conquête du port de Kismayo.
L'UTI commet alors l'erreur d'envoyer ses miliciens attaquer les troupes du GFT à Baidoa, c'est à dire en fait les soldats éthiopiens. L'armée éthiopienne, largement soutenue par les Américains, balaye assez rapidement ses adversaires , qui, au lieu de mener une guérilla urbaine à Mogadischio dans le pur héritage somalien, choisissent d'abandonner la capitale pour se réfugier au sud du pays. Il faut dire que le soutien populaire dans la capitale à l'UTI était large, mais pas très prononcé. Les habitants étaient reconnaissants du retour à l'ordre, d'une politique de nettoyage et de la réouverture du port et de l'aéroport, mais quelque peu mécontents de certains édits islamiques promulgués par l'UTI. Celle-ci se replie donc sur le port méridional de Kismayo, avant d'en être chassée par l'armée éthiopienne ; la plupart des membres de l'organisation survivent alors à la frontière avec le Kenya, traqués par les soldats éthiopiens et par des forces spéciales américaines opérant depuis l'autre côté de la frontière.
Dans la première moitié de 2007, à Mogadischio, le TFG tente de rétablir son autorité mais se heurte à de nombreuses difficultés. Il a en effet exclu le sous-clan Ayr des Haber Gidir des responsabilités, car c'est le sous-clan d'Aweys, le fondamentaliste leader de l'UTI. Par ailleurs, les Shabaab mènent quant à eux une véritable guérilla urbaine dans la capitale contre les troupes du TFG et les Ethiopiens. Les 1 600 soldats ougandais de la force de maintien de la paix de l'Union Africaine expédiée sur place sont aussi pris pour cible. Les leaders du mouvement Shabaab, aidés par des combattants étrangers, sont d'ailleurs les principaux responsables des attaques : ils introduisent de nouvelles tactiques, attentats-suicides, engins explosifs improvisés, assassinats ciblés, qui sont alors inconnues en Somalie. En janvier 2007, les Américains réalisent plusieurs frappes avec des appareils AC-130 gunships à Ras Kamboni et près de la frontière kenyane pour éliminer certains des dirigeants extrémistes des Shabaab et de l'UTI. Un détachement américain, baptisé Task Force 88, coopère étroitement avec les Ethiopiens pour traquer les personnages importants de l'islamisme radical somalien. Les appareils américains sont d'ailleurs vraisemblablement basés en Ethiopie. Début juin 2007, un destroyer américain effectue une frappe tactique dans la région semi-autonome du Puntland, au nord-est du pays, contre un groupe d'Al-Qaida suspecté de se cacher dans les montagnes environnantes.
En mars 2008, les Etats-Unis franchissent un cap dans la lutte contre Al-Shabaab en mettant le groupe sur la liste des organisations terroristes à travers le monde. En mai, une frappe de missiles tue le leader de l'organisation, Aden Hayshi Ayro. Le 26 octobre 2008, le GFT et le principal mouvement de résistance, l'Alliance pour la Re-Libération de la Somalie (ARS) -le nouveau sigle de ralliement de l'UTI- concluent un accord de paix qui prévoit aussi le départ des troupes éthiopiennes. En janvier 2009, le Cheikh Ahmed, dirigeant modéré des Tribunaux Islamiques, est élu président de la Somalie. On peut alors penser que c'est un gage de stabilisation pour le pays, les Tribunaux Islamiques étant respectés par une bonne partie de la population ; ceci étant, deux des 11 tribunaux islamiques penchent du côté des radicaux, dont celui dirigé par Aweys. A la mi-septembre 2009, les forces spéciales américaines réussissent à tuer un autre responsable important des Shabaab, Saleh Ali Nahan, un vétéran des attentats de 1998 au Kenya et en Tanzanie, et qui avait aussi participé à l'attentat de Mombasa en 2002 contre un appareil israëlien. Ceci étant dit, le gouvernement somalien peine encore à s'imposer, de par l'absence d'armée régulière, de forces de police et de justice qui transcenderaient les luttes claniques. Cependant, le départ des troupes éthiopiennes a permis d'ôter un prétexte utilisé par les Shabaab pour rallier la population somalienne à la lutte contre « l'envahisseur chrétien » .
La principale menace pour les Américains réside bien, en fait, dans le groupe Al-Shabaab (littéralement « la jeunesse ») créé en 2004 dans le but de partir, d'abord, à la reconquête du sud somalien. L'organisation a réussi à s'imposer dans plusieurs parties du sud et du centre de la Somalie. La plupart des attaques les plus violentes lui sont dues ; elle disposerait d'un vivier de 7 000 combattants. Le but d'Al-Shabaab est d'installer un Etat islamique en Somalie, régi par la charia, et de chasser les envahisseurs étrangers, Ethiopiens ou Américains. Plus de 450 combattants étrangers auraient rejoint, au total, le mouvement Al-Shabaab en Somalie. Le groupe est très présent dans le Puntland, mais aussi près de Baidoa et Kismayo. Autre groupe combattant à côté d'Al-Shabaab : Hizbul-Islam, lui aussi frange extrêmiste de l'UTI, mais qui a perdu beaucoup de son importance depuis la disparition de son chef. Les deux groupes, très installés dans le sud somalien, se sont d'ailleurs régulièrement affronté par les armes. Al-Shabaab, à l'avenir incertain depuis la disparition de son chef, cherche désormais à s'implanter dans les deux régions autonomes du Somaliland et du Puntland, fragilisées par des crises politiques. Al-Shabaab a souffert, de fait, de la politique menée dans les villages « libérés » au sud de la Somalie : loi islamique draconienne, châtiments corporels terrifiants, sans parler de certaines attaques politiquement malhabile (bombardement de la cérémonie de remise de diplôme de l'université Benadir le 3 décembre 2009, par exemple). En outre, elle a promu des dirigeants de clans originaires du nord de la Somalie dans le sud, tout en cherchant à imposer le salafisme contre le soufisme, ce qui n'a pas été sans provoquer des heurts avec la population locale. La force actuelle du mouvement Al-Shabaab témoigne davantage, en fait, de la faiblesse persistante du gouvernement central somalien .
Globalement, néanmoins, le phénomène Al Qaida reste marginal en Somalie ; il suffit à l'organisation d'avoir recruté un petit noyau de fidèles pour mener à bien ses opérations sur place. L'exagération rhétorique des Américains sur la menace islamiste en Somalie ne fait que servir les intérêts de ce petit groupe de combattants fanatisés, trop heureux de bénéficier de la couverture médiatique ainsi fournie.
Piraterie et djihad : une connexion inexistante ?
Il ne faut pas oublier non plus que la question des Tribunaux Islamiques, et in fine de l'islamisme en Somalie, est liée aussi à celle de la piraterie, et de sa recrudescence depuis la chute de l'UTI en décembre 2006 . Les Tribunaux Islamiques avaient en effet lancé une grande campagne de nettoyage des « nids de pirates » le long des côtes somaliennes qu'ils contrôlaient. Après l'intervention éthiopienne, la piraterie a repris ses droits et s'est même développée : en 2008, plus de 130 navires avaient été attaqués, faisant du golfe d'Aden et du détroit de Bab-el-Manded une des régions les plus dangereuses du monde pour le commerce maritime. Le 8 avril 2009, la tentative d'abordage du navire américain Maersk Alabama était la première subie par les Etats-Unis depuis plus de deux siècles. Les pirates, très bien renseignés, diversifient d'ailleurs le type de prises et étendent leur champ d'action géographique par l'utilisation de « vaisseaux-mères ». On estime en 2009 qu'il y avait plus de 1 200 pirates basés sur les côtes somaliennes, en particulier celles du Puntland, la région semi-autonome du nord-est, où la piraterie est une tradition depuis longtemps (autour du port d'Eyl, aujourd'hui, en particulier). La plupart des pirates appartiendrait au clan Majarteen, le même que celui de l'ancien président du GFT somalien Abdullahi, qui fournissait d'ailleurs les quelques troupes de ce dernier. Quatre groupes principaux de pirates opèrent en Somalie : le National Volunteer Coast Guard autour de Kismayo, le Marka Group, au sud de Mogadischio, et celui du Puntland. Le plus important et le plus organisé militairement parlant est celui des Somali Marines, qui préfèrent d'ailleurs se dénommer « Défenseurs des Eaux Territoriales somaliennes » . Le groupe opère depuis Mogadischio jusqu'au Puntland, au nord.
Pour l'instant les contacts entre le mouvement Al-Shabaab et les pirates ne semblent pas très étroits, malgré le fait que le premier aurait formé plus de 2 500 Somaliens sur les côtes. Le risque d'apparition d'un djihad sur les mers existe bel et bien, mais il ne s'est pas encore matérialisé.
Bibliographie :
Napoleon A. BAMFO, « Ethiopia’s invasion of Somalia in 2006 : Motives and lessons learned », African Journal of Political Science and International Relations, Volume 4, février 2010.
Mohamed IBRAHIM, « The Geopolitical Implications of the Somali « Islamic Courts » . Activities in the Horn of Africa. », mai 2009.
André LE SAGE, « Somalia’s Endless Transition : Breaking the Deadlock. », Institute for National Strategic Studies National Defense University, n°257, juin 2010.
Roland MARCHAL, « Somalie : un nouveau front antiterroriste ? », Les Etudes du CERI n°135, juin 2007.
Gérard PRUNIER, « Liaisons dangereuses de Washington en Somalie », Le Monde Diplomatique, septembre 2006.
David H. SHINN, « Al-Qaeda in East Africa and the Horn », Journal of Conflict Studies, été 2007.
Gerrie SWART, « Pirates of Africa's Somali Coast : on terrorism's brink ? », South African Journal of Military Studies, volume 37, n°2, 2009.
La prise de Mogadischio en juin 2006 par l'Union des Tribunaux Islamiques a brutalement ramené sur le devant de la scène un pays, la Somalie, que le monde occidental cherchait un peu à oublier depuis la mission des Nations Unies de 1992-1995 -en particulier les Etats-Unis, traumatisés par les pertes subies lors d'une opération spéciale au coeur de la capitale les 3-4 octobre 1993 (objet du fameux film La Chute du Faucon Noir de Ridley Scott, inspiré du livre de Mark Bowden). Depuis lors, la Somalie fait l'objet d'interventions directes et indirectes des Etats-Unis pour lutter contre ce que ceux-ci estiment être la menace d'un Etat islamiste s'installant sur les décombres du pouvoir somalien éclaté depuis 1991, et la chute du dictateur Siad Barre. Avec l'accroissement massif de la piraterie depuis 2007, un autre facteur d'inquiétude est venu s'ajouter au sujet de la Somalie, vue comme un « repaire de flibustiers » et une menace grave pour le commerce maritime mondialisé. Pourtant, une analyse sommaire de la situation montre que le constat est beaucoup plus nuancé ; c'est ce que nous allons présenter ici dans cette petite synthèse qui n'a pas l'ambition d'être exhaustive.
L'ascension des Tribunaux Islamiques (2002-2006) :
Le Gouvernement Fédéral de Transition (GFT) somalien, reconnu internationalement depuis octobre 2004 et l'élection de son président Abdullahi, installé d'abord à Nairobi, au Kenya, puis à Baidoa, en Somalie, n'avait pas pu s'installer dans la capitale, encore aux mains des seigneurs de guerre locaux. Déchiré par des querelles de personnes, il ne disposait pas, par ailleurs, de force armée digne de ce nom. Ce sont les seigneurs de guerre somaliens, héritiers de la décomposition de l'Etat à partir de la chute du dictateur Siad Barre en 1991, qui faisaient la loi dans le pays, en s'appuyant sur les gangs de jeunes souvent drogués, les mooryaans, tout en réalisant des bénéfices juteux par toute une série de trafics (commerce du khat, plante euphorisante locale, en particulier).
C'est pour réagir à la décomposition de la Somalie que s'étaient créés, en 1996, les premiers Tribunaux Islamiques, fédérés au sein de l'Union des Tribunaux Islamiques (UTI) depuis 2002, alors dirigée par Cheikh Sharif Cheik Ahmed . Le recrutement clanique de l'UTI se fait essentiellement chez les Hawiyé, et quelque peu chez un autre clan, les Haber Gidir. Or les Hawiyé se trouvent aussi dans le GFT somalien, et le clan est surtout présent en Somalie centrale. La ligne politique de l'UTI est d'ailleurs, au départ, assez floue : des modérés y côtoient des proches d'Al Qaida. Le succès des Tribunaux Islamiques est dû, au départ, à une volonté de remise en ordre de la société somalienne, certes d'après les principes de l'islam : lutte contre le banditisme, les rivalités de clans, une sorte de solidarité horizontale qui semble bien prendre, au départ. Son action est particulièrement appréciée dans les quartiers nord de Mogadischio.
L'UTI va réussir à prendre le contrôle de la Somalie en raison de la crainte des Américains, qui depuis les attentats du 11 septembre voient le pays comme un foyer potentiel d'islamisme radical. La CIA prétend y avoir repéré plusieurs proches de Ben Laden -par exemple le Comorien Fazoul Abdallah Mohamed, qui avaient organisé les attentats contre les ambassades américaines en Tanzanie et au Kenya en 1998. Les Américains s'inquiètent également des liens suspects entre certains milieux d'affaires somaliens et des organisations financières douteuses des pays du Golfe : les avoirs de la principale compagnie somalienne, al-Barakat, sont d'ailleurs gelés assez rapidement. Basées à Djibouti, au camp Lemonier, les forces spéciales américaines surveillent de près la Somalie, formant les troupes des alliés américains de la région (Ethiopie au premier chef), tout en utilisant des milices somaliennes pour enlever les personnes jugées proches d'Al Qaida. Le président du GFT, élu en octobre 2004, a d'ailleurs été volontairement appuyé par les Américains car il était proche de l'Ethiopie... Pour contrer une menace islamiste qu'elle juge de plus en plus dangereuse avec la formation de l'UTI, la CIA finance et arme une coalition des seigneurs de guerre baptisée, en février 2006, du titre ronflant d'Alliance pour le Rétablissement de la Paix et Contre le Terrorisme (ARPCT). Les services secrets américains utilisent en particulier le paravent que constitue la société privée de sécurité Select Armor . Le but est en réalité d'éradiquer l'UTI, qui ne s'y trompe pas et passe à l'offensive le 20 février 2006. Après trois mois de violents combats, Modagichio tombe aux mains de l'UTI le 16 juin. Il est significatif que cette intervention plus marquée des Américains arrive alors que la politique des Etats-Unis en Irak est violemment critiquée, au vu de la dégradation de la situation sur le terrain .
La guerre civile en Somalie se complique encore par l'intervention des voisins de la Corne de l'Afrique. L'Ethiopie et l'Erythrée, ennemis jurés depuis que la seconde s'est séparée de la première en 1993 après la lutte victorieuse de la rébellion érythréenne et la chute du régime du colonel Mengistu, se sont affrontées militairement entre 1998 et 2000. Le conflit larvé entre les deux Etats se traduit par un soutien apporté par chacun à l'un des deux camps en présence chez le voisin somalien. Comme l'Ethiopie soutient depuis le début le GFT somalien, l'Erythrée, pourtant Etat laïque, arme régulièrement l'UTI. On sait par ailleurs que d'autres Etats participent à l'approvisionnement en armes des deux camps : l'Arabie Saoudite soutient l'UTI, tandis que l'Egypte et le Yémen aident au contraire le GFT.
La presse internationale évoque alors une « talibanisation » rampante de la Somalie, à tort, car le contexte n'est pas du tout le même dans ce pays déchiré depuis 1991 qu'en Afghanistan. Si l'UTI est dirigée, à partir de la mi-2006, par le fondamentaliste Hassan Dahir Aweys, il n'en reste pas moins que son influence est limitée par le clanisme très fort encore présent en Somalie, qui avait d'ailleurs beaucoup coûté au dictateur Siad Barre, et qui a joué aussi dans la guerre civile déclenchée en 1991 jusqu'à aujourd'hui. L'UTI ne bénéficie pas d'un véritable soutien extérieur et les Hawiyés ne représentent que 20 % à peine de la population. Il semble aussi que les « durs » plus proches d'Al Qaïda n'est pas véritablement le contrôle de l'organisation de l'UTI.
Une présence d'Al Qaida en Somalie ? :
En Somalie, l'islam est arrivé dès les VIIème-VIIIème siècles de notre ère, surtout par le contact des marchands arabes. Aujourd'hui, 98 % de la population est musulmane. L'islam somalien se caractérise par la présence de confréries soufies, en particulier la Qaadiriya et l'Ahmediya. Le sunnisme orthodoxe est la norme, avec un clergé en général proche des élites dirigeantes. Il a fallu attendre la guerre civile consécutive à la chute de Siad Barre en 1991 pour voir l'islam véritablement jouer un rôle important en politique. Le mouvement Al-Ittihad, un des principaux groupes armées de la guerre civile somalienne, avait d'ailleurs été mis sur la liste des organisations terroristes par les Etats-Unis en 1998 ; on peut le considérer comme un surgeon des Frères Musulmans. Il avait des liens avérés avec la mouvance Al Qaïda.
Que dire d'ailleurs de la présence d'Al Qaïda en Somalie ? Il semblerait que les premiers éléments soient arrivés sur place en février 1993, depuis Peshawar, au Pakistan. Ils auraient même joué un rôle dans les attaques conduites contre les troupes de l'ONU et les Américains cette année-là. Plus vraisemblablement, la Somalie de l'immédiat après-Siad Barre était un excellent point de recrutement pour l'organisation, qui a surtout fourni de l'entraînement à certains Somaliens, fonctionnant un peu comme un camp de forces spéciales. Les membres d'Al Qaïda se heurtent d'ailleurs au problème clanique : leurs convois sont souvent attaqués, et le message a du mal à passer auprès d'une population soucieuse d'abord de se protéger contre les clans voisins. Il est intéressant de voir que l'organisation islamiste se heurte au même problème que les Américains : elle n'arrive pas à cerner le contexte local, et le discours salafiste grippe devant la question de l'enseignement soufi, très développé en Somalie. Elle arrive cependant à conquérir certains secteurs, en particulier le port de Ras Kamboni, sur l'Océan Indien, proche de la frontière avec le Kenya dans le sud du pays ; ce sera d'ailleurs l'un des bastions de l'UTI. Des camps d'entraînement y sont installés pour des volontaires étrangers, non sans opposition locale d'ailleurs .
De la chute des Tribunaux Islamiques à la résistance d'al-Shabaab (2006-2010) : « la guerre islamiste n'aura pas lieu » ?
A la mi-décembre 2006, l'UTI contrôle près de la moitié de la Somalie : seuls le Puntland, le Somaliland et la zone centre-sud de la Somalie, autour de la ville de Baidoa, échappent à son emprise. Le GFT somalien, installé près de Baidoa, ne survit que grâce à l'appui des troupes éthiopiennes, contre lesquelles Daweys lance le djihad, et tient un discours qui n'est pas sans rappeler les ambitions de « Grande Somalie » du dictateur Siad Barre qui avait mené à la guerre de l'Ogaden (1977-1978) contre l'Ethiopie. L'UTI revendique aussi un soutien aux deux mouvements de rébellion de l'Ogaden, le Front de Libération de la Somalie Occidentale, création de Siad Barre, et le Front de Libération Nationale de l'Ogaden ; le Front de Libération Oromo, un autre mouvement rebelle d'une province éthiopienne, basé à Asmara en Erythrée, serait lui aussi soutenu par l'UTI. Les Américains et les Ethiopiens, en décembre 2006, affirment que l'UTI est désormais contrôlée par la mouvance radicale al-Shabaab, un mouvement qui regroupe des jeunes gens dont la plupart ont été formés en Afghanistan ou ont combattu au sein des divers théâtres d'opérations de « l'internationale islamiste », si l'on peut dire. L'UTI revendique en tout cas un pouvoir fort et centralisé pour la Somalie : elle s'est imposée en dehors de Mogadischio d'abord par la force militaire plutôt que par le ralliement politique, comme le montre la conquête du port de Kismayo.
L'UTI commet alors l'erreur d'envoyer ses miliciens attaquer les troupes du GFT à Baidoa, c'est à dire en fait les soldats éthiopiens. L'armée éthiopienne, largement soutenue par les Américains, balaye assez rapidement ses adversaires , qui, au lieu de mener une guérilla urbaine à Mogadischio dans le pur héritage somalien, choisissent d'abandonner la capitale pour se réfugier au sud du pays. Il faut dire que le soutien populaire dans la capitale à l'UTI était large, mais pas très prononcé. Les habitants étaient reconnaissants du retour à l'ordre, d'une politique de nettoyage et de la réouverture du port et de l'aéroport, mais quelque peu mécontents de certains édits islamiques promulgués par l'UTI. Celle-ci se replie donc sur le port méridional de Kismayo, avant d'en être chassée par l'armée éthiopienne ; la plupart des membres de l'organisation survivent alors à la frontière avec le Kenya, traqués par les soldats éthiopiens et par des forces spéciales américaines opérant depuis l'autre côté de la frontière.
Dans la première moitié de 2007, à Mogadischio, le TFG tente de rétablir son autorité mais se heurte à de nombreuses difficultés. Il a en effet exclu le sous-clan Ayr des Haber Gidir des responsabilités, car c'est le sous-clan d'Aweys, le fondamentaliste leader de l'UTI. Par ailleurs, les Shabaab mènent quant à eux une véritable guérilla urbaine dans la capitale contre les troupes du TFG et les Ethiopiens. Les 1 600 soldats ougandais de la force de maintien de la paix de l'Union Africaine expédiée sur place sont aussi pris pour cible. Les leaders du mouvement Shabaab, aidés par des combattants étrangers, sont d'ailleurs les principaux responsables des attaques : ils introduisent de nouvelles tactiques, attentats-suicides, engins explosifs improvisés, assassinats ciblés, qui sont alors inconnues en Somalie. En janvier 2007, les Américains réalisent plusieurs frappes avec des appareils AC-130 gunships à Ras Kamboni et près de la frontière kenyane pour éliminer certains des dirigeants extrémistes des Shabaab et de l'UTI. Un détachement américain, baptisé Task Force 88, coopère étroitement avec les Ethiopiens pour traquer les personnages importants de l'islamisme radical somalien. Les appareils américains sont d'ailleurs vraisemblablement basés en Ethiopie. Début juin 2007, un destroyer américain effectue une frappe tactique dans la région semi-autonome du Puntland, au nord-est du pays, contre un groupe d'Al-Qaida suspecté de se cacher dans les montagnes environnantes.
En mars 2008, les Etats-Unis franchissent un cap dans la lutte contre Al-Shabaab en mettant le groupe sur la liste des organisations terroristes à travers le monde. En mai, une frappe de missiles tue le leader de l'organisation, Aden Hayshi Ayro. Le 26 octobre 2008, le GFT et le principal mouvement de résistance, l'Alliance pour la Re-Libération de la Somalie (ARS) -le nouveau sigle de ralliement de l'UTI- concluent un accord de paix qui prévoit aussi le départ des troupes éthiopiennes. En janvier 2009, le Cheikh Ahmed, dirigeant modéré des Tribunaux Islamiques, est élu président de la Somalie. On peut alors penser que c'est un gage de stabilisation pour le pays, les Tribunaux Islamiques étant respectés par une bonne partie de la population ; ceci étant, deux des 11 tribunaux islamiques penchent du côté des radicaux, dont celui dirigé par Aweys. A la mi-septembre 2009, les forces spéciales américaines réussissent à tuer un autre responsable important des Shabaab, Saleh Ali Nahan, un vétéran des attentats de 1998 au Kenya et en Tanzanie, et qui avait aussi participé à l'attentat de Mombasa en 2002 contre un appareil israëlien. Ceci étant dit, le gouvernement somalien peine encore à s'imposer, de par l'absence d'armée régulière, de forces de police et de justice qui transcenderaient les luttes claniques. Cependant, le départ des troupes éthiopiennes a permis d'ôter un prétexte utilisé par les Shabaab pour rallier la population somalienne à la lutte contre « l'envahisseur chrétien » .
La principale menace pour les Américains réside bien, en fait, dans le groupe Al-Shabaab (littéralement « la jeunesse ») créé en 2004 dans le but de partir, d'abord, à la reconquête du sud somalien. L'organisation a réussi à s'imposer dans plusieurs parties du sud et du centre de la Somalie. La plupart des attaques les plus violentes lui sont dues ; elle disposerait d'un vivier de 7 000 combattants. Le but d'Al-Shabaab est d'installer un Etat islamique en Somalie, régi par la charia, et de chasser les envahisseurs étrangers, Ethiopiens ou Américains. Plus de 450 combattants étrangers auraient rejoint, au total, le mouvement Al-Shabaab en Somalie. Le groupe est très présent dans le Puntland, mais aussi près de Baidoa et Kismayo. Autre groupe combattant à côté d'Al-Shabaab : Hizbul-Islam, lui aussi frange extrêmiste de l'UTI, mais qui a perdu beaucoup de son importance depuis la disparition de son chef. Les deux groupes, très installés dans le sud somalien, se sont d'ailleurs régulièrement affronté par les armes. Al-Shabaab, à l'avenir incertain depuis la disparition de son chef, cherche désormais à s'implanter dans les deux régions autonomes du Somaliland et du Puntland, fragilisées par des crises politiques. Al-Shabaab a souffert, de fait, de la politique menée dans les villages « libérés » au sud de la Somalie : loi islamique draconienne, châtiments corporels terrifiants, sans parler de certaines attaques politiquement malhabile (bombardement de la cérémonie de remise de diplôme de l'université Benadir le 3 décembre 2009, par exemple). En outre, elle a promu des dirigeants de clans originaires du nord de la Somalie dans le sud, tout en cherchant à imposer le salafisme contre le soufisme, ce qui n'a pas été sans provoquer des heurts avec la population locale. La force actuelle du mouvement Al-Shabaab témoigne davantage, en fait, de la faiblesse persistante du gouvernement central somalien .
Globalement, néanmoins, le phénomène Al Qaida reste marginal en Somalie ; il suffit à l'organisation d'avoir recruté un petit noyau de fidèles pour mener à bien ses opérations sur place. L'exagération rhétorique des Américains sur la menace islamiste en Somalie ne fait que servir les intérêts de ce petit groupe de combattants fanatisés, trop heureux de bénéficier de la couverture médiatique ainsi fournie.
Piraterie et djihad : une connexion inexistante ?
Il ne faut pas oublier non plus que la question des Tribunaux Islamiques, et in fine de l'islamisme en Somalie, est liée aussi à celle de la piraterie, et de sa recrudescence depuis la chute de l'UTI en décembre 2006 . Les Tribunaux Islamiques avaient en effet lancé une grande campagne de nettoyage des « nids de pirates » le long des côtes somaliennes qu'ils contrôlaient. Après l'intervention éthiopienne, la piraterie a repris ses droits et s'est même développée : en 2008, plus de 130 navires avaient été attaqués, faisant du golfe d'Aden et du détroit de Bab-el-Manded une des régions les plus dangereuses du monde pour le commerce maritime. Le 8 avril 2009, la tentative d'abordage du navire américain Maersk Alabama était la première subie par les Etats-Unis depuis plus de deux siècles. Les pirates, très bien renseignés, diversifient d'ailleurs le type de prises et étendent leur champ d'action géographique par l'utilisation de « vaisseaux-mères ». On estime en 2009 qu'il y avait plus de 1 200 pirates basés sur les côtes somaliennes, en particulier celles du Puntland, la région semi-autonome du nord-est, où la piraterie est une tradition depuis longtemps (autour du port d'Eyl, aujourd'hui, en particulier). La plupart des pirates appartiendrait au clan Majarteen, le même que celui de l'ancien président du GFT somalien Abdullahi, qui fournissait d'ailleurs les quelques troupes de ce dernier. Quatre groupes principaux de pirates opèrent en Somalie : le National Volunteer Coast Guard autour de Kismayo, le Marka Group, au sud de Mogadischio, et celui du Puntland. Le plus important et le plus organisé militairement parlant est celui des Somali Marines, qui préfèrent d'ailleurs se dénommer « Défenseurs des Eaux Territoriales somaliennes » . Le groupe opère depuis Mogadischio jusqu'au Puntland, au nord.
Pour l'instant les contacts entre le mouvement Al-Shabaab et les pirates ne semblent pas très étroits, malgré le fait que le premier aurait formé plus de 2 500 Somaliens sur les côtes. Le risque d'apparition d'un djihad sur les mers existe bel et bien, mais il ne s'est pas encore matérialisé.
Bibliographie :
Napoleon A. BAMFO, « Ethiopia’s invasion of Somalia in 2006 : Motives and lessons learned », African Journal of Political Science and International Relations, Volume 4, février 2010.
Mohamed IBRAHIM, « The Geopolitical Implications of the Somali « Islamic Courts » . Activities in the Horn of Africa. », mai 2009.
André LE SAGE, « Somalia’s Endless Transition : Breaking the Deadlock. », Institute for National Strategic Studies National Defense University, n°257, juin 2010.
Roland MARCHAL, « Somalie : un nouveau front antiterroriste ? », Les Etudes du CERI n°135, juin 2007.
Gérard PRUNIER, « Liaisons dangereuses de Washington en Somalie », Le Monde Diplomatique, septembre 2006.
David H. SHINN, « Al-Qaeda in East Africa and the Horn », Journal of Conflict Studies, été 2007.
Gerrie SWART, « Pirates of Africa's Somali Coast : on terrorism's brink ? », South African Journal of Military Studies, volume 37, n°2, 2009.
Libellés :
Blog,
Corne Afrique,
islamisme,
Somalie,
Terrorisme
dimanche 4 juillet 2010
Pour les vacances : photos d'Ethiopie
Demain la chaîne Arte propose un épisode de la série documentaire "Les montagnes du monde", réalisé par François Chayé (France, 2009, 43 min) consacré au Ras Dashen (dans le parc du Simien)et aux églises troglodytiques (creusés dans le rocher à flanc de montagne) du nord de Éthiopie.
Vous pouvez aussi visionner ce reportage pendant 7 jours sur le site d'Arte : ICI
Je profite donc de cette période estivale pour enrichir le blog de quelques photos (paysage du Simien, Babouins géladas, Eglises troglodytiques...) et vous faire voyager devant votre ordinateur...
Vous pouvez aussi visionner ce reportage pendant 7 jours sur le site d'Arte : ICI
Inscription à :
Articles (Atom)